Corps de l’article

Le 7ème colloque de l’AIRMAP, organisé à Biarritz par l’Université de Pau et des Pays de l’Adour (Centre de Recherche et d’Études en Gestion), portait sur la question de l’innovation publique. Face à un contexte public de plus en plus complexe et contraint, l’innovation apparait en effet comme le principal vecteur d’amélioration de l’efficacité et de l’efficience de l’action publique (Damanpour et Schneider, 2006[1]) et, plus généralement, de la qualité des services publics (Jung et Lee, 2015[2]). Ainsi, à l’échelle internationale, les dispositifs et des programmes nationaux et locaux, visant à favoriser et diffuser l’innovation publique internationale, se multiplient (Arundel et al., 2015[3]).

Parmi les différents types d’innovation, les organisations publiques semblent très largement recourir aux innovations de type organisationnel et managérial qui portent sur les modes de fonctionnement et d’organisation internes et sur les techniques de gestion. La multiplication d’expérimentations dans le domaine du management et de l’évaluation de la performance (Rivenbark et al., 2016[4]), de la planification stratégique (Poister, 2010[5]), des tableaux de bords, de la mutualisation et de l’agencification, mais aussi des recherches académiques faisant état de ces pratiques témoignent de cet engouement. Cependant, l’enthousiasme suscité autour de ce mouvement et les espoirs placés dans les innovations managériales contrastent avec les résultats obtenus. Ainsi, un certain nombre de recherches font état d’un taux d’échec ou d’insatisfaction important en ce qui concerne des innovations managériales de type management par la performance (Yang et Hsieh, 2007[6]). Bien que plébiscitées, ces innovations ont ainsi du mal à s’implanter durablement et à produire des résultats significatifs au sein du secteur public.

Face à ces difficultés, la compréhension des processus d’innovation publique s’est progressivement imposée comme un thème majeur de la recherche en management public (De Vries et al., 2015[7]). En effet, si de nombreuses organisations publiques encouragent une dynamique d’innovation, qui porte aussi bien sur les modes de fonctionnement que sur la nature des services et des politiques publics, elles semblent globalement confrontées à une notion floue, à la fois dans son périmètre, mais aussi dans ses solutions. Or, plusieurs enjeux existent autour de l’innovation publique. Tout d’abord, des enjeux conceptuels liés au contenu et à la nature de l’innovation publique (Damanpour, 2014[8]). Ensuite, des enjeux stratégiques liés à la dynamique et aux facteurs influençant les processus d’innovation (Carassus et al., 2013[9]). Enfin, des enjeux humains et organisationnels liés à la gouvernance des processus d’innovation, notamment sur les innovations collaboratives et en réseaux (Agranoff, 2006[10]; Bryson, 2004[11]).

Pour répondre à ces enjeux, nous avons sélectionné après ce colloque trois études se situant dans le champ de l’innovation publique.

  • Une première de Fabienne PINOS et Solange HERNANDEZ, intitulée « Les Contrats à Impact Social (CIS) en France, une innovation entre discours performatifs et recul démocratique ». Elle répond ainsi aux enjeux organisationnels de l’innovation publique, en abordant une forme innovante de contrat public-privé inspirée des Social Impact Bonds : les Contrats à Impact Social (CIS). Cet étude analyse ainsi les finalités de la création des CIS en France et leurs conséquences potentielles. Les résultats mettent non seulement en évidence l’influence du contexte théorique et idéologique international sur la détermination de nouveaux instruments d’action publique, mais aussi une analyse des opportunités et les risques inhérents à ces choix.

  • Une seconde de Christophe FAVOREU, Christophe MAUREL, Yoann QUEYROI et Pierre MARIN, intitulée « Les déterminants des différentes catégories d’innovation publique locale : une analyse nationale multi facteurs ». Elle répond à des enjeux stratégiques de l’innovation publique, en traitant des facteurs d’influence des différentes formes d’innovation, dans le contexte local. L’objectif de cet étude est ainsi d’analyser l’impact des déterminants organisationnels, environnementaux et managériaux sur les différentes formes d’innovations publiques locales, en s’appuyant sur une recherche quantitative menée auprès de collectivités locales françaises. Sur la base de 118 réponses à un questionnaire, cette étude met en évidence des déterminants communs aux innovations locales, comme le leadership administratif ou la conjoncture locale, mais aussi des déterminants propres à certaines formes d’innovation, comme la situation sociale ou les pressions institutionnelles. Des préconisations managériales en sont tirées en terme de processus d’innovation locale.

  • Et une troisième de Armand Brice KOUADIO et Yves EMERY, intitulée « La publicitude de l’environnement de travail influence-t-elle l’engagement au travail des agents publics ? Étude de cas dans l’administration suisse ». Elle répond ainsi à des enjeux humains de l’innovation publique, en abordant le lien entre la publicitude de l’environnement de travail et l’engagement des employés publics suisses. Sur la base de plus d’un millier de réponses à un questionnaire, les résultats montrent tout d’abord que la publicitude perçue de l’environnement où travaillent les employés publics est bien plus liée à leur engagement que la publicitude théorique. Les analyses permettent ensuite d’identifier les ancres d’engagement au travail les plus saillantes dans les environnements de travail post- bureaucratiques suisses, constituant autant de préconisations managériales lors de changements culturels importants aux niveaux institutionnel, sectoriel, ou encore organisationnel.

