LES MISSIONS ORTHODOXES

EN PAYS MUSULMANS

DE MOYENNE- ET BASSE-VOLGA

1552-1865

Au milieu du xvie siècle, la marche conquérante des armées d'Ivan le Terrible vers les terres de l'Est, Volga, Oural et Sibérie occidentale, mit fin à un chapitre brillant de l'histoire de l'Islam, celui de la Horde d'Or et de ses héritiers, les khanats de Kazan, d'Astrakhan et de Sibiť.

A partir de ce moment et jusqu'à la Révolution de 1905, le territoire de la Russie orientale, islamisé dès le Xe siècle, disparaît de la carte du monde islamique. La doctrine musulmane traditionnelle n'avait pas prévu le cas du recul de l'Islam devant les infidèles. Certes, il y avait déjà eu le précédent de l'Andalus, mais les musulmans avaient abandonné l'Espagne, tandis que dans la région de la Volga ils étaient restés sur place en sujets d'un pouvoir infidèle. Ils vécurent oubliés et abandonnés de leurs coreligionnaires du Dar ul-Islam et pratiquement ignorés de leurs maîtres russes.

L'histoire de ces peuples musulmans connaît ainsi, entre le xvie et le début du xxe siècle, un long hiatus et nos connaissances sur leur vie, leurs rapports avec les Russes, leur attitude envers l'État russe sont insuffisantes. Les sources musulmanes, étrangères ou locales, font presque totalement défaut, et les sources russes ne parlent des sujets musulmans qu'à' l'occasion des révoltes, d'ailleurs nombreuses et sanglantes, des Tatars, Bachkirs et Kazakhs.

■Pourtant une institution russe — une seule — s'est constamment préoccupée du sort des musulmans, l'Église orthodoxe russe, à qui, dès la 'conquête de Kazan en 1552, fut confié le soin d'intégrer les allogènes hétérodoxes à l'État moscovite, et dont la tâche s'est poursuivie, avec des fortunes diverses, jusqu'en février 1917.

Le but de son action était la transformation des allogènes de races et de langues turques ou finnoises et de religion musulmane ou animiste