LE BILINGUISME A L'ÉCOLE

En 1974, dans de nombreux pays du Tiers Monde, l'école est plus que jamais confrontée au choix des langues d'enseignement. Revendiquées comme moyen indispensable ď affirmer me identité culturelle, comme élément décisif dans la formation d'une conscience nationale, les langues utilisées dans les différents systèmes de formation posent aux éducateurs et aux responsables des systèmes d'enseignement de nombreux problèmes qui seront évoqués ultérieurement dans un numéro de la Revue Tiers-Monde. Nous présentons aujourd'hui deux articles consacrés au Maghreb : dans le premier, c'est un éducateur marocain, docteur en sciences de l'éducation, qui dénonce le « bilinguisme sauvage » de son pays et qui, à travers une analyse de ses méfaits, propose des solutions personnelles que d'aucuns pourraient qualifier d'utopiques ; le deuxième présente les résultats d'enquêtes menées en Algérie pour étudier le rôle de la situation linguistique dans le système scolaire et ses effets dans l'évolution sociale et politique du pays.

N.D.L.R.

LE « BILINGUISME SAUVAGE » :

Blocage linguistique

Sous-développement et coopération hypothéquée L'exemple maghrébin. Cas du Maroc

par Ahmed Moatassime*

L'échec du « bilinguisme » dans le Tiers Monde en général et au Maghreb en particulier n'a pas que des implications pédagogiques. Il participe aussi du sous-développement puisqu'il a des conséquences économiques, politiques et sociales, à l'intérieur comme à l'extérieur du pays. A ce titre, si l'on considère que les langues étrangères à l'école constituent un élément déterminant pour le développement et l'avenir des relations internationales, notamment entre le Tiers Monde et les pays industrialisés, il faudra mettre fin au blocage linguistique et culturel que sécrète leur étude à sens unique. Plus ou moins anarchique ou « sauvage », cette pédagogie linguistique en cours dans de nombreux pays du Tiers Monde risque, tôt ou tard si ce n'est déjà fait, de contrecarrer tout effort de développement et d'hypothéquer toute forme de coopération. Le débat actuel sur le « bilinguisme » au Maghreb, aussi riche soit-il, ne dépasse pas toujours les formes académiques connues à savoir : l'étude des rapports de force entre l'arabe classique considéré, à tort d'ailleurs,

619