Bonne lecture à tous, en espérant que ces études participent non seulement à développer le champ de la recherche en innovation managériale publique, en pleine émergence, mais aussi à répondre aux besoins des praticiens publics, dans un contexte mouvant.


The 7th AIRMAP conference, organized in Biarritz by the University of Pau and Pays de l’Adour (Centre de Recherche et d’Études en Gestion), was focused on public innovation. In an increasingly complex and constrained context in the public sector, innovation appears to be the main vector for improving the effectiveness and efficiency of public action (Damanpour and Schneider, 2006[1]) and the quality of public services (Jung and Lee, 2015[2]). Thus, on an international scale, national and local systems and programs aimed at promoting and disseminating international public innovation, are multiplying (Arundel and al., 2015[3]).

Among the different categories of innovation, public organizations seem to make extensive use of organizational and managerial innovations in relation with internal operating and organizational modes and to management techniques.

The multiplication of experiments and academic publications testify to this enthusiasm: in management and performance evaluation (Rivenbark and al., 2016[4]), strategic planning (Poister, 2010[5]), dashboards, shared-resources and creation of agencies. However, the enthusiasm aroused around this movement and the hopes placed in managerial innovations contrast with the results obtained. In fact, many studies report a significant failure or dissatisfaction rate regarding managerial innovations when it comes to those involving performance management (Yang and Hsieh, 2007)[6]. Despite their popularity, these innovations are therefore struggling to establish themselves sustainably and produce significant results in the public sector.

To overcome these difficulties, understanding public innovation processes has gradually emerged as a major theme in public management research (De Vries and al., 2015[7]). Indeed, if many public organizations encourage a dynamic of innovation (processes, new services and public policies), the concept itself of innovation remains a vague concept (perimeter and solutions). Nevertheless, public innovation is still a challenge and opportunity for researchers. First, conceptual issues related to the content and nature of public innovation (Damanpour, 2014[8]). Secondly, strategic issues related to the dynamics and factors influencing innovation processes (Carassus and al., 2013[9]). Finally, human and organizational challenges linked to the governance of innovation processes, in particular on collaborative and networked innovations (Agranoff, 2006[10]; Bryson, 2004[11])).

In order to participate actively in those challenges, we selected, during our annual conference, three studies focusing on public innovation.

  • First study, written by Fabienne PINOS and Solange HERNANDEZ, entitled “The French Social Impact Bonds, An Innovation Between Performative Discourse and Democratic Retreat?”. This study responds to the organizational challenges of public innovation, by tackling an innovative form of public-private contract inspired by Social Impact Bonds: Social Impact Contracts (SIC). The authors analyze the purposes of the creation of SIC in France and their potential consequences. The results not only highlight the influence of the international theoretical and ideological context on the determination of new public policy instruments, but also propose an analysis of the opportunities and risks inherent in these choices.

  • A second contribution by Christophe FAVOREU, Christophe MAUREL, Yoann QUEYROI and Pierre MARIN, entitled “The determinants of the different categories of local public innovation: a multi-factor analysis in France”. It responds to strategic challenges of public innovation, by dealing with the factors influencing each form of innovation, in a local context. Thus, the objective of this study is to analyze the impact of organizational, environmental and managerial determinants on the various forms of local public innovation, based on a quantitative research on French local authorities. Based on 118 responses to a questionnaire, this study highlights the identical determinants to local innovations, such as administrative leadership or the local economic situation, but also determinants specific to certain forms of innovation, such as social situation or institutional pressures. By the end of this study, managerial recommendations are made concerning the implementation process of local innovation.

  • To finish, the third contribution by Armand Brice KOUADIO and Yves EMERY, entitled “How Does the Publicness of the Working Environment Relate to Public Employee Workplace Commitment? an Inquiry in the Swiss Administration ”. this study is a response to the human challenges of public innovation, by making a connection between the publicness of the working environment and the commitment of Swiss public employees. Based on more than a thousand responses to a questionnaire, results show first of all that the actual perceived publicness of the working environment is much more linked to their commitment to their work than theoretical publicness. Following this conclusion, this study highlights the most important factors of commitment to work in Swiss post-bureaucratic work environments. This factors represent managerial recommendations that could be followed during major cultural changes at the institutional, sectoral or organizational levels.

We hope that you will enjoy the reading of this studies as they not only contribute to the development of the field of research in public managerial innovation, which is emerging, but also give ideas and tools to public practitioners, in a changing context.


