COMMUNICATION

QUELQUES SITES DE LA LIBYE ANTIQUE ET IBN BATTUTA, PAR M. ANDRÉ LARONDE, MEMBRE DE L'ACADÉMIE

II est bien connu que les voyages des Arabes occidentaux andalous et maghrébins ont donné naissance à un genre littéraire spécifique, celui de la rihla, journal de voyage qui donne non seulement la description de la route suivie, mais qui l'accompagne de remarques historiques, politiques, économiques, ethnographiques. L'œuvre d'Ibn Battuta tient une place de choix dans ce genre. Né à Tanger en 1304, mort probablement après 1369, Ibn Battuta partit en pèlerinage en 1305, et ne revint qu'en 1349 après avoir parcouru le Nord de l'Afrique, l'Arabie, l'Iraq et la Perse, l'Afrique orientale, la Russie du Sud et Constantinople, puis l'Asie centrale et l'Inde, et enfin la Chine, pour gagner ensuite les Maldives, l'Inde du Sud, Ceylan et le Bengale, et enfin Sumatra. Dans l'intervalle, il avait effectué six pèlerinages. Personnalité très riche, musulman sincère, mais doté aussi d'un tempérament épicurien, Ibn Battuta n'a fait œuvre de géographe que dans deux domaines : il a décrit de grands itinéraires, et il a enrichi notre connaissance de la toponymie. L'Afrique du Nord étant déjà bien connue, sa place est plutôt réduite dans l'œuvre. En ce qui concerne la Libye, elle n'est cependant pas indifférente.

Ibn Battuta avait quitté Tanger en l'an 725 de l'Hégire, soit 1325. Il gagna Tripoli, où il se maria, et il ne quitta cette ville qu'à la fin du mois Moharram 726, soit au début de janvier 1326. La caravane resta à Tripoli à cause du froid et de la pluie, chose somme toute banale dans l'hiver méditerranéen. Quant à Ibn Battuta, il gagna d'abord Msallâta, étape non identifiée avant Misurata. En fait, il faut reconnaître ici la région située au sud-est de Lepcis Magna, zone de collines fertiles, avec ses champs de céréales et d'oliviers, qui fut le cœur du territoire de la grande cité des Emporia1. C'est la région de Gusbat, que parcourut quatre