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Experts et expertises au Moyen Âge. Consilium quaeritur a perito

 | 
Société des historiens médiévistes de l’Enseignement supérieur public

L’expertise judiciaire

Les médecins en justice (Bologne, xiiie-xive siècles)1

Joël Chandelier et Marilyn Nicoud

Résumé

Depuis plusieurs décennies, des historiens de la médecine ont mis l’accent sur le recours aux compétences des praticiens de la part des autorités publiques. Requis lorsqu’il y a ignorance, débat, voire conflit, ces derniers mobilisent un ensemble de compétences propres à l’ars medica. La documentation statutaire et les sources judiciaires bolonaises rendent compte de la précocité du recours aux médecins dans le cadre de la justice inquisitoriale, dès la seconde moitié du xiiie siècle. Tandis que les rédactions successives des statuts contribuent à préciser qui sont les experts, les modalités de leur intervention et la manière de les recruter, les pièces des procès, rédigées par les notaires, et les enregistrements des témoignages fournissent un éclairage sur le compte rendu d’expertise et sur la manière dont l’avis peut servir à la qualification du fait.

Texte intégral

  • 1 Abréviation utilisée : ASB pour Archivio di Stato di Bologna. Nous remercions Massimo Giansante pou (...)
  • 1 On se reportera notamment, pour l’époque moderne, à C. Crawford, « Legalizing Medicine : Early Mode (...)

1Si la question de la naissance de la médecine légale en tant que discipline demeure fort débattue1, un fait reste assuré : les premières expertises médico-légales apparaissent, dès la seconde moitié du xiiie siècle, dans les communes d’Italie du Nord. En effet, de manière simultanée, les principales cités du nord de la Péninsule se dotent d’un cadre juridique visant à réguler le recours aux médecins dans les procès, le plus souvent en matière criminelle. Comme les statuts des communes l’indiquent souvent, il s’agit d’abord d’éviter toute contestation, notamment dans le cas de blessures infligées post mortem ou, tout simplement, d’encadrer une pratique de témoignage que la multiplication des médecins rendait sans doute fréquente. Toutefois, le recours à l’expertise médicale n’allait pas sans quelques difficultés. En particulier, elle ne pouvait que mettre en opposition deux régimes de vérité difficilement compatibles : d’un côté, les attentes des juristes, pour qui la qualification des actes se devait d’être sans ambiguïté, et, de l’autre, les réponses que les médecins étaient capables d’apporter, en fonction de l’éthique de leur art et de ses limites empiriques.

  • 2 Sur les débuts de la médecine légale à Bologne, voir G. Ortalli, « La perizia medica a Bologna nei (...)

2Dans cette rapide étude, nous nous contenterons du cas de Bologne. Le choix de cette cité s’explique par la conjonction de plusieurs facteurs favorables à l’émergence d’une véritable tradition d’expertise médico-légale : la présence de nombreux juristes et médecins, liés à la prestigieuse université, l’ancienneté et la régularité de la rédaction des statuts communaux, qui permettent de suivre au plus près les évolutions de la législation, et enfin la conservation, dans les archives de la commune, de nombreux documents attestant la pratique médico-légale. Ainsi, cette double documentation permet d’envisager l’expertise de deux points de vue différents : celui de son organisation règlementaire et celui de sa mise en œuvre concrète. C’est cette comparaison qui permettra, nous l’espérons, de fournir quelques éléments de réponse à la question du statut de l’expertise médicale en justice2.

Les statuts bolonais

  • 3 Gentile da Foligno, Super lege VIIo mense, éd. H. U. Kantorowicz, « Cino da Pistoia ed il primo tra (...)

3Dans son De temporibus partus ou Super lege VIIo mense, parfois considéré comme le premier traité de médecine légale, le médecin Gentile da Foligno († 1348) affirme que, dans les cas ambigus où les juristes doivent avoir recours à l’avis des médecins, il convient de se tourner vers des « médecins probes3 ». Une telle affirmation laissait bien sûr une importante marge d’appréciation : que devait-on entendre par « probe » ? Les médecins devaient-ils simplement avoir fait preuve d’une vie honnête ou certaines compétences techniques étaient-elles exigées d’eux ?

  • 4 Sur le rapport entre doctrine médicale et particularia en Italie à la fin du Moyen Âge, on pourra s (...)
  • 5 D’autres cas de législation médico-légale peuvent être relevés dans des villes italiennes pour la s (...)

4La question du choix des médecins devant intervenir en justice était à l’évidence essentielle, à partir du moment où il était largement admis que la doctrine médicale générale seule ne pouvait suffire à produire une réponse particulière et que le recours à un expert examinant le cas concret était nécessaire4. Or, un tel besoin a, très tôt, été perçu par les autorités communales d’Italie, et particulièrement celles de Bologne. Dès le milieu du xiiie siècle, les cités se préoccupent de mettre en forme les conditions et les procédures de recours à l’expert dans le cas, notamment, des procès criminels. S’il n’est bien sûr pas unique, le cas de Bologne se révèle particulièrement intéressant, notamment en raison de la révision régulière des statuts, de 1265 à 1335, qui permet de suivre pas à pas la complexification croissante de l’organisation de l’expertise médico-légale5. Deux questions sont alors abordées : quelles sont les qualités que doivent posséder les experts ? Selon quelle procédure doit-on les choisir ?

