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Contextes, espaces, pratiques

De la banalité du mal : délation et franquisme

Severiano Rojo Hernandez

Résumés

Cet article analyse la place et le fonctionnement de la délation dans la société franquiste.

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Texte intégral

  • 1 Arendt, Hannah, Eichmann in Jerusalem: A Report on the Banality of Evil, New York, Viking Press, 19 (...)
  • 2 Klein, Claude, Le cas Eichmann. Vu de Jérusalem, Paris, Gallimard, « La Suite des temps », 2012.

1Lorsque Hannah Arendt publie en 1963 Eichmann in Jerusalem : A Report on the Banality of Evil1, ouvrage où elle reprend et amplifie ses réflexions sur le procès d’Adolf Eichmann qu’elle couvre pour The New Yorker en 1961, elle suscite une controverse internationale, dont les échos parviennent jusqu’à nos jours comme le montre l’ouvrage de Claude Klein, Le cas Eichmann. Vu de Jérusalem2. La polémique, entre autres, s’explique par la mise en cause des Judenrats (Conseils juifs) dans la déportation et l’extermination de millions de Juifs et par l’image qu’elle propose d’Adolf Eichmann, considérée sous le prisme de la « banalité du mal ». Cette notion, en effet, ébranle ce qui semble une évidence lors de la découverte des camps de la mort : de tels crimes ne peuvent avoir été commis que par des monstres, qui incarnent le « mal absolu ». Hitler et les nazis se retrouvent ainsi bannis à jamais de la sphère de l’humanité. Dès lors, à cette époque, pour une grande partie des lecteurs de Hannah Arendt il est difficile d’admettre qu’Adolf Eichmann puisse être dépeint de la sorte :

  • 3 Arendt, Hannah, Eichmann à Jérusalem. Rapport sur la banalité du mal, Paris, Gallimard, Folio Histo (...)

Eichman n’était pas un fou au sens psychologique du terme et encore moins au sens juridique ­[…il…] n’avait jamais rien eu contre les Juifs ; au contraire, il avait de nombreuses « raisons personnelles » de ne pas les haïr. […] c’était plutôt un déclassé issu d’une solide famille bourgeoise […] Eichmann n’entra pas au parti par conviction, et n’adhéra jamais aux idées nazies […] jeune ambitieux, il en avait eu assez d’être représentant de commerce […] Dans sa vie monotone, vide de sens, dépourvue d’importance, le vent de l’histoire avait soufflé […] Il était évident pour tous que cet homme n’était pas un « monstre », quoi qu’en dit le procureur ; et on ne pouvait s’empêcher de penser que c’était un clown. […] ce qui, pour Eichmann, n’était qu’un emploi, avec sa routine, ses hauts et ses bas, fut, pour les juifs, littéralement la fin du monde.3

2Cette difficulté à percevoir Eichmann comme un banal et ambitieux bureaucrate, dépourvu de suffisamment d’intelligence et de courage pour s’opposer aux ordres les plus abjects, s’explique certes par la dimension des crimes auxquels il est associé. Nonobstant, cela tient également au fait qu’il est particulièrement difficile, lorsque nous analysons des questions telles que la violence extrême ou les génocides, de rompre avec une vision binaire de la réalité. Les catégories de « bien » et de « mal » s’imposent automatiquement. Les stéréotypes et les représentations sociales qui forgent notre perception de ces phénomènes nous empêchent de penser leur complexité et, au-delà, celle des actes et des pratiques que l’on observe chez les individus et les groupes impliqués dans les divers processus à l’œuvre. A travers la notion de « banalité du mal », Hannah Arendt fait imploser les grilles d’analyse et nous contraint à rompre avec notre tendance à créer des catégories et à assimiler des stéréotypes de manière inconsciente.

  • 4 Dans cette étude nous employons indistinctement les termes de délation et de dénonciation. Comme le (...)

3L’apport de cette notion est donc des plus précieux, notamment lorsqu’il s’agit d’analyser la dénonciation4 dans l’Espagne franquiste, objet difficile à appréhender en raison des nombreux clichés et idées reçues qui circulent sur la question et qui ont opacifié notre lecture du phénomène. Celle-ci s’est d’autant plus densifiée que l’univers de la délation constitue un espace interstitiel situé entre les différentes strates qui charpentent le système de contrôle social déployé par le franquisme tout au long de son existence (1936-1975). De fait, la délation est un instrument de contrôle social, mais elle est aussi un élément essentiel au bon fonctionnement de la plupart des pratiques et activités articulant la stratégie du régime dans ce domaine. La dénonciation, en définitive, est consubstantielle à la dictature et elle garantit sa pérennité dans le temps et son ascendant sur les différentes composantes de la société espagnole. Par conséquent, l’étude du lien existant entre dénonciation et stéréotypes plonge le chercheur dans les méandres du régime et le contraint à s’interroger non seulement sur le fonctionnement du franquisme, mais aussi sur les complexes systèmes de loyauté et d’adhésion dont bénéficie la dictature. Un travail de ce type sur l’ensemble de la période dictatoriale requiert un espace dont nous ne disposons pas dans le cadre de cet article. Celui-ci propose donc de réduire la focale et de centrer l’analyse non seulement sur une période particulièrement propice à la délation (la guerre civile, 1936-1939), mais aussi sur un territoire que la dictature marque de son empreinte dès les premières heures du soulèvement militaire du 18 juillet 1936 (province de Salamanque). Cette approche permet de saisir au mieux la façon dont la dénonciation et les stéréotypes s’enchevêtrent et favorisent la compréhension de la société franquiste.

Aux origines du mal : guerre, violences et stéréotypes

  • 5 Cf. Preston, Paul, El holocausto español. Odio y exterminio en la Guerra Civil y después, Barcelona (...)
  • 6 González Calleja, Eduardo, « Brutalización de la política y banalización de la violencia en la Espa (...)
  • 7 Cf. Balfour, Sebastián, Abrazo mortal. De la guerra colonial a la Guerra Civil en España y Marrueco (...)
  • 8 Ibid. Voir également, Sevillano Calero, Francisco, Exterminio. El terror con Franco, Madrid, Oberon (...)

4Lorsque les militaires espagnols prennent les armes contre le gouvernement du Front Populaire, ils ignorent que leur coup d’Etat va échouer et déclencher une guerre civile qui ébranle les fondements de la société espagnole. Ils ignorent également que leur entreprise va provoquer cette révolution sociale qu’ils affirment vouloir empêcher ainsi que la mobilisation sans précédent de milliers d’Espagnols opposés à leur projet de société. Ils sont néanmoins conscients d’un point : le pronunciamiento va être brutal et s’accompagner de formes de violences extrêmes. Ce n’est qu’ainsi que l’on peut comprendre la série d’instructions secrètes que le général Mola, l’un des chefs de la conspiration, adresse au printemps 1936 aux personnes et groupes impliqués dans le coup d’Etat. El director y ordonne l’emploi d’une violence implacable contre l’ennemi et l’application de châtiments exemplaires aux responsables des organisations et institutions opposées au movimiento5. Ces instructions vont être appliquées au pied de la lettre, notamment à partir du moment où l’échec du coup d’Etat ne fait plus l’ombre d’un doute. Ainsi, pendant les premiers mois du conflit, les militaires rebelles et leurs alliés organisent dans les territoires dont ils s’emparent des opérations de nettoyage destinées à terroriser et à éliminer l’adversaire politique, des opérations qui rappellent par certains aspects les guerres d’extermination qui ont lieu en Europe de l’Est au cours des deux guerres mondiales6. Cette stratégie s’inspire également de l’expérience coloniale, laquelle a largement façonnée l’esprit des principaux officiers rebelles (Franco, Mola, Queipo de Llano, Sanjurjo, Goded, Millán Astray). Ces derniers appliquent dans la péninsule les enseignements et les pratiques acquis lors de la guerre du Maroc (1909-1926)7. Les unités de l’armée et les groupes paramilitaires font preuve, en effet, d’une brutalité féroce à l’encontre des personnes et des communautés, brutalité similaire à celle déployée contre les tribus du Rif8.

  • 9 Ledesma, José Luis, « Qué violencia para qué retaguardia o la República en guerra de 1936 », Retagu (...)
  • 10 Ledesma, José Luis, « Las fuentes locales de la violencia : conflictividad rural, fractura social y (...)
  • 11 Ledesma, José Luis, « Qué violencia para qué… », p. 99.

5Les zones contrôlées par les républicains ne sont pas non plus épargnées par la violence. Des milliers de personnes considérées comme proches des insurgés sont assassinées, en particulier durant l’été et l’automne 1936. Mais à la différence du « territoire rebelle », la violence n’a pas été planifiée et ne constitue pas « la colonne vertébrale d’un projet et d’un régime politique » bien défini9. Même si la thèse d’une violence spontanée œuvre d’éléments incontrôlées n’a plus cours10, les nombreux assassinats et actes de barbarie qui ont lieu dans le territoire républicain sont principalement le résultat de l’effondrement de l’Etat et de l’éclatement du pouvoir (sous la forme de comités révolutionnaires, etc.), deux phénomènes qui touchent notamment des régions comme la Catalogne et l’Aragon, voire des villes telles que Madrid11.

