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Femmes, réconciliation et fin de conflits dans l’arc nord méditerranéen médiéval et moderne

Femmes et conflits dans l’imaginaire historié de la Rome des Valois

Mujeres y conflictos en el imaginario historiado de la Roma de los Valois
Women and conflicts in the historically imagined Rome of the Valois
Pierre Pretou

Résumés

La réception et appropriation de l’histoire romaine sous les Valois grâce aux copies et traductions de luxueux manuscrits possédés par ces rois, leurs parentèles et grands officiers, relient l’imaginaire médiéval de l’Antiquité à cette dynastie. L’iconographie politique française des XIVe et XVe siècles associe la gouvernance de la Cité de Rome aux origines du royaume depuis la traduction du Ab Urbe Condita de Tite-Live par Pierre Bersuire, les copies des Fleurs des histoires de Jean Mansel, les traductions du De Civitate Dei par Raoul de Presles et la traduction vernaculaire des écrits de Valère Maxime par Simon de Hesdin et Nicolas de Gonesse. Par milliers, ces miniatures sur un univers d’hommes et de cités, ordre et désordre, paix et vindictes, concordes et discordes, identifient l’espace public, la prise de parole, le juste pouvoir, la contestation, la tyrannie, la circulation pacificatrice de la loi, mais font très peu place aux femmes, sinon pour les associer aux scènes sanglantes. L’analyse sérielle du corpus étroit de la figuration féminine montre que l’appropriation par l’image de l’histoire romaine donne une place singulière au genre dans la représentation des conflits et leur résolution en milieu urbain. Les femmes peintes qui surgissent des histoires romaines de la fin du Moyen Âge français escortent un monde d’hommes antiques expérimentant le rôle apaisant de la loi. Peut-on conclure pour ces rares femmes qui accompagnent les scènes de conflits et paix que le peintre leur accorde un rôle historique de médiatrices et réinterprète les faits et gestes des femmes romaines ? Repense-t-il la construction de l’ordre public à la fin du Moyen Âge français ou s’agit-il d’abord de la formulation historiée d’une théorie politique du mariage ?

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Texte intégral

  • 1 Nous restreignons ici notre enquête aux manuscrits enluminés conservés par la Bibliothèque Sainte-G (...)
  • 2 Marie-Hélène TESNIERE, « Les Décades de Tite-Live traduites par Pierre Bersuire et la politique édi (...)

1Le remarquable succès des multiples copies de la translation des histoires romaines commandées par Jean II le Bon lie indéfectiblement l’imaginaire médiéval de l’Antiquité au lustre souverain des Valois. Cette appropriation de l’histoire fit florès dans quantité de copies possédées par cette dynastie, leurs parentèles ou leurs grands officiers1. L’iconographie française des XIVe et XVe siècles, à l’occasion d’un vertigineux mélange de représentation des magistratures des bonnes villes et de démembrement de la curia regis, y assimilait l’exercice du pouvoir à la gouvernance de la Cité terrestre – la cité de Rome – aux nobles origines du royaume lui-même. Cité et royaume s’imbriquant, une vision politique se greffait donc sur la réception des histoires romaines à la cour de France. Au point de départ des succès courtisans de cette imagerie se trouvait la traduction du Ab Urbe Condita de Tite-Live par Pierre Bersuire2. Y surgissaient des motifs qui se prolongeaient ensuite très largement dans les copies des Fleurs des histoires de Jean Mansel, les traductions du De Civitate Dei engagées par Raoul de Presles, ainsi que les écrits de Valère Maxime portés en langue vernaculaire par Simon de Hesdin et Nicolas de Gonesse. Flanqués par les armes des Valois ou de leurs proches, ces manuscrits du pouvoir français étaient politiques à double titre : ils représentaient le pouvoir et étaient possédés par celui-ci. Ces luxueux manuscrits contiennent des milliers de miniatures représentant les alternances d’ordre et de désordre, de paix et de vindictes, de concordes et de discordes. Les peintres identifient clairement l’espace public, la prise de parole, le juste pouvoir, la contestation, la tyrannie et la circulation pacificatrice de la loi, mais la logique de l’insertion des femmes dans cet ensemble paraît obscure. Très rarement présentes dans cet univers d’hommes et de murs de cités, leur figuration s’associe fréquemment aux scènes sanglantes. Nous avons donc ici un monde politique et historique parfaitement masculin mais aléatoirement émaillé de femmes introduites par des fenêtres de violences civiques. Engagée sur ce corpus étroit, l’analyse sérielle de la figuration féminine démontre que l’appropriation de l’histoire romaine par l’image accorde une place singulière au genre dans la représentation des conflits et leur résolution en milieu urbain. Les femmes peintes des histoires romaines de la fin du Moyen Âge français nous invitent à considérer la place du genre dans la validation de cette concorde recherchée par les magistrats antiques et dont les officiers du XVe siècle entreprirent de s’approprier l’histoire. Or, tandis que le texte traduit ne les y invite pas, les femmes qui surgissent de cette imagerie médiévale escortent un monde d’hommes antiques expérimentant le rôle apaisant de la loi. La présence féminine y accompagne les scènes de conflits et de paix mais doit-on en conclure que le peintre leur accordait un rôle historique de médiatrices sédatives au cœur de la violence d’un univers antique réinterprété ? Les codes iconographiques, à première vue, semblent l’indiquer, mais les contextes figurés – irruption de la domesticité dans le conflit, prégnance des devoirs afférents au mariage, entrelacements de la parentèle avec la citoyenneté – renvoient la lecture de l’image à une construction subtile reliant la paix publique à la paix domestique. En interprétant les faits et gestes des femmes romaines, les manuscrits des Valois nous inclinent à repenser la construction de l’ordre public sur son socle de domesticités, telle qu’elle est engagée par la fin du Moyen Âge français, une fois fondée sur ce qui nous apparait ici comme une formulation historiée d’une théorie politique du mariage.