  • 6 Statuts de Bologne de 1265, dans Statuti di Bologna dall’anno 1245 all’anno 1267, éd. L. Frati, Bol (...)
  • 7 Ibid. : Et ne fraus in vulneribus commitatur, duo medici, qui sint sine suspitione et in arte medic (...)
  • 8 Ibid. : Dicimus quod medici qui mittentur per potestatem vel iudices potestatis ad videndum mortuum (...)

5Les statuts de 1265 rendent ainsi obligatoire le recours à des médecins en cas d’accusation de meurtre par blessure, en particulier pour savoir si celles-ci ont été mortelles ou pas, ou si elles ont été infligées post mortem par quelqu’un qui aurait intérêt à faire accuser un tiers6. Il s’agit là, en effet, des cas les plus évidents pour lesquels le rôle des experts pouvait être déterminant. Sur la façon de choisir ces médecins, le texte du statut est assez succinct. On y indique simplement que ceux-ci doivent être « au-dessous de tout soupçon et expérimentés (periti) dans l’art de la médecine7 » : aucune mention n’est faite d’un examen ou du besoin de posséder un titre universitaire. En revanche, les dispositions se font plus précises à propos de la procédure à suivre : l’examen du corps ou du blessé, obligatoire en cas d’homicide, doit être effectué, dans les huit jours qui suivent les faits, par deux médecins qui prêtent un serment ; ceux-ci reçoivent, en échange, une somme de 20 sous de Bologne pour chaque patient ou cadavre examiné8.

  • 9 Statuts de Bologne de 1288, dans Statuti di Bologna dell’anno 1288, éd. G. Fasoli, P. Sella, Cité d (...)

6La mise en œuvre de ces décisions, attestée par plusieurs expertises aujourd’hui conservées pour les années 1260, avait dû mettre en évidence les insuffisances du texte, puisque, dès 1288, plusieurs précisions sont apportées sur le choix des médecins dans la version révisée des statuts. Si la procédure, pour l’essentiel, ne change pas, sont introduites plusieurs conditions concernant le choix des médecins experts. Ceux-ci, toujours qualifiés de periti in arte medicandi, doivent désormais avoir au moins 40 ans, habiter Bologne depuis dix ans et avoir un bien d’au moins 100 livres9. Le but de ces ajouts est clair : il s’agit de s’en remettre, pour juger de la qualité de l’expert, à sa réputation publique, attestée par son âge et son succès professionnel. Il est du reste intéressant de noter que, cette fois encore, aucun titre universitaire n’est requis.

  • 10 Ibid., p. 173 : Potestas presens et futurus (sic) singulis sex mensibus in principio sui regiminis (...)

7Il faut croire que ces précisions n’avaient pas suffi à établir une procédure satisfaisante, car, à peine cinq ans plus tard, en 1292, une nouvelle version du texte est produite. Cette fois, elle se veut complète et définitive, puisqu’elle reprend et corrige l’ensemble des dispositions précédentes, tout en leur ajoutant diverses mesures visant à mieux choisir les experts. Les médecins, qui doivent désormais avoir 30 ans seulement, mais habiter Bologne depuis vingt ans au moins, sont dits « dignes et experts dans l’art de chirurgie et de médecine10 », l’introduction de la chirurgie s’expliquant par le fait que les chirurgiens étaient, sans doute, les plus à même de juger des cas de mort violente par blessure. Surtout, un processus très détaillé est décrit pour le choix de ces médecins :

  • 11 Ibid. : Et de hiis qui sic dabuntur fiat publicum instrumentum et ponantur nomina eorum qui dabuntu (...)

Et pour les médecins qui seront ainsi donnés, que l’on fasse un document public et que les noms de ceux qui seront donnés soient séparés sur de petits morceaux et mis dans un sac ; que ce sac et un autre sac vide soient déposés auprès du frère dépositaire de la commune de Bologne, l’actuel ou celui qui sera en poste au moment où le cas surviendra et quand il faudra envoyer des médecins au mort ou au blessé ; et que soient extraits, en présence de quatre des Anciens, deux [noms de] médecins de ce sac où se trouvent les noms, et que soient ensuite posés dans le sac vide ces noms qui ont été extraits, et ainsi pour chaque cas tant que ce régime perdurera ; et que le médecin ait un salaire selon ce qui est indiqué dans le statut. Et, si un médecin était envoyé auprès d’un mort ou d’un blessé selon une modalité contraire à celle décrite, que le juge du seigneur podestat qui préside ad malleficia soit condamné à cent livres bolonaises pour chaque décision contraire à la modalité décrite11.