  • 12 Cf. Gil Andrés, Carlos, Lejos del frente. La Guerra Civil en la Rioja Alta, Barcelona, Crítica, 200 (...)
  • 13 López García, Santiago et Delgado Cruz, Severiano, « Que no se olvide el castigo : la represión en (...)
  • 14 Ibid.
  • 15 « Promenade » qui se termine par l’exécution du prisonnier. Cette pratique concerne les deux camps.
  • 16 Sortie, transfert de prisonniers que l’on exécute par la suite. Cette pratique concerne les deux ca (...)
  • 17 Cf. Iglesias Ovejero, Angel, La represión franquista en el sudoeste de Salamanca (1936-1948), Ciuda (...)

6A Salamanque comme dans d’autres territoires (Logroño, par exemple12), l’effondrement de l’Etat et la désorganisation que génère le conflit sont en revanche savamment canalisés par les militaires qui déclarent l’état de guerre le 19 juillet. Alors qu’ils s’emparent de la capitale et des principales localités de la province (Béjar, Ciudad Rodrigo) entre le 19 et le 25 juillet, les militaires rebelles laissent les mains libres aux groupes de phalangistes et aux « milices patriotiques » – fréquemment secondés par la garde civile – pour semer la terreur à leur guise. De fait, ils assassinent, emprisonnent, torturent et appliquent diverses formes de châtiments et humiliations dans l’espace public (femmes tondues, ingestion d’huile de ricin…) en toute impunité et pendant de longs mois. L’embrasement qui se produit facilite dès lors « la destruction des bases sociales de la République, de tout ce qui est en lien avec le Front Populaire voire même avec la simple idée du républicanisme libéral et laïque »13. Par cette stratégie, les militaires confient la « sale besogne » aux groupes paramilitaires et étendent « la sensation de peur à l’ensemble de la population susceptible de subir ce châtiment »14. Les paseos15, les sacas16, voire les battues contre les fuyards dans des zones telles que le Rebollar, déciment la société locale et plongent de nombreuses familles dans la misère et le dénuement le plus complet17.

  • 18 López García, Santiago et Delgado Cruz, Severiano, op. cit., pp. 140-141.
  • 19  Infante Miguel-Motta, Javier, « Por el Imperio hacia Dios bajo el mando del Caudillo : Profesores (...)
  • 20 López García, Santiago et Delgado Cruz, Severiano, op. cit., pp. 140-141.
  • 21 Cf. Archivo Provincial de Salamanca, section Gobierno civil de Salamanca, Leg. 232, Exp. 2.
  • 22 Ibid. Voir en annexe le document n° 1.
  • 23 Ce processus ne doit pas masquer le fait que l’on organise des conseils de guerre dès le début du c (...)
  • 24 Moreno Gómez, Francisco, « La gran acción represiva de Franco que se quiere ocultar », SIN RESPETO (...)

7Cette violence se déchaine, en premier lieu, contre les personnes qui se sont opposées de quelque façon que ce soit au coup d’Etat. Au sein de ce groupe figurent, entre autres, des élus et des représentants de l’Etat (gouverneurs, maires, conseillers municipaux…), ainsi que des militants d’organisations proches du Front Populaire, notamment les membres du Sindicato de Trabajadores de la Tierra. Ces derniers ont appuyé la réforme agraire promue par les gouvernements républicains de gauche et ont participé à l’occupation de certaines fincas au cours du printemps 1936. La plupart des personnes appartenant à ce groupe sont exécutées sommairement entre juillet et décembre 1936. La violence atteint, en second lieu, les représentants du pouvoir et les sympathisants de gauche qui n’ont pas manifesté d’opposition ouverte au pronunciamiento, mais qui sont considérés comme des ennemis en raison de leurs activités et de leur engagement passés et présents. Ces personnes sont tantôt victimes d’exécutions extrajudiciaires, tantôt fusillées ou emprisonnées après comparution devant un conseil de guerre. Leur situation évolue souvent en fonction du degré de dangerosité que leur attribuent les rebelles et leurs alliés. Enfin, un dernier groupe est composé d’individus que l’on élimine (assassinat ou emprisonnement) pour des raisons sans lien avec l’affrontement armé. La violence à l’encontre de ces personnes masque des actes crapuleux (vols, accaparement de biens…), des conflits de voisinage voire des querelles familiales18. Cette classification est bien évidemment aléatoire et elle présente une vision réductrice de la réalité, car de nombreux cas recoupent les différentes catégories. Quoi qu’il en soit, 780 personnes sont victimes d’exécutions sommaires (paseos et sacas) entre 1936 et 1937. En 1940, les diverses formes de violence provoquent, au total, la mort de 1042 personnes19. La plupart des victimes sont des paysans sans terre (40 % des morts), des ouvriers (33 % des morts) et des enseignants (16 % des morts)20, soit en grande partie les groupes considérés en raison de leurs revendications comme la menace la plus importante contre l’ordre social structurant la province de Salamanque. Quant aux personnes qui prennent une part active dans la répression, leur profil diffère du traditionnel stéréotype décrivant les tortionnaires sous l’apparence d’un militaire. Les forces armées ne participent qu’à la marge aux nombreux actes de violence qui frappent cette province. La garde civile, en revanche est très active et encadre fréquemment des groupes dont le profil est extrêmement varié, comme le montrent indirectement les documents d’archive. Contrairement au cliché qui voudrait que les appuis des militaires rebelles se limitent à une fraction réduite de la population, les listes des personnes qui prennent le pouvoir dans les différentes localités de Salamanque ou qui s’engagent dans la guardia cívica chargée de contrôler l’ordre public montrent que les putschistes bénéficient en 1936 d’un large appui, qui traverse l’ensemble des groupes sociaux. On y retrouve des grands et petits propriétaires terriens, des médecins, des fonctionnaires, des enseignants, des juges, des étudiants, des chefs d’entreprise, des commerçants et des paysans sans terre21. Une partie de ces personnes, certes, intègre la guardia cívica afin d’échapper à la violence et à la répression. Néanmoins, ces documents démontrent que les rebelles bénéficient d’appuis sociaux hétérogènes et vastes, qui facilitent le contrôle de la province. Celui-ci est d’autant plus aisé que les putschistes et leurs alliés fournissent les armes et les véhicules et que se mettent en place rapidement des formes de collaboration entre les milices et groupes de la phalange des différentes communes de Salamanque. La coopération renforce l’effectivité de la violence et permet fréquemment de confier les assassinats à des personnes extérieures à la localité22. Cette brutalité extrême tend néanmoins à disparaître à la fin de l’année 1936, voire au cours des premiers mois de 1937. Elle fait place progressivement à une violence institutionnalisée, – mais tout aussi intense (exécutions, emprisonnements, amendes, confiscation de biens, etc.) – sous la forme de conseils de guerres23, dont l’activité se poursuit jusque dans les années 194024.

  • 25 Ledesma, José Luis, « Franco y las violencias de la Guerra Civil. Manual de uso para unretrato blan (...)
  • 26 González Calleja, Eduardo, « La violencia política y la crisis de la democracia republicana (1931-1 (...)
  • 27 González Calleja, Eduardo et Souto Kustrín, Sandra, « De la dictadura a la República : orígenes y a (...)

8Cette terreur et ces pratiques à l’encontre du prétendu ennemi politique ont des origines multifactorielles liées non seulement aux divers problèmes et évolutions auxquels est confronté le pays depuis des décennies, mais aussi à la situation que génère le coup d’Etat sur le plan local et national. Néanmoins, signalons d’emblée que les conflits et tensions qui secouent l’Espagne – et Salamanque tout particulièrement – entre 1931 et 1936 ne peuvent à eux seuls expliquer un affrontement d’une telle brutalité. Des auteurs comme José Luis Ledesma rappellent que divers pays à cette époque (la France, par exemple) font face à des crises et des divisions politiques d’une ampleur similaire sans pour cela basculer dans un conflit de cette nature25. Comme nous l’avons signalé auparavant, à la veille de la guerre, les putschistes sont déjà dans une logique de violence, qui prend racine dans leur expérience de la guerre coloniale. Mais, le choix d’un pronunciamiento brutal et sans concession pour l’ennemi constitue une nouveauté au regard de la tradition des militaire espagnols dans ce domaine. L’exemple du pronunciamiento du général Sanjurjo en 1932 en atteste parfaitement. Entre 1932 et 1936, il se produit donc une évolution qui, dans une certaine mesure, s’explique par la participation des militaires à des opérations de contrôle de l’ordre public, notamment lors de l’insurrection révolutionnaire d’octobre 1934. En faisant appel à l’armée, le pouvoir permet aux africanistes, en particulier au général Franco, de vérifier l’efficacité de leurs pratiques dans les « campagnes de pacification » menées dans la péninsule. Ceci étant, les militaires rebelles sont également à l’image d’une partie de la société espagnole, qui perçoit négativement la rupture de l’ordre social de la Restauration26 et les réformes qu’entreprend la République (séparation de l’Eglise et de l’Etat, réforme de l’armée, réforme agraire, réforme du travail, autonomie régionale). Cette fraction de la société, composée d’une part importante de la jeunesse, est dans un processus de radicalisation qui a débuté bien avant l’avènement de la République. L’instauration de ce régime en 1931 accélère dès lors la mutation en cours. Elle rend cette partie de la population beaucoup plus réceptive aux idéaux réactionnaires et d’extrême droite ainsi qu’à la vision de la violence que proposent ces courants. Tout cela se traduit par un accroissement du militantisme et l’émergence ou le renforcement d’organisations partisanes de l’action directe27.

