Les médiations thérapeutiques

DOI : 10.35562/canalpsy.1798

p. 10-13

Plan

Texte

Les activités de médiation sont des dispositifs spécifiques de soin organisés autour d’un « medium malléable », qui désigne conjointement un objet médiateur, et le clinicien qui présente au patient cet objet médiateur dans sa matérialité, comme une « matière à symbolisation ». Les médiations thérapeutiques sont la plupart du temps des médiations sensorielles ou/et des médiations artistiques, comme la peinture, le modelage, le collage, la musique, les marionnettes, le théâtre, la danse, l’écriture, mais aussi la médiation sensorielle olfactive, les thérapies avec poney, la vidéo, les médiations corporelles ou les médiations numériques… Les activités de médiation représentent une modalité privilégiée de traitement des sujets en difficulté majeure pour accéder au travail de symbolisation, comme les patients présentant des pathologies lourdes, et leur utilisation apparaît centrale dans les pratiques institutionnelles. Ces activités à médiation, souvent pratiquées en groupe, ont connu un essor considérable ces dernières années, notamment dans le soin psychique en pratiques institutionnelles.

Dans le cadre du CRPPC, Centre de Recherche en Psychologie et Psychopathologie Clinique, nos travaux à Lyon ces dernières années ont tenté de construire une théorie générale de la médiation, en proposant les fondements d’une métapsychologie de la médiation et de sa place dans les processus de symbolisation, notamment dans le Manuel des médiations thérapeutiques (Brun A., Chouvier B., Roussillon R., 2013), ainsi qu’une évaluation de la portée thérapeutique de ces pratiques à médiation (Brun A., Roussillon R., Attigui P. et coll., 2016) : le premier fondement du cadre des dispositifs de médiations thérapeutiques est l’associativité sensori-motrice, le second un transfert multifocal sur le medium malléable et le troisième se définit par des modalités spécifiques de symbolisation à partir de la sensori-motricité, qui permettent aux patients en difficulté avec la symbolisation d’accéder notamment aux formes primaires de symbolisation.

Le concept de medium malléable : Marion Milner et René Roussillon

Marion Milner apparaît comme une des ancêtres de la psychothérapie psychanalytique fondée sur des médiations thérapeutiques, même si elle n’a pas directement pratiqué ni théorisé ce type de dispositif. Son originalité consiste dans sa théorisation des rapports entre psychanalyse et créativité. Elle s’interroge sur le rapport entre une œuvre d’art et le travail analytique : elle souligne que l’enfant en psychothérapie utilise des jouets, des objets ou des matériaux divers, comme l’artiste utilise un médium malléable. Elle définit aussi le médium comme une substance malléable à laquelle on peut faire prendre la forme de ses fantasmes. Le médium malléable, c’est donc à la fois une possible utilisation du cadre matériel, à la fois une modalité d’utilisation du thérapeute. Le médium malléable renvoie ainsi conjointement à la matérialité du cadre et à la dimension transférentielle.

C’est René Roussillon qui a rendu célèbre ce concept, en le prolongeant et le renouvelant. Il a en effet redéfini le Médium Malléable en soulignant que M. Milner a introduit l’idée d’un objet médiateur, qui, par sa matérialité spécifique, offre la possibilité de matérialiser la problématique interne d’un sujet, par la mise en forme du matériau proposé. Le Médium Malléable désigne donc l’existence d’objets matériels, qui ont des propriétés perceptivo-motrices susceptibles de rendre perceptible et manipulable l’activité représentative ; celle-ci consiste à représenter en chose le processus de symbolisation lui-même.

Dans ses derniers travaux (2012, 2013), R. Roussillon souligne qu’avant d’être une propriété reconnue dans certains objets du monde matériel comme la pâte à modeler, le Médium Malléable est d’abord une fonction de la relation primitive. Les propriétés du Médium Malléable sont d’abord des propriétés d’un certain mode de relation et de communication primitive avec l’objet premier, qui suppose aussi disponibilité, sensibilité, saisissabilité, constance, indestructibilité etc. de l’objet. C’est dans le jeu de transformation au sein de la communication primitive que s’éprouve d’abord l’objet Medium pour laquelle le Médium Malléable est l’objet transitionnel du processus de symbolisation, objet qui « symbolise la symbolisation » par ses diverses propriétés, et représente les conditions de l’environnement humain facilitatrices du processus de symbolisation.