La miniaturisation de la Rome antique et la place du genre

  • 3 On consultera ici une vignette dans : Paris, BnF, Français 33, fol. 15v. Tite-Live, Ab urbe condita(...)
  • 4 Sur les bâtons levés par les sergents dans l’iconographie : Christine BELLANGER, « La figure du ser (...)
  • 5 Le motif le plus récurent autorisant des représentations de la banlieue est celui des Romains colon (...)

2Les centaines d’images réalisées pour les commanditaires des histoires romaines présentent des similitudes frappantes. La Rome antique selon les peintres de la fin du Moyen Âge français est une cité hérissée de murs et peuplée de magistratures. L’analogie qui peut être conduite avec les bonnes villes du roi est évidente : l’espace urbain, compartimenté par les murailles, distingue des espaces publics, souvent rehaussés d’un emblématique pavement matérialisant l’opinion publique, alterné par des espaces clos, stylisés, et abritant les gens de pouvoir. Le prototype miniaturé déploie une composition qui force la place des murailles et écrase un léger trait d’horizon comprenant un parfois un léger dévoilement paysager et campagnard figurant une hypothétique banlieue3. Le sujet est d’abord la cité et ses espaces politiques. Un espace clos ou fermé, inséré entre les murs, accueille les consuls de la ville, caractérisés par l’inversion chromatique de leurs vêtements qui indique ici leur complémentarité politique. Ces magistrats ordonnent le débat duquel nait l’ordonnancement de la loi, loi qui sort par la porte signifiée par un sergent à verges4. L’on comprend alors que c’est la décision de qui est matérialisée par son exécution. D’identiques sergents, verges levées, répliquent la décision aux portes de la ville. Les propos des artistes se font donc clairs : la loi est délibérée dans l’espace clos du pouvoir, puis elle transite à travers l’espace public caractérisé par le pavement urbain et émaillé de quelques Romains discutant, Romains qui matérialisent une forme d’opinion publique. Les images assimilent donc « cité » et res publica en peuplant leurs enceintes de débats, de décisions législatives et d’exécuteurs de la loi. Au-delà des murailles, les peintres dévoilent parfois une extension campagnarde, policée par des clochers et des moulins. Il est cependant rare que les juridictions de la banlieue soient figurées5.

Figure 1. Vie quotidienne à Rome.

Paris, BnF, Français 260, fol. 166. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre Bersuire. 1er quart du XVe siècle.
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  • 6 Paris, BnF, Français 260, fol. 166. Tite-Live, Ab urbe condita
  • 7 Il peut être considéré comme un hapax féminin dans ce manuscrit singulièrement vide de femmes.