La séptima conferencia anual AIRMAP, organizada en Biarritz (Francia) por la Universidad de Pau et des Pays de l’Adour (Centro de Investigación y Estudios en Gestión), se centró en el tema de la innovación pública. En un contexto público cada vez más complejo, la innovación parece ser el vector principal para mejorar la efectividad y la eficiencia de la acción pública (Damanpour y Schneider, 2006[1]) y, globalmente, la calidad de los servicios públicos (Jung y Lee, 2015[2]). Por lo tanto, a escala internacional, los sistemas y programas nacionales y locales, destinados a promover y difundir la innovación pública internacional, se multiplican (Arundel y al., 2015[3]).

Diferentes tipos de innovación existen y las organizaciones públicas usan particularmente las innovaciones organizacionales y con relación al management que se relacionan con los modos internos de operación y organización. La multiplicación de experimentos y la evaluación del desempeño (Rivenbark y al., 2016[4]), planificación estratégica (Poister, 2010[5]), paneles, agrupación y agencificación, pero también la investigación académica atestiguan este entusiasmo. Sin embargo, el entusiasmo suscitado en torno a este movimiento y las esperanzas depositadas en las innovaciones gerenciales contrastan con los resultados obtenidos. Por lo tanto, diferentes estudios informan una tasa significativa de fracaso o insatisfacción con respecto a estos tipos de innovaciones (Yang y Hsieh, 2007[6]). Aunque aclamadas, estas innovaciones están luchando por establecerse de manera sostenible y producir resultados significativos en el sector público.

Ante estas dificultades, la comprensión de los procesos públicos de innovación se ha convertido gradualmente en un tema principal en la investigación de la gestión pública (De Vries y al., 2015[7]). De hecho, si muchas organizaciones públicas fomentan una dinámica de innovación, que se relaciona tanto con los modos de operación como con la naturaleza de los servicios y las políticas públicas, parecen enfrentarse globalmente con un concepto vago, tanto dentro de su perímetro, pero también en sus soluciones. Sin embargo, existen varios desafíos en torno a la innovación pública. Primero, cuestiones conceptuales relacionadas con el contenido y la naturaleza de la innovación pública (Damanpour, 2014[8]). A continuación, cuestiones estratégicas relacionadas con la dinámica y los factores que influyen en los procesos de innovación (Carassus y al., 2013[9]). Finalmente, los desafíos humanos y organizacionales vinculados a la gobernanza de los procesos de innovación, en particular sobre las innovaciones colaborativas (Agranoff, 2006[10]; Bryson, 2004[11]).

Para responder a estos desafíos, seleccionamos tres estudios presentados durante esta conferencia dedicada a la innovación pública.

  • Una primera, de Fabienne PINOS y Solange HERNANDEZ, titulada “Social Impact Contracts (CIS) en Francia, una innovación entre el discurso performativo y la retirada democrática”. Este articulo responde a los desafíos organizacionales de la innovación pública, tratando de una forma innovadora de contrato público-privado inspirado en los Bonos de Impacto Social: Contratos de Impacto Social (CIS). Este estudio analiza los propósitos de la creación de los “CIS” en Francia y sus posibles consecuencias. Los resultados no solo destacan la influencia del contexto teórico e ideológico internacional en la determinación de nuevos instrumentos de política pública, sino también un análisis de las oportunidades y los riesgos inherentes a estas elecciones.

  • Un segundo articulo, de Christophe FAVOREU, Christophe MAUREL, Yoann QUEYROI y Pierre MARIN, titulado “Los determinantes de las diferentes categorías de innovación pública local: un análisis multifactorial en Francia”. Responde a los desafíos estratégicos de la innovación pública, tratando de los factores influyentes de las diferentes formas de innovación, en el contexto local. El objetivo de este estudio es analizar el impacto de los determinantes organizacionales, ambientales y de gestión en las diversas formas de innovación pública local. Basado en 118 respuestas a un cuestionario, este estudio destaca los determinantes comunes a las innovaciones locales, como el liderazgo administrativo o la situación económica local, pero también determinantes específicos de ciertas formas de innovación, como la situación social o las presiones institucionales.

  • Y un tercero articulo, de Armand Brice KOUADIO e Yves EMERY, titulado “¿El publiness del entorno laboral influye en el compromiso de los funcionarios públicos con el trabajo? Estudio de caso en la administración suiza.” Este articulo responde a los desafíos humanos de la innovación pública, tratando del vínculo entre el publiness del entorno laboral y el compromiso de los empleados públicos suizos. Basado en más de mil respuestas a un cuestionario, los resultados muestran principalmente que el publiness percibida del entorno en el que trabajan los empleados públicos está mucho más vinculada a su compromiso que el publiness teórica. Los análisis permiten identificar los elementos principales del compromiso para trabajar en entornos de trabajo postburocráticos suizos. Así aparecen muchas recomendaciones gerenciales durante cambios culturales significativos a nivel institucional, sectorial u organizacional.

Os deseo una productiva lectura a todos, con la esperanza de que estos estudios no solo ayuden a desarrollar el campo de investigación en innovación de gestión pública, que está surgiendo, sino que también satisfagan las necesidades de los profesionales públicos, en un contexto siempre en cambio.