Il faut donc s’interroger d’une part sur les processus intersubjectifs en lien avec le travail de la matière, avec la mise en forme d’un matériau, ce qui suppose de s’interroger sur la spécificité et les modalités de cette mise en forme, d’autre part sur les interactions des patients avec les thérapeutes et avec le groupe.

Métapsychologie de la médiation thérapeutique

À partir du constat que les dispositifs cliniques classiques présentent des limites quand il s’agit de prendre en charge la psychopathologie lourde, comme les autismes, les psychoses, la criminalité ou l’anti-socialité grave, il s’agit de montrer comment les dispositifs thérapeutiques à médiation conviennent particulièrement à ces différentes formes de pathologies du narcissisme ou de l’identité, définies comme « situations limites de la subjectivité » ou cliniques de l’extrême » (R. Roussillon).

Les dispositifs à médiations thérapeutiques, fondés sur la prise en compte du transfert et de l’associativité psychique, au fondement de la méthode analytique, permettent aux patients d’engager des processus de symbolisation spécifiques, d’abord par la mise en jeu d’une associativité sensorimotrice dans la confrontation à un medium.

Premier fondement du cadre des médiations thérapeutiques : l’associativité sensorimotrice

En premier lieu, pour pouvoir inscrire les médiations dans le champ de la psychothérapie psychanalytique, il s’impose de prendre en compte l’associativité, au fondement de la méthode psychanalytique. Comment repère-t-on un processus associatif dans le cadre des médiations thérapeutiques ? On observe habituellement les associations du patient en lien avec sa production, ainsi que les chaînes associatives groupales. Mais pour les patients en difficulté avec le langage verbal, il devient indispensable de se centrer sur un autre type d’associativité, l’associativité propre au langage du corps et de l’acte, présente dans l’œuvre freudienne. Freud a en effet souligné dans son œuvre l’importance du langage des gestes, y compris dans les stéréotypies des schizophrènes, qui ne sont pas dénuées de sens mais renvoient à un scénario archaïque mis en scène par le corps du sujet (Freud, 1913). Le medium sensoriel va mobiliser une mémoire perceptive décrite par Freud (1897), des traces perceptives d’expériences archaïques, composée de traces sensori-affectivo-motrices.

Les thérapeutes doivent en quelque sorte réorienter leur capacité d’écoute du côté de la prise en compte du langage sensorimoteur. C’est en effet une forme « d’associativité » non verbale qui se déploie avec le médium, une associativité liée au geste, à la succession des séquences, à l’enchaînement des formes et aux déformations que le sujet fait subir au medium. Le clinicien sera attentif à la gestualité des patients, à leurs mimiques, à leurs postures, à toute la dynamique mimo-gestuo-posturale, mais aussi à leurs choix de tel ou tel instrument pour travailler le medium, de tel ou tel matériau ou support, de telle ou telle technique et la façon dont s’enchaîne au fil des ateliers thérapeutiques toute cette dynamique sensorimotrice pour chaque patient et pour le groupe.

Second fondement du cadre des médiations thérapeutiques : un transfert multifocal sur le medium malléable

L’associativité est inséparable du transfert qui est multifocal dans un dispositif à médiation référé à la psychothérapie psychanalytique, transfert sur le Medium Malléable, à la fois objet médiateur et thérapeute, transfert sur le cadre, transfert sur le groupe : le transfert se présente fondamentalement comme une « constellation » transférentielle (Freud, 1938). L’expérience clinique montre que l’objet médiateur constitue un véritable attracteur sensoriel du transfert dont il devient le support : il focalise en effet les liens transféro-contre-transférentiels et les articule.

Le transfert sur le médium malléable apparaît comme une modalité du transfert sur le cadre, au sens d’un transfert des modes de relation primitifs : comme l’écrit en effet Bleger (1967), le cadre est le dépositaire des liens symbiotiques primitifs et renvoie à une indifférenciation entre le corps du patient, et l’espace, l’environnement. Ainsi, quand M. Milner définit le médium malléable, elle indique que l’enfant est capable de l’utiliser et d’utiliser la salle de jeu comme « cette substance malléable d’interposition ». Dans le contexte de pathologies graves du narcissisme, les patients ne vont pas seulement projeter les éléments morcelés de leur monde interne sur les thérapeutes et sur les autres sujets du groupe, selon le processus de diffraction du transfert dans un dispositif groupal conceptualisé par R. Kaës (1976), mais aussi sur les éléments sensoriels du cadre thérapeutique. Il s’agit donc d’un transfert par « diffraction sensorielle » (A. Brun, 2007) puisque les fragments projetés sont diffractés en partie sur les éléments du cadre et notamment sur le medium malléable.

