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Nobles et paysans en Russie, de « l'âge d'or » du servage à son abolition (1762-1861)

Published online by Cambridge University Press:  11 October 2017

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« Dans l'histoire de Russie, le personnage essentiel, c'est le paysan… De lui dépend toute la vie du pays », écrivait M. Pierre Pascal, il y a une trentaine d'années, dans la synthèse magistrale que lui avaient inspirée les trois volumes de l'Histoire de Russie à laquelle Paul Milioukov a attaché son nom. Que représentent numériquement, dans la Russie de 1780, trois centièmes de « bourgeois » et artisans, un centième de nobles et autant d'ecclésiastiques, par rapport aux 95 pour 100 de moujiks dont plus de la moitié sont des serfs privés (les autres étant pour la plupart des paysans de l'État) ? Mais cette immense masse rurale, en proie à des exigences toujours plus lourdes de la part de ceux qui l'exploitent, reste le plus souvent inerte, en dehors de quelques explosions de désespoir et de fureur dont la Pougatchovchtchina est l'exemple le plus frappant, mais aussi le dernier.

Type
Mises au Point sur la Russie aux XVIIIe et XIXe siècles
Copyright
Copyright © Les Éditions de l'EHESS 1966

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References

page 111 note 1. Pascal, P., « Le paysan dans l'histoire de Russie », Revue historique, 1934, I, pp. 3279.Google Scholar

page 111 note 2. Pour l'orthographe des mots russes, j'adopte ici une transcription de caractère phonétique (avec, en outre, le signe ë pour exprimer le son io). Dans les références infrapaginales, j'ai suivi la translitération internationale pour le nom des auteurs ; mais, pour les titres des œuvres écrites en russe, je ne donne que leur traduction en français.

page 112 note 1. Par exemple, pour la période prérévolutionnaire : Semevskij, V. I., La question paysanne en Russie au XVIIIe siècle et dans la première moitié du XIXe , Saint-Pétersbourg, 2 vol., 1888 Google Scholar ; du même : Les paysans pendant le règne de Catherine II, Saint-Pétersbourg, 2 vol., 1901-1903. — Parmi les ouvrages soviétiques récents : Rubinštejn, N. L., L'économie rurale en Russie dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, Moscou, 1957 Google Scholar ; Linkov, Ja.-I., Précis d'histoire du mouvement paysan en Russie de 1825 à 1861, Moscou, 1952 Google Scholar ; Ignatovič, J. I., Le mouvement paysan en Russie dans le premier quart du XVIe siècle, Moscou, 1963.Google Scholar

page 112 note 2. Korf, S. A., La noblesse et son organisation corporative (1762-1855), St-Pétersbourg, 1906 Google Scholar ; Romanovic-Slavatinskič, A., La noblesse en Russie, du début du XVIIIe siècle à l'abolition du servage, St-Pétersbourg, 1870 (2e éd., Kiev, 1912).Google Scholar

page 112 note 3. Blum, J., Lord and Peasant in Russia from the Ninth to the Nineteenth Century, Princeton University Press, 1961.Google Scholar Nous ne pouvons entrer ici dans les controverses sur la définition et l'établissement progressif du servage. Disons seulement que J. Blum voit avant tout dans le servage, considéré comme un élément non indispensable du régime féodal, l'aspect institutionnel, même s'il n'a pas été fixé par des textes précis : le paysan, soustrait à l'autorité directe de l'État, passe sous la domination personnelle d'un propriétaire privé. En U.R.S.S., les spécialistes de ces questions, avec l'éminent historien L. V. Tchérepnine, dénoncent là une conception trop étroite, qui n'est réalisée en Russie qu'à l'époque du « féodalisme tardif » (à partir de la fin du XVIe siècle). Pour eux, le régime féodal ne peut exister sans le servage, qui est d'abord un fait économique reposant sur le monopole de la propriété seigneuriale et le travail forcé des paysans. Sur ces problèmes, cf. la contribution de Čerepnin, L. V. au recueil Critique des conceptions bourgeoises de l'histoire de la Russie à l'époque du féodalisme, Moscou, 1962 Google Scholar ; et l'écho de ces discussions dans Carson, G. B., « Recent Works on the History of Russia in the Period from the Tatars to Catherine II », Cahiers d'Histoire Mondiale, VIII, 3, 1964, pp. 548563.Google Scholar

page 113 note 1. Cf. par exemple : « Priées in Russia in the Sixteenth Century », Journal of Economie History, XVI, 1956 ; « The Rise of Serfdom in Eastern Europe », American Historical Reviett), LXIII, July 1957 ; « Russian Agriculture in the Last 150 Years of Serfdom », Agricultural History, XXXIV, 1, January 1960.

