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LES INSTITORES ET LE COMMERCE MARITIME DANS L'EMPIRE ROMAIN *

À la fin d'un banquet resté célèbre, l'affranchi C. Pompeius Trimalchio Maecenatianus, homme plein de vie, de vin et de lui-même, gratifia ses invités du récit de sa spectaculaire ascension sociale, pour démontrer que la clé du succès était avant tout de nature économique et qu'elle résidait moins dans le fait d'avoir des complaisances sexuelles vis-à-vis de son maître et de sa maîtresse que dans l'audace dont on pouvait faire preuve au moment d'investir la part d'héritage laissée par celui-là et durement acquise, puis dans l'opiniâtreté qu'il fallait avoir en dépit des revers de fortune ! Le moyen de prédilection de ce parvenu pour faire fructifier sa fortune avait été le commerce maritime, et plus particulièrement l'importation de denrées alimentaires dans un but spéculatif. La passion des affaires l'avait poussé à armer cinq navires et à les charger d'une cargaison de vin pour approvisionner la capitale en période de pénurie. Le naufrage de toute l'expédition lui avait infligé une perte chiffrée à quelque trente millions de sesterces. Comme Jean sur la montagne, l'apprenti magnat avait reconstruit plus grand et plus beau qu'avant et il avait affrété une deuxième cargaison qui comprenait non seulement du vin, mais aussi de la viande de porc, des légumineuses, des esclaves et du parfum. Celle-là avait été la bonne, et le bénéfice net de l'entreprise s'était élevé à quelque dix millions de sesterces, que l'heureux entrepreneur s'était empressé de réinvestir dans la terre et la pierre, sources d'honorabilité sociale. Les rentrées s'étant succédées, le patron enrichi avait décidé de prendre

Topoi 9 (1999), fascicule 1 p. 145-164