Troisième fondement du cadre des médiations thérapeutiques : spécificité de la symbolisation à partir de la sensorimotricité

Pour des pathologies lourdes, en difficulté avec la symbolisation, le recours aux médiations thérapeutiques permet de relancer la virtualité symbolisante par l’engagement de processus de symbolisation spécifiques, notamment par la mise en jeu de la sensorimotricité des patients dans la confrontation à un médium sensoriel, comme la peinture, la terre, la pâte à modeler, le collage, la musique : il s’agit d’abord d’un transfert sur la matérialité du médium qui va devenir du coup une « matière à symbolisation », selon le titre d’un ouvrage dirigé par B. Chouvier (2000).

L’originalité du cadre de ces médiations thérapeutiques consiste en effet à permettre aux patients en difficulté majeure avec la symbolisation d’engager un travail de figuration à partir du registre sensoriel, tant de la sensorimotricité que des qualités sensorielles du « médium malléable », dont la manipulation s’inscrit dans la dynamique transférentielle.

Qualités symboligènes spécifiques de l’objet médiateur

Dans un cadre de thérapie médiatisée, l’objet médiateur fonctionne comme un véritable attracteur pour la symbolisation. Chaque medium privilégie un mode de rapport particulier à la sensorialité, selon ses qualités tactiles, visuelles, olfactives, ce qui déterminera le processus transférentiel. Il semble indispensable de se demander quelles composantes sensori-perceptivo-motrices de l’objet médiateur le patient a utilisé, et à quel moment du processus thérapeutique. Une partie du travail du thérapeute consiste en effet à observer avec attention la mise en jeu de la sensorialité du patient, ou du groupe de patients, dans leur rapport au medium malléable, pour pouvoir ensuite s’interroger sur ce qui a pu être symbolisé, grâce à telle ou telle qualité symboligène propre à la matérialité de l’objet médiateur.

C’est la raison pour laquelle chaque médiation relève aussi, en deçà d’une théorie générale de la médiation, de modalités spécifiques de théorisation. Sans prétendre à une exhaustivité impossible dans le cadre de cet article, voici quelques références relatives à telle ou telle médiation ; pour l’écriture (Cadoux, 1999, Brun, 2013, 293-316), pour l’équithérapie (Lorin de Reure, 2016), pour les médiations numériques (Gillet, Brun, 2017), pour la médiation sensorielle olfactive (Leca, Brun, 2012), pour le modelage (Pankow G., 1969, 1981), pour la peinture (Brun A., 2007, 2013, 2014), pour le photolangage (Vacheret, 2000), pour le théâtre (Attigui, 2012), pour la vidéo (Lavallée, 2011).

Sensorialité du médiat et réactualisation d’une mémoire perceptive

De façon générale, dans les groupes thérapeutiques à médiation, la sensorialité du médiat permet le transfert d’expériences primitives sur l’objet médiateur et enclenche un processus de réactualisation d’expériences archaïques souvent catastrophiques, qui concernent les états du corps et les sensations. Pour des patients dans des problématiques de pathologies lourdes, en difficulté majeure pour accéder aux processus de symbolisation, les sensations procurées par la matérialité du medium réactivent en effet, sous forme de sensations hallucinées, des éprouvés corporels et psychiques impensables, des vécus originaires, comme les angoisses primitives évoquées par M. Klein, les terreurs sans nom de Bion ou les expériences d’agonie primitive décrites par Winnicott (46), soit des terreurs extrêmes, sans fin et sans limites, telles que le sujet se retire de cette expérience de mort psychique, pour pouvoir survivre.

Ces expériences primitives catastrophiques, qui n’ont jamais pu être représentées car elles n’ont, en quelque sorte, pas été éprouvées par le sujet, comme le souligne Winnicott, peuvent justement se réactualiser et se figurer au gré de la rencontre avec tel ou tel matériau, et s’imposent au patient sous la forme d’un vécu hallucinatoire dans la rencontre avec le medium malléable.