page 113 note 2. La manière dont le rôle des immunités, des chartes de privilèges et de franchises des XIV-XVIe siècles a été interprété par les savants du XIXe siècle vient de faire l'objet d'une analyse très fouillée, de la part de Kaštanov, S. M. : « Sur l'historiographie du servage en Russie », dans le recueil Histoire et Historiens : Historiographie de l'Histoire de l'U.R.S.S., Moscou, 1965, pp. 270312 Google Scholar (sous la direction générale de Mme M. V. Nečkina). On voit en particulier que les historiens, juristes, économistes se sont laissé guider par leurs orientations politiques et par les événements de leur temps : ainsi, dans les années cinquante, les adversaires de la caste nobiliaire insistent sur le fait que les privilèges n'avaient été accordés par l'État que de façon révocable et en échange de services.

page 115 note 1. Raeff, M., « Home, School, and Service in the Life of the 18th. Century Russian Nobleman », Slavonic and East European Review, XL, June 1962, pp. 295307.Google Scholar

page 116 note 1. Confino, M., Domaines et Seigneurs en Russie vers la fin du XVIIIe siècle. Étude de structures agraires et de mentalités économiques, Paris, 1963 Google Scholar (préface de R. Portal). Cette excellente thèse de Doctorat de l'Université de Paris est complétée, sur certains aspects, par divers acticles du même auteur, dont la référence sera donnée plus loin. L'histoire de la Compagnie dont M. Confino a utilisé les Travaux a été retracée par l'historien soviétique Oreškin, V. V., La Société Libre d'Économie en Russie (1765-1917), Moscou, 1963.Google Scholar

page 116 note 2. Selon les chiffres rapportés par V. I. Semevskij, 32 pour 100 des propriétaires possédaient moins de 10 âmes et 30, 7 pour 100 entre 10 et 30 âmes. Le cas limite est celui des odnodvortsy, possesseurs d'un seul dvor (maison avec exploitation), descendants de petits fonctionnaires chichement dotés par leur souverain. Certains n'étaient pas nobles, d'autres l'étaient, mais tous devaient la capitation. Certains possédaient un couple de serfs, qui payaient la même capitation que leurs maîtres ; d'autres n'en possédaient pas du tout. Leur nombre tendait à s'accroître : 450 000 au milieu du XVIIIe siècle, 1 900 000 au milieu du XIXe . Un des récits de Tourguéniev, dans les Carnets d'un chasseur, est intitulé « L'odnodvorets Ovsianikov » (” Il évoquait pour moi, dit le narrateur, les boiars du temps d'avant Pierre Ier »).

page 117 note 1. Sur ce sujet, cf. Portal, R., « Pugačev : une révolution manquée », Études d'histoire moderne et contemporaine, t. I, Paris, 1947, pp. 6898.Google Scholar En U.R.S.S., le spécialiste de cette question est actuellement V. V. Mavrodin, qui a publié beaucoup de documents nouveaux et résumé ses conclusions dans la revue V oprosy istorii (« Questions d'histoire »), 1964, 8, pp. 60-76.

page 117 note 2. Cf. Confino, M., « La politique de tutelle des seigneurs russes envers leurs paysans vers la fin du XVIIIe siècle », Revue des Études slaves, XXXVII, 1960, pp. 3969.CrossRefGoogle Scholar

page 117 note 3. Cf. Pipes, R. E., « The Russian Military Colonies », Journal of Modern History, XXII, 1950.Google Scholar

page 118 note 1. Cf. Confino, M., « Le paysan russe jugé par la noblesse au XVIIIe siècle », Revue des Études slaves, XXXVIII, 1961, pp. 5163 CrossRefGoogle Scholar (Mélanges Pierre Pascal).

page 118 note 2. Ils tiennent d'autant plus à ce droit qu'ils risquent eux-mêmes d'être mis en tutelle sur l'ordre du gouvernement, pour scandale, mauvaise gestion ou cruauté envers les serfs. Cette mesure, instaurée par Pierre le Grand en 1722, puis tombée en désuétude, fut appliquée par Catherine II en 1779 dans un cas qui inspira peut-être à Fonvizin sa célèbre pièce Le garçon mineur (1782). C'est l'hypothèse soutenue par le regretté D. Strémooukhofp, « Autour du Nedorosl' de Fonvizin », Bévue des Études slaves, XXXVIII, 1961, pp. 185-192 (Mélanges Pierre Pascal).