3Alors qu’une foule de personnages est insérée dans ces réalisations, force est de constater que nous sommes en face d’un monde quasi exclusivement constitué d’hommes. Il faut noter que les translations et les adaptations des histoires romaines n’invitent que rarement à considérer la population féminine de la ville. Les programmes iconographiques ne sont donc pas prompts à représenter les femmes au cœur des contextes historiques, qui sont très souvent militaires. Toutefois, certaines scènes peintes, parce qu’elles investissent un thème général ou élargi, peuvent s’affranchir de cette exclusivité masculine. La peinture du motif des Romains discutant, des Romains priant, de l’ordre public ou de quelques massacres génériques, autorisent les miniaturistes à s’affranchir du déroulé chronologique de leurs récits antiques. Suivons ici un exemplaire des Décades de Tite-Live, selon Pierre Bersuire au début du XVe siècle6. Le manuscrit, bien qu’orné de scènes à portée générale ne laisse apparaître des figurations féminines qu’à deux reprises. Les femmes y sont totalement absentes, tant lors des débats politiques que des cérémonies religieuses. L’espace politique, stylisé et inséré dans une clôture entourée par le pavement public, accueille les magistrats délibérant autour de la loi écrite (Figure 1). Le figuré est conventionnel mais, la peinture ayant pour sujet la vie de la Cité, l’artiste a ajouté une femme, guimbée et donc âgée, cheminant avec un enfant tenu par la main vers les portes de la Cité. Quelques groupes d’hommes, dans et hors les murs, sont également aux travaux des jours. C’est donc le quotidien de la cité qui est figuré et qui a autorisé cette représentation féminine7.

Figure 2. Emeutes urbaines.

Paris, BnF, Français 260, fol. 73 v. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre Bersuire. 1er quart du XVe siècle.
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  • 8 Paris, BnF, Français 260, fol. 73 v. Tite-Live, Ab urbe condita
  • 9 Rappelons ici que l’équité d’une possible redistribution des terres entre les citoyens était le suj (...)

4Dans les manuscrits de la cour des Valois les femmes n’entrent donc ni dans le débat politique, ni dans l’espace clos du pouvoir municipal. Elles viennent rarement orner des scènes génériques ou rehausser une action que l’on peut considérer comme masculine. Elles font un retour remarquable dans les scènes de massacres et de séditions. Par exemple, les troubles de 467 av. J.-C. sont l’occasion pour un peintre d’insérer un groupe féminin8. La composition a ôté l’espace clos du politique puisque cette fois c’est le désordre politique qui est le sujet (Figure 2). Les Romains arpentent le pavement, débattent fort et lèvent les armes les uns contre les autres9. Deux femmes, incarcérées dans le coin supérieur droit, en sont les témoins impuissants. Leurs gestes, mains jointes levées, signalent certes l’effroi face à la discorde, mais également leur incapacité à intervenir. Elles renforcent donc la gravité d’une scène de conflit très masculine. Là encore, ces femmes ne sont pas associées au débat, fut-il houleux, ni-même à la discorde. Loin d’être des pacificatrices, elles sont d’abord utilisées par le peintre pour accentuer l’émotion, comme il le fait lorsqu’il choisit de figurer des massacres de populations comprenant des femmes et des enfants victimes. La figuration féminine semble donc exploitée par les artistes pour fonder une gradation des événements représentés. A coup sûr, la scène est donc ici d’une exceptionnelle gravité. Elle nous indique la direction que doit prendre notre enquête visant la figuration féminine dans ces programmes iconographiques masculins : la violence, le sang coulé et le désordre. Toutefois, aussi exceptionnelles que les scènes qui les abritent, les femmes des histoires romaines sont en réalité des femmes. Entendons par là que nous savons qui elles sont.

La peinture des femmes dans les conflits

5Partir à la recherche des figurations féminines de la matière des histoires romaines exige d’aller à la rencontre d’un gisement d’images associé à la violence et au sang versé. Le texte livre leur nom : elles jouent un rôle dans la chronologie des conflits romains, un rôle qui est retenu par l’écriture historique traduite par les translateurs en moyen français de la fin du Moyen Âge. Toutefois, malgré une identité claire, elles se font porte voix d’un ordre ou d’un désordre masculin à portée générale. Il est à noter que ces images sont extrêmement rares dans les programmes iconographiques, mais elles sont exceptionnellement spectaculaires et illustrent les moments les plus forts de l’histoire de la cité. Si les femmes sont absentes, une femme est toujours reliée aux événements d’importance. Six motifs récurrents sont ici retenus par les peintres : la pacification, la dénonciation, la convoitise, les lois somptuaires et le sacrifice.

