Sandrine LAVAUD*

LA PALU DE BORDEAUX AUX XVe et XVIe SIÈCLES**

La Palu de Bordeaux, dans son état originel, est mal connue, car elle a été transformée par les travaux de drainage du XVIIe siècle puis par l'urbanisation. C'est un espace a priori hostile, à cause du milieu marécageux, et dénoncé comme tel par ceux qui l'ont asséché. Pourtant, à la fin du Moyen Âge et au début de l'époque moderne, la palu apparaît fréquentée et recherchée ; en témoignent, par exemple, le réseau dense des mouvances seigneuriales et les obstacles à l'assèchement. Pourquoi un tel engouement pour une zone marécageuse ? Quels atouts présente-t-elle ?

À la fin du XVIIIe siècle, l'abbé Baurein en propose une description : « On appelle palus, dans ce diocèse [de Bordeaux], certaines lisières de terre qui peuvent avoir un demi quart de lieue de profondeur et qui régnent sur presque toute la longueur des deux rivages formés par la Garonne et la Dordogne, depuis au-dessous de Langon jusqu'au bec d'Ambez et depuis ce dernier lieu jusqu'à trois lieues au-dessus de Libourne. » À propos de la palu de Bordeaux, il précise : « Ce qu'on appelle palu et marais de Bordeaux... est donc une lisière de terre grasse et fertile placée sur la rive gauche de la Garonne qui s'étend depuis l'Estey Crebat qui est au milieu des Chartrons, jusqu'à la Jale de Blanquefort. Une partie de cette lisière est complantée en vignes ; une autre est cultivée en prairies et l'autre partie est construite en chays et en maisons. Une partie des Chartrons et le lieu appelé Bacalan sont compris dans celle-ci. Indépendamment de cette palu qui est la partie la plus voisine de la rivière, il existe, en second lieu, un marais qui fut desséché par Conrat Gaussen, Flamand, en vertu d'un accord que la ville passa avec lui en l'année 1599. Ce lieu, qui estoit plus bas que les terres qui l'environnoient, estoit le réceptacle