A PROPOS DU NOM DE « BACCHANTE »
attribué par les auteurs anciens à la figure artistique
de la compagne de Dionysos : un point du vocabulaire
de la critique d'art dans l'Antiquité.
Un des problèmes posés par les multiples appellations de la compagne de Dionysos est celui du nom à attribuer au personnage dans les très nombreuses scènes figurées où il est représenté '. Une série de textes des époques hellénistique et romaine peut apporter, sinon une réponse définitive, du moins un élément de réponse à cette question. Il s'agit de descriptions et commentaires d'œuvres d'art, peintes ou sculptées - et en particulier d'une εκφρασις - dont la compagne du dieu constitue le sujet, ou encore de documents variés, épigraphiques ou littéraires, faisant allusion à des représentations scéniques : extraits de tragédie, pantomimes et danses diverses qui ont pour sujet la figure dionysiaque féminine. Le personnage est, dans ces deux séries de documents, presque exclusivement désigné sous le nom de Bacchante.
Le propos de cet article est d'établir que pour les auteurs antiques la figure artistique de la compagne du dieu se nomme Bacchante et qu'une des explications possibles de la prédominance de cette appellation du personnage est dans la vogue extraordinaire que connaît aux époques hellénistique et romaine la tragédie dionysiaque d'Euripide Les Bacchantes comme en témoignent plusieurs types de documents. C'est la figure de la danse expressive et de la pantomime qui pourrait constituer une sorte d'intermédiaire entre le personnage de la tragédie, à laquelle elle emprunte ses épisodes les plus frappants, et celui des arts figurés.
Une première série de documents se réfère à des figures de Bacchantes peintes ou sculptées. Il s'agit de statues vues par Pausanias dans tel sanctuaire, de l'évocation d'un temple à décor dionysiaque plus fantaisiste comme dans Daphnis et Chloé ou encore de poèmes invitant peintres ou sculpteurs à représenter la compagne du dieu, et pour l'essentiel d'épi- grammes de V Anthologie Grecque célébrant des statues de Bacchantes ou des Tableaux de Philostrate à thème dionysiaque.
Deux de ces témoignages font exception à la règle qui attribue le nom de Bacchante à la figure artistique de la compagne du dieu. Il s'agit d'abord de la présence mentionnée par Pausanias aux frontons du temple d'Apollon à Delphes de Dionysos et des femmes Thyiades 2. Des découvertes récentes ont permis de reconstituer certaines figures du fronton
1 . Il s'agit, si l'on exclut les termes qui ne sont connus que par le témoignage unique d'un lexicographe ou d'un commentateur tardif, de Βάκχαι, Βασσάραι, Θυιάδες, Κλώδωνες, Λήναι, Μαινάδες et Μιμαλλόνες.
2. Pausanias, Χ, 19, 4.
