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La «Méditerranée» de Fernand Braudel vue d'Istamboul

Published online by Cambridge University Press:  11 October 2017

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Publier ou republier des comptes rendus concernant les livres qui nous sont chers dans cette maison, — travail superflu. Mais, quand un excellent travailleur comme notre ami et collaborateur Orner Lutfi Barkan consacre, de son point de vue d'historien turc ouvert aux méthodes et à l'esprit des Annales, une étude à un livre aussi considérable, à tous égards, que La Méditerranée de Fernand Braudel, — nos scrupules cèdent le pas à des considérations d'ordre scientifique. L'étude d'Orner Lutfi Barkan montre excellemment la nouveauté, mieux, quelques nouveautés, du livre de notre ami et ce qu'il apporte aux historiens turcs. Elle contient par surcroit des promesses bien satisfaisantes — et même plus que des promesses : la prochaine mise à jour d'ouvrages et d'études fondés sur les Archives turques et concernant la population, les recensements, l'allure des prix, etc., dans la Turquie moderne. C'est toute une nouvelle province d'Histoire qui va s'ouvrir à nous.

Type
Essais
Copyright
Copyright © Les Éditions de l’EHESS 1954

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References

page 192 note 1 Les résultats de nos recherches seront publiés prochainement sous forme de livre par la Société d'histoire turque. On pourra trouver dès maintenant un tableau général de la population de l'Empire ottoman, établi d'après les documents que nous avons étudiés, dans notre article : La Science de la démographie historique et VHistoire ottomane, actuellement en cours d'impression pour le tome X de la Revue de Turcologie (Tiirkiyat Mecmuasi), dédié au professeur Fuat Kôprulii à l'occasion de son soixante-dixième anniversaire.

page 192 note 2 Par exemple p. 348, n. 3, il est dit que, d'après une source, la population recensée en Anatolie à la fin du xvie siècle (1594) se monte à 478 000 hab. Ce chiffre se rapproche, d'une façon surprenante, du chiffre de 479 150 que nous avons relevé pour cette région au début de ce siècle (1525) dans les « registres de recensement et d'impositions ». C'est-à-dire que les renseignements qui appartiennent, d'après nos recherches, à l'année 1525 et seulement à l'Anatolie occidentale (selon l'organisation administrative de l'époque, province d'Anatolie signifie Anatolie occidentale), par leur manque de précision risquent d'être appliqués à toute l'Anatolie et pour la fin du xvie siècle, comme c'est le cas dans la source utilisée par le professeur Braudel. De même, les chiffres donnés au sujet de la « Grèce » dans une autre source ne sont pas sûrs, parce qu'on n'a pas précisé exactement les limites de ce pays. L'auteur, tout en signalant ces sources et ces renseignements, a compris qu'il ne pouvait édifier sur eux un jugement définitif.

page 194 note 1 Nous avons consacré nos efforts à défendre la thèse contraire en étudiant les déportations comme méthode de peuplement et de colonisation en Turquie (t. XI de la même revue), où nous faisons une large place aux particularités de l'état démographique. Nous espérons avoir prouvé l'existence d'une population nombreuse en Anatolie par le besoin qu'ont ressenti les Turcs de s'étendre vers l'Ouest, de s'installer en Anatolie occidentale et dans la partie orientale de la péninsule balkanique — régions qu'ils ont transformées en une véritable patrie. Les renseignements qu'a donnés M. Braudel sur l'origine de l'Empire ottoman permettent aussi de justifier ces idées. N'est-il pas nécessaire, pour juger l'invasion et l'occupation turques dans les Balkans comme une révolution sociale et pour croire au rôle joué par les villes turques comme centres de diffusion de la culture turque et islamique, d'accepter l'idée d'une sorte de supériorité démographique? — D'ailleurs, il convient peut-être de séparer les unes des autres les périodes d'invasion qui se sont succédé ; il convient également de distinguer soigneusement les régions où les Turcs se sont installés en grand nombre et les régions où ils n'ont pu le faire. De fait, les conditions d'installation des Turcs en Grèce, dans les îles de la mer Egée, dans la partie montagneuse de la Yougoslavie et dans les régions transdanubiennes donnent raison à Fernand Braudel.

sommes persuadé qu'il faut considérer comme fondamentale l'installation des Musulmans en Egypte et en Afrique du Nord. Nous ne pensons pas que les Musulmans, qui ont conquis et occupé autrefois l'Espagne et les îles de la Méditerranée, n'aient compris que quelques Syriens, des Berbères chassés d'Afrique et des Arabes nomades. Une poignées d'Arabes n'aurait pu, de façon aussi prolongée, imposer la culture et l'influence islamique en Espagne. Un groupe d'hommes qui prétend être le créateur d'une culture nouvelle ou bien son propagateur ou encore son défenseur dans un pays étranger, ne doit-il pas être dans une position favorable, du point de vue démographique, vis-à-vis du peuple à qui il veut imposer cette culture?

page 196 note 1 M. Braudel juge inutile de s'étendre sur la théorie, sans fondement, selon laquelle les Ottomans, en fermant les voies commerciales orientales passant par leur Empire, auraient obligé les Européens à trouver une autre voie pour aller vers l'Inde. Suivant lui, on peut soutenir la théorie tout à fait inverse : au moment où les Turcs trouvent la possibilité d'avancer rapidement en Europe centrale, les États européens ont leur attention entièrement tournée vers les découvertes d'outre-mer et l'acquisition de colonies ; il ne faut donc pas s'étonner qu'une partie du monde chrétien soit restée sans défense en face des Turcs.

page 198 note 1 Cf. Akdag, Mustafa, Les Crises économiques dans l'histoire de la Turquie : les révoltes des étudiants, dans Revue de la Faculté des Sciences Economiques de l'Université de Stamboul, t. XI, p. 361387 Google Scholar (partie turque).