page 119 note 1. Araktchéiev, le créateur des colonies militaires, avait expérimenté ses théories dans ses propres domaines : « Chaque femme doit avoir un enfant chaque année, de préférence un garçon plutôt qu'une fille. Si une femme donne naissance à une fille, je prélève une amende… et s'il y a une année où la femme ne met pas d'enfant au monde, elle doit fournir dix archines de toile… » (cité par Mazour, A. G., The First Russian Révolution : 1825. The Decembrist Movement, University of California, 1937, p. 42 Google Scholar).

page 120 note 1. L'obrok payé par les cultivateurs passe en moyenne, entre le début et la fin du règne de Catherine II , de 2 à 5 roubles par an. En tenant compte de la dépréciation du rouble-papier, émis depuis 1769, l'augmentation réelle doit être de 50 à 60 pour 100. A la veille de l'émancipation, le montant normal se tiendra le plus souvent entre 10 et 20 roubles.

page 120 note 2. Dans certains cas, la corvée et la redevance coexistent sur les mêmes domaines, soit que chaque paysan ait à fournir les deux types de prestations en même temps ou à des périodes différentes de l'année, soit que ceux-ci frappent des catégories séparées de serfs. Les statistiques dont on dispose ne permettent pas d'évaluer avec précision la part occupée par ce système. Cf. Confino, M., « Le système des redevances mixtes dans les domaines privés en Russie (XVIIIe - XIXe siècles) », Annales E.S.C., 1961, 6, pp. 10661095.Google Scholar

page 121 note 1. Cf. Confino, M., « La comptabilité des domaines privés en Russie dans la seconde moitié du XVIIIe siècle », Revue d'Histoire moderne et contemporaine, VIII, janvier-mars 1961, pp. 534.Google Scholar

page 121 note 2. Le prix des serfs varie beaucoup selon les époques, les régions et les capacités, selon qu'ils sont vendus avec ou sans la terre et que cette pratique est légale ou non. Le prix moyen d'un serf mâle vendu sans la terre est de moins de 30 roubles vers 1750, il s'élève à plus de 100 roubles vers 1800 pour redescendre à une cinquantaine de roubles vers 1850. Les serfs « qualifiés » coûtent très cher : jusqu'à 5 000 roubles pour une actrice jeune et jolie (J. Blum, p. 426). A partir d'une statistique officielle concernant les années 1854-1858, on peut calculer de la façon suivante le prix moyen d'une « âme » : on multiplie le nombre de dessiatines de terre avec serfs par le prix moyen d'une dessiatine de terre sans serfs ; on soustrait ensuite le prix de vente total de la terre avec serfs pour connaître la valeur ajoutée à la terre par la présence des serfs ; on divise alors ce résultat par le nombre de serfs vivant sur la terre en question et on obtient le prix moyen du serf mâle vendu sans la terre : de 5 à 10 roubles en Lituanie et Biélorussie, de 35 à 41 roubles dans les régions centrales et en Petite-Russie, autour de 65 roubles en Nouvelle-Russie et dans les provinces de la Volga, 125 roubles dans le Sud-Ouest (J. Blum, pp. 371-372).

page 122 note 1. Quelques exemples pris dans la littérature ont été relevés par Confino, M., « Seigneurs et intendants en Russie aux XVIIIe et XIXe siècles », Revue des Études slaves, XLI, 1962, pp. 6191.CrossRefGoogle Scholar

page 122 note 2. Vie et Aventures d'André Bolotov, racontées par lui-même pour ses descendants (1738-1793), Saint-Pétersbourg, 4 vol., 1870-1873. Édition abrégée en 3 vol., Moscou-Leningrad, 1931. Bolotov, propriétaire de la région de Toula, s'occupait de l'exploitation de domaines de la Couronne et était féru d'agronomie.

