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Le dernier voyage de Monsieur de Saint-Simon

[article]

Année 2005 33 pp. 79-83
Fait partie d'un numéro thématique : Palais et Châteaux
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Le dernier voyage de Monsieur de Saint-Simon

A peu près délivré de ses soucis financiers par le concordat conclu avec ses créanciers en août 1748, ayant mis la dernière main au manuscrit des Mémoires, Saint-Simon, après quelques mois de relative sérénité, put consacrer l'année 1754 à la conclusion de ses affaires personnelles. Elle fut d'abord tragiquement marquée, le 20 mai, par la mort, à Angervilliers, de son fils le second duc de Ruffec, qui emportait définitivement l'espoir jusque là jamais complètement dissipé de voir renaître un duc de Saint-Simon. Conséquence de ce décès et de la substitution arrêtée en 1751 (1), la comtesse de Valentinois, petite-fille du duc, prit le 4 juin le tabouret de Grande d'Espagne.

Le 26 juin suivant, Saint-Simon rédigeait son testament, sur lequel nous reviendrons dans une autre étude, et le 7 octobre écrivait la dernière lettre de lui que nous conservons (2). Le 4 janvier 1755, il avait la joie d'assister, au moins par la pensée, à la remise par le roi, à Versailles, de la croix de Saint-Louis à son petit-gendre Valentinois, quelques jours avant d'atteindre lui-même son quatre-vingtième anniversaire. La dernière nouvelle du monde à lui parvenir fut, le 10 février, celle de la mort de l'ami Montesquieu, dont les obsèques eurent lieu à Saint-Sulpice (3), décès à la suite duquel Saint-Simon fit fermer sa porte : refusant de recevoir personne, pas même l'évêque de Metz, il ne voulait plus songer qu'à la façon d'aborder la mort. Le 28 février, lord Bulkeley écrivait que le duc était «à l'extrémité ». Et, le 2 mars 1755, à six heures du matin, après avoir reçu les sacrements, mourait Louis, duc de Saint-Simon, dans son hôtel de Maillebois, rue de Grenelle (4).

Après le délai de trente heures stipulé par le testament, les obsèques furent célébrées trois jours plus tard, dans ce qui était le sanctuaire paroissial du duc depuis sa naissance, cette église Saint-Sulpice à laquelle il avait toujours été fidèle, même à l'époque où il se rendait pour l'office aux Jacobins de la rue Saint-Dominique (Saint-Thomas d' Aquin). Toujours curieux d'architecture, il avait suivi toute sa vie les étapes de sa construction (5). Les travaux d'édification de la nouvelle église, successivement conduits par Gamard, Le Vau et Gittard, arrêtés peu après sa naissance, avec faillite de 530 000 livres, n'avaient repris, grâce au curé Languet de Gergy, qu'en 1719, époque de gloire pour le membre du Conseil de Régence, et ce dernier avait vu s'élever la nef, le transept et la chapelle de la Vierge, puis à partir de 1732 la façade de Servandoni, qu'il avait eu le temps de voir à peu près terminée, à l'exception des tours. L'église avait été consacrée en 1745, sans doute en sa présence.

Même au temps où il fréquentait chaque semaine l'église des Jacobins (1714-1730), Saint-Simon, quand il se trouvait à Paris, n'avait pas délaissé son église paroissiale, où il se rendait pour les fêtes carillonnées ou les enterrements, et depuis 1730, résidant rue du Cherche-midi, puis rue de Grenelle, il en était redevenu le fidèle. Il y avait certainement assisté à des mises en place de décor, des funérailles ou autres cérémonies (6). C'est donc dans ce superbe vaisseau qu'il avait vu s'élever que furent célébrées ses obsèques, selon le rite habituel pour un duc et pair. Le cousin et héritier Claude de Saint-Simon, évêque de Metz, y officiait peut-être pontificalement, à condition qu'il eût obtenu l'accord de son collègue l'archevêque de Paris : Claude était de rapports difficiles.

Regrettons de n'avoir conservé, en dehors du faire-part (7), aucune relation de cette cérémonie et d'ignorer qui y participa, sans parler de ceux assistant au convoi et dont nous parlerons. En dehors de ces derniers, qui ? Pas de femmes, ces dernières n'ayant pas coutume, à l'époque, d'assister aux obsèques, ce qui nous prive de la présence des dernières survivantes de la famille, la contrefaite princesse de Chimay, fille de Saint-Simon, la comtesse de Valentinois sa petite-fille et les deux duchesses de Ruffec ses belles-filles. Alors qui, en dehors de quelques proches ? Un prince du sang vint-il représenter la Cour aux obsèques de l'ancien membre du Conseil de Régence, de l'ancien ambassadeur ? Certains ducs tinrent-ils à accompager celui qui les avait de tous temps défendus ? Avouons notre ignorance, mais ne nous faisons pas trop d'illusions : Saint-Simon était oublié, à la ville et à la Cour.

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