  • 28 González Calleja, Eduardo, « Brutalización de la política y banalización de la violencia…”, op. cit (...)
  • 29 Moradiellos García, Enrique, « La evitable guerra civil española de 1936 », Cuadernos republicanos, (...)
  • 30 Gros, Frédérica, Etats de violence. Essai sur la fin de la guerre, Paris, Gallimard, 2006, p. 103.
  • 31 González Calleja, Eduardo, « La violencia política y la crisis de la democracia… », p. 5.
  • 32 Voir, par exemple au Pays basque, La Gaceta del Norte, 15 août 1931.
  • 33 Voir, par exemple : Maeztu, Ramiro de, « La moral del ejército », El Pueblo Vasco, 19 avril 1934, p (...)
  • 34 Cf. Rojo Hernández, Severiano et Eiroa, Matilde (Dir.), « La prensa y el levantamiento militar del (...)
  • 35 Cf. Rojo Hernández, Severiano, « Mito nacional e instrumentalización : el dos de mayo en la prensa (...)
  • 36 González Calleja, Eduardo, « La prensa carlista y falangista durante la Segunda República y la Guer (...)
  • 37 González Calleja, Eduardo, « Brutalización de la política y banalización de la violencia…”, op. cit (...)
  • 38 Cf. Mosse, George L., De la Grande Guerre au totalitarisme. La brutalisation des sociétés européenn (...)
  • 39 Cruz, Rafael, En el nombre del pueblo : República, rebelión y guerra en la España de 1936, Madrid, (...)
  • 40 Cf. González Calleja, Eduardo et Souto Kustrín, Sandra, op. cit.

9Pour ces groupes, la violence n’est pas seulement un instrument, mais elle est aussi une valeur devant orienter la conduite des individus dans tous les domaines28. Cette culture si prégnante dans les années trente et qui touche tant la droite que la gauche se nourrit de l’idée selon laquelle la violence est légitime, en particulier lorsqu’il s’agit de défendre et d’imposer un certain ordre moral et politique29. Défendue par des mouvements tels que le carlisme et la phalange, cette perception de la violence sous-tend une pensée totale, une idéologie qui repose sur la certitude « d’avoir raison contre les autres, contre la réalité et même contre soi »30. Comme dans d’autres sociétés européennes, elle donne lieu à la prolifération de langages et de symboles violents qui invitent à l’action armée dans l’espace public31. Ceux-ci sont largement relayés par les moyens de communication, en particulier la presse. De ce point de vue, les journaux jouent un rôle essentiel, d’autant que le cadre démocratique contribue à une multiplication sans précédent des périodiques. Avec l’avènement de la République, la presse devient plus que jamais un vecteur de la mobilisation et de la radicalisation des masses. Ainsi, dès 1931, elle relaie les premiers appels à l’insurrection armée32. La stigmatisation et le dénigrement de l’adversaire politique se banalisent également. Ces pratiques articulent, en dépit de la censure, des articles d’opinion aux accents paramilitaires, où la démocratie apparaît comme un système politique incapable de résoudre les problèmes du pays. Ce type d’écrits est fréquent dans les journaux contrôlés par les milieux catholiques (par exemple, El Pueblo Vasco), où des personnalités proches de la revue Acción Española (Ramiro de Maeztu, entre autres) font, dès 1934, l’éloge de l’armée33. Dans des quotidiens conservateurs comme El Debate, on assiste aussi à l’émergence d’une rhétorique fondée sur la notion de l’anti-Espagne, notion qui regroupe tous ceux que les formations de droite considèrent comme étant au service de puissances étrangères et complotant contre l’Espagne éternelle. Avec la victoire du Front populaire, la violence de ces discours s’accentue et se double d’une dialectique de la peur, qui ne cesse de mettre en avant les troubles politiques et sociaux, pour mieux insister sur la prétendue déliquescence de la nation34. Ainsi se cristallisent des représentations négatives de la IIe République, d’où émergent des stéréotypes qui alimentent un imaginaire nationaliste, souvent réactionnaire voire d’extrême droite. Le peuple espagnol y est dépeint à travers le souvenir de son passé prétendument glorieux (victoires des chrétiens pendant la Reconquista, victoires de la monarchie espagnole au XVI et XVIIe siècles, guerre d’indépendance)35, ce qui lui confère une dimension guerrière fondée sur des oppositions tranchées : la violence et la barbarie des marxistes s’opposent à la pureté, l’abnégation et le courage de la nation espagnole. Au-delà du discours nationaliste, la presse – tout particulièrement les publications d’extrême droite telles que Arriba et Informaciones36 – institue une éthique du dépassement de soi et propose le stéréotype d’un homme nouveau, jeune et viril, un guerrier idéal, pour qui l’affrontement est un défi, le moyen de se surpasser, de confirmer sa capacité à être à la hauteur de l’histoire, dont il prétend modifier le cours. Cet homme nouveau est au cœur d’un affrontement où le sacrifice pour l’idéal politique, l’héroïsation et la lutte contre l’adversaire sont des moyens de retourner aux sources d’un passé prétendument grandiose. Ce type de discours s’adresse prioritairement à la jeunesse, invitée à défendre la patrie menacée par la révolution. La presse légitime ainsi l’emploi de la force37 et alimente la « banalisation de la violence », phénomène que décrit George Mosse dans son analyse des sociétés européennes ayant subi la Première Guerre mondiale38. Dans son discours, elle propose quatre idées fondamentales. Premièrement, la société espagnole est menacée par un ennemi interne – contrôlé parfois par une puissance étrangère (URSS…) – qu’incarne l’adversaire idéologique (partis politiques ou/et autorités)39. Deuxièmement, la violence constitue le moyen d’éradiquer cette menace et de mettre un terme à la déliquescence dont souffre la patrie. Troisièmement, la jeunesse est l’élément sain du pays et, en tant que tel, elle doit intervenir dans la vie politique et déterminer l’avenir de la nation40. Quatrièmement, la guerre est, dans certains cas, une alternative salutaire, nécessaire à la rédemption des hommes pervertis par le système en place. Cette représentation renvoie à une vision idéalisée de l’affrontement militaire, de ses modalités et de ses conséquences, comme le montre cet exemple :

  • 41 Cf. Yguartua y Landecho, Francisco, « Grito a la juventud española », El Pueblo Vasco, 15 février 1 (...)

En ces heures sombres, soyons un rayon de lumière ; en ces heures de haine soyons la paix, même si nous la portons comme Jeanne d’Arc, à la pointe de l’épée. Soyons une dague ignacienne et pénétrons tel un bistouri adroit dans le cancer marxiste et dans la pourriture séparatiste ; soyons le poids indispensable qui permette à la balance de la vie de l’Espagne de s’incliner vers la résurrection plutôt que vers la mort, en cette heure suprême, jeunesse espagnole, où l’Espagne joue son existence avec un jeu de cartes truqué.41

  • 42 Cruz, Rafael, op. cit., p. 197.
  • 43 Cf. González Calleja, Eduardo, « The Symbolism of Violence During the Second Republic », The Splint (...)
  • 44 Cf. Ledesma, José Luis, « Qué violencia para qué retaguardia … », op. cit., p. 101.
  • 45 Núñez Seixas, Xosé Manoel, ¡Fuera el invasor ! Nacionalismos y movilización bélica durante la Guerr (...)

10La « banalisation de la violence » et la propagation de la peur deviennent de ce fait consubstantielles à des pratiques et des discours journalistiques42, qui orientent et imprègnent les imaginaires d’une fraction croissante de la population43, convaincue, notamment à partir d’octobre 1934, que la seule alternative est l’affrontement armé et l’annihilation de l’opposant politique44. Au-delà, la presse élabore et propose, bien avant la guerre civile, un discours largement repris par les rebelles et qui deviendra le substrat non seulement de leur propagande, mais aussi de leur idéologie45. Ceci dit, même si ce discours contribue à la radicalisation des masses, son impact réel demeure difficilement mesurable et ne peut expliquer à lui seul le basculement qui se produit dès le 18 juillet 1936.

  • 46 A Salamanque, 15 % de la superficie agricole de la province, soit 180 000 hectares, étaient entre l (...)