page 122 note 3. Cf. Bouloiseau, M., « Les archives Voronzov », Bévue historique, CCXXX, 1, juillet-septembre 1963, pp. 121130.Google Scholar E t , en russe, le livre de Mme Indova, E. I., L'économie servile au début du XIXe siècle, d'après les archives domaniales des Voroncov, Moscou, 1955.Google Scholar

page 122 note 4. Cf. Sivkov, K. V., Esquisses d'histoire de l'économie servile et du mouvement paysan en Russie dans la première moitié du XIXe siècle, d'après les archives des Jusupov pour leurs domaines des steppes, Moscou, 1951.Google Scholar

page 122 note 5. La dessiatine (desjatina) correspond à 1,09 hectare.

page 122 note 6. Bakounine, Tatiana, Le Domaine des Princes Kourakine dans le Gouvernement de Saratov, Paris, 1929 Google Scholar (en français). Depuis cette étude précise et concrète, les archives Kourakine à Moscou ont été utilisées également par l'historienne soviétique Kogan, E. S., Esquisses d'histoire de l'économie servile d'après les archives domaniales des Kurakin pour la seconde moitié du XVIIIe siècle, Moscou, 1960.Google Scholar L'intérêt de ce petit livre tient au fait qu'il traite de la période précédant celle sur laquelle Mme T. Bakounine avait le plus longuement insisté. L'auteur souligne que, dès cette époque, la différenciation s'est affirmée entre paysans pauvres et paysans aisés.

page 123 note 1. Elles ont été dépouillées par l'historien soviétique Čepetov, K. N., Le servage dans les domaines des eremetev, Moscou, 1947.Google Scholar Du même auteur, une brochure de caractère pédagogique : La vie des paysans-serfs en Russie aux XVIIIe et XIXe siècles, d'après les archives domaniales des Šeremetev, Moscou, 1963.

page 124 note 1. Sur ce cas extrêmement curieux, voir Portal, R., « Aux origines d'une bourgeoisie industrielle en Russie », Revue d'Histoire moderne et contemporaine, VIII, janvier-mars 1961, pp. 3560.Google Scholar

page 125 note 1. Tourgueneff, Nicolas, La Russie et les Russes, Bruxelles, 1847, t. II, p. 89.Google Scholar L'auteur ajoute : « L'esclave ne peut rien posséder en son nom, et la loi ne permet pas de lui faire crédit au delà de 5 roubles… La plus grande fabrique de chapeaux à Moscou appartient à un esclave du comte Cheremeteff ; on le disait riche de cinq millions de roubles. »

page 125 note 2. Cf. Papmehl, K. A., « The Problem of Civil Liberties in the Records of the Great Commission », Slavonic and East European Review, XLII, June 1964, pp. 274291.Google Scholar Sur les idées du prince Chtcherbatov (1733-1790), voir Raeff, M., « State and Nobility in the Ideology of M. M. Chtcherbatov », American Slavic and East European Review, XIX, October 1960, pp. 363379.CrossRefGoogle Scholar

page 125 note 3. Voir les exemples donnés par Mme Gourfinkel, Nina, « L'opéra-comique russe et la formation de la comédie nationale », Revue des Études slaves, XLI, 1962, pp. 93105.CrossRefGoogle Scholar On peut se reporter aussi à l'article de Welsh, D. J., « Satirical Themes in the 18th. Century Russian Comédies », Slavic and East European Review, XLII, June 1964, pp. 403414.Google Scholar

page 126 note 1. Il existe une traduction anglaise du Voyage : Radishchev, A. N., A Journey from St-Petersburg to Moscow (Translation by Léo Wiener ; Introduction and Notes by R. P. Thaler), Harvard University Press, 1958.CrossRefGoogle Scholar Sur l'écrivain, voir Lang, D. M., The First Russian Radical : Al. Radishchev (1749-1802), Londres, 1959.Google Scholar Mc Connell, A., A Russian Philosoph : Al. Radishchev, La Haye, 1964.Google Scholar En russe, l'étude de Makogonenko, G. P., Radiščev et son temps, Moscou, 1956.Google Scholar

page 127 note 1. Texte russe dans Radiščev, A. N., Œuvres complètes, Moscou-Leningrad, 1941, t. II, pp. 171177.Google Scholar Il s'agit d'un domaine à l'obrok, dont on sait seulement qu'il se trouvait en dehors des terres noires et n'était pas celui de l'auteur. Le titre complet est : Description de mon domaine, pomest'e, votčina, campagne ou tout autre nom que l'on voudra.

