DOSSIERS DU PERSONNEL,

MÉMOIRE DES PERSONNELS,

DÉMARCHE ET DIFFICULTÉS DES CHERCHEURS

Élise FELLER

«Archives à construire », le titre de cette première journée interpelle d'abord les entreprises, premières dépositaires des registres, dossiers et documents constitués pendant l'activité et parfois la retraite de leurs salariés. Il interpelle évidemment les archivistes amenés à prendre en charge cette masse documentaire, à en assurer le tri, la conservation, la communication. Mais il interpelle aussi le monde de la recherche, qui dans ce cas est à la fois «consommateur » des sources qui lui sont proposées, et «créateur » d'ensembles documentaires qui, convenablement documentés et sauvegardés, auront à leur tour valeur de source pour les recherches à venir.

Mon propos est ici de montrer que les chercheurs, historiens, sociologues ou ethnographes, qui s'attachent de plus en plus nombreux à l'histoire des personnels, sont amenés dans leurs investigations à construire des matériaux, élaborés tantôt à partir des sources écrites classiques, tantôt à partir des sources orales ou des témoignages. Ils constituent, en combinant l'approche quantitative et l'approche qualitative, des ensembles de données cohérentes, qui méritent une action de sauvegarde débouchant à terme sur des «archives de la recherche ». Au-delà des résultats publiés, il s'agirait de permettre une confrontation des méthodes et des expériences, de favoriser des opérations de réutilisation des données collectées, de comparer ou poursuivre les enquêtes entreprises, d'en cumuler ou corriger les résultats.

Le domaine de recherche qui nous occupe fournit beaucoup d'arguments dans ce sens. Longtemps négligé, il produit depuis une vingtaine d'années une floraison de travaux particulièrement stimulants pour les sciences sociales par la nouveauté de leurs problématiques et la diversité de leurs méthodes.