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Troisième partie : Vie et mort des chemins de fer secondaires : destins comparés

Les chemins de fer vicinaux de la Haute-Saône de l’extension (1878-1912) au déclin (1918-1938) : un modèle de desserte d’un département en mutation économique

Claude Bouchaud et Jean Finsterwald
p. 211-231

Texte intégral

1Le département de la Haute-Saône doit son nom au cours supérieur de la rivière Saône qui le traverse dans sa totalité. La Saône occupe une large dépression bordée au Nord et au Sud par des plateaux d’altitude moyenne. A l’Est, leur faciès devient plus montagneux puisque la retombée méridionale des Vosges occupe toute cette façade du département qui culmine à plus de 1 200 m au ballon de Servance, tandis que le point le plus bas est, à l’extrême Ouest du département, à 191 m d’altitude où confluent les deux plus importantes rivières, la Saône et l’Ognon. Ce département a donc un relief marqué qui posera bien des problèmes aux constructeurs du réseau secondaire que nous allons traiter, puisqu’il leur faudra concilier un profil convenable à un minimum d’ouvrages d’art.

2Aujourd’hui, le département est essentiellement agricole mais a gardé une forte implantation d’activités industrielles, vestige d’un passé pas si lointain où de nombreuses activités de métallurgie, de mécanique, de fonderie et de textile étaient florissantes, sans oublier l’exploitation des forêts et l’industrie du meuble qui lui est liée. La principale usine actuelle est celle des automobiles Peugeot à Vesoul, desservie par une noria de camions Gefco que l’on rencontre sans cesse sur les routes.

3Pour commencer à conter l’histoire des chemins de fer départementaux de la Haute-Saône, il faut se reporter très loin, dans les années 1880 où le rail des grandes compagnies est déjà présent dans le département puisqu’il en dessert les axes principaux et les villes les plus importantes : Vesoul, Gray, Lure, dès 1856-1858, Luxeuil-les-Bains en 1878. L’arrivée du chemin de fer a eu de fortes incidences sur la vie économique de la région : les fontes de Franche-Comté subissent la concurrence des productions du Nord et de l’Est et les hauts-fourneaux s’éteignent les uns après les autres, les fers au bois ne pouvant rivaliser avec les fers à la houille. Dans le même temps, la plupart des mines haut-saônoises ferment tandis que le vignoble, victime du phylloxera, ne résistera pas davantage à l’arrivée des vins du Midi. Pour résister à ce déclin annoncé, il faut améliorer les transports et désenclaver des vallées industrieuses.

4En résumé, la Haute-Saône de 1880 a encore une vocation industrielle mais est en pleine mutation. Elle est dépourvue de grandes villes : Gray et Vesoul ont moins de 9 000 habitants et 80 % de la population vit à la campagne ; son territoire est parsemé d’une multitude de villages. C’est cette prise de conscience par les autorités haut-saônoises qui va progressivement conduire à l’idée de la nécessité d’un réseau secondaire, économique, capable de desservir la plupart des communes à l’écart des grands axes ferroviaires déjà en service.

5Les premières réalisations correspondent à des besoins très locaux et il est probable que la notion d’un futur réseau de chemin de fer n’était pas envisagée, même si toutes ces lignes « précurseurs » étaient susceptibles d’être réunies, puisque toutes construites à l’écartement métrique. Il est classique de décrire la formation de ce qui allait être un des plus grands réseaux d’intérêt local de France en trois étapes suivant la chronologie des mises en service.

6Rappelons les origines du choix de la voie métrique pour la plupart des chemins de fer d’intérêt local, le mètre étant l’unité de longueur issue de la Révolution. Cet écartement fut adopté en France par la loi du 12 juillet 1865 pour des lignes de faible longueur et au potentiel de trafic également faible, ce qui permettait une installation économique par l’utilisation courante de courbes de 100 m limitant les ouvrages d’art au minimum ; par ailleurs, un matériel moins large et moins puissant paraissait bien adapté au type de trafic attendu. On pouvait ainsi construire à coût peu élevé des affluents desservant des zones que les grandes lignes avaient laissées à l’écart. L’idée de construire des lignes locales économiques semble dater de 1859 quand le préfet du Bas-Rhin, Migneret, imagina en collaboration avec l’ingénieur Coumes une telle réalisation dans son département. L’idée était d’appliquer les possibilités dites « de vicinalité » prévues par une loi de 1836 et permettant l’utilisation des accotements des routes, donc du domaine public, évitant les frais d’expropriation. Des subventions de l’État pouvaient atteindre jusqu’à la moitié des frais d’exécution selon l’article 5 de la loi du 12 juillet 1865. En outre, la loi du 12 juin 1880 précisait que l’État pourrait subventionner les déficits d’exploitation à condition qu’une contribution équivalente soit apportée par le département. On a également laissé au préfet la possibilité de fixer le montant d’une participation financière des communes traversées.

Les premières lignes

7La première voie métrique française est réalisée dès 1865 en Seine-et-Marne pour apporter les pierres extraites de deux carrières de la région de Villeneuve-le-Comte à un port de la rivière Grand-Morin. Cette courte ligne sera prolongée en 1869 jusqu’à Lagny puis en 1902 à Mortcerf ; elle est exploitée tout d’abord par la Société des chemins de fer de Seine-et-Marne puis, à partir de 1896, par la Compagnie des chemins de fer départementaux.