Autrement dit, l’expérience de la rencontre du medium dans l’espace thérapeutique permettra de transformer la sensation hallucinée en une forme perceptive : ces sensations hallucinées vont prendre forme dans l’objet médiateur et devenir ainsi figurables et transformables.

Un des enjeux principaux des médiations thérapeutiques dans ces cliniques consiste donc à pouvoir ainsi faire advenir à la figuration des expériences primitives non symbolisées, d’ordre sensori-affectivo-moteur. Le recours aux médiations permet d’engager un travail thérapeutique en deçà des processus de symbolisation secondaires vectorisés par les mots, et de figurer des expériences sensori-affectivo-motrices non symbolisées. Les enjeux du recours aux médiations se situent donc du côté d’une possible inscription des expériences primitives, non inscrites dans l’appareil de langage ; comme ces dernières sont expérimentées avant l’apparition du langage verbal, elles peuvent s’inscrire selon des modalités autres que langagières, tels que le langage du corps, le langage de l’affect… Il s’agit d’activer les processus de passage du registre perceptif et sensori-moteur au figurable, tout en conservant une place privilégiée à la verbalisation, indispensable à une utilisation thérapeutique des médiations susceptible de s’inscrire dans le champ de la psychothérapie psychanalytique. Dans la rencontre avec le medium malléable, le trauma apparaît transposé par le processus créateur en figuration : les médiations thérapeutiques permettent en quelque sorte un retour non traumatique des traumas. On assiste à une possible mise en forme de ces sensations hallucinées dans des formes primaires de symbolisation ou protoreprésentations (Brun, 2007, 2014, 2016).

Formes primaires de symbolisation

Dans le cadre des médiations thérapeutiques, le travail du Médium Malléable par les patients dans des problématiques psychotiques ou narcissiques identitaires, réactualise donc des sensations hallucinées et permet l’émergence et la mise en forme de formes primaires de symbolisation (Brun, Roussillon et coll., 2008) qui vont pouvoir se mettre en forme dans une matière. Quelles sont les logiques de l’émergence de ces protoreprésentations en lien avec le Médium Malléable et leur rôle dans l’accès à la symbolisation primaire et secondaire ?

J’ai (2014) dégagé les logiques de l’émergence et de la transformation des formes primaires de symbolisation à partir de l’hypothèse d’une chaîne associative formelle de groupe, essentiellement constituée de signifiants formels, qui permet de repérer l’enchaînement des formes à la fois dans les productions proprement dites et dans l’ensemble du langage sensorimoteur des patients confrontés au médium. Les patients autistes et psychotiques passent souvent d‘une irréversibilité et d’une destruction de la forme au début des groupes peinture, d’une matière vécue comme intransformable, à une possible transformation de la matière, pour ensuite accéder au fil du groupe à la possibilité de figurer des personnages et des scènes

En définitive, les médiations thérapeutiques permettent aux patients souffrant de pathologies lourdes, d’accéder à des processus d’appropriation subjective, à partir de leur travail du medium.

Évaluation des psychothérapies groupales à médiation

Au-delà du simple constat empirique de l’intérêt et de l’efficacité de ces dispositifs à médiation, comment montrer l’intérêt et la portée thérapeutique des thérapies à médiation ? L’ouvrage L’évaluation clinique des psychothérapies psychanalytiques, (A. Brun, R. Roussillon, P. Attigui et coll., 2016) défend l’idée qu’il est urgent d’inventer des méthodologies cliniques d’évaluation, notamment des dispositifs de médiations thérapeutiques. Nous avons élaboré une méthodologie clinique d’évaluation des dispositifs groupaux et individuels à médiation, avec la conception d’outils d’évaluation précis sous la forme de tableaux avec des critères d’évaluation différents selon les dispositifs de médiations thérapeutiques, comme la peinture, le modelage, le théâtre, la musique, mais aussi la médiation sensorielle olfactive, les thérapies avec poney : beaucoup de jeunes docteurs du CRPPC ont aussi contribué à ces travaux de recherche.

