Cahiers Glotz, XIX, 2008, p. 187-199 JEAN ANDREAU

REMARQUES SUR L’ÉPIGRAPHIE DE L’INSTRVMENTVM DOMESTICVM

DANS LES PROVINCES DE LANGUE GRECQUE

Pour des périodes (la fin de la République et le Principat) où il n’existait aucune forme de coupure institutionnelle entre les deux moitiés de l’empire romain, il ne va pas de soi d’étudier ensemble, comme un bloc, toutes ses provinces de langue latine ou bien toutes ses provinces de langue grecque. La chose va d’autant moins de soi quand il est question d’épigraphie de l’instrumentum domesticum – et surtout si l’on se consacre à la partie grecque de l’Empire. Pourquoi cela ? D’abord, parce qu’une cinquantaine de cités grecques, dans la péninsule, dans les îles, sur les côtes d’Asie Mineure et en mer Noire, possédaient de vieilles traditions de marquage des amphores, passablement différentes du marquage qui, par la suite, se pratique en Italie et dans le monde romain. Après l’installation des Romains dans le monde grec, ces traditions grecques du marquage des amphores, dont je ne parlerai pas ici, disparaissent (elles ne se maintiennent nulle part au-delà des dernières décennies avant notre ère), mais, depuis longtemps, l’attention des chercheurs s’est concentrée sur elles, aux dépens des siècles de l’Empire1. Une autre raison est liée à la structure économique de l’Empire. L’étude des objets de la vie quotidienne et des instruments et outils (instrumentum domesticum)

et celle des inscriptions que portent ces objets et instruments se fragmentent en un certain nombre de sous-disciplines spécifiques et de bibliographies distinctes. Même au sein de chaque sous-discipline, il y a parfois plusieurs catégories et sous-catégories. En matière d’amphores, par exemple, les marques appliquées avant cuisson désignent dans certains cas le fabricant de l’amphore et dans d’autres le producteur du contenu. Les inscriptions peintes ne s’interprètent pas de la même façon pour tous les types d’amphores. Mutatis mutandis, on trouve une situation un peu analogue dans le domaine de la céramique de table et dans celui des lingots (les lingots d’étain ou de cuivre ne peuvent pas s’étudier exactement de la même façon que ceux de plomb). Face à cette forêt d’objets, de techniques de marquage et de mouvements commerciaux entre diverses régions, la Méditerranée occidentale a un gros atout : la présence de Rome et de l’Italie. L’instrumentum

domesticum est évidemment lié à l’approvisionnement et à la vie économique ; en Méditerranée occidentale, les études de ce domaine s’ordonnent, pour