page 127 note 2. Sur ces réformes, il existe en russe un travail de premier ordre : Družinin, N. M., Les paysans de l'État et la réforme de P. D. Kiselev, Moscou, 2 vol., 1946 et 1958.Google Scholar

page 127 note 3. La méfiance des paysans, entretenue souvent par le clergé local, et les tentatives maladroites des propriétaires sont des thèmes courants dans la littérature. On les retrouve dans les œuvres de Tolstoï (La Matinée d'un seigneur russe, La Guerre et la Paix, Anna Karénine), dans sa Correspondance, dans son Journal. L'écrivain soviétique S. V. Tokaeev a consacré un livre, publié en 1939, aux révoltes paysannes dirigées contre l'introduction de la culture des pommes de terre (” kartofel'nye bunty »).

page 128 note 1. L'ouvrage du baron Auguste de Haxthausen a été publié simultanément en allemand et en français : Études sur la situation intérieure, la vie nationale et les institutions rurales de la Russie, Hanovre, 3 vol., 1847-1848.

page 129 note 1. On observe parallèlement une régression du servage, qui atteint son apogée numérique vers 1835-1840. Diminution en valeur absolue (environ 10 pour 100 entre 1835 et 1860) et diminution en valeur relative : à la veille de l'émancipation, les serfs représentent moins de la moitié des paysans (environ 48 pour 100). C'est dû surtout au fait que des serfs privés ont changé de catégorie (par affranchissement, émigration en Sibérie, incorporation dans l'armée, rachat ou confiscation de domaines par l'État). Les paysans de l'État — qui, par ailleurs, ont un taux de natalité plus élevé — sont alors les plus nombreux.

page 130 note 1. Les « pointes » d'agitation se placent dans les années 1830-1831, 1847-1848, 1854-1855. Cf. Okun, S. B.', Précis d'Histoire de l'U.B.S.S. (deuxième quart du XIXe siècle), Léningrad, 1957, p. 43.Google Scholar Sous la direction de N. M. Druzinin, paraissent depuis quelques années en U.R.S.S. d'excellents recueils de documents sur Le mouvement paysan au XIXe siècle : en 1961, poux les années 1826-1849 ; en 1962, pour les années 1850-1856.

page 131 note 1. Dans certains cas, les propriétaires allaient jusqu'à supprimer les parcelles des serfs et employer entièrement ceux-ci sur la réserve, en échange d'une certaine quantité de denrées, versée mensuellement (mesjačina). Les historiens soviétiques voient là une préfiguration du prolétariat en régime capitaliste, tout en reconnaissant la différence due au fait que le mesjačnik est généralement payé en nature.

page 131 note 2. Les différentes positions des partisans du servage, des siavophiles, des idéologues libéraux de la noblesse et de la bourgeoisie (Kavelin, Strukov, Vernadskij) sont passées en revue par Cagolov, N. A., Essais sur la pensée économique en Russie pendant la période de déclin du servage, Moscou, 1956.Google Scholar

page 131 note 3. C'est à cette œuvre que le grand critique Biélinski, qui avait apprécié le réalisme satirique du Revizor et des Ames mortes, répondit par la fameuse Lettre à Gogol, écrite de Salzbrünn (Prusse) le 15 juillet 1847. Il lui reprochait de s'être fait « l'apologiste du knout, l'apôtre de l'ignorance, le champion de l'obscurantisme ».

page 132 note 1. Cf. Granjard, H., « Alexandre Herzen à la croisée des chemins, 1842-1846 », Revue des Études slaves, XXXV, 1958, pp. 5776.CrossRefGoogle Scholar Sur la pensée de Herzen avant 1855, voir le livre important de Malia, M., Alexander Herzen and the Birth of Russian Socialism, Harvard University Press, 1961.CrossRefGoogle Scholar

page 132 note 2. Cité par Gratieux, A., A. S. Khomiakov (1804-1860), Paris, 1939, t. I, pp. 3334.Google Scholar

page 133 note 1. Cf. Corbet, Ch., Nekrasov, l'homme et le poète, Paris, 1948.Google Scholar

page 133 note 2. Biélinski écrivait, à propos de Anton Goremyka : « Aucun roman russe n'a produit sur moi une impression aussi terrible, accablante, torturante, étouffante : en le lisant, il me semblait que j'étais dans l'écurie où le propriétaire bien pensant fouette et martyrise sa vottchina tout entière, héritage légitime de ses aïeux » (cité par Mezencev, P., Vissarion Belinskij, Moscou, 1963, p. 109 Google Scholar).