11D’autres éléments sont à prendre en compte. Parmi eux, la crise économique qui réduit les revenus ou accentue la pauvreté endémique de milliers d’Espagnols vivant dans les zones industrielles et les campagnes. Elle accentue leur mécontentement face à un pouvoir jugé peu efficace, voire trop modéré, et elle les incite à adhérer à des idéologies proposant un changement radical de société. De fait, dès l’avènement de la République, la crise alimente une conflictualité sociale croissante et renforce les tensions là où se posent depuis des décennies des problèmes endémiques de la société espagnole. Dans des régions comme Salamanque ou l’Andalousie, la misère, la question de la répartition de la terre46 et la mise en place de la réforme agraire exacerbent les revendications des braceros, mais aussi la peur des petits et grands propriétaires terriens qui perçoivent la République comme une menace pour leurs intérêts immédiats. Cette inquiétude est accentuée par le fait que l’accession des masses à la politique, grâce au système démocratique, et les transformations induites par la nouvelle législation sur le travail (protection de l’action collective des travailleurs, régulation des salaires, etc.) remettent en question des rapports traditionnels fondés sur le caciquisme et le paternalisme. De plus, cet ordre social que l’on pressent en danger est intimement associé à l’Eglise, institution particulièrement visée par les réformes républicaines. A la veille de la guerre civile conflue donc une multitude d’éléments qui génère une impression de chaos au sein de la population en rupture avec la République. Ce sentiment est renforcé par la stratégie de déstabilisation des putschistes et de leurs alliés (attentats…), la réponse des organisations de gauche ainsi que la multiplication des grèves et l’occupation des fincas. En définitive, il n’existe plus en 1936, si tant est que cela n’ait jamais existé auparavant, la capacité à faire société dans un Etat en phase de consolidation démocratique, confronté à une multiplicité de projets antidémocratiques.

De la banalité du mal : délation et violences

  • 47 Reig Tapia, Alberto, Memoria de la Guerra Civil. Los mitos de la tribu, Madrid, Alianza Editorial, (...)
  • 48 Sémelin, Jacques, Purifier et détruire. Usages politiques des massacres et génocides, Paris, Editio (...)
  • 49 Ibid., pp. 177-178.
  • 50 Ledesma, José Luis, “Franco y las violencias de la Guerra Civil… », op. cit., p. 163.
  • 51 Gros, Frédérica, op. cit., p. 100-101.
  • 52 Gros, Frédérica, op. cit., p. 100.
  • 53 Iglesias Ovejero, Angel, « Ensayo de cronología del alzamiento militar, terror y represión de 1936 (...)
  • 54 Ibid., p. 183.

12Alberto Reig Tapia signale que la guerre civile devient envisageable lorsque l’adversaire politique sombre dans la déshumanisation et devient un ennemi. Elle est inéluctable quand s’impose l’idée de son élimination physique et qu’une fraction importante de la population ne souhaite plus vivre avec les autres membres de la nation au sein du même système politique47. Sans l’ombre d’un doute, l’Espagne est confrontée à cette situation en 1936. Néanmoins, pour comprendre les caractéristiques de l’affrontement et la façon dont il évolue au cours des premiers mois, il est nécessaire de considérer que la guerre impose ses propres logiques et que celles-ci ne sont pas obligatoirement la conséquence immédiate des événements survenus dans les mois qui précèdent le déclenchement des hostilités. « Entrer en guerre, c’est en réalité pénétrer dans un autre univers où les conduites humaines se métamorphosent. […] Le propre de la guerre est de pousser à l’incandescence l’imaginaire de la peur : c’est “eux” ou “nous”. Au nom de ce dilemme de sécurité, tout devient justifiable. La guerre est ainsi un formidable levier des inhibitions et interdits »48. En outre, un affrontement armé « bouleverse le rapport aux autres mais aussi celui à l’espace et au temps. L’espace est synonyme d’insécurité (lieux à ne plus fréquenter) ou de refuge (se mettre à l’abri). Le temps devient celui de l’incertitude : on ne sait plus vraiment de quoi sera fait le lendemain »49. On comprend mieux dès lors pourquoi l’instabilité politique et sociale qui règne en 1936 ne peut expliquer à elle seule les formes, les fonctions et la portée de la violence qui embrasent le pays dans les heures qui suivent le pronunciamiento50. La guerre d’Espagne provoque une mutation de la société à grande échelle, qui modifie radicalement les comportements, les stratégies et les besoins des individus et des groupes. A l’instar d’autres guerres fratricides, elle alimente « une structure paranoïaque. […] il faut se méfier de tout le monde, chacun vit dans un état d’insécurité constante, de vigilance perpétuellement éveillée ». L’affrontement exacerbe une « logique d’anticipation présente au cœur de tout combat. […] Tout le monde […] est un ennemi potentiel de tous ». Il devient ainsi beaucoup plus aisé d’éliminer ou de mettre hors d’état de nuire celui que l’on perçoit comme un adversaire, en particulier lorsqu’aux justifications d’ordre idéologique, politique, social et économiques se greffent des raisons personnelles51. La proximité spatiale, sociale, culturelle voire familiale induit parfois des formes de brutalité peu fréquentes dans d’autres contextes, car il « n’y a rien comme une ancienne familiarité pour donner à la haine sa profondeur »52. C’est la raison pour laquelle à Salamanque, notamment dans le Alto Águeda, on observe des actes de violence importants (plusieurs dizaines d’exécutions sommaires)53 dans de petites communautés (El Bodón, Fuenteguinaldo, Robleda), où les liens entre les habitants sont particulièrement étroits et où se manifestent de dérisoires actes de résistance au coup d’Etat (une charrette en travers de la voie pour couper la route aux forces rebelles, par exemple), sans aucune commune mesure avec la brutalité de la répression54.

  • 55 Cf. Kalyvas, Stathis, « The Ontology of “Political Violence” : Action and Identity in Civil Wars », (...)
  • 56 Ledesma, José Luis, « Franco y las violencias de la Guerra Civil… », op. cit., p. 163.
  • 57 Kalyvas, Stathis N., « Aspects méthodologiques de la recherche sur les massacres : le cas de la gue (...)

13Pour saisir cette violence dans toute sa complexité et dépasser une vision stéréotypée de l’affrontement, celui-ci doit être envisagé sous un angle différent, en rupture avec les approches traditionnelles. Il faut, en particulier, rompre avec cette globalité qu’institue l’expression « guerre civile espagnole » et s’inscrire dans la pluralité, en partant du principe que nous ne sommes pas confrontés à un, mais à une multiplicité de conflits. Le 18 juillet 1936 convergent de nombreux autres conflits, où s’enchevêtrent des questions multiples, à dimension locale, nationale et internationale, aux origines sociales, économiques, politiques et culturelles, sans qu’aucune de ces dimensions, dans certains cas, ne priment sur les autres. A cela s’ajoute le fait que la guerre génère des situations où les intérêts individuels et collectifs interfèrent, s’agrègent voire s’opposent. Et ceci, n’est pas propre à la guerre d’Espagne. Aucune guerre civile ne peut se réduire à un affrontement de type idéologique. De nombreux conflits locaux, voire privés viennent s’y greffer, « les guerres civiles sont des agrégations imparfaites et fluides de multiples guerres civiles localisées, plus petites, diverses, se chevauchant plus ou moins »55. Dans le cas espagnol, cela est d’autant plus vrai que le pronunciamiento provoque un effondrement de l’Etat et la disparition ou la réduction de sa capacité à canaliser et à administrer la coercition légitime. Dès lors, ce qui avait été le monopole des institutions et le propre des groupes politiques les plus radicaux devient accessible à tout un chacun, qui en use ou pas en fonction d’un nombre considérable de facteurs56. Parallèlement, les formes de violence se multiplient, au point que les assassinats et les massacres, l’une des déclinaisons les plus spectaculaires du phénomène, ne représentent qu’une faible part de la façon dont s’exprime la brutalité d’une société en guerre. « L’acte de tuer n’est que la pointe de l’iceberg. Alors que peu de personnes perpètrent le meurtre en tant que tel, beaucoup plus y sont impliquées, des civils la plupart du temps »57, qui délèguent l’assassinat en se livrant à la délation. La guerre – notamment la situation que traverse l’Espagne en 1936 – est propice au développement d’une culture de la suspicion et de la dénonciation, car parallèlement à l’effondrement des règles sociales collectives se produit un accroissement de la valorisation des pratiques individuelles. Dans un contexte de désorganisation sociale et institutionnelle, marqué par la violence, émergent des comportements et des stratégies qui remplacent, ou visent à épauler, des pratiques de régulation collectives, incarnées traditionnellement par des organismes chargés de faire respecter l’ordre institué (police, garde civile, etc.). En tant que mécanisme qui contribue à la surveillance des pratiques sociales, la délation prend alors tout son sens et tend à se développer, d’autant que la brutale dégradation de la situation et les pratiques des pouvoirs émergeants accroissent les lectures binaires de la société et de ses composantes. Elles renforcent aussi la conviction que le particulier prime sur le collectif, que la guerre est la conséquence de multiples déviances, transgressions et dysfonctionnements, qui menacent des intérêts (personnels ou/et communautaires, locaux ou/et nationaux), un type d’organisation sociale (ancien ou récent) que le délateur juge légitimes. En ce sens, la délation est un phénomène aux origines diverses, représentatif de la dimension protéiforme de la guerre d’Espagne.

