Bibliothèque de l'École des chartes, t. 158, 2000, p. 283-292.
DEUX LETTRES INÉDITES DE LA PREMIÈRE MISSION EN ORIENT D'ANDRÉ DE LONGJUMEAU (1246)
par Pierre-Vincent CLAVERIE
Le contexte des croisades permit à la papauté médiévale de renouer des relations diplomatiques avec plusieurs églises orientales, réputées hérétiques depuis les conciles œcuméniques d'Ephèse et de Chalcédoine. L'adhésion des maronites puis des Arméniens à la foi romaine, en 1182 et 1198, précéda dans cette logique les ambassades dépêchées en 1233 et 1237 par le pape Grégoire IX auprès de l'église géorgienne et du catholicos nestorien Sabriso V. Son successeur, Innocent IV, délégua en Orient en 1245 trois ambassades vouées à en apprendre davantage sur les intentions de baptême des Mongols 1. Les missions d'Ascelin de Crémone et de Jean de Plancarpin, lancées en mars et avril 1245, sont bien connues grâce au propre témoignage de leurs acteurs et aux travaux de Paul Pelliot. Ce dernier fut le premier à étudier, en 1922, la réponse adressée au pape par le Grand Khan Guyuk le 11 novembre 1246 2. Le ton méprisant affecté par les Mongols déçut grandement la papauté.
Il n'en fut pas de même des lettres rapportées de Perse par André de Longjumeau en 1247, à l'issue d'un voyage de deux années. Ces confessions de foi, rédigées par divers prélats jacobites ou nestoriens de Syrie, figurent en bonne place dans les registres d'Innocent IV en raison leur dimension œcuménique 3. P. Pelliot, qui les a étudiées attentivement en 1924, soupçonnait qu'elles ne constituaient qu'une partie des documents rapportés d'Orient par André de Longjumeau. Ce dernier semble en effet avoir rencontré au cours de sa mission quatre émirs ou princes de Syrie, dont la papauté enregistra également une série de lettres 4.
1. Jean Richard, La papauté et les missions d'Orient au Moyen Age (xnf-xv3 siècles), 2e éd., Rome, 1998 {Collection de l'Ecole française de Rome, 33), p. 70-72. La mission confiée à Laurent de Portugal le 5 mars 1245 semble pour sa part avoir été repoussée au mois de juillet 1246 (ibid., p. 60-61).
2. P. Pelliot, Les Mongols et la papauté, [I], dans Revue de l'Orient chrétien, t. 23, 1922-1923, p. 3-30. Les sources, on le sait, sont nombreuses : Simon de Saint-Quentin, Histoire des Tartares, éd. J. Richard, Paris, 1965 (Documents relatifs à l'histoire des croisades publiés par l'Académie des inscriptions et belles-lettres, 8) ; Jean de Plan Carpin, Histoire des Mongols, trad, dom Jean Becquet et Louis Hambis, Paris, 1965 ; Alf Onnerfors, Hystoria Tartarorum C. de Bridia monachi, Berlin, 1967 (Kleine Texte für Vorlesungen und Übungen, 186).
3. Odorico Rinaldi, Annales ecclesiastici, éd. Domenico Mansi, Lucques, 1747, t. II (t. XXI des Annales de C. Baronio), § xxxii-xliii, p. 379-383.
4. P. Pelliot, Les Mongols et la papauté, [II], dans Revue de l'Orient chrétien, t. 24, 1924, p. 225-335.
Pierre- Vincent Claverie, 42 boulevard Masséna, F-75013 Paris.
