Variations spatiales de la pluviosité dans les Alpes du Sud. Coïncidence constatée avec des variations de vitesse du ravinement1

Intérêt de l'étude

Des mesures d'érosion réalisées sur divers affleurements de marnes noires jurassiques des Alpes du Sud montrent des résultats divergents. Les valeurs d'ablation moyenne des roubines dénudées des Baronnies, à l'ouest de la Durance, dépassent 3 cm/an (Lecompte et ai, 1998), contre 1 à 1,5 cm dans la vallée du Buëch (Bufalo et ai, 1988, Olivry et Hoorelbeck, 1990) et, à l'est de la Durance, dans les bassins de Draix (Meunier et ai, 1995, Mathys et ai, 1996) et du Saignon (Rovera et ai, 1999) (fig. 1).

Sans préjuger d'éventuelles différences d'érodibilité des marnes étudiées - dont la technique de mesure varie d'ailleurs d'un site à l'autre — il convient de s'interroger sur l'influence d'une variation climatique ouest-est, susceptible, notamment, de moduler l'érosivité de la pluie : on sait classiquement (Schumm, 1956) que le ravinement est activé par les pluies concentrées et intenses (voir également les auteurs ci-dessus).

Or le climat moyen des Alpes du Sud, tel qu'il ressort des normales saisonnières et mensuelles établies par Météo-France (1986) varie, d'ouest en est, entre un régime de pluie franchement méditerranéen, et un régime continentalisé, où les maxima mensuels sont décalés vers l'été. C'est ce qu'illustre, par exemple, la comparaison des normales trentenaires (1951-1980) de Montauban-sur-Ouvèze {in Dumas et ai, 1987) et de Mar- coux (fig. 2). Un tel changement pourrait s'accompagner de différences de certains caractères des pluies retentissant sur leur plus ou moins grande agressivité (Alexandre et ai, 2000). Ceci peut être précisé en comparant des intensités d'averses. Cependant, celles-ci ne sont connues de nous, avec un certain recul que sur les stations du CEMA- GREF, à Draix, et du CNRS, dans les Baronnies. Le réseau de Météo-France fournit des informations plus diversifiées géographiquement, mais seulement au pas quotidien depuis de nombreuses années, les abats horaires n'étant, quant à eux, connus que trop récemment pour être valablement comparés entre stations. La distribution spatiale des pluies quotidiennes est toutefois corrélée avec les averses qu'elles cumulent (Alexandre et ai, 2000).

REVUE DE GEOGRAPHIE ALPINE 2001 №3