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Le masculin est-il plus productif que le féminin ?

[article]

Année 1992 96 pp. 113-124
Fait partie d'un numéro thématique : La productivité lexicale
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Michel ROCHÉ Université de Toulouse- Le Mirail

LE MASCULIN EST-IL PLUS PRODUCTIF QUE LE FÉMININ ?

Dans la création lexicale, le genre grammatical joue un rôle secondaire maie indispensable : chaque nouveau nom doit être caractérisé comme masculin ou féminin. Comment se fait l'attribution du genre ? On peut établir 1 qu'elle n'est ni aléatoire ni automatique. Elle résulte d'un rapport de forces dans lequel de nombreux facteurs — morphologique, phonologique, syntaxique, sémantique, lexical... — entrent en jeu, dans des proportions variables suivant les époques et les modes de formation. Nous n'évoquerons pas ici ces mécanismes, mais, puisque ce numéro est consacré à la productivité lexicale, leurs conséquences sur l'équilibre des genres dans le lexique. Il semble admis — sous réserve de vérification — que le français comporte « à peu près autant de noms masculins que de noms féminins » 2. Est-ce que la création lexicale respecte cet équilibre quantitatif ? Quels mots, quels domaines du lexique se trouvent associés à chaque genre ? Compte tenu des implications psycho- et sociolinguistiques de la catégorie du genre, cette répartition qualitative peut se révéler plus importante qu'un simple jeu de proportions.

Le problème ne se pose pas de la même façon, cependant, pour les noms de personnes et pour les autres. Pour les premiers, le déséquilibre est patent. Dans le Petit Robert, à peine plus de la moitié des noms / + humain/ sont enregistrés comme variables ou épicènes ; 40 % sont donnés comme seulement masculins, 6 % comme seulement féminins. Même si le rôle du masculin non marqué a sa part dans cette disproportion, son origine, on le sait, est surtout extra-linguistique : réfèrent exclusivement masculin pour certains mots, réticences à féminiser les autres (noms de professions, titres) lorsque le réfèrent lui-même devient mixte. A quoi s'ajoute un problème plus étroitement lexicographique : bandagiste et champignonniste peuvent être féminine d'après le Robert, mais pas chaîniste ou abolitionniste, tandis que dans le GLLF c'est l'inverse... Tout cela est maintenant bien connu 3, et nous n'envisagerons ici que les noms /-humain/ 4. Pour un simple aperçu du problème : les limites d'un article obligent à s'en tenir à quelques exemples et aux faits les plus saillants.

1. Le déséquilibre quantitatif

Globalement, sur un échantillon d'environ 11 000 noms — 1/3 du Petit Robert en nombre de pages dépouillées 5 — les proportions sont de 56 % de masculins pour 44 % de féminins. La différence est nette, elle n'est pas considérable. Mais si l'on compare les strates chronologiques correspondant aux différentes époques, on observe une évolution sensible. Dans le lexique héréditaire — mots latins ou germaniques transmis par la voix populaire — , les masculins sont minoritaires : 46 %, contre 54 % de féminins. L'apport de l'ancien français respecte à peu près les mêmes proportions (47 %/53 %), mais, parmi les mots nouveaux apparus à cette époque, les formations proprement françaises (dérivés, composés) sont déjà majoritairement masculines ; ce sont les très nombreux emprunts au latin, dont beaucoup de mots abstraits, qui font pencher la balance en faveur du féminin. En moyen français, le nombre encore

1. Michel Roche, De l'attribution du genre aux mots nouveaux dans la langue française, thèse, Toulouse, 1992. 2. Arrivé et al. 1986 : 281. 3. Voir en particulier les travaux d'Anne-Marie Houdebine et d'Edwige Khaznadar citée en bibliographie, et leurs communications au colloque Genre et Langage (Koskas et Leeman 1988). 4. On pourrait s'attendre à un clivage entre noms / + animé/ et noms /-animé/, puisque pour les premiers le genre peut être motivé alors que pour les seconds il est arbitraire. Mais de fait les noms d'animaux qui disposent de formes ou de mots différente pour exprimer le sexe ne sont qu'une petite minorité : la plupart se comportent comme les noms /-animé/ (cf. Dubois 1988 et Roche 1992 : 646-655). 5. Tranches alphabétiques de A à Cri- et de Sou- à Z, dans l'édition 1988. Avec les / + humain/, l'échantillon est de 13 150 noms.

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