8Une telle procédure, on l’imagine, visait à éviter toute tentative de fraude et toute collusion entre les experts et les parties en procès. Le choix des médecins experts s’est complexifié : alors qu’en 1262, la seule recommandation était qu’ils soient « insoupçonnables et expérimentés », désormais une double procédure est organisée. Tout d’abord, on établit une liste selon des critères de réputation publique, puis on s’assure que le choix, parmi ces experts jurés et sélectionnés, soit fait de manière complètement aléatoire. On notera qu’il n’est jamais fait mention d’une compétence validée par un titre universitaire : cela s’explique certainement par le fait qu’à l’époque qui nous occupe – la fin du xiiie siècle –, le nombre des médecins lettrés, passés par la faculté de médecine, est encore très faible, même pour l’Italie du Nord ; on se fie donc plutôt au serment prêté par les médecins.

  • 12 Statuts de Bologne de 1335, éd. A. L. Trombetti Budriesi, Lo Statuto del Comune di Bologna dell’ann (...)
  • 13 Ibid., p. 603 : Que relatio reduci debeat in scriptura in actis unius ex notariis, una cum dictis m (...)

9La révision des statuts de 1335 n’apporte, de ce point de vue, aucun ajout majeur. Quelques détails sont modifiés, comme le temps de l’intervention des médecins, qui est drastiquement réduit. Ceux-ci avaient, précédemment, huit jours pour venir examiner le corps ou les blessures ; cette fois, « si le méfait a été commis dans la cité de Bologne, dans les bourgs ou la seigneurie de la cité, les médecins sont tenus de faire leur relation le jour où il leur a été commissionné de voir les blessures ; et s’ils étaient dans le comté ou le district de Bologne, avant le 3e jour ou plus vite s’ils le peuvent12 ». Ici, c’est probablement un souci technique qui a provoqué l’ajout : en effet, certaines blessures peuvent s’infecter et devenir mortelles, alors qu’elles ne l’étaient pas au départ. Plus intéressant pour l’histoire de l’expertise judiciaire est la mention de l’intervention du notaire. En effet, est ajouté à la fin du texte que « la relation doit être mise par écrit dans les actes d’un des notaires, qui devra, avec lesdits médecins, aller, voir et écrire les choses susdites, et [les médecins] ne pourront pas aller ou être envoyés sans lui13 ». Ce sont ces relations qui nous permettent de connaître de manière plus concrète la façon dont les statuts bolonais étaient appliqués : la comparaison entre les textes normatifs et les documents de la pratique nous donne l’opportunité de saisir comment la figure de l’expert médical était envisagée par les communes médiévales italiennes.

Les carte di corredo

10Du côté des actes de la pratique, l’historien dispose donc à Bologne de ce qu’on pourrait qualifier d’expertises médicales : il s’agit de pièces produites pour l’instruction et l’action pénale qui consistent dans la transcription par un notaire, sur des feuilles de papier ou de parchemin de petites dimensions, du compte rendu de l’examen opéré sur le corps de la victime, décédée ou simplement blessée, par les médecins mandatés par le podestat. Si les délits représentent un grand nombre des interventions, les doutes relatifs à de possibles empoisonnements ou à de supposées grossesses suscitent aussi l’examen de spécialistes.

  • 14 Exemple d’expertise assez fréquemment répandue :
  • 15 Quelques rares cas toutefois fournissent des précisions sur les raisons pour lesquelles telle ou te (...)
  • 16

11Dans la majorité des cas étudiés, ces documents ne comportent ni date, ni signature. Ils sont rédigés à la troisième personne par le notaire qui, après avoir nommé le juge ad maleficia responsable de l’expertise et les praticiens qu’il a accompagnés, produit le résultat de l’observation de ces derniers : elle consiste, le plus souvent, dans le catalogue des blessures, avec leur localisation précise. La liste qui se clôt sur la réitération du serment prêté auprès du notaire par les médecins14 fait souvent mention de leur caractère mortel ou bénin, le plus souvent toutefois sans réelle justification15. Cette précision est importante aussi bien pour les morts, afin de déterminer les responsabilités des coupables – à savoir quel coup fut fatal et qui l’a porté –, que pour les simples blessés, lorsque l’avis médical autorise à prévoir une issue favorable ou, au contraire, sans espoir. Il en va ainsi du cas d’un certain Gotard de Plastellis, examiné par Giovanni da Brescia et Iacopo, fils de maître Amoreti, qui jugent sa blessure à la tête non mortelle, d’autant que l’examen révèle qu’elle est déjà quasiment guérie16.

12Ainsi formulés, ces comptes rendus de visite répondent a priori parfaitement aux attentes du tribunal : par le relevé et la distinction des blessures observées sur le corps des victimes, ils permettent à la fois d’initier la procédure et de qualifier le fait. Aussi les médecins opèrent-ils pour l’essentiel sur la base d’un mode classificatoire emprunté au droit. Si, au vu de la documentation étudiée, une bonne partie des expertises présentent un profil plutôt similaire, fruit d’une écriture notariée formalisée, d’autres toutefois s’en éloignent, soit d’un point de vue formel, soit par le contenu. En voici quelques exemples significatifs.