8Comme on l’a dit, le département de la Haute-Saône a été un pionnier pour ce type de chemin de fer puisque, dès 1872, une demande de concession parvient au conseil général au bénéfice de MM. Martin, Burdin et Cornu. M. Martin, architecte à la ville de Paris, connaît bien la région dont il est originaire, MM. Burdin et Cornu appartiennent à la société qui vient de mettre en service, en Seine-et-Marne, la ligne de Villeneuve-le-Comte. C’est donc à l’est de la sous-préfecture de Gray que naît le projet d’une première ligne, celle de Gray à Gy et Bucy-lès-Gy. Le besoin de transport de matériaux des carrières de Gy était très important, la canalisation de la Saône puis la construction du canal de l’Est nécessitant d’énormes quantités de pierres. Par ailleurs, leurs carrières fournissaient de belles pierres analogues au « marbre du Jura », très utilisées pour les immeubles de la capitale. Enfin, le canton de Gy était un gros producteur de vins, son vignoble étant encore indemne du phylloxera qui ne le décimera qu’à partir de 1886. Une commission constituée par le préfet étudie les conditions financières et administratives d’une telle réalisation. Devant ses conclusions favorables, la concession de la ligne est accordée par un traité du 15 octobre 1873 à MM. Martin, Pradines frères et Compagnie (ces derniers entrepreneurs de travaux publics). La ligne de Gray à Gy est déclarée d’utilité publique et promulguée au Journal officiel du 13 décembre 1874 en tant que chemin de fer d’intérêt local. Elle est construite sous le régime de la loi de 1865 sans subvention de l’État mais moyennant une subvention kilométrique de 12 000 F versée par le département. Celui-ci versera donc pour les 21,556 km du projet 258 672 F et les communes 216 480 F. Le 15 août 1877 est créée la Compagnie anonyme du chemin de fer de Gray à Gy et prolongements.

9Cette ligne, construite et exploitée par cette compagnie, est mise en service en 1878 et, très rapidement, un petit trafic voyageurs s’ajoute au transport des marchandises. La liquidation de la compagnie en novembre 1885 conduit le département à s’y substituer provisoirement. Le 19 octobre 1886, un arrêté préfectoral place la ligne sous séquestre et charge les Ponts et Chaussées de son administration et de son exploitation sous la direction de M. Bouvaist, ingénieur en chef du département. Le département se retrouve propriétaire à la fois de la ligne et du matériel roulant et cherche rapidement un repreneur. Il prend contact avec Félix Vellut qui avait fondé la Compagnie des chemins de fer vicinaux avec l’aide de plusieurs personnalités lyonnaises, dont la Société Horme et Buire. M. Vellut, étant plutôt un intermédiaire, cherche à céder l’affaire à une autre compagnie ; il trouve la Compagnie générale des chemins de fer vicinaux (C.F.V.) créée le 18 juin 1888. Celle-ci se verra donc confier la concession de la ligne de Gray à Bucey-lès-Gy et aura la préférence du département sur tout autre concurrent, à égalité de prix de construction, si de nouvelles lignes sont envisagées. Par ailleurs, les C.F.V. sont assurés d’un minimum de recette par kilomètre. C’est donc cette compagnie qui exploitera la totalité du futur réseau départemental, excepté le court prolongement en Haute-Saône jusqu’à Champlitte de la ligne de Dijon à Fontaine-Française, lui-même exploité par la Compagnie des chemins de fer du Sud de la France. Celle-ci devient localement en 1910 la Régie départementale des tramways de la Côte-d’Or puis, en 1922, les Chemins de fer départementaux de la Côte-d’Or (C.D.C.O.).

10La ligne de Gy fut prolongée six ans plus tard jusqu’à la gare du réseau Est de Gray, tandis qu’un autre prolongement fut poussé de Gy à Marnay, assurant la connexion avec le P.L.M.

11La région la plus industrielle du département, également la plus riche en ressources minières, celle du Nord-Est, réclama à son tour une desserte ferroviaire. Dès 1895, la vallée du Rahin était parcourue par des trains des C.F.V. amenant en gare de Champagney les produits de la région de Plancher-les-Mines : c’était la première ligne pénétrant dans le massif vosgien. Enfin, un prolongement au nord de Bucey-lès-Gy permit d’atteindre le village de Frétigney tandis qu’au sud de Gray une nouvelle ligne parvenait en 1901 dans le gros bourg de Pesmes, prolongée quelques mois plus tard jusqu’à Dole dans le département voisin du Jura. Cette mise en service impliquait les conseils généraux des deux départements limitrophes.

12Ce premier « réseau » s’étendait sur 93 km (fig. 1) : Gray à Bucey-lès-Gy, 24 km ; Gy à Marnay, 17 km ; Bucey-lès-Gy à Frétigney, 11 km ; Ronchamp à Plancher-les-Mines, 16 km ; Gray à Pesmes, 25 km.

Figure 1 : Carte des lignes des C.F.V. en Haute-Saône après la mise en service de la 2e partie du 1er réseau (1899-1901).

Figure 1 : Carte des lignes des C.F.V. en Haute-Saône après la mise en service de la 2e partie du 1er réseau (1899-1901).

© Jean Finsterwald

Les C.F.V. et le groupe Empain

13Les C.F.V. font partie de l’important groupe financier et économique belge Empain, d’où le qualificatif « vicinaux » emprunté aux secondaires d’Outre-Quiévrain à voie métrique. Ceux-ci ont été créés en Belgique secondairement à la construction des grands réseaux ; ils réalisèrent un réseau au maillage très dense puisque leurs voies, souvent en accotement de route (tramways), représentent en 1908 un total de 3 200 km. C’est ainsi que le groupe Empain se retrouve au 3e rang des exploitants de chemins de fer secondaires en France après la Société générale des chemins de fer économiques (S.E.) et la Compagnie des chemins de fer départementaux (C.F.D.). Le groupe Empain a exploité plus de 2 000 km de voies métriques comprenant C.F.V. (réseaux de Haute-Saône, du Doubs et du Jura), Chemins de fer de la banlieue de Reims (C.B.R.), Chemins de fer économiques du Nord (C.E.N.) dans le Nord, le Pas-de-Calais, la Savoie et l’Isère, chemins de fer des Basses-Pyrénées, du Calvados et du Périgord.