14Ceci étant, la dénonciation n’est pas un phénomène nouveau qui surgit avec l’affrontement armé. Il s’agit d’une pratique traditionnelle, que les autorités et la police espagnoles utilisent pour améliorer leur action ainsi que la connaissance des mutations qui s’opèrent au sein du corps social. La délation permet de lutter tant contre la délinquance que contre les activités de groupes politiques que le pouvoir considère comme dangereux. Cette utilisation de la délation se vérifie quel que soit le type de régime en place et ce, jusqu’à la guerre. A partir du 18 juillet 1936, il se produit néanmoins plusieurs changements importants.

  • 58 Prado Herrera, María Luz de, « Patria y dinero. La contribución salmantina a la financiación de la (...)
  • 59 Hernández Burgos, Claudio, Franquismo a ras de suelo. Zonas grises, apoyos sociales y actitudes dur (...)
  • 60 Ibid., p. 128.
  • 61 Ibid., p. 127.

15Premièrement, ce phénomène relativement marginal en temps de paix devient massif58 et ce, pour une raison évidente : la dénonciation constitue un signe d’appartenance politique, la preuve que l’on soutient les rebelles59. Lorsque l’on essaie de déterminer les raisons qui incitent à dénoncer, il est indispensable de mesurer les avantages et désavantages qu’un individu tire de cet acte, notamment par rapport à son milieu et aux valeurs qui structurent sa perception de la réalité. Dans le cas qui nous occupe, nul doute que la peur a conduit un certain nombre de personnes à dénoncer leurs voisins afin d’échapper à la répression. Ceci dit, la dénonciation constitue également un acte d’allégeance à l’égard des groupes qui, certes, ont le monopole de la violence et contrôlent le pouvoir, mais aussi avec lesquels une grande partie des délateurs partage une certaine vision de la société locale et nationale. Cette catégorie de dénonciateurs, au même titre que tous ceux qui sont impliquées dans les assassinats, signe donc un « pacte du sang » avec les militaires qui renforce la cohésion sociale et politique du camp rebelle60. En outre, nombre de dénonciateurs sont convaincus que, le moment venu, leur acte leur rapportera certains dividendes ou des formes de reconnaissance de la part du pouvoir en place61. De ce point de vue, le franquisme a su parfaitement récompenser ses fidèles collaborateurs.

  • 62 Sur cette question, voir Mir. Conxita, Vivir es sobrevivir. Justicia, orden y marginación en la Cat (...)
  • 63 Voir en annexe le document n° 2. Archivo Municipal de Ciudad Rodrigo, Exp. 383, Leg. 4.

16Deuxièmement, nous assistons à une institutionnalisation de la délation. Les principales autorités locales (notamment les maires et les curés de paroisse62) doivent fournir aux tribunaux militaires et à des organismes tels que le gobierno civil (préfecture) des rapports sur le passé politique, les activités et le comportement non seulement des personnes emprisonnées ou soupçonnées d’être opposées aux forces rebelles, mais aussi de toute personne souhaitant, par exemple, ouvrir un bar ou entrer dans la fonction publique63. Ces rapports sont largement utilisés pendant les conseils de guerre et lors de la mise en application de la loi sur les responsabilités politiques de février 1939, loi rétroactive qui sanctionne toutes les activités jugées contraires au movimiento depuis 1934.

17Troisièmement, avec la guerre, on assiste à l’implosion du traditionnel stéréotype du mouchard ou du « corbeau ». La dénonciation se généralise et touche toutes les strates de la société. Elle se répand dans l’espace, qu’il soit urbain ou rural, car les nouvelles autorités et leurs appuis sociaux l’encouragent sous de multiples formes.

18Quatrièmement, la délation traditionnelle réalisée au moyen d’une lettre anonyme se perpétue. Mais rapidement se multiplient les dénonciations orales auprès des forces de l’ordre, des autorités locales et des membres des organisations luttant aux côtés des rebelles. Elles sont certes révélatrices d’un processus de massification, mais aussi de la participation à la délation des couches sociales les plus défavorisées, incapables de rédiger une lettre anonyme en raison de l’analphabétisme dont elles souffrent. Se constitue de la sorte un maillage du territoire fondé sur une multiplication exponentielle des points d’émission et de réception de la délation. Dès lors, à mesure que se consolide le pouvoir des rebelles, il devient de plus en plus difficile d’avoir un comportement considéré comme déviant, même si le système franquiste de contrôle des pratiques sociales n’est pas infaillible. La dissidence continue d’exister dans des provinces comme Salamanque, mais elle évolue et devient moins perceptible dans l’espace public. A l’instar de toute personne vivant dans un régime autoritaire où la délation est un élément constitutif du système, les salmantinos accordent leurs conduites à partir de leur interprétation de l’environnement dans lequel ils évoluent et des menaces qu’ils y perçoivent.

19Les différentes évolutions qui façonnent la pratique de la délation pendant la guerre soulignent donc à quel point elle devient une pièce essentielle à l’implantation de la société franquiste à Salamanque et dans le reste de l’Espagne. Grâce au caractère massif qu’acquiert la dénonciation, le processus de construction des bases sociales de la dictature se consolide et s’amplifie. En incitant à la délation, le franquisme resserre ses liens avec la société, notamment avec ses appuis de la première heure, lesquels participent, avec beaucoup d’autres Espagnols, à la mise en place d’un système qui permet au régime d’atteindre et de mieux encadrer l’individu dans l’espace public et privé.

  • 64 Cf. Iglesias Ovejero, Angel, « Ensayo de cronología del alzamiento militar… », op. cit., p. 212.
  • 65 López García, Santiago et Delgado Cruz, Severiano, op. cit., p. 125.
  • 66 Voir sur ce point les observations réalisées par : González Calleja, Eduardo, « Brutalización de la (...)
  • 67 Archivo Provincial de Salamanca, section Gobierno civil de Salamanca, Leg. 76, Exp. 4 ; Leg. 172, E (...)
  • 68 28 % des rapports ne fournissent aucun détail sur l’identité et parfois sur le nombre des délateurs (...)
  • 69 Médecins, avocats, juges…
  • 70 Dans 24 % des cas, la profession du délateur n’est pas signalée.
  • 71 Pourcentages établis à partir de : Archivo Provincial de Salamanca, section Gobierno civil de Salam (...)
  • 72 Dans 42 % des cas, la profession de la personne dénoncée n’est pas signalée.

20Tout cela devient parfaitement perceptible au fur et à mesure que la guerre se prolonge. Au cours des premiers jours du coup d’Etat, les arrestations et assassinats s’effectuent, en général, grâce à des listes recensant les personnes devant être éliminées. Elles sont confectionnées par des individus proches des rebelles, connaissant parfaitement les activités et les idées politiques des victimes. Les voisins, un employé municipal, une autorité, un notable local ou, parfois, le curé de la paroisse64 se retrouvent de la sorte au cœur d’un processus de maintien ou de refondation des rapports de pouvoir sur le plan local, processus qui débute fréquemment par un bain de sang65. Cette première étape, qui se déroule parallèlement à la création de ce nouveau territoire que constitue l’arrière, correspond à une phase de contrôle et d’épuration du corps social. Secondés par une partie importante de la population civile, les rebelles et leurs alliés mènent une campagne violente de « pacification » afin de consolider leur emprise sur la province et se consacrer de la sorte à d’autres objectifs, tels que la prise de Madrid66. Avec le revers cuisant que subissent les nacionales aux portes de la capitale et la transformation du conflit en guerre de longue durée (fin 1936, début 1937), la délation s’inscrit dans une stratégie de stabilisation et de consolidation du pouvoir. C’est à ce moment-là que l’institutionnalisation de la dénonciation prend toute son ampleur et que la délation orale devient une pratique extrêmement courante, qui concerne l’ensemble de la société. Sur ce point, les procès-verbaux qu’élaborent les forces de l’ordre lorsque leur intervention s’effectue sur la base d’une dénonciation apportent de précieuses informations67. L’analyse d’un corpus composé de cent rapports rédigés par la police et la garde civile entre 1936 et 1938 montre que les dénonciateurs dont l’identité et le nombre sont signalés (116)68 forment un groupe constitué majoritairement d’hommes (88 %), les femmes ne représentant que 12 % des cas. Les délateurs ont entre 18 et 66 ans et leur profil socioprofessionnel est extrêmement varié. Ce sont des policiers et des membres des forces paramilitaires (22,5 %), des autorités municipales (12,5 %), des femmes au foyer (11,5 %), des paysans sans terre (8,5 %), de petits propriétaires terriens (4,5 %), des ouvriers (4,5 %), des fonctionnaires (4,5 %), des commerçants (2,5 %), des employés municipaux (2 %) des chefs d’entreprises (1,5 %), des personnes exerçant une profession libérale69 (1,5 %)70. Il s’agit, en définitive, de profils en adéquation avec ceux des personnes qui secondent les militaires rebelles lorsque se produit le coup d’Etat, constat que corrobore le fait qu’une grande parte d’entre eux appartient aux milices qui quadrillent le territoire ou ont été nommés à la tête d’une municipalité par les militaires ou leurs appuis locaux. Le profil des individus qui assassinent et incarcèrent recoupe donc celui des délateurs, soulignant de la sorte à quel point ces pratiques sont étroitement liées et constituent un ensemble cohérent, où délateurs et assassins partagent dans certains cas une seule et même identité. Les personnes dénoncées (225)71 sont des paysans sans terre (18,5 %), des femmes au foyer (14,5 %), des ouvriers (5,5 %), de petits propriétaires terriens (4 %), des commerçants (3 %), des élus et employés municipaux (3 %), des enseignants (2,5 %), des employés des postes et des télécommunications (2 %), des policiers, des militaires, et des membres des forces paramilitaires (1,5 %), des personnes exerçant une profession libérale (1,5 %), des artisans (1 %), des représentants de commerce (0,5 %), des prostituées (0,5 %)72. La répartition par sexe fait apparaître une majorité d’hommes (83,5 %) et une minorité de femmes (16,5 %). Les paysans sans terre sont par conséquent les principales victimes de la délation, ce qui confirme l’idée selon laquelle les militaires et leurs alliés les considèrent comme faisant partie des principaux adversaires sur le plan social et politique. Quant aux femmes au foyer, même si les femmes sont minoritaires dans les deux groupes, leur forte présence parmi les victimes et les dénonciateurs témoigne sans doute du lien étroit existant entre les dénonciations et les conflits de voisinage, voire familiaux. De ce point de vue, le document en annexe numéro trois est édifiant. Il présente le cas d’une femme qui n’hésite pas à dénoncer sa belle-sœur pour des propos contraires au movimiento. En définitive, les divers profils des victimes montrent que la dénonciation s’est généralisée et menace l’ensemble de la société, un constat qui illustre la nature du système franquiste et les tensions extrêmes qui traversent le corps social au cours de la guerre.