  • 17 Mccclxxxxii mensis setenber (sic).
    De mandato nobili viri sapientis periti domini Matei de Puxio iud (...)
  • 18 Éd. A. Simili, « Un referto medico legale inedito e autografo di Bartolomeo da Varignana », Il Poli (...)
  • 19 Ibid. : sicut filosofi medicine precipiunt.
  • 20 (...)
  • 21 R. Mandressi, Le regard de l’anatomiste. Dissections et invention du corps en Occident, Paris, 2003 (...)
  • 22 Sur ces questions, voir Consilium. Teorie e pratiche del consigliare nella cultura medievale, dir. (...)
  • 23 Consilium mei Merchadantis de Sancto Petro super eo quod queritur utrum Martinus quondam Aymi sit m (...)

13Quoiqu’une grande partie des expertises soit transcrite par le notaire sur la base du témoignage des médecins, quelques-unes sont rédigées directement à la première personne par l’un des deux praticiens mandatés par le podestat : si, à l’image du cas de ce Pietro Pellecani, elles empruntent la structure formelle des précédentes, elles s’en détachent par la signature des opérateurs et parfois, comme ici, par une mention de date17. Certains examens se révèlent aussi plus prolixes en détails, faisant montre d’un souci de préciser les conditions dans lesquelles l’examen a eu lieu. Dans les deux cas mentionnés ici et qui concernent, pour l’un, un blessé, pour l’autre, une possible grossesse18, les praticiens bolonais ne se contentent pas de leur propre jugement, mais interrogent d’autres collègues : d’un côté le chirurgien et le médecin qui ont soigné jusqu’à sa mort Pietro, fils d’Ugolino de la chapelle San Martino, de l’autre des matrones choisies par les experts « pour toucher ladite Gilia comme les philosophes de la médecine le recommandent19 ». Les premiers disent opérer avec le « conseil solennel et la délibération » de ces médecins traitants, reprenant ici les recommandations d’usage dans les ouvrages de déontologie médicale : il s’agit de pratiquer, à l’abri d’oreilles indiscrètes, la collatio, cette discussion à plusieurs qui permet de confronter les points de vue et d’aboutir à un avis unique, celui qui sera rendu public20. Ayant trouvé la victime déjà décédée, les praticiens choisis par le podestat décident aussi de se livrer à une autopsie21, afin de déterminer si la blessure observée était ou non responsable de la mort. Ce genre d’expertise, qui vise à produire une sorte de certificat, ou du moins un avis autorisé, s’avère surtout détaillé dans les cas qui se révèlent plus difficiles et prend alors plus volontiers la forme d’une parole personnalisée, quoique ce ne soit pas toujours le cas. Le consilium – titre que porte, en référence à un genre en vogue à la fois dans la littérature médicale et juridique22, le compte rendu de Merchandato de San Pietro à propos des causes du décès d’un certain Martino – sert aussi très clairement les intérêts du praticien, qui se disculpe de toute responsabilité, lui qui fut le médecin traitant de la victime. L’absence de lien avéré entre les blessures superficielles qu’il a soignées et la fièvre putride cause du décès, survenue trois semaines plus tard, lui permet de se prémunir d’une possible accusation de mauvais traitement23.

  • 24 N. G. Siraisi, Taddeo Alderotti and His Pupils. Two Generations of Italian Medical Learning, Prince (...)
  • 25 Dicunt […] predictum Açolinum ex veneno aliquo mortuum non fuisse, sed potius et certius ex multitu (...)
  • 26 L’empoisonnement partage cette spécificité, aux yeux des médecins, avec la peste. Cette conception (...)
  • 27 C’est ce qui s’est passé ici puisque le résultat de l’analyse est le fruit d’une ouverture du cadav (...)

14Les cas de suspicion d’empoisonnement fournissent aussi l’exemple de ces observations plus détaillées. L’intervention du célèbre Bartolomeo da Varignana, disciple et concurrent de maître Taddeo Alderotti24, s’accompagne ici de l’usage d’un vocabulaire médical – mention de la veine hépatique et de la veine chyle – pour expliquer le processus mortel : une profusion de sang autour de ces veines, empêchant l’esprit vital de circuler, a provoqué l’extinction de la chaleur naturelle, le noircissement du corps et, au total, une mort rapide25. La difficulté à reconnaître la présence d’un venin, qui a pour particularité, à la différence des blessures et de nombre de pathologies, de s’étendre rapidement à l’ensemble du corps26, a peut-être rendu nécessaire l’intervention d’un maître aussi réputé que Bartolomeo da Varignana. Surtout, à la différence de nombre d’autres expertises, la présence de l’un des professeurs les plus en vue de l’université accompagne l’usage d’un vocabulaire spécialisé qui peut se justifier aussi par le recours à l’autopsie27.

  • 28 Item in brachio dextro unum vulnus dubiosum ex quo vulnere dicunt quod posset mori (ASB, Curia del (...)
  • 29 viderunt dominam Rosam quondam Michelaeii mortuam, de qua dicunt quod propter longitudinem temporis (...)
  • 30 À l’image d’une citation du De ingenio sanitatis de Galien par deux médecins, qui d’une voix commun (...)