14Il faut revenir sur Edouard Empain (1852-1929) qui, issu d’un milieu modeste – son père était instituteur et lui-même le fils aîné d’une fratrie de cinq enfants –, était parvenu à devenir dessinateur à la Société métallurgique (1878) puis, tout en travaillant, ingénieur. Prenant la direction d’une carrière, il créa son propre chemin de fer aboutissant à une grande voie ferrée. Il crée ensuite sa propre société de voies ferrées secondaires, la « Compagnie générale de Railways à voie étroite », en 1881, dont le succès est grand, mais la création de la Société nationale des chemins de fer vicinaux lui ferme le marché belge. C’est pourquoi il se tourne vers la France après qu’il a créé sa propre banque d’investissement, la Banque Empain, ce qui montre qu’à cette époque la montée en puissance des ingénieurs et des capitalistes est indissociable. Autodidacte brillant, Empain, comme Solvay, s’expatrie avec des capitaux pour en contrôler l’utilisation et le rendement. Sa vie sera consacrée à promouvoir et développer les transports en commun. Plus tard, Edouard Empain, devenu l’ami du roi des Belges, pourra donner à grande échelle la mesure de son talent. Il constitua la Société du chemin de fer du Congo supérieur aux grands lacs ; il sera donc à l’origine du réseau ferré colonial d’Afrique centrale permettant la mise en valeur et l’exploitation de riches et vastes territoires. Ses multiples activités le conduiront à construire aussi bien les tramways de Tachkent que le zoo de Budapest ! Devenant de plus en plus puissant, le groupe wallon s’engage dans la construction de tramways électriques urbains en Europe, Russie et même en Afrique et devient le concessionnaire, via sa Compagnie générale de traction, de la construction du métro de Paris, réseau administrativement d’intérêt local. Il s’associe aux établissements Schneider du Creusot pour fonder en 1899 la Compagnie du chemin de fer métropolitain de Paris (C.M.P.) qui équipe les ouvrages de génie civil du métro sous l’autorité de Fulgence Bienvenüe et assure l’exploitation du nouveau réseau.

15Signalons que, anobli en 1907, le baron Empain réalisa un rêve puisque, séduit par l’Egypte où il avait participé à la construction des tramways du Caire, il bâtit sur 8 000 hectares au voisinage de cette ville et aux confins du désert la ville d’Héliopolis aujourd’hui peuplée de plusieurs centaines de milliers d’habitants ; c’est au centre de cette ville que sa dépouille sera définitivement inhumée en 1931.

Le deuxième réseau

16C’est à partir de 1902 qu’est réalisé en deux années seulement ce qui est qualifié de deuxième réseau (fig. 2), centré sur les sous-préfectures de Gray et de Lure. Une première ligne par la vallée de l’Ognon atteignait le village forestier du Haut-du-Them via Melisey, Servance et Ternuay. En outre, la ligne isolée de Ronchamp à Plancher-les-Mines fut raccordée à la gare C.F.V. de Lure tandis qu’une autre ligne fut construite jusqu’à Héricourt ; ainsi, Lure devenait le terminus d’un groupe de trois lignes. Dans le même temps, Gray héritait d’une nouvelle ligne se dirigeant vers le nord du département pour atteindre Jussey. Ainsi, depuis Pesmes, on pouvait par les C.F.V. traverser le département du Sud au Nord. Une ligne isolée de Luxeuil à Corravillers desservait la vallée industrielle du Breuchin – troisième pénétration vosgienne.

17L’ensemble de ces lignes correspondait à 163 km : Gray à Jussey, 61 km ; Lure à Héricourt, 43 km ; Lure au Haut-du-Them, 26 km ; Lure à Ronchamp, 8 km ; la cinquième ligne de Luxeuil à Corravillers, (25 km) étant isolée…

Figure 2 : Carte des lignes des C.F.V. de la Haute-Saône après la mise en service du 2e réseau (1902-1904).

Figure 2 : Carte des lignes des C.F.V. de la Haute-Saône après la mise en service du 2e réseau (1902-1904).

© Jean Finsterwald

Le troisième réseau

18On notera que la région de Vesoul, le chef-lieu, était totalement dépourvue de desserte par les C.F.V. C’est pourquoi un troisième réseau (fig. 3) prenant naissance à Vesoul fut réalisé avant la déclaration de la guerre de 1914, créant dans le département une desserte cohérente en atteignant souvent des villages situés à son extrême limite. De 1907 à 1912 furent ainsi construites, le plus souvent en site propre, les lignes de Vesoul à Molay, à l’ouest du département, de Vesoul à Grandvelle et Frétigney avec bifurcation jusqu’à Besançon dans le département voisin du Doubs, de Vesoul à Luxeuil avec raccordement à la ligne existante de Corravillers, de Vesoul à Saint-Georges et enfin de Courcelles, station de la ligne Vesoul à Corravillers, à Vauvillers via Port-d’Atelier. Par ailleurs, une série de lignes raccordant les lignes partant de Lure et Luxeuil permit le parachèvement du réseau. La touche finale fut le creusement d’un tunnel de plus d’un kilomètre amenant la ligne du Haut-du-Them dans le département des Vosges face à la gare du Thillot de la Compagnie de l’Est.