Figure 3. Coriolan et le siège de Rome

Paris, Bibliothèque Sainte-Geneviève, Ms. 777, fol. 042v°. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre Bersuire. Premier maître de la Bible de Jean de Sy, vers 1370.
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  • 10 Paris, Bibliothèque Sainte-Geneviève, Ms. 777, fol. 042v. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre (...)
  • 11 Voir également : Paris, BnF, Français 289, fol. 253. Valère Maxime, Facta et dicta memorabilia, tra (...)

6La parentèle pacificatrice. Les clichés accompagnant un prétendu rôle pacificateur des femmes dans les conflits ne sont pas absents des manuscrits ici étudiés. Toutefois, les peintres n’entrent que rarement dans cette logique : seul le motif de Coriolan faisant le siège de Rome est instrumentalisé en ce sens. Dans l’exemplaire de Charles V des Décades, un médaillon quadrilobé à fond géométrique centralise un groupe féminin menant un enfant par la main10. Ce groupe s’interpose entre une troupe de cavaliers lourds armés de lances levées et les murs fortifiés des portes de la cité (Figure 3). Rôle sédatif de la violence des hommes ? Ces femmes tentent de détourner Coriolan de ses projets de vindicte sur la ville. Toutefois, il faut souligner que l’on considère ici plus une irruption de la parentèle et de la domesticité que du genre féminin11. La jeune femme en tête, l’épouse, indique son ventre du doigt tandis qu’elle précède d’autres femmes plus âgées et deux enfants. C’est donc la famille qui vient ici s’interposer au nom de la parenté et de la domus. Elle invite au ralliement véritable et non à la réconciliation stricte.

Figure 4. Hispala Faecenia denonce les bacchanales.

Paris, BnF, Français 263, fol. 455v°. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre Bersuire. Début du XVe siècle.
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  • 12 Paris, BnF, Français 263, fol. 455v°. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre Bersuire. Début du X (...)
  • 13 Hispala avait été attirée dans la maison de Sulpicia afin d’y être interrogée ; elle découvre les l (...)
  • 14 Figuration identique dans : Paris, BnF, Français 268, fol. 551. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. P (...)

7La femme dénonciatrice. La peinture de l’affaire des Bacchanales en 186 av. J.-C. ouvre une autre occasion de représentation féminine. Dans le récit, l’affranchie Hispala Faecenia, afin de protéger son amant des débauches orgiaques auxquelles il allait s’exposer, accepte de les confesser auprès du consul Postumius, lequel déclenche aussitôt l’enquête sous le secret. La terrible répression des sectateurs qui suit – les hommes exécutés publiquement et les femmes privativement dans leurs familles – est aussi l’occasion de récompenser la dénonciatrice pour avoir permis la solution de justice rigoureuse face à la menace insidieuse qui pesait sur les vertus romaines. Les programmes iconographiques qui l’illustrent choisissent de figurer soit une scène extraordinaire de répression, soit une scène de justice. Dans ce second cas, qui nous intéresse ici, une femme s’approche du siège du magistrat12. Quatre groupes composent l’image (Figure 4). Au centre, résident le consul et Hispala Faecinia marquant envers la chaire une génuflexion honorable. A leur droite un groupe d’hommes assiste à la confession et à l’enquête tandis que sur le registre gauche un second groupe d’hommes arrêtés, dénudés et aux yeux bandés, vient présager l’exécution rigoureuse des coupables. Cette mise en scène s’écarte singulièrement de l’écrit orné car ce dernier décrit le déplacement du consul dans la domus où s’était réfugiée la dénonciatrice13. Les peintres forcent donc le texte et préfèrent appuyer sur l’enquête de justice et l’honorabilité de la dénonciatrice, ici guimbée pour renforcer un caractère vénérable, quelle que fut la rigueur de la répression qui suivit14. La dénonciation a restauré la vertu romaine et accorde un rôle public à la dénonciatrice. Le sujet est donc l’autorité de justice et la défense du bien public à travers la mise en œuvre de la procédure inquisitoire qui franchit le secret de la domus romaine et en publie la débauche constatée.

Figure 5. Les Horaces, les Curiaces et la mort d’Horatia.

