Travail partisan et sociabilités populaires
Observations localisées de la politisation communiste
Julian Mischi
Dans sa stratégie d'implantation territoriale, le Parti communiste français (PCF) a masqué les réseaux de sociabilité des milieux populaires qu'il a investis autant qu'il a participé à leur structuration. Par un double mouvement de différenciation vis-à-vis de l'extérieur et d'homogénéisation interne, il a entretenu une confusion entre sociabilité militante et sociabilité populaire, confusion reprise par certains observateurs usant de façon réificatrice des termes de « sociabilité rouge » ou de « bastion ouvrier ». Or, s'il est fructueux d'insérer les partis au sein des groupes sociaux qui les portent, il est également essentiel de distinguer la spécificité des formes militantes de mobilisation populaire. Cet objectif conduit à appréhender le militantisme politique dans ses contextes d'expérience et d'activité, tout en orientant également l'investigation vers le travail normatif de l'institution partisane. Pour explorer de façon sociologique la complexité des relations qui s'établissent entre un parti et les pratiques populaires locales, il est ainsi nécessaire de prendre en compte deux dimensions qui sont souvent séparées dans l'étude des organisations politiques, d'une part, leur ancrage social et, d'autre part, leur fonctionnement institutionnel1.
1. Sur cette distinction entre analyse sociétale et analyse organisa tionnelle, cf. Sawicki (F.), Les réseaux du Parti socialiste. Sociologie d'un milieu partisan, Paris, Belin, 1997, p. 7-13.
Politix. Volume 16 - n° 63/2003, pages 91 à 119