Figure 3 : Carte des lignes des C.F.V. de la Haute-Saône construites dans le cadre du 3e réseau (achevé en 1914).

Figure 3 : Carte des lignes des C.F.V. de la Haute-Saône construites dans le cadre du 3e réseau (achevé en 1914).

© Jean Finsterwald

19Cet ultime prolongement fut mis en service le 11 novembre 1912. Dès 1910, la nouvelle gare de Vesoul C.F.V. permet de regrouper les services administratifs, tandis que les trois dépôts-ateliers se répartissent à Vesoul, Gray et Lure.

20Dans les quatre départements concernés, les C.F.V. Haute-Saône desservent 245 stations (gares et haltes comprises).

21L’ensemble de ces lignes s’étendait sur 228 km : Vesoul à Molay, 46 km ; Vesoul à Luxeuil, 36 km ; Vesoul à Besançon, 69 km ; Vesoul à Saint-Georges, 38 km ; Courcelles à Vauvillers, 33 km ; Le Haut-du-Them au Thillot, 6 km.

22Notons qu’il existait à Besançon un raccordement avec le réseau à voie métrique du Doubs permettant d’aller en voie métrique du Thillot (Vosges) à Saint-Claude (Jura) en empruntant les trains de quatre compagnies différentes.

Le « quatrième réseau »

23C’est dès 1906 que le conseil général étudie les bases d’un quatrième réseau qui devait achever la desserte locale dans le département. Si on se replace à cette époque, il faut bien comprendre que l’arrivée du chemin de fer représentait un progrès essentiel par rapport à la traction hippomobile sur des routes ou des chemins souvent médiocres. Le conseil général se trouve devant une multitude de projets, certains très ambitieux comme la construction d’une section à crémaillère dans les Vosges, remplacée dans un projet ultérieur par un tunnel de 1 134 m sous le mont des Fourches. Une série de sessions du conseil conduit le 29 août 1913 à retenir les lignes suivantes : Molay à Champlitte, Lure à Belfort, Héricourt à Montbéliard (ces trois lignes assuraient des relations avec les départements voisins de la Côte-d’Or, du territoire de Belfort et du Doubs), Luxeuil à Plancher-les-Mines, Corre à Luxeuil, Fougerolles et Val d’Ajol à Luxeuil, plus une ligne à déterminer pour le groupe de Vesoul. Cet ensemble nécessitait la création d’environ 170 km de lignes. Il est souvent considéré que l’abandon de ce projet est lié aux conséquences de la guerre de 1914-1918 qui entraîna l’arrêt des travaux et qui conduisit à l’essor du transport routier ; cela n’est vrai qu’en partie. En effet, dès 1908, le département envisageait, sur certaines relations complémentaires du réseau ferré existant, une desserte par autobus ou camions. Par ailleurs, et pour limiter la prolifération de lignes secondaires dont la construction était réclamée un peu partout et dont la nécessité économique apparaissait souvent douteuse, fut édictée la loi du 31 juillet 1913. Cette loi responsabilisait les concessionnaires en leur laissant une plus grande part des frais d’établissement des lignes : « aucune concession ne peut être accordée sans que le concessionnaire engage dans l’entreprise une somme égale au 1/5e du capital. » Par ailleurs elle précisait que la subvention de l’État ne pouvait contribuer à couvrir les insuffisances de l’exploitation (article 14). Cela conduira à réduire de manière drastique les constructions de voies d’intérêt local dans toute la France et, après 1918, bien peu de lignes seront construites sous le régime de ladite loi. Le 19 mai 1914, le conseil général confirme toutefois que les lignes projetées seront concédées aux C.F.V. puisqu’elles complètent le réseau existant (fig. 4). En fait, la compagnie se montre réticente compte tenu des termes de la nouvelle loi et le département concède une remise d’environ 20 % sur la part qui est due par le concessionnaire dans la mesure où il assure déjà une exploitation. Bien entendu, la guerre bloque toute réalisation ; une fois la paix revenue, le projet est réexaminé, mais l’enthousiasme n’est plus là. Un seul prolongement, celui d’Héricourt à Montbéliard, a l’aval du département et des CF.V. ; les participations financières respectives sont fixées comme suit : 1 089 298 F pour la Haute-Saône, 1 136 702 F pour le Doubs, mais la baisse générale du trafic constatée dès 1920 et l’augmentation considérable des frais de construction font abandonner définitivement le projet.

Figure 4 : Relations des C.F.V. avec les lignes des grands réseaux.

Figure 4 : Relations des C.F.V. avec les lignes des grands réseaux.

© Jean Finsterwald

24De 1914 à 1918, le réseau est fortement utilisé, en particulier sur la ligne du Thillot qui permet d’alimenter le front ; en outre, de nombreuses locomotives et wagons sont réquisitionnés pour des besoins militaires sur les lignes à voie métrique de la zone des combats. Jusqu’au début des années 1920, on peut dire que le réseau C.F.V. était prospère d’autant qu’il a donné naissance à de nombreux embranchements – jusqu’à 75 (fig. 5) – certains n’existant que pour une courte période, en particulier ceux concernant les coupes de bois ou l’armée.

Figure 5 : Quantité d’embranchements industriels ayant existé sur le réseau C.F.V.

Figure 5 : Quantité d’embranchements industriels ayant existé sur le réseau C.F.V.

