NOBILITAS, QUID EST?
UN PROCÈS À TAIN-L'HERMITAGE EN 1408
par Jacques MOURIER
On a beaucoup étudié les origines de la noblesse et la chevalerie ; la noblesse de l'époque moderne a, elle aussi, suscité de beaux travaux1. Mais, pour la fin du Moyen Age, ce groupe social a surtout été éclairé dans son rôle militaire2 et peu dans son statut et dans ses réalités sociologiques ; depuis l'hypothèse avancée par Marc Bloch jusqu'à l'essai d'interprétation tenté par Guy Bois, la plupart des historiens ont cherché à démontrer qu'il y avait une crise nobiliaire en cette fin du Moyen Age, même si certains autres ont davantage nuancé ce point de vue3.
Le Dauphiné et le Vivarais, cadre géographique de mon enquête, n'ont guère fait, sur ce point d'histoire sociale, l'objet d'études d'ensemble, hormis le travail de Gérard Giordanengo pour le Dauphiné du xive siècle4. C'est pourquoi il me semble intéressant et très utile, pour mieux appréhender la socité médiévale, de présenter un docu-
1 . Citons les travaux de Georges Duby ou de Michel Parisse et la thèse de Jean Meyer sur la noblesse bretonne au xvm« siècle (1966).
2. Voir Philippe Contamine, Guerre, État et société à la fin du Moyen Age..., Paris, 1972 ; voir aussi Françoise Autrand, L'image de la noblesse en France à la fin du Moyen Age : tradition et nouveauté, dans Académie des inscriptions et belles lettres, Comptes rendus des séances, 1979, p. 340-354, et R. H. Lucas, Ennoblement inlate medieval France, dans Mediaeval Studies, 1977, p. 239-260.
3. Marc Bloch, Les caractères originaux de l'histoire rurale française, Paris, 1960, p. 107- 118. Les idées de cet historien ont été suivies par Robert Boutruche, Seigneurs et paysans du Bordelais..., Paris, 1947 ; voir aussi Guy Bois, Noblesse et crise des revenus seigneuriaux en France aux XIVe et XVe siècles : essai d'interprétation, dans La noblesse au Moyen Age, Paris, 1976, p. 219-233. Au contraire, Pierre Charbonnier, Guillaume de Murol, un petit seigneur auvergnat au début du XVe siècle, Clermont-Ferrand, 1973, p. 243-251, montre la vitalité du noble qu'il étudie.
4. Gérard Giordanengo, La noblesse dauphinoise au temps du dauphin Humbert II, 1333- 1349, dans École nationale des chartes, positions des thèses, 1969, p. 48-59 ; voir aussi l'important article de Vital Chomel, Francs et rustiques, dans Bulletin philologique et historique du Comité des travaux historiques, 1965, p. 285-308. Les monographies sur les seigneuries et les nobles dauphinois sont très rares.
Bibliothèque de V École des chartes, t. 142, 1984.
