DIX ARGUMENTS POUR RÉVISER LE TRAITÉ DE MAASTRICHT
André Grjebine,
Fondation Nationale des Sciences Politiques, Centre d'Etudes et de Recherches Internationales
La création d'une monnaie unique s'inscrit dans la dynamique de l'intégration européenne l. Elle devrait constituer une étape majeure, d'une portée symbolique considérables, dans l'avancement vers un Etat fédéral européen ayant une puissance comparable ou supérieure à celle des Etats-Unis et du Japon. Mais, cette création ne doit pas se faire au détriment du développement économique et de l'équilibre social des pays membres.
Les structures économiques, sociales et culturelles des pays européens demeurent sensiblement différentes. Certes, les taux d'inflation se sont rapprochés ces dernières années et celui de la France est même inférieur actuellement à celui de l'Allemagne. Mais, c'est au prix de trois millions de chômeurs. En passant outre à ces différences, on risque de provoquer des situations explosives. Dans son dernier rapport annuel, publié en juin 1992, la Banque des Règlements Internationaux observe (pp. 143-144) que « si rien n'indique que tous les pays sont tenus de chercher à respecter les critères dès les premières évaluations, prévues pour 1996 et 1998, les efforts pour y parvenir pourraient rendre les taux de change et peut-être la politique budgétaire trop rigides, dans certains pays, pendant les années à venir ».
Le processus choisi pour parvenir à la monnaie unique est donc fondamental. Trois approches de la construction monétaire européenne étaient concevables. Selon la première, le passage d'une monnaie commune à la monnaie unique aurait été l'aboutissement d'un processus, sans doute long, de rapprochement des structures économiques et sociales des pays européens. Dans un premier temps, la priorié aurait donc été donnée à la mise en œuvre de mesures visant à favoriser ce rapprochement. La seconde
1 Pour une analyse critique plus détaillée du traité de Maastricht, le lecteur peut se reporter à mon étude publiée dans Le débat en septembre 1992 : «Après Maastricht : des écus et des chômeurs ?» Avec des commentaires critiques de Philippe Lagayette et Pierre Jacquet.
97