© Jean Finsterwald

25Ce réseau a donc rendu les plus grands services, ce qui justifie sa construction d’autant qu’avant 1914 le nombre de camions était infime et qu’il n’y avait aucune alternative au chemin de fer si ce n’est le cheval.

26Il ne faut pas oublier non plus qu’avant 1914 les routes n’étaient qu’empierrées, les pneumatiques encore primitifs et le moteur à explosion à ses débuts, rendant le chemin de fer départemental attractif pour les populations qui découvraient avec lui la traction mécanique.

L’exploitation

27Avant la guerre de 1914-1918, chaque ligne était classiquement parcourue par trois aller-retour quotidiens, tous de composition voyageurs-marchandises. Le trafic marchandises était prospère d’autant que les embranchements particuliers apportaient une large contribution aux tonnages transportés. Bois, minerais, charbon, pierres, mais aussi matériels agricoles, bétails utilisaient le réseau C.F.V. Ces trains étaient lents compte tenu des caractéristiques du matériel roulant et du fait que, dans la plupart des gares, il fallait manœuvrer pour prendre ou laisser des wagons. De manière générale, les trains se croisaient dans une ou deux gares de chaque ligne, là où se faisait le ravitaillement en eau des machines. La moyenne commerciale était de l’ordre de 20 km/h tenant compte de ces manœuvres, de nombreux points singuliers (traversées de villages en chaussée…) et de la faible vitesse autorisée (maximum : 30 km/h).

28Après 1918, la situation du réseau se dégrada tant du point de vue de la voie que de celui du matériel roulant ; de plus, l’augmentation vertigineuse du coût du charbon, de même que de nouvelles lois sociales plus favorables aux personnels renchérirent l’exploitation ; c’est pourquoi, sur la plupart des lignes, le nombre d’aller-retour fut ramené à deux. En revanche, la compagnie maintint longtemps des circulations touristiques les dimanches et fêtes sur ses trois lignes vosgiennes. Ces trains d’excursion avaient des compositions lourdes de cinq à six voitures extrêmement chargées de voyageurs endimanchés. Une affiche publicitaire pour ces trains confirme le dynamisme de la compagnie dans ce domaine du tourisme encore peu exploité sur les réseaux secondaires. Mais, en Haute-Saône comme ailleurs, la concurrence routière arrivait et un lent déclin du trafic s’amorçait, sans doute plus marqué pour le trafic voyageurs, entraînant un déficit croissant à la charge du seul conseil général ; c’est pourquoi les C.F.V. s’efforcèrent de rendre leur réseau plus attractif et son exploitation plus économique : la compagnie commanda donc dès 1930 sept automotrices de Dion-Bouton et cinq remorques montrant sa confiance en l’avenir. A partir de cette date, les automotrices assurèrent la presque totalité du trafic voyageurs.

Les bâtiments

29On a dit que le réseau était particulièrement bien pourvu en gares et haltes. Le type le plus courant, construit à 74 exemplaires en Haute-Saône, mais aussi dans le Jura (6) et dans le Doubs (4), est illustré ci-contre (fig. 6). Le plus souvent, le personnel des stations résidait dans les villages et ne travaillait en gare qu’au moment du passage des trains, sauf dans les gares à étage éloignées des habitations... Comme ces stations étaient construites en moellons et que la croissance démographique de la Haute-Saône a été modeste, un grand nombre de ces bâtiments sont encore visibles, certains fortement modifiés après leur acquisition par des propriétaires privés, d’autres restés en l’état, en particulier ceux à l’écart des villages ou utilisés par la D.D.E. Certains subissent difficilement l’épreuve du temps, voire du vandalisme, même si celui-ci reste discret dans les campagnes. Parcourir la Haute-Saône permet de retrouver nombre de ces bâtiments.

Figure 6 a : Les bâtiments

Figure 6 a : Les bâtiments

Le Haut-du-Them : gare du tramway, au pied du massif des Vosges.

Coll. F.A.C.S.-UNECTO, cl. d.r.

Figure 6 b : Les bâtiments

Figure 6 b : Les bâtiments

L’attente du train en gare de Fondremand, sur la ligne Vesoul-Besançon.

Coll. F.A.C.S.-UNECTO, cl. d.r.

30La gare la plus classique comportait un petit bâtiment sans étage flanqué d’une halle à marchandises au toit débordant s’appuyant sur des corbeaux des deux façades. Cette halle, plus élevée, était pourvue d’un quai et desservie par une voie de débord. En principe, chaque gare était donc pourvue d’un évitement permettant les manœuvres et le déchargement ou le chargement des wagons. Sur chaque ligne, une ou deux gares intermédiaires possédaient une voie supplémentaire pour le croisement des trains ; ces gares étaient équipées d’une prise d’eau parfois située dans un petit bâtiment annexe abritant une pompe à vapeur Field puis, ultérieurement, un moteur électrique.

31Quelques gares ont été agrandies par une aile supplémentaire justifiée par l’extension du réseau (Combeaufontaine devenue gare de croisement lors de la construction du troisième réseau) ou par l’importance du trafic (Melisey). D’autres, rarement, se sont vu ajouter un étage lorsqu’elles sont devenues bifurcations (Saint-Georges et halte d’Ancier- Bifurcation) ; en outre, les gares terminus étaient toutes équipées d’une remise pour les machines et d’un foyer pour le personnel ainsi, bien entendu, que d’une prise d’eau et d’une plaque tournante. Il faut préciser l’exception de la station terminus de Saint-Antoine qui ne possédait qu’une plaque tournante, la machine passant la nuit sous l’avant-toit de la halle à marchandises de Plancher-les-Mines.