Nous avons proposé des systèmes d’évaluation qualitative fondés sur l’associativité, verbale, sensori-affectivomotrice et formelle (associativité en lien avec l’émergence des formes primaires de symbolisation), sur le langage mimogestopostural, sur les modalités spécifiques du travail du médiateur et sur les différentes formes de transfert, sur le matériau du medium, sur le cadre dans sa matérialité, sur les cliniciens, sur l’observateur écrivant, sur le groupe. Ces tableaux d’évaluation qualitative des dispositifs à médiation montrent l’efficacité et l’intérêt de l’approche psychanalytique groupale, dans un contexte de disqualification de l’approche psychanalytique en institution. L’intérêt porté à la question de l’évaluation est donc fondamentalement méthodologique : il s’agit en fait d’une méthode d’exploration pour s’interroger sur les fondements épistémologiques sous tendant les pratiques groupales de médiations thérapeutiques et pour sérier les processus à l’œuvre. Cette évaluation des dispositifs groupaux à médiation constitue un champ de recherche nouveau.

Enfin, l’ouvrage sur L’évaluation clinique des psychothérapies psychanalytiques amorce la construction d’un outil d’évaluation spécifique des processus de symbolisation, en cours de cure, à partir des logiques du jeu : Winnicott (1971) montre comment apprendre à jouer permet de transformer les situations les plus douloureuses en situations « bonnes à symboliser ». C’est dans cette perspective que R. Roussillon (2008) a déployé une hypothèse fondamentale pour la clinique : il faut retrouver les traces des jeux qui n’ont pas pu historiquement avoir lieu et les remettre en jeu dans le cadre thérapeutique. Il (ibid., 2016, 457-462) propose donc l’élaboration d’un modèle scientifique global fondé sur les opérateurs du jeu, utilisable au plan international et permettant de dépasser les particularités locales des pratiques de soin. Il s’agit par exemple de jeux de coucou, jeux de présence/absence, jeu de lancer/ramener, jeu de dévoration, jeu de la bobine (pas pareil ?), jeu du miroir avec exagération mimétique du comportement, jeu d’imitation, jeu de faire-semblant. Le repérage de l’émergence de différents jeux typiques dans le processus thérapeutique permet ainsi de construire un outil d’évaluation spécifique pour les médiations thérapeutiques destiné à compte (?) de l’évolution des processus de symbolisation donc du processus thérapeutique.

Dans cette perspective, je propose ainsi de dégager les logiques des processus de transformation au fil du travail thérapeutique pour les médiations thérapeutiques et de montrer (2017) comment la relance des jeux qui n’ont pas encore été joués, au sein du dispositif-cadre spécifique des médiations thérapeutiques, permet aux patients d’accéder aux premières formes de symbolisation. Cet amorçage ou réamorçage de jeux sensoriels partagés permettra aux patients d’évoluer d’une sensorialité sous le signe d’une désorganisation majeure, à un mantèlement sensoriel, à une organisation du registre sensorimoteur dans le lien au medium malléable, à la fois matière, matériel de jeu et thérapeute. Il s’agit donc d’une reprise du processus inachevé des jeux partagés avec l’environnement primaire, qui passe par le transfert de la sensori-motricité des patients sur le medium malléable dans sa matérialité et sur le cadre thérapeutique. Ce transfert de la sensorialité sur le medium met en jeu à la fois une intersensorialité et une intersubjectivité

Enfin, le CRPPC a proposé en 2016 un colloque sur le jeu suite à une recherche internationale et pluridisciplinaire sur Art, Médiation, Jeu, Créativité et Soin et de nombreux travaux sur ce thème sont en cours de publication.

Le modèle du jeu permet donc un travail thérapeutique axé autour du retour dans d’un non intégré dans la subjectivité. Un des enjeux principaux des médiations thérapeutiques dans les cliniques en difficulté avec la symbolisation consiste à pouvoir ainsi faire advenir à la figuration des expériences primitives non symbolisées, d’ordre sensori-affectivo-moteur. Il ne s’agit donc pas, pour le clinicien qui use de médiations thérapeutiques, de privilégier seulement l’expression d’une fantasmatique afférente à une production, mais d’interroger l’interaction entre la verbalisation associative, le lien transférentiel et le registre sensori-perceptivo-moteur en jeu dans l’exploitation de la médiation thérapeutique.

Citer cet article

Référence papier

Anne Brun, « Les médiations thérapeutiques », Canal Psy, 120 | 2017, 10-13.

Référence électronique

Anne Brun, « Les médiations thérapeutiques », Canal Psy [En ligne], 120 | 2017, mis en ligne le 01 mai 2020, consulté le 18 avril 2024. URL : https://publications-prairial.fr/canalpsy/index.php?id=1798

Auteur

Anne Brun

Professeure de psychopathologie et psychologie clinique, directrice du CRPPC

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