UNE INTUITION OUBLIEE : LE MYTHE DE LA MÉROPIE.
En 1492, la découverte de l'Amérique troubla profondément les élites européennes et les mena à retrouver et à disserter de nouveau sur le mythe de l'Atlantide, auquel plus personne ne s'intéressait depuis le vi' siècle ap. J.-C. Toutefois, il existe un autre mythe antique qui, en dépit de ce contexte favorable, ne suscita que très peu d'attention, alors qu'il aurait bien mieux résolu la perplexité des humanistes que celui de l'Atlantide. Il s'agit du mythe de la Méropie, un immense continenl au-delà de l' Atlantique qui, lui, n'aurait jamais été englouti et serait toujours resté aussi ferme que. l'Europe, l'Afrique et l'Asie. A la Renaissance, seuls le géographe Ortélius et l'astronome Kepler se penchèrent sur ce mythe, et aujourd'hui encore, il demeure très peu connu. Au cours du xx' siècle, seul un petit nombre de chercheurs l'a évoqué, à savoir Pierre Raingeard dans Le llspî, tou TcpoCTCoTiou de Plutarque ', Robert Graves dans Les Mythes grecs, D. Larmour et A. Georgiadou dans Lucian's Science Fiction Novel et Pierre Vidal-Naquet dans L'Atlantide, petite histoire d'un mythe platonicien 2. A cette liste, il convient d'ajouter deux auteurs qui y ont fait de brèves allusions : François Ollier, dans une édition commentée des Histoires vraies de Lucien, et Guy Lacaze dans une autre édition de la même œuvre 3. A l'origine de cette méconnaissance du mythe de la Méropie, il faut incriminer la rareté de ses occurrences. De fait, il n'apparaît que chez deux auteurs que sépare l'intervalle entre le iv* siècle av. J.-C. et le il1 siècle ap. J.-C. : Théopompe de Chio
1 . Cf. P. Raingeard, Le I lepl toO rcporKÔTtou de Plutarque, Chartres, Durand, 1934, p. 136-137 et XI-X1I. Le travail de ce ehereheur étant très important, nous en reparlerons ultérieurement aux pages 1 13 et 1 14 du présent article.
2. Concernant toutes ces références, cf. R. Graves, Les Mythes grecs, Paris, Fayard, l%7 (traduction : M. Haie/.), p. 138, 442-443 ; 0. Larmour, A. Georgiadou, Lucian's Science Fiction Novel, Leyde, Boston, Cologne, J. Brill, 1998, ]>. 17,231-232 ; I'. Vidal-Naquet, U Atlantide, petite histoire d'un mythe platonicien, Paris, les Belles-Lettres, 2005, p. 4S-46.
3. Cf. Lucien, Histoire vraie, Paris, P.U.K, Erasme, 1962 (commentaire : F. Ollier), p. 78-79, 98 ; Lucien, Histoires vraies et autres œuvres, Paris, le livre de poche, 2003 (traduction : G. Lacaze), note 3 de la p. 283.