32Dans tous les cas où les C.F.V. voisinaient avec les compagnies des grands réseaux, ils avaient leur propre halte. Seules étaient en commun les installations de transbordement.

33Les deux bâtiments les plus importants étaient les gares de Gray-Ville et de Vesoul. La gare de Gray-Ville, construite en 1906, était un coquet bâtiment voyageurs avec marquise côté voie, ses deux façades présentaient d’élégants parements où la pierre alternait avec la brique. Ce bâtiment a été remplacé par une hideuse construction de béton devenue terminus des lignes de car. Notons qu’à Gray-Ville, comme dans les grands réseaux, la halle à marchandises était distincte du bâtiment voyageurs. La gare de Vesoul C.F.V. a été construite pour être mise en service à l’ouverture des lignes du troisième réseau. Située à 200 m de la gare du réseau de l’Est, c’est un très élégant bâtiment qui a repris à Gray-Ville les parements de brique alternés avec la pierre (fig. 7). Cet important bâtiment à deux étages est comparable par son importance à la gare du Sud à Nice. Nul doute qu’il a été le plus important de toutes les gares de chemins de fer d’intérêt local de France. Il regroupait tous les services administratifs et son rez-de-chaussée était pourvu d’un vestibule, de deux salles d’attente de 1re et de 2e classe, de bureaux pour la vente des billets, pour les chefs de trains, d’une consigne, etc., et, même, d’une sortie voyageurs distincte de l’entrée. Aujourd’hui, ce beau bâtiment a conservé tout son lustre et est devenu la poste centrale de Vesoul. Côté façade sur rue, il a perdu sa marquise et son auvent ainsi que son intitulé « chemins de fer vicinaux » mais a gardé son blason de pierre avec les armoiries de la ville. Côté intérieur, la façade était aussi pourvue d’une marquise pouvant abriter les voyageurs qui bénéficiaient de quatre voies desservies par trois quais ; aujourd’hui, ce périmètre est occupé par des bâtiments postaux plus ou moins préfabriqués. La gare marchandises (fig. 8) était distincte avec ses six voies, sa halle, ses installations de transbordement entre wagons C.F.V. et Est et son important dépôt-atelier qui ne comportait pas moins de 13 voies en impasse. L’importance des installations vésuliennes était donc considérable.

Figure 7 : Façade avant de la gare C.F.V. de Vesoul.

Figure 7 : Façade avant de la gare C.F.V. de Vesoul.

© Jean Finsterwald

Figure 8 : Plan des voies de la gare C.F.V. de Vesoul.

Figure 8 : Plan des voies de la gare C.F.V. de Vesoul.

© Jean Finsterwald

Les ouvrages d’art

34Nous avons indiqué que, bien que le département ait une géographie mouvementée, spécialement à l’Est, là où commencent les contreforts des Vosges, le réseau des C.F.V. a limité au maximum les ouvrages d’art. Il a suivi autant que possible les accotements routiers d’où l’appellation de tramways appliquée aux trains ; ceci est surtout vrai pour les deux premiers réseaux, le troisième bénéficiant davantage de sites propres comme c’était le cas de la plupart des réseaux d’intérêt général.

35Les plus nombreux ouvrages d’art étaient les ponts (fig. 9), le plus souvent métalliques pour enjamber rivières (Ognon à Ternuay et Pesmes, Lanterne à Fleurey-lès-Faverney, Superbe à Senoncourt) ou voies ferrées (à Vesoul et à Lure au-dessus de la ligne Paris-Belfort). Les passages sur la Saône à Gray, Scey-sur-Saône et Quitteur utilisaient des ponts routiers. L’accès à ces ponts nécessitait souvent d’importants remblais, les plus spectaculaires étant ceux de Vesoul avec franchissement de la voie ferrée par un pont métallique puis de la rivière Colombine par un viaduc à trois arches et ceux de Besançon. Bien entendu, de nombreux ponts en pierre ont dû être construits pour éviter des dépressions de terrain ou laisser passer des ruisseaux. En outre, de très importantes tranchées ont été nécessaires. Citons celles de Montoille sur la ligne de Vesoul à Molay et de Champ-sans-terre près de Noroy-le-Bourg sur la ligne de Vesoul à Saint-Georges.

Figure 9 : Train en gare de Ternuay dans la montagne haut-saônoise.

Figure 9 : Train en gare de Ternuay dans la montagne haut-saônoise.

Coll. J. Finsterwald

36Un très important remblai a dû être réalisé pour accéder au viaduc de Gourgeon, viaduc à trois arches de 14 m de hauteur qui permet d’enjamber une vallée sèche. Outre celui de Vesoul cité plus haut, trois autres viaducs également à trois arches ont été construits sur la ligne de Besançon, deux à la sortie d’Echenoz, un entre Boult et Boulot. Tous sont visibles aujourd’hui, sauf l’un d’entre eux enterré dans une tranchée comblée à Echenoz.

37Le réseau C.F.V. avait été conçu à l’origine sans aucun tunnel. Pourtant, lorsque, avant 1910, se fit jour la nécessité de parvenir dans le département des Vosges et qu’on décida de prolonger au Thillot la ligne de Lure au Haut-du-Them, il fallut prendre la décision de creuser un grand tunnel sous le col des Croix. Cet ouvrage de 1,097 km, rectiligne et en rampe de 19,16 pour mille, est exceptionnel pour un chemin de fer d’intérêt local. Il nécessita le détournement du lit supérieur de l’Ognon ; sa construction dura trois années, occupa plus d’une centaine d’ouvriers, provoquant la mort de quatre d’entre eux. Réceptionné le 5 novembre 1912, il permit l’ouverture à l’exploitation de la ligne le 11 novembre suivant.