15Dans ces quelques cas, le droit n’est plus le seul moteur de la formulation de l’expertise ; cette dernière devient le lieu d’expression d’un savoir médical, avec ses certitudes, mais aussi ses limites. L’avis autorisé ne répond alors peut-être plus totalement aux attentes de la justice, lorsqu’il propose un savoir probable, plausible, qui relève plus de l’opinion que d’une vérité certifiée. On le voit dans quelques exemples où les médecins parlent de blessure douteuse (dubiosa), qui pourrait entraîner la mort28, mais sans aucune certitude sur le pronostic ; ou bien lorsqu’ils évoquent le mauvais état de conservation d’un cadavre, qui les empêche de proposer un jugement complet sur les causes du décès29 ; voire lorsqu’ils s’appuient sur la citation d’autorités pour étayer leur avis30.

  • 31 Nos magister Johannes de Sancto Georgio et magister Landaloctus ambo medicis comunis in cirugia qui (...)

16L’expertise s’effectue le plus souvent à deux, conformément aux décisions statutaires, parfois à plusieurs, lorsque le cas s’avère difficile. Ces médecins, recrutés dans le milieu bolonais, portent habituellement le titre de maître. On les qualifie aussi de phisici, noms que portent généralement ceux qui ont suivi un plein cursus universitaire, voire de doctores phisice, dans le cas de Bartolomeo da Varignana. Si l’échantillon étudié semble fournir plus de médecins que de chirurgiens, spécialistes a priori des affections superficielles, rien ne permet de dire que ces derniers étaient moins souvent requis par le pouvoir judiciaire. Toutefois, il est clair qu’ils avaient pleinement conscience de ne pas disposer des mêmes compétences, à l’image de ces deux chirurgiens qui renoncent à pratiquer l’examen, se déclarant incompétents dans un cas d’empoisonnement, qui relève, selon eux, des phisici31, les spécialistes des affections internes.

  • 32 Ces comptes rendus sont ensuite transcrits dans les libri inquisitionum et testium, enregistrements (...)
  • 33 Voir A. Garosi, « Perizie e periti medico legali in alcuni capitoli di legislazione statutaria medi (...)

17Pour éviter toute « fraude ou dol », comme le rappellent les statuts de Bologne, la commune fait donc souvent appel à des médecins et chirurgiens dans la recherche des causes de décès ou de blessures, mais aussi dans une série d’affaires qui peuvent susciter des doutes. Mandatés par la cour du podestat, ces spécialistes fournissent un témoignage de première importance, préalable à la qualification du fait32. La documentation notariée qui en résulte, conservée aux côtés d’autres témoignages dans les pièces des procès, ne fournit toutefois le plus souvent qu’un compte rendu expurgé de la visite auprès des victimes : du mode opératoire suivi par les médecins pour proposer leur pronostic – en cas de simple blessé – et leur avis autorisé, nous ne savons que peu de choses, lorsque, souvent, le bulletin se contente d’énumérer une liste de blessures. Les sources ne font pas non plus mention de possibles désaccords entre les praticiens. Pourtant la chose était sans doute fréquente et les statuts de Forlì, eux, précisent la nécessité de faire appel à un troisième expert en cas de litige entre les deux premiers33. Parfois, les observateurs se révèlent plus prolixes, dans les cas difficiles, lorsqu’ils font mention de leur savoir ou du recours à l’autopsie.

  • 34 Comme le rappelle Alessandro Pastore (Il medico in tribunale…, op. cit. n. 1, p. 16), citant le cél (...)
  • 35 Pastore, Il medico in tribunale…, op. cit. n. 1. Sur ce système juridique d’Ancien Régime, voir aus (...)
  • 36 Par exemple : quidem vulnus dicitur esse timidum et suspectum quandum ad presens spectat (ASB, Curi (...)
  • 37 M. Ascheri, « Diritto comune, processo e istituzioni : ovvero della credibilita dei giuristi (e dei (...)

18Si, au total, l’intérêt des juristes pour les faits rejoint l’importance accordée par les médecins, notamment à la fin du Moyen Âge, aux données sensibles et particulières – les particularia – et justifie pleinement l’intervention de ces derniers dans le processus judiciaire34, il n’en reste pas moins difficile de cerner le statut de cette documentation : comme le souligne Alessandro Pastore pour l’époque moderne, alors que le tribunal doit évaluer, décider et infliger des condamnations sur la base d’un ensemble de preuves35, la parole du médecin évalue parfois surtout des possibilités, émet des hypothèses et propose au total plus un avis, qui n’est pas toujours certain, qu’une certification. Souvent plus proches de l’éthique de leur métier que des impératifs judiciaires, certains médecins n’hésitent pas à réserver leur jugement ou simplement à rappeler qu’il vaut pour le moment présent, celui où l’examen a été fait (quandum ad presens spectat)36, surtout lorsqu’il s’agit de fournir un pronostic vital. Le statut de preuve accordé à l’expertise médicale, sa crédibilité et son rôle dans la procédure méritent donc d’être examinés37.

Notes

1 On se reportera notamment, pour l’époque moderne, à C. Crawford, « Legalizing Medicine : Early Modern Legal Systems and the Growth of Medico-Legal Knowledge », Legal Medicine in History, dir. M. Clark, C. Crawford, Cambridge, 1994, p. 89-116, et à A. Pastore, Il medico in tribunale. La perizia medica nella procedura penale d’antico regime (secoli xvi-xviii), Bellinzona, 1995.

