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Un conflit « routier » : observations sur les causes de la guerre de Tacfarinas

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Année 1982 18 pp. 11-25
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Antiquités africaines t 18, 1982, p. 11-25

UN CONFLIT « ROUTIER » : OBSERVATIONS SUR LES CAUSES DE LA GUERRE DE TACFARINAS*

par Jean-Marie LASSÈRE

La question des causes de l'affrontement entre Rome et les Musulames commandés par Tacfarinas ne s'est pas posée aux auteurs de l'Antiquité. Seul Tacite accorde à cet épisode des développements appréciables dans les Annales '. Les autres sources sont infimes 2 ; il est très remarquable que Pline et Dion Cassius l'ignorent totalement, et digne aussi de remarque que Suétone n'y fasse aucune allusion 3. Or Tacite ne cherche aucunement à démêler quels purent être les motifs d'un conflit qui devait durer sept ans. Dédaigneux des leçons de Polybe, il néglige la cause et le prétexte, et se borne à indiquer le commencement de l'action, à savoir le rassemblement de troupes pillardes progressivement entraînées à une discipline de combat et grossies de Maures auxquels étaient réservés les coups de main, incendia, caedis et terrorem 4.

Cette absence d'indications antiques sur les causes de la guerre vient de ce que Tacite, selon R. Syme 5, tenait son information des acta senatus, notices brèves d'histoire intérieure, où des développements sur un tel sujet n'avaient pas leur place. Cette lacune a conduit les historiens contemporains à adopter des positions diverses face à l'ignorance des origines du conflit. R. Cagnat, qui s'inspire directement de Tacite, imite sa discrétion 6 ; même silence d'Albertini 7, de Homo 8, de W. Orth 9 et, plus curieusement, de I. Burian 10. Ch. A. Julien s'était borné à

* Communication présentée le 7 mars 1981 devant le « Centre de géographie historique » (devenu depuis le Groupe de recherches sur l'Afrique antique) de l'Université de Montpellier III.

1 Tacite, Annales, II, 52 ; III, 20-21, 32 et 73-74 ; IV, 23-26.

2 Velleius Paterculus, II, 125 (simple allusion au proconsulat et au triomphe de Junius Blaesus) ; Aurelius Victor, De Caesaribus, II, 3 : compressa Gaetulorum latrocinio quae, Tacfarinate duce, passim proruperant ; cf Epitome de Caes. II, 8 ; on ne trouve rien dans Orose.

3 Est-ce le signe qu'à Rome l'événement n'a pas eu toute l'importance que lui donnent les auteurs qui croient à un « parti de la paix » ?

4 Tacite, Annales, II, 52,4.

5 Svme (R.), Tacfarinas, the Musulamii and Thubursicu. Studies in honour of A.C. Johnson, 1 95 1 , p. 1 1 3- 1 30 ; plus récent, Tacitus, 2 vol., Oxford, 1 958. A la p. 37 1 , l'A. montre que, à suivre Tacite, la guerre de Tacfarinas n'apparaît que comme une résurgence des troubles de Numidie temporairement apaisés par la victoire gétule dix ans plus tôt.

6 Cagnat (R.), L'armée romaine d'Afrique et l'occupation militaire de l'Afrique sous les Empereurs. Paris, 2e édit. 1913, t. 1, p. 9.

7 Albertini (E.), L'empire romain (Peuples et Civilisations, t. 4). 1929, p. 88-89.

1 Homo (L.), Le Haut Empire (Histoire Générale, histoire romaine, t. 3). 1941, p. 220. 9 Orth (W.), Die Provinzialpolitik des Tiberius. Diss. Munich, 1970, 145 p.

10 Burian (I.), Die einheimische Bevölkerung Nordafrikas von den Punischen Kriegen bis zum Ausgang des Prinzipats, in Die Araber in alten Welt, t. 1 , Berlin, 1 964, p. 457. Je n'ai pu consulter, du même auteur, un article rédigé en bulgare (avec rés. en russe) sur La tactique des tribus africaines dans leur lutte contre les Romains au temps de Tibère. V.D.I., n° 60, 1957, p. 138-147.

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