Le matériel roulant

38Au fur et à mesure de la réalisation du réseau, les matériels devinrent de plus en plus nombreux. Le parc de locomotives à vapeur était presque exclusivement composé de machines-tender de type 030 T fournies à l’origine par la S.A.C.M., puis par Weidknecht. A partir de 1902, ce fut une série de locomotives Pinguely qui arriva sur le réseau, suivie à partir de 1908 par une livraison Corpet-Louvet. Trois locomotives bi-cabines ont bien circulé sur les C.F.V. de Haute-Saône comme sur le réseau C.F.V. voisin du Jura et comme c’était la règle sur les vicinaux de Belgique, mais pendant fort peu de temps, sans doute en 1901 pour un service urbain entre Gray-Est et Gray-Promenades. Très rapidement, la cabine de tête fut supprimée ainsi que la double commande afin d’éviter les inconvénients d’entretien d’un matériel existant en petit nombre sur le réseau et nécessitant un personnel formé spécialement.

39On a dit plus haut que le département acquit des automotrices de Dion-Bouton type JM3 à deux essieux (7) et des remorques (5) suite à une commande passée en 1929 ; cet important parc d’automotrices, ressemblant à des autobus mis sur rail et possédant un système de retournement propre, assura l’essentiel du trafic voyageurs au cours des sept dernières années d’exploitation du réseau. Ces autorails, aptes à remorquer un wagon, donnèrent de bons résultats.

40Pour transporter les voyageurs, les C.F.V. avaient un important parc de voitures à bogies de 1re, 2e et 3e classe, cette dernière étant supprimée dès 1901, certaines mixtes (on en comptait 61 en 1907) ; un fourgon à bagages était incorporé aux trains. Le matériel marchandises comprenait environ 300 wagons à essieux de types divers. Il a été indiqué qu’avant l’arrivée des automotrices la quasi-totalité des trains voyageurs était mixte.

Le lent déclin du réseau

41Le déficit des comptes d’exploitation commença dès les années 1920 et le trafic ne retrouva jamais son niveau d’avant-guerre, en ce qui concerne tant les voyageurs que les marchandises ; le réseau était soumis à une rude concurrence par les engins routiers de plus en plus performants et le déficit qui allait croissant – il atteignit 3 400 000 F en 1932 – ne pouvait être compensé que par le département, c’est-à-dire par le budget du conseil général qui, dès 1933, laissa fermer le tronçon haut-saônois de Fontaine-Française à Champlitte des C.D.C.O. Le département voisin du Jura fit de même, la même année, pour fermer le tronçon Pesmes-Dole de la ligne de Gray des C.F.V. A la même époque, les services d’excursion vers les Vosges haut-saônoises étaient abandonnés, victimes de la concurrence des autocars. Progressivement, les C.F.V. perdront la moitié de leur trafic et leur coefficient d’exploitation sera multiplié par trois. Le tramway pour lequel les conseillers généraux d’avant 1914 se battaient perdait progressivement ses défenseurs ; à partir de 1935, le tramway devenait au mieux le « tortillard », au pire, le « tacot ». Si l’on voulait faire plaisir aux conseillers généraux, il fallait parler de suppression. Bien sûr, certains conseillers résistaient, tels Victor Bennerotte, conseiller du canton de Melisey qui défendait avec vigueur sa ligne de Lure au Thillot et qui, d’ailleurs, ne lui survivra que de quelques mois ; lors de ses obsèques, en octobre 1938, le député de Lure, Frossard, rappelait : « je le revois encore à l’une des dernières sessions du conseil général, malade déjà, mais se multipliant pour sauver sa ligne… et prenant par la veste chacun de ses collègues pour forcer une conviction qui se dérobait. »

La fermeture du réseau

42A partir de 1935 et devant le déclin du trafic, en particulier voyageurs, que l’introduction des automotrices n’avait pu juguler, un plan de fermeture est étudié par le département, accompagné de mesures pour des personnels qui seront reclassés dans les grandes compagnies (Est et P.L.M.). Dans le même temps des routes sont améliorées pour faciliter les transports routiers de substitution ; de leur côté, les C.F.V. souhaiteront maintenir le transport des marchandises au moins sur certaines lignes mais sans succès.

43Sur la plus grande partie du réseau, le service voyageurs est assuré par autobus durant l’année 1937 tandis que le service marchandises s’arrête presque partout le 31 décembre de la même année. Au 1er janvier 1938 ne subsistent que les lignes des groupes de Gray et de Lure, soit 147 km. Le répit ne sera que de courte durée puisque le conseil général décide que le 30 juin 1938 sera le dernier jour d’exploitation du réseau et que toute subvention d’exploitation sera supprimée à cette date.

44La seule poche de résistance fut la haute vallée de l’Ognon où l’émotion est intense : en effet, le trafic reste considérable dans cette région industrieuse. Le conseil général doit organiser une réunion d’information réunissant autour du ministre des Travaux publics toutes les personnalités politiques et industrielles de la région. Dans le même temps, les responsables militaires s’émeuvent de la suppression d’une relation stratégique entre la vallée de l’Ognon et la haute vallée de la Moselle et la trouée de Belfort. Mais cette inquiétude n’est pas assortie d’un financement par l’armée bien que le spectre d’une nouvelle guerre soit bien présent. En dépit de la fourniture de statistiques montrant l’importance des tonnages à transporter (grumes et bois divers, granites, produits métallurgiques, houille…) et d’une demande de report de la fermeture de la ligne de Lure au Thillot, le préfet maintient sa position : les crédits étant votés jusqu’au 30 juin et les personnels licenciés ou reclassés à cette même date, l’exploitation doit être suspendue.