2 Sur les débuts de la médecine légale à Bologne, voir G. Ortalli, « La perizia medica a Bologna nei secoli xiii e xiv. Normativa e pratica di un istituto giudiziario », Atti e memorie della deputazione di storia patria per le provincie di Romagna, 17-19 (1969), p. 223-259. Plus généralement, voir S. Blanshei, Politics and Justice in Late Medieval Bologna, Leyde, 2010.

3 Gentile da Foligno, Super lege VIIo mense, éd. H. U. Kantorowicz, « Cino da Pistoia ed il primo trattato di medicina legale », Archivio storico italiano, 5e sér., 37 (1906), p. 115-128.

4 Sur le rapport entre doctrine médicale et particularia en Italie à la fin du Moyen Âge, on pourra se reporter à C. Crisciani, « Fatti, teorie, narratio e i malati a corte : note su empirismo in medicina nel Tardo Medioevo », Quaderni storici, Fatti : storie dell’evidenza empirica, 108 (2001), no 3, p. 695-717, et J. Chandelier, « Expérience, expérimentation et connaissance dans la médecine scolastique italienne du xive siècle », Expertus sum. L’expérience par les sens dans la philosophie naturelle médiévale, éd. Th. Bénatouïl, I. Draelants, Florence, 2011, p. 373-391.

5 D’autres cas de législation médico-légale peuvent être relevés dans des villes italiennes pour la seconde moitié du xiiie siècle, comme à Venise en 1258.

6 Statuts de Bologne de 1265, dans Statuti di Bologna dall’anno 1245 all’anno 1267, éd. L. Frati, Bologne, 1877, t. 3, p. 596 : Quod nullus possit de morte alicuius vel mortifere vulnerato et accusare vel denuntiare, nisi tot homines quot vulnera mortalia apparuerint esse illata mortuo vel vulnerato, que per medicos videantur.

7 Ibid. : Et ne fraus in vulneribus commitatur, duo medici, qui sint sine suspitione et in arte medicandi periti, destinentur ad vulneratum, et videant vulnera omnia, et sacramento de novo prestito ab eis, dicant quot vulnera habet, et quot non mortifera.

8 Ibid. : Dicimus quod medici qui mittentur per potestatem vel iudices potestatis ad videndum mortuum vel vulneratum, habeat et recipere debeat quilibet eorum a comuni bonon. viginti sol. bon. pro quolibet mortuo vel vulnerato infra octo dies postquam dixerint se vidisse mortuum vel vulneratum. Et hoc si fuerit in civitate vel burgis, per comitatum vero et districtum bon. fiat solutio medicis secundum viam et qualitatem personarum arbitrio iudicis potestatis.

9 Statuts de Bologne de 1288, dans Statuti di Bologna dell’anno 1288, éd. G. Fasoli, P. Sella, Cité du Vatican, 1937, t. 1, p. 172 : Refferrant (sic) etiam si qua in mortuo viderint vulnera esse illa post mortem et de hiis credatur sacramento dictorum medicorum, qui medici sint etatis quadraginta annorum et fuerint habitatores civitatis Bononie per decem annos ad minus et habeant extimum centum librarum bon. ad minus in comuni Bononie.

10 Ibid., p. 173 : Potestas presens et futurus (sic) singulis sex mensibus in principio sui regiminis precise mitere teneatur pro quarterio medicos de sapiencioribus et dignioribus, science ciruxie et medicine et faciat sibi dari, sacramento primo prestito ab eis, omnes medicos fide dignos et expertos in arte cirexie et medicine ; qui sint maiores triginta annis et de parte ecclesie et Ieremiensium civitatis Bononie ; qui habeant centum libras bon. in extimum quilibet eorum, et abinde supra et sint habitatores civitatis Bononie a viginti annis citra, sub pena centum librarum ipsi medico et vigintiquinque librarum illi qui eum posuerit contra predicta.

11 Ibid. : Et de hiis qui sic dabuntur fiat publicum instrumentum et ponantur nomina eorum qui dabuntur separata ad modum brevium in uno saculo, et iste saculus et alter saculus vacuus ponatur apud fratrem depoxitarium comunis Bononie qui nunc est vel pro tempore fuerit et casus obvenerit quod oporteat mitere medicos ad mortuum vel vulneratum, extrahi debeant in presencia quatuor ex ancianis duo medici de dicto saculo, ubi sunt nomina et ponantur postea in saculo vacuo illa nomina extracta, et sic de singulis quousque regimen cuiuslibet perdurabit et habere debeat sallarium in statuto contemptum. Et si aliquis medicus miteretur ad mortuum vel vulneratum contra formam predictam condempnetur iudex domini potestatis qui preest ad malleficia in centum libris bon. pro quolibet poxito contra formam predictam.

12 Statuts de Bologne de 1335, éd. A. L. Trombetti Budriesi, Lo Statuto del Comune di Bologna dell’anno 1335, Rome, 2008, p. 604 : Dicimus autem quod medici eorum relationem, si malleficium fuerit comissum in civitate Bononie, burgis vel guardia civitatis, facere teneantur ea die qua eis fuerit comissum videre vulnera. Et si fuerint, in comitatu vel districtu Bononie, saltem infra terciam diem vel cicius, si potuerint.

13 Ibid., p. 603 : Que relatio reduci debeat in scriptura in actis unius ex notariis, una cum dictis medicis, vadat, videat et scribat predicta et sine eo ire vel micti non possint.

14 Exemple d’expertise assez fréquemment répandue :
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15 Quelques rares cas toutefois fournissent des précisions sur les raisons pour lesquelles telle ou telle blessure est considérée par le médecin comme mortelle. Ainsi d’un écoulement de sang important qui occasionne la mort (ASB, Carte di corredo 90, 1337) ou de blessures qui touchent les principaux organes (ASB, Curia del Podestà, Carte di corredo 89, 1re moitié de l’année 1337).

16 Image 10000000000002CC00000089CCE3AAA9D4ED34A6.jpg

17 Mccclxxxxii mensis setenber (sic).
De mandato nobili viri sapientis periti domini Matei de Puxio iudex meleficiorum (sic) presentis domini potestatis et capetanium comunis Bononie precepit et mandavit magistro Dominico quondam Lençi et magistro Petro quondam Jhoanis anbo çiruiçi estrati de busolo sechondum formam statutis comunis Bononie. Ivimus ad videndum Petrum Pelachanum capela Sancte Marie mascharde vulneratum in petore (sic) a parte sinistram (sic) chon magno sanguine et fuxionem (sic) et penetrans, diçimus et referimus anbo quod dictus Petrus Pelacanus esse timidus et suspetus (sic) in periculo mortis de dicta vulnera et de febreetc.
Ego magister Petrus condam <Jhoan
barré> Johanis medicus supraditascripsi.
Ego Dominichus quondam Lenzi medicus supradictus et de mea manu propria scrissi
(ASB, Curia del Podestà, Carte di corredo 1bis). Notons aussi que les médecins rappellent comment ils ont été choisis pour l’expertise, à savoir tirés au sort, « selon la forme des statuts de la commune de Bologne ».

18 Éd. A. Simili, « Un referto medico legale inedito e autografo di Bartolomeo da Varignana », Il Policlinico, sezione pratica, 58 (1951), no 5, p. 150-155.

19 Ibid. : sicut filosofi medicine precipiunt.

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Medici communis Bononie <vs barré> viderunt Petrum filium Ugolini de Capelle Sancti Marini qui dicebatur fuisse vulneratus cum una clavi super capud eius ex parte sinixtra quem invenerunt mortuum. De quo dicunt quod habito solempni conscilio et deliberatione cum medicis qui aprimordio ipsum medicaverunt scilicet phisico et cyrugo et continue usque ad finem ipsum medicaverunt et eumdem in parte illa usque ad cerebrum anothomizantes non invenerunt aliquam causam propter quam ex dicto vulnere dictus Petrus fuerit mortuus. Unde dicunt dictum vulnus non fuisse mortale nec ex dicto vulnere dictum Petrum esse mortuum (éd. L. Münster, « La medicina legale in Bologna dai suoi albori fino alla fine del secolo xiv », Bollettino dell’Accademia medica pistoiese Filippo Pacini, 26 [1955], p. 3-17). Sur la discussion entre les praticiens : C. Crisciani, « Éthique des consilia et de la consultation (xiiie - xive siècles) », Médiévales, 46 (2004), p. 23-44.

21 R. Mandressi, Le regard de l’anatomiste. Dissections et invention du corps en Occident, Paris, 2003 ; A. Carlino, La fabbrica del corpo. Libri e dissezione nel Rinascimento, Turin, 1994.

22 Sur ces questions, voir Consilium. Teorie e pratiche del consigliare nella cultura medievale, dir. C. Casagrande, C. Crisciani, S. Vecchio, Florence, 2004 (Micrologus’Library, 10).

23 Consilium mei Merchadantis de Sancto Petro super eo quod queritur utrum Martinus quondam Aymi sit mortuus ex quibusdam vulneribus ei illatis in brachio sinistro sive aiutorio a me Merchadante predicto ex eo quia ipsum curavi ex dictis vulneribus, dico quod dictus Martinus non est mortuus ex dictis vulneribus ex eo quia vulnera fuerunt superficialia vel excoriationes et nullum accidens supervenit predicto Martino ex dictis vulneribus. Imo post sanationem faciebat solitas ut sani facient postquam sanatus fuit de dictis vulneribus per tres septimanas vel circha yd. Sed dicit ipsum esse mortuum ex quadam febre continua putrida ex flate que supervenit predicto Martino, et nullo modo est mortuus ex alia de causa nixi ex predicta febre et non ex vulneribus. Et predictum consillium quesitum fuit a me Merchadante predicto a domino Martello yudice malleficiorum honorabilis millitis domini Nigri de Bursatis de Brissia potestatis Bononie et predicta dicit suo sacramento ab eo de nuovo prestito. Die xxo setembris MCCCXVIII (éd. Münster, « La medicina legale… », loc. cit. n. 20, p. 10). Sur ces dénonciations de médecins de la part de patients, G. Pomata, La promessa di guarigione. Malati e curatori in antico regime : Bologna xvi-xviii secolo, Rome-Bari, 1994.

24 N. G. Siraisi, Taddeo Alderotti and His Pupils. Two Generations of Italian Medical Learning, Princeton, 1981 ; Ead., « Taddeo Alderotti and Bartolomeo da Varignana on the Nature of Medical Learning », Isis, 68 (1977), p. 27-39.

25 Dicunt […] predictum Açolinum ex veneno aliquo mortuum non fuisse, sed potius et certius ex multitudine sanguinis agregati circa venam magnam, que dicitur vena chilis et venas epatis propinquas eidem, unde prohibita fuit spiritus quia ipsum in totum corpus efluxio et facta caloris innati in toto mortifficatio sive extincio ex quo post mortem celeriter circa totum corpus denigratio facta est (éd. A. Simili, « Bartolomeo da Varignana e una sua perizia giudiziaria », La riforma medica, 36 [1941], p. 3-12).

26 L’empoisonnement partage cette spécificité, aux yeux des médecins, avec la peste. Cette conception d’une corruption corporelle est déjà évoquée par l’un des premiers témoins de la peste de 1347-1348, Gentile da Foligno (R. French, Canonical Medicine : Gentile da Foligno and Scholasticism, Leyde, 2001, p. 280-295). Voir aussi F. Collard, « Quid est venenum ? Naissance d’une notion, explorations d’un concept », chapitre d’un ouvrage encore inédit. Nous remercions l’auteur de nous avoir fait lire son travail avant sa publication.

27 C’est ce qui s’est passé ici puisque le résultat de l’analyse est le fruit d’une ouverture du cadavre : predicti medici sensibiliter cognoverunt visceribus eius anothomice circumspectis (éd. Simili, « Bartolomeo da Varignana… », loc. cit. n. 25).

28 Item in brachio dextro unum vulnus dubiosum ex quo vulnere dicunt quod posset mori (ASB, Curia del Podestà, Carte di corredo 89, 1re moitié de l’année 1337).

29 Image 100000000000015C0000002FE7DCFF974C3F1FF6.jpgviderunt dominam Rosam quondam Michelaeii mortuam, de qua dicunt quod propter longitudinem temporis mortis eidem et coruptionem corporis eius non potuerint de causa mortis eius plenum afferre judicium (éd. Münster, « La medicina legale… », loc. cit. n. 20, p. 8).

30 À l’image d’une citation du De ingenio sanitatis de Galien par deux médecins, qui d’une voix commune (dicemus, refferimus, denunciamus inquisivisse, vidisse et temptasse vulnera) rapportent le résultat de leur examen (ASB, Curia del Podestà, Carte di corredo 1bis).

31 Nos magister Johannes de Sancto Georgio et magister Landaloctus ambo medicis comunis in cirugia qui de mandato domini Manfredini iudicis domini potestatis ad maleficia deputati, ivimus ad videndum Rustiganum Martellini qui dicitur venenatum fuise (sic), quo viso dicimus nostro sacramento de novo prestito dictum iudicium non pertinere ad nos neque posset cognosci per nos cum dictum iudicium seu cognitio pertinet ad medicos fisice (A. Simili, « Sui primordi e sulla procedura della medicina legale in Bologna [con documenti inediti] », Atti e memorie dell’Accademia di storia dell’arte sanitaria, 42 [1943], no 2 p. 41-56).

32 Ces comptes rendus sont ensuite transcrits dans les libri inquisitionum et testium, enregistrements des enquêtes entreprises et des témoignages reçus à leur propos.

33 Voir A. Garosi, « Perizie e periti medico legali in alcuni capitoli di legislazione statutaria medioevale », Rivista di Storia delle scienze mediche e naturali, 20 (1938), p. 157-167.

34 Comme le rappelle Alessandro Pastore (Il medico in tribunale…, op. cit. n. 1, p. 16), citant le célèbre juriste de Pérouse, Baldo degli Ubaldi, iudex est sicut medicus, à propos de la méthode d’enquête suivie. Sur les particularia en médecine et en droit, voir le numéro de Quaderni storici, 108 (2001), no 3, consacré aux fatti.

35 Pastore, Il medico in tribunale…, op. cit. n. 1. Sur ce système juridique d’Ancien Régime, voir aussi I. Rosoni, Quae singula non prosunt collecta iuvant. La teoria della prova indiziaria nell’età medievale e moderna, Milan, 1995.

36 Par exemple : quidem vulnus dicitur esse timidum et suspectum quandum ad presens spectat (ASB, Curia del Podestà, Carte di corredo 1bis).

37 M. Ascheri, « Diritto comune, processo e istituzioni : ovvero della credibilita dei giuristi (e dei medici) », dans Id., Diritto medievale e moderno. Problemi del processo, della cultura e delle fonti giuridiche, Rimini, 1991, p. 181-255. Voir aussi La preuve en justice de l’Antiquité à nos jours, dir. B. Lemesle, Rennes, 2003.

Notes de fin

1 Abréviation utilisée : ASB pour Archivio di Stato di Bologna. Nous remercions Massimo Giansante pour son aide précieuse à l’ASB.

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