  • 73 Iglesias Ovejero, Angel, « Ensayo de cronología del alzamiento militar… », op. cit., pp. 186/210.
  • 74 Terme emprunté à Iglesias Ovejero, Angel, « Ensayo de cronología del alzamiento militar… », op. cit (...)
  • 75 Archivo Provincial de Salamanca, section Gobierno civil de Salamanca, Leg. 162, Exp. 2.
  • 76 Cf. Voir les exemples cités dans, Iglesias Ovejero, Angel, « La represión militar legalizada a part (...)

21En ce qui concerne les délits dont sont accusées les victimes, il s’agit en général de propos et d’actes considérés comme subversifs ou témoignant d’une opposition manifeste à la cause des militaires insurgés. Il existe néanmoins quelques cas de personnes dénoncées en 1937 pour avoir participé à des actions destinées à faire échouer le coup d’Etat militaire en juillet 1937 (voir le document en annexe n° 6). Ces exemples soulignent les failles de la répression et remettent en question la vision selon laquelle la violence qui se déchaine au cours de l’été 1936 fait disparaître ou neutralise l’ensemble des personnes opposées au levantamiento. Non seulement ce n’est pas le cas, mais qui plus est un certain nombre d’entre elles continuent de vivre en toute liberté pendant de longs mois. Une partie des dénommés républicains adoptent d’ailleurs des stratégies de survie multiples, telles que la fuite, la dissimulation, l’enrôlement dans l’armée rebelle (voir le document en annexe n° 6) ou, dans les cas les plus extrêmes, la participation aux exactions commises par les groupes de phalangistes73. A travers les procès-verbaux des forces de l’ordre et la figure des chaqueteros (opportunistes)74 apparait toute la complexité et la diversité des situations auxquelles sont confrontés les salmantinos au cours du conflit. Les données, en outre, indiquent que les victimes et les délateurs sont dans un rapport de proximité. Ils sont voisins ou vivent dans la même localité, travaillent ensemble et fréquentent les mêmes lieux (bars, commerces, marchand de journaux…). Cette proximité est essentielle à la délation. Le délateur dénonce, en général, les personnes avec lesquelles il entretient des liens divers et multiples, familiaux, communautaires, professionnels, spatiaux, etc. comme en témoignent les analogies existant entre les profils des délateurs et ceux des personnes dénoncées. C’est la raison pour laquelle l’impact de cette pratique est particulièrement important dans les petites localités où la dénonciation, certes, se nourrit de la promiscuité entre les personnes, mais accroît également les tensions et désagrège le lien social ainsi que les solidarités traditionnelles. Les conséquences de la délation sont d’autant plus importantes qu’elle entraine à maintes reprises d’autres dénonciations, issus de personnes qui connaissent la victime et qui font l’objet d’interrogatoires. L’intervention systématique des forces de l’ordre s’accompagne de pressions, d’actes d’intimidation voire de tortures qui délient rapidement les langues. En ce sens, la mémoire des violences est déterminante. Quant aux conséquences de la dénonciation, elles sont dramatiques. Elle se termine en général par l’incarcération de la victime, ce qui ne laisse rien présager de bon pour l’ensemble de la famille. La perte d’un mari prive de nombreux foyers de la principale source de revenus, situation qui entraine l’éclatement de la cellule familiale et la misère pour tous ses membres, comme le montrent les lettres qu’adressent certaines épouses au gouverneur civil de Salamanque afin d’obtenir la liberté de leur conjoint (voir document en annexe n° 7). Enfin, en devenant une pratique consubstantielle au régime franquiste, la dénonciation ne touche pas seulement les personnes opposées aux militaires rebelles ou des individus sans aucune appartenance politique. A partir de 1937, les représentants du nouveau pouvoir commencent également à faire l’objet d’enquêtes où la délation joue un rôle capital. En octobre 1937, par exemple, le maire et le chef de la phalange de Carbajosa de la Sagrada entrent en conflit et adressent divers courriers au gouverneur civil, où ils s’accusent mutuellement de porter préjudice au parti en raison de leurs activités et de leurs comportements75. Ce type d’affrontement devient récurrent sur l’ensemble du territoire et met parfois en lumière la corruption qui gangrène l’édifice franquiste dès ses origines76. La délation se retourne donc contre ceux qui l’ont promue et encouragée, à tel point que le chef de la phalange de la province de Salamanque estime, en décembre 1939, qu’elle constitue une sérieuse menace pour le parti.

il faut éradiquer ce fléau qui prospère avec exubérance lorsque se produisent des troubles ou des mutations politiques. Nous voulons parler de la dénonciation qui a toujours un fond passionnel et qui n’obéit jamais, ou rarement, à un authentique sens du devoir civique. Les bénéfices que retire l’Etat de la délation sont négligeables, notamment à l’aune des dégâts qu’elle provoque sur le plan social, avec des familles voire des villages entiers qui vivent dans une rancœur perpétuelle et des désirs insatiables de vengeance : les dénonciateurs d’aujourd’hui sont les dénoncés de demain et l’Etat ne peut ni ne doit défendre ni alimenter ces luttes fratricides.

C’est pourquoi nous estimons qu’il est indispensable de mettre en place un système qui punisse le délateur, système qui consisterait à lui infliger la même peine que celle qu’aurait méritée la victime pour le délit imputé, si celui-ci s’avérait infondé ou donnait lieu à un acquittement.

  • 77 Archivo General de la Administración, Secretaría General de FET de las JONS, Delegación nacional de (...)

La liberté dont jouit la délation peut également être fatale pour la Phalange, car ses ennemis, en se consacrant en toute impunité au jeu facile et sans danger de la dénonciation, peuvent aisément désigner certains camarades comme ennemis du régime afin de les supplanter ou tout simplement […] pour remettre en question le prestige de la Phalange.77

22Pourtant, les recommandations de ce dirigeant local de la phalange n’aboutissent pas. La délation demeure un élément fondamental de la société franquiste jusqu’à la mort du dictateur et ce, pour une raison essentielle : le régime nait d’une multiplicité de guerres civiles, soit de l’enchevêtrement de nombreux affrontements locaux et nationaux qui ont non seulement fait imploser les liens entre les proches, mais aussi altéré durablement l’ensemble du tissu social. En éliminant et en marginalisant les opposants, le régime a certes généré de nombreuses ruptures, mais aussi un système dont a su tirer profit, contrairement aux idées reçues, une partie importante de la population espagnole, au sein de laquelle on dénombre de nombreux délateurs.

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Annexe

Document n° 1, Archivo Provincial de Salamanca, section Gobierno civil de Salamanca, Leg. 232, Exp. 2.

Document n° 1, Archivo Provincial de Salamanca, section Gobierno civil de Salamanca, Leg. 232, Exp. 2.

Document n° 2, Archivo Municipal de Ciudad Rodrigo, Exp. 383, Leg. 4.

Document n° 2, Archivo Municipal de Ciudad Rodrigo, Exp. 383, Leg. 4.

Document n° 3, Archivo Provincial de Salamanca, section Gobierno civil de Salamanca, Leg. 201, Exp. 1.

Document n° 3, Archivo Provincial de Salamanca, section Gobierno civil de Salamanca, Leg. 201, Exp. 1.

Document n° 4, Archivo Provincial de Salamanca, section Gobierno civil de Salamanca, Leg. 201, Exp. 1.

Document n° 4, Archivo Provincial de Salamanca, section Gobierno civil de Salamanca, Leg. 201, Exp. 1.

Document n° 5, Archivo Provincial de Salamanca, section Gobierno civil de Salamanca, Leg. 201, Exp. 1.

Document n° 5, Archivo Provincial de Salamanca, section Gobierno civil de Salamanca, Leg. 201, Exp. 1.

Document n° 6, Archivo Provincial de Salamanca, section Gobierno civil de Salamanca, Leg. 76, Exp. 4.

Document n° 6, Archivo Provincial de Salamanca, section Gobierno civil de Salamanca, Leg. 76, Exp. 4.

Document n° 7, Archivo Provincial de Salamanca, section Gobierno civil de Salamanca, Leg. 201, Exp. 2.

Document n° 7, Archivo Provincial de Salamanca, section Gobierno civil de Salamanca, Leg. 201, Exp. 2.

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Notes

1 Arendt, Hannah, Eichmann in Jerusalem: A Report on the Banality of Evil, New York, Viking Press, 1963.

2 Klein, Claude, Le cas Eichmann. Vu de Jérusalem, Paris, Gallimard, « La Suite des temps », 2012.

3 Arendt, Hannah, Eichmann à Jérusalem. Rapport sur la banalité du mal, Paris, Gallimard, Folio Histoire, 1991, pp. 49 ; 58 ; 60-61 ; 93-94 ; 251.

4 Dans cette étude nous employons indistinctement les termes de délation et de dénonciation. Comme le montre l’ouvrage que dirige Laurent Joly, La délation dans la France des années noires, la dénonciation et la délation sont deux termes dont la « distinction […est…] éminemment subjective [...et…] peu pertinente ». « Tout pouvoir déclare rejeter avec horreur la délation, anonyme et abjecte, et ne retenir que la “bonne dénonciation”, civique et franche ». Joly, Laurent (Dir.), La délation dans la France des années noires, Paris, Perrin, 2012, p. 17.

5 Cf. Preston, Paul, El holocausto español. Odio y exterminio en la Guerra Civil y después, Barcelona, Debolsillo, 2012, (2011), pp. 194-195. Barrera Arzac, Fernando, « Misión urgente de la sección del SIMP de Ejército para la necesaria ejemplaridad de las sanciones a los cautivos del campo de concentración de Zaldívar », Todos (…) los nombres, http://www.todoslosnombres.org/content/materiales/mision-urgente-la-seccion-del-simp-ejercito-para-la-necesaria-ejemplaridad-las, pp. 3-4.

6 González Calleja, Eduardo, « Brutalización de la política y banalización de la violencia en la España de entreguerras » Crisis, dictaduras, democracia : I Congreso Internacional de Historia de Nuestro Tiempo, Navajas Zubeldia, Carlos et Iturriaga Barco, Diego (coord.), Logroño, Universidad de La Rioja, 2008, p. 36.

7 Cf. Balfour, Sebastián, Abrazo mortal. De la guerra colonial a la Guerra Civil en España y Marruecos (1909-1939), Barcelona, Península, 2002.

8 Ibid. Voir également, Sevillano Calero, Francisco, Exterminio. El terror con Franco, Madrid, Oberon, 2004.

9 Ledesma, José Luis, « Qué violencia para qué retaguardia o la República en guerra de 1936 », Retaguardia y cultura de guerra, 1936-1939, Rodrigo, Javier (dir.), Ayer, n° 76, 2009, p. 99.

10 Ledesma, José Luis, « Las fuentes locales de la violencia : conflictividad rural, fractura social y contrapoderes en la retaguardia republicana de Zaragoza durante la guerra civil », Nuevas tendencias historiográficas e historia local en España : actas del II Congreso de Historia Local de Aragón (Huesca, 7 al 9 de julio de 1999), Miguel Ruiz Carnicer, Angel et Frías Corredor, Carmen (Dirs.), Zaragoza,Instituto de Estudios Altoaragoneses, 2001,pp. 261-262.

11 Ledesma, José Luis, « Qué violencia para qué… », p. 99.

12 Cf. Gil Andrés, Carlos, Lejos del frente. La Guerra Civil en la Rioja Alta, Barcelona, Crítica, 2006 ; « La zona gris de la España azul », Retaguardia y cultura de guerra, 1936-1939, Rodrigo, Javier (dir.), Ayer, n° 76, 2009, p. 117.

13 López García, Santiago et Delgado Cruz, Severiano, « Que no se olvide el castigo : la represión en Salamanca durante la guerra civil », Esta salvaje pesadilla : Salamanca en la Guerra Civil española, Robledo, Ricardo (ed.), Barcelona, Crítica, 2007, pp. 125-126.

14 Ibid.

15 « Promenade » qui se termine par l’exécution du prisonnier. Cette pratique concerne les deux camps.

16 Sortie, transfert de prisonniers que l’on exécute par la suite. Cette pratique concerne les deux camps.

17 Cf. Iglesias Ovejero, Angel, La represión franquista en el sudoeste de Salamanca (1936-1948), Ciudad Rodrigo, Centro de Estudios Mirobrigenses, 2016.

18 López García, Santiago et Delgado Cruz, Severiano, op. cit., pp. 140-141.

19  Infante Miguel-Motta, Javier, « Por el Imperio hacia Dios bajo el mando del Caudillo : Profesores de la Facultad de Derecho de Salamanca durante el primer franquismo ». De Dios, Salustiano et Eugenia Torijano Pérez (Dirs.), Cultura, política y práctica del Derecho. Juristas de Salamanca, siglos XV-XX, Salamanca, Ediciones Universidad de Salamanca, 2012, p. 475 ; Voir aussi le site de l’Asociación Salamanca Memoria Justicia http://salamancamemoriayjusticia.org/

20 López García, Santiago et Delgado Cruz, Severiano, op. cit., pp. 140-141.

21 Cf. Archivo Provincial de Salamanca, section Gobierno civil de Salamanca, Leg. 232, Exp. 2.

22 Ibid. Voir en annexe le document n° 1.

23 Ce processus ne doit pas masquer le fait que l’on organise des conseils de guerre dès le début du conflit. L’année 1936 est une période au cours de laquelle coexistent de multiples formes de violence.

24 Moreno Gómez, Francisco, « La gran acción represiva de Franco que se quiere ocultar », SIN RESPETO POR LA HISTORIA Una biografía de Franco manipuladora, Viñas, Angel (Dir.), HISPANIA NOVA, Número extraordinario, año 2015. http://e-revistas.uc3m.es/index.php/HISPNOV/article/view/2872 Il ne s’agit là que d’une partie des nombreuses modalités qu’a revêtue la violence des rebelles et de leurs alliés contre la population considérée comme proche des républicains. Nous n’avons pas abordé des questions comme les camps et les prisons, la dépuration, l’exclusion sociale et professionnelle, la répression économique, le vol et la disparition d’enfants, etc.

25 Ledesma, José Luis, « Franco y las violencias de la Guerra Civil. Manual de uso para unretrato blando de la represión franquista », SIN RESPETO POR LA HISTORIA Una biografía de Franco manipuladora, Viñas, Angel (Dir.), HISPANIA NOVA, Número extraordinario, año 2015, p. 163. http://e-revistas.uc3m.es/index.php/HISPNOV/article/view/2871.

26 González Calleja, Eduardo, « La violencia política y la crisis de la democracia republicana (1931-1936) », Hispania Nova, n° 1, 1998‑2000, p. 4. http://hispanianova.rediris.es/general/articulo/003/art003.htm

27 González Calleja, Eduardo et Souto Kustrín, Sandra, « De la dictadura a la República : orígenes y auge de los movimientos juveniles en España », Hispania, n° 225, enero-abril 2007.

28 González Calleja, Eduardo, « Brutalización de la política y banalización de la violencia…”, op. cit., pp. 36-37.

29 Moradiellos García, Enrique, « La evitable guerra civil española de 1936 », Cuadernos republicanos, n° 62, 2006, p. 16.

30 Gros, Frédérica, Etats de violence. Essai sur la fin de la guerre, Paris, Gallimard, 2006, p. 103.

31 González Calleja, Eduardo, « La violencia política y la crisis de la democracia… », p. 5.

32 Voir, par exemple au Pays basque, La Gaceta del Norte, 15 août 1931.

33 Voir, par exemple : Maeztu, Ramiro de, « La moral del ejército », El Pueblo Vasco, 19 avril 1934, p. 1 ; « Sir Norman Angell », El Pueblo Vasco, 13 décembre 1934, p. 1.

34 Cf. Rojo Hernández, Severiano et Eiroa, Matilde (Dir.), « La prensa y el levantamiento militar del 18 de julio de 1936 », El Argonauta Español, n° 13, livraison de juin, 2016. http://argonauta.imageson.org/

35 Cf. Rojo Hernández, Severiano, « Mito nacional e instrumentalización : el dos de mayo en la prensa madrileña de la Segunda República (1931-1939) », Las elites y la “revolución de España”(1808-1814), Elisabel Larriba, Armando Alberola (dir.), Madrid, Universidad de Alicante, 2010, pp. 365-389.