45Le réseau est déferré à partir de1939, rendant impossible toute exploitation ultérieure. Les C.F.V. de Haute-Saône avaient vécu alors que ceux du département voisin du Jura continuèrent leur activité encore une dizaine d’années.

46C’est ainsi que le réseau C.F.V. Haute-Saône ferme définitivement. Il fera durant les années de guerre cruellement défaut aux populations, surtout à celles des vallées vosgiennes, alors que les transports routiers étaient en panne.

47À notre époque où les chemins de fer touristiques ont toute leur place dans l’animation des régions, on ne peut que regretter la disparition précoce de la dernière ligne exploitée dans le massif vosgien dont des sections auraient pu constituer une remarquable attraction touristico-ferroviaire.

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Bibliographie

Bibliographie

- J. Cuynet, Histoire du Rail en Franche-Comté, Chanac, Éditions La Régordane, 1989.

- H. Domengie et J. Banaudo, Les Petits Trains de jadis, vol. 5, Est de la France, Breil-sur-Roya, Éditions du Cabri, 1995.

- D. Grisel et G.-J. Michel, Haute-Saône, Éditions Cael, 1981.

- P. Magnin, Vesoul-Lure-Héricourt en tramway, Vesoul, Tramways de la Haute-Saône, éd. 1995.

- P. Magnin, En tramway dans les Vosges Saônoises, Vesoul, Tramways de la Haute-Saône, éd. 1996.

- H. Rameau, La Haute-Saône en tramway au début du siècle, Vesoul, H. Rameau, 1995.

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Table des illustrations

Titre Figure 1 : Carte des lignes des C.F.V. en Haute-Saône après la mise en service de la 2e partie du 1er réseau (1899-1901).
Crédits © Jean Finsterwald
URL http://journals.openedition.org/rhcf/docannexe/image/2048/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 60k
Titre Figure 2 : Carte des lignes des C.F.V. de la Haute-Saône après la mise en service du 2e réseau (1902-1904).
Crédits © Jean Finsterwald
URL http://journals.openedition.org/rhcf/docannexe/image/2048/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 72k
Titre Figure 3 : Carte des lignes des C.F.V. de la Haute-Saône construites dans le cadre du 3e réseau (achevé en 1914).
Crédits © Jean Finsterwald
URL http://journals.openedition.org/rhcf/docannexe/image/2048/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 84k
Titre Figure 4 : Relations des C.F.V. avec les lignes des grands réseaux.
Crédits © Jean Finsterwald
URL http://journals.openedition.org/rhcf/docannexe/image/2048/img-4.jpg
Fichier image/jpeg, 136k
Titre Figure 5 : Quantité d’embranchements industriels ayant existé sur le réseau C.F.V.
Crédits © Jean Finsterwald
URL http://journals.openedition.org/rhcf/docannexe/image/2048/img-5.jpg
Fichier image/jpeg, 108k
Titre Figure 6 a : Les bâtiments
Légende Le Haut-du-Them : gare du tramway, au pied du massif des Vosges.
Crédits Coll. F.A.C.S.-UNECTO, cl. d.r.
URL http://journals.openedition.org/rhcf/docannexe/image/2048/img-6.jpg
Fichier image/jpeg, 308k
Titre Figure 6 b : Les bâtiments
Légende L’attente du train en gare de Fondremand, sur la ligne Vesoul-Besançon.
Crédits Coll. F.A.C.S.-UNECTO, cl. d.r.
URL http://journals.openedition.org/rhcf/docannexe/image/2048/img-7.jpg
Fichier image/jpeg, 300k
Titre Figure 7 : Façade avant de la gare C.F.V. de Vesoul.
Crédits © Jean Finsterwald
URL http://journals.openedition.org/rhcf/docannexe/image/2048/img-8.jpg
Fichier image/jpeg, 312k
Titre Figure 8 : Plan des voies de la gare C.F.V. de Vesoul.
Crédits © Jean Finsterwald
URL http://journals.openedition.org/rhcf/docannexe/image/2048/img-9.jpg
Fichier image/jpeg, 248k
Titre Figure 9 : Train en gare de Ternuay dans la montagne haut-saônoise.
Crédits Coll. J. Finsterwald
URL http://journals.openedition.org/rhcf/docannexe/image/2048/img-10.jpg
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Pour citer cet article

Référence papier

Claude Bouchaud et Jean Finsterwald, « Les chemins de fer vicinaux de la Haute-Saône de l’extension (1878-1912) au déclin (1918-1938) : un modèle de desserte d’un département en mutation économique »Revue d’histoire des chemins de fer, 24-25 | 2002, 211-231.

Référence électronique

Claude Bouchaud et Jean Finsterwald, « Les chemins de fer vicinaux de la Haute-Saône de l’extension (1878-1912) au déclin (1918-1938) : un modèle de desserte d’un département en mutation économique »Revue d’histoire des chemins de fer [En ligne], 24-25 | 2002, mis en ligne le 17 avril 2015, consulté le 19 avril 2024. URL : http://journals.openedition.org/rhcf/2048 ; DOI : https://doi.org/10.4000/rhcf.2048

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Auteurs

Claude Bouchaud

Président de la Fédération des amis des chemins de fer secondaires - Union des exploitants de chemins de fer touristiques

Jean Finsterwald

Membre de la Fédération des amis des chemins de fer secondaires

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Droits d’auteur

Le texte et les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés), sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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