page 133 note 3. Voir le chapitre consacré à cette oeuvre par H. Granjard, dans son livre fondamental, Ivan Tourguénev et les courants politiques et sociaux de son temps, Paris, 1954. Les extraits, cités plus loin, du rapport des censeurs en date du 5/17 août 1852, y figurent aux pages 183 et 196.

page 134 note 1. Cf. N. Leskov, Le Pèlerin enchanté. Œuvres choisies, traduction française, Moscou, s.d. (” Éditions en langues étrangères »), pp. 187-213.

page 134 note 2. Les différentes tendances et leurs polémiques, à l'époque de ce que les historiens soviétiques appellent « la première situation révolutionnaire » (1859-1861) sont décrites par N. G. Sladkevič, Essais sur l'histoire de la pensée sociale en Russie à la fin des années 50 et au début des années 60, Léningrad, 1962.

page 135 note 1. Ulaščik, N. N., Les préliminaires de la réforme paysanne de 1861 en Lituanie et en Biélorussie occidentale, Moscou, 1965.Google Scholar Le rapport du gouverneur-général de Vilna, Mirkovič, est cité à la page 451.

page 135 note 2. Cf. Smirnov, A. F., Le soulèvement de 1863 en Lituanie et en Biélorussie, Moscou, 1963.Google Scholar

page 136 note 1. Bon résumé de la question dans l'article de I. I. Kostjuško sur le Centenaire, Voprosy istorii, 1963, 1, pp. 86-99.

page 136 note 2. Leslie, R. F., Reform and Insurrection in Russian Poland (1856-1865), Londres, 1963 Google Scholar (” University of London Historical Studies », t. XIII). Dans la même collection (t. III) et du même auteur : Polish Politics and the Révolution of November 1830, Londres, 1956.

page 136 note 3. R. F. Leslie mentionne (pp. 62-63) l'exemple d'un propriétaire, auteur d'un article non signé paru dans une revue polonaise en 1842 et intitulé : « Description de l'état présent de mon domaine, précédé d'une franche confession de son développement historique et des erreurs qui y furent commises ». Ce seigneur reconnaît avoir incorporé en vingt ans un grand nombre de tenures paysannes à la réserve qui en était arrivée à occuper les deux tiers de la propriété.

page 137 note 1. Le Statut des paysans libérés du servage. Recueil d'articles et de documents présentés par R. Portal, avec la collaboration de T. Bakounine, M. Confino, C. Kastler, B. Kerblay, P. Péchoux, R. Philippot, Paris-La Haye, 1963. Du côté soviétique, les deux ouvrages essentiels sont ceux de P. A. Zajončkovskij, L'abolition du servage, Moscou, 1954 ; La mise en vigueur de la réforme paysanne de 1861, Moscou, 1958.

page 137 note 2. Lettre du 9 juin 1856, citée par Troyat, H., Tolstoï, Paris, 1965, p. 174.Google Scholar

page 138 note 1. Tolstoï se consacra avec beaucoup d'équité à cette tâche ingrate qui lui valut de nombreux ennuis. Le 26 janvier 1862, il écrivait à son ami Botkine : i Bien que j'aie toujours rempli mes fonctions avec sang-froid et conscience, j ‘ a i suscité contre moi la haine terrible des gentilshommes. Ils voudraient me battre, me traîner devant les tribunaux… » (ibid., p. 266).

page 139 note 1. Engelhardt (1832-1893), à la fois chimiste et officier, avait quitté l'armée en 1863, en raison de ses opinions avancées. Devenu professeur de chimie à l'Institut d'Agriculture de Saint-Pétersbourg, il est de nouveau persécuté en 1870 et se retire sur ses terres en 1871. En relations étroites avec les populistes, il publie ses Lettres entre 1872 et 1881 dans la revue Les Annales de la Patrie, dont l'écrivain Saltykov-Chtchédrine était le directeur (avec Nekrassov jusqu'à la mort de celui-ci en 1877).

page 140 note 1. Van Regemorter, J. L., «L'influence de la Réforme de 1861 sur la production marchande, le commerce et l'exportation des céréales dans la Russie du Sud- Ouest (1861-1870) », Revue historique, CCXXXII, 1, juillet-septembre 1964, pp. 126.Google Scholar

page 140 note 2. Sur les causes et les manifestations de l'exode rural avant et après la réforme, cf. Fr.-X. Coquin, « Faim et migrations paysannes en Russie au XIXe siècle », Revue d'Histoire moderne et contemporaine, IX, avril-juin 1964, pp. 127-144.