36 González Calleja, Eduardo, « La prensa carlista y falangista durante la Segunda República y la Guerra Civil (1931-1937) », El Argonauta Español, n° 9, livraison de janvier, 2012. https://argonauta.revues.org/819 ?lang =fr

37 González Calleja, Eduardo, « Brutalización de la política y banalización de la violencia…”, op. cit., pp. 30-33 et « Experiencia en combate. Continuidad y cambios en la violencia represiva (1931-1939) », Retaguardia y cultura de guerra, 1936-1939, Rodrigo, Javier (dir.), Ayer, n° 76, 2009, p. 45.

38 Cf. Mosse, George L., De la Grande Guerre au totalitarisme. La brutalisation des sociétés européennes, (1990), Paris, Hachette, 1999.

39 Cruz, Rafael, En el nombre del pueblo : República, rebelión y guerra en la España de 1936, Madrid, Siglo XXI, 2006, p. 191.

40 Cf. González Calleja, Eduardo et Souto Kustrín, Sandra, op. cit.

41 Cf. Yguartua y Landecho, Francisco, « Grito a la juventud española », El Pueblo Vasco, 15 février 1936, p. 1.

« En esta hora de sombras, seamos rayo de luz ; en esta hora de odios seamos la paz, aunque la llevemos, como Juana de Arco, en la punta de la espada. Seamos daga ignaciana, que entremos como bisturí certero en el cáncer marxista y en la podredumbre separatista ; seamos el peso necesario para que la balanza de la vida de España se incline a la resurrección y no a la muerte, en esta hora suprema, juventud de España, en que España se juega su existencia con una baraja falsificada. »

42 Cruz, Rafael, op. cit., p. 197.

43 Cf. González Calleja, Eduardo, « The Symbolism of Violence During the Second Republic », The Splintering of Spain. Cultural History and the Spanish Civil War 1936-1939, Richards, Michael et Ealham, Chris (coord.), Cambridge, Cambridge University Press, 2005.

44 Cf. Ledesma, José Luis, « Qué violencia para qué retaguardia … », op. cit., p. 101.

45 Núñez Seixas, Xosé Manoel, ¡Fuera el invasor ! Nacionalismos y movilización bélica durante la Guerra Civil española (1936-1939), Madrid, Marcial Pons, Historia, 2006.

46 A Salamanque, 15 % de la superficie agricole de la province, soit 180 000 hectares, étaient entre les mains d’une centaine de propriétaires, notamment dans le sud-ouest de la province (campo charro). Robledo, Ricardo et Espinoza Luis Enrique, « “¡El campo en pie !” Política y reforma agraria », Esta salvaje pesadilla : Salamanca en la Guerra Civil española, Robledo, Ricardo (ed.), Barcelona, Crítica, 2007, p. 5.

47 Reig Tapia, Alberto, Memoria de la Guerra Civil. Los mitos de la tribu, Madrid, Alianza Editorial, 1999, p. 91.

48 Sémelin, Jacques, Purifier et détruire. Usages politiques des massacres et génocides, Paris, Editions du Seuil, 2005, p. 178.

49 Ibid., pp. 177-178.

50 Ledesma, José Luis, “Franco y las violencias de la Guerra Civil… », op. cit., p. 163.

51 Gros, Frédérica, op. cit., p. 100-101.

52 Gros, Frédérica, op. cit., p. 100.

53 Iglesias Ovejero, Angel, « Ensayo de cronología del alzamiento militar, terror y represión de 1936 a 1946 en el Alto Águeda y otras localidades de la tierra de Ciudad Rodrigo », Cahiers du P.R.O.H.E.M.I.O., XI, 2010, pp. 218-221.

54 Ibid., p. 183.

55 Cf. Kalyvas, Stathis, « The Ontology of “Political Violence” : Action and Identity in Civil Wars », Perspectives on Politics, vol. 1, n° 3, sept 2003, p. 479.

56 Ledesma, José Luis, « Franco y las violencias de la Guerra Civil… », op. cit., p. 163.

57 Kalyvas, Stathis N., « Aspects méthodologiques de la recherche sur les massacres : le cas de la guerre civile grecque », Revue internationale de politique comparée, 2001/1, vol. 8, p. 35.

58 Prado Herrera, María Luz de, « Patria y dinero. La contribución salmantina a la financiación de la guerra civil española : suscripciones e impuestos especiales », Esta salvaje pesadilla : Salamanca en la Guerra Civil española, Robledo, Ricardo (ed.), Barcelona, Crítica, 2007, p. 209.

59 Hernández Burgos, Claudio, Franquismo a ras de suelo. Zonas grises, apoyos sociales y actitudes durante la dictadura (1936-1976), Granada, EUG, 2013, p. 125.

60 Ibid., p. 128.

61 Ibid., p. 127.

62 Sur cette question, voir Mir. Conxita, Vivir es sobrevivir. Justicia, orden y marginación en la Cataluña rural de posguerra, Lleida, Editorial Milenio, 2000.

63 Voir en annexe le document n° 2. Archivo Municipal de Ciudad Rodrigo, Exp. 383, Leg. 4.

64 Cf. Iglesias Ovejero, Angel, « Ensayo de cronología del alzamiento militar… », op. cit., p. 212.

65 López García, Santiago et Delgado Cruz, Severiano, op. cit., p. 125.

66 Voir sur ce point les observations réalisées par : González Calleja, Eduardo, « Brutalización de la política y banalización de la violencia…”, op. cit., p. 37.

67 Archivo Provincial de Salamanca, section Gobierno civil de Salamanca, Leg. 76, Exp. 4 ; Leg. 172, Exp. 1 ; Leg. 201, Exp. 1, Exp. 2 ; Leg. 5 ; Leg. 225, Exp. 6 ; Leg. 232, Exp. 1, 2.

68 28 % des rapports ne fournissent aucun détail sur l’identité et parfois sur le nombre des délateurs (sur ce dernier point, voir document en annexe n° 6). La présence dans le procès-verbal de formules telles « après avoir pris connaissance de… », « après dénonciation verbale… » indique que l’intervention des forces de police est le résultat d’une délation.

69 Médecins, avocats, juges…

70 Dans 24 % des cas, la profession du délateur n’est pas signalée.

71 Pourcentages établis à partir de : Archivo Provincial de Salamanca, section Gobierno civil de Salamanca, Leg. 76, Exp. 4 ; Leg. 172, Exp. 1 ; Leg. 201, Exp. 1, Exp. 2 ; Leg. 5 ; Leg. 225, Exp. 6 ; Leg. 232, Exp. 1, 2.

72 Dans 42 % des cas, la profession de la personne dénoncée n’est pas signalée.

73 Iglesias Ovejero, Angel, « Ensayo de cronología del alzamiento militar… », op. cit., pp. 186/210.

74 Terme emprunté à Iglesias Ovejero, Angel, « Ensayo de cronología del alzamiento militar… », op. cit., p. 186.

75 Archivo Provincial de Salamanca, section Gobierno civil de Salamanca, Leg. 162, Exp. 2.

76 Cf. Voir les exemples cités dans, Iglesias Ovejero, Angel, « La represión militar legalizada a partir de 1936 : terror e impunidad en el occidente de Salamanca », Cahiers du P.R.O.H.E.M.I.O., nº 12, DVD, Presses Universitaires d’Orléans, 2012, pp. 50-51.

77 Archivo General de la Administración, Secretaría General de FET de las JONS, Delegación nacional de provincias, Estudio sobre responsabilidades políticas, IDD 09, Fondo 17.10, Caja 51/20513.

« debe atajarse de modo radical esa lacra que florece exuberante en todos los trastornos o mutaciones políticas. Nos referimos a la denuncia que siempre tiene un fondo pasional y nunca o casi nunca obedece a un auténtico sentido de deber ciudadano. Son menguados los beneficios que recibe el Estado por medio de la denuncia y se compara con los perjuicios que causa en el orden social, donde familias y aun pueblos enteros viven en perpetuo rencor y ansias inextinguibles de desquite : los denunciantes de hoy son los denunciados de mañana y el Estado no puede ni debe ser amparador o fomentador de estas luchas fatricidas […sic…].

Por esto estimamos como indispensable el establecimiento de un sistema punitivo del denunciante, que puede consistir el considerarlo sujeto a la misma pena que hubiera merecido su víctima por el hecho imputado, si esto fuera falso o se hubiera hecho acreedor a la absolución.

Esta libertad de denuncia puede ser también fatal para la Organización de Falange, pues sus enemigos dedicados al sencillo y cómodo juego de la denuncia por entera impunidad, les es factible el señalar como enemigos del régimen a camaradas que pretenden desplazar o simplemente […] el poner en tela de juicio el propio prestigio de Falange. »

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Pour citer cet article

Référence électronique

Severiano Rojo Hernandez, « De la banalité du mal : délation et franquisme »Amnis [En ligne],  | 2018, mis en ligne le 10 mars 2018, consulté le 29 mars 2024. URL : http://journals.openedition.org/amnis/3354 ; DOI : https://doi.org/10.4000/amnis.3354

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Auteur

Severiano Rojo Hernandez

Aix-Marseille Université, TELEMME, CNRS, France, severiano.rojohernandez@univ-amu.fr

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