Paris, BnF, Français 285, fol. 74. Valère Maxime, Facta et dicta memorabilia, trad. Simon de Hesdin et Nicolas de Gonesse. Maître de l’échevinage, vers 1470.
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  • 15 Exemple classique de cette iconographie dans Paris, BnF, Français 172, fol. 27. Augustin, De civita (...)
  • 16 Voir Paris, BnF, Français 273, fol. 11v. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre Bersuire. Maître (...)
  • 17 Paris, BnF, Français 285, fol. 74. Valère Maxime, Facta et dicta memorabilia, trad. Simon de Hesdin (...)
  • 18 Notons ici que la peinture s’écarte très fortement du texte qui évoque, non la maisonnée et sa dome (...)

8La femme convoitée ou séduite. La convoitise des hommes autorise également l’insertion des représentations féminines dans les programmes iconographiques des histoires romaines. Deux contextes des Décades ouvrent cette possibilité. En premier lieu, l’enlèvement des Sabines fournit quelques images, relues par un imaginaire du rapt féodal15. Des Romains sont représentés enlevant les femmes nécessaires à l’extension de la population civique de Rome. Alors que les Sabines produisent les gestes signifiant l’absence de consentement, les Romains les mènent par la main, ou les soulèvent par la taille dans des représentations plus tardives de la seconde moitié du XVe siècle16. En second lieu, le combat des Horaces et des Curiaces, figuré par la peinture française de cour, retient également le rôle que joua Horatia dans le conflit entre les deux familles. Ce motif surprendra bien plus que le précédent. Les peintres français choisissent pourtant d’insister largement sur le rôle d’une femme dans l’affaire. La sœur, séduite par un ennemi, est châtiée par Horatius après sa victoire inattendue contre les Curiaces. La composition d’un manuscrit en délivre tout le sens : quatre triangles séparent quatre registres figurant l’affrontement des hommes, le camp de bataille et l’issue fatidique lors de laquelle le frère, revenant vers la domus, y transperce le cœur d’Horatia, jugée responsable de l’ensemble du conflit17. Elle s’effondre, sous les yeux de la domesticité de la maisonnée (Figure 5). Placé en tête au sommet de la composition, guidé par un chemin de terre, le sororicide identifie toute l’histoire selon le peintre et fait circuler la violence du public au privé à l’occasion d’une composition à la géométrie saillante18. Si le rapt des Sabines et la séduction d’Horatia semblent de prime abord deux thématiques bien différentes, elles n’en illustrent pas moins la même démarche. La possession des femmes, une fois placée au cœur des conflits, écrase bien entendu leur initiative. Mais le cas d’Horatia permet au peintre d’aller plus loin. Il ne s’intéresse ni au serment des frères, ni véritablement à leur combat, pour privilégier la fin des hostilités validée par la mort sanglante de la sœur qui permit l’apaisement familial. L’artiste n’a pas retenu ici le jugement de Horatius.

Figure 6. Caton défendant la lex Oppia.

Paris, BnF, Français 262, fol. 36v°. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre Bersuire. 1er quart du XVe siècle.
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  • 19 Voir Paris, BnF, Français 33, fol. 41. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre Bersuire. Milieu du (...)
  • 20 Paris, BnF, Français 262, fol. 36v°. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre Bersuire. 1er quart d (...)
  • 21 Voir ici un exemple significatif dans Paris, BnF, Français 33, fol. 240v. Tite-Live, Ab urbe condit (...)

9Les lois somptuaires et le mariage. Si les femmes peintes sont au déclenchement des conflits, l’activité législative masculine se doit de les réguler en amont. Aussi les programmes iconographiques retiennent-ils largement les activités législatives de Caton et de Canuleius. Le premier voulut faire maintenir des lois somptuaires sévères afin d’atténuer la visibilité des écarts de richesse dans la cité. Le second voulut régénérer la cité et rétablir la concorde en faisant autoriser les mariages entre la plèbe et l’aristocratie romaine. Il est donc étonnant de prime abord de considérer que la représentation des deux personnages s’accompagne presque systématiquement de figurations féminines. Le texte y invite puisque Tite-Live décrivait des contextes dans lesquels les femmes avaient envahi le forum. C’est donc logiquement l’un des gisements les plus importants de représentation des femmes dans les manuscrits français des histoires romaines. Habituellement lacunaires dans la peinture, elles se mêlent ici avec le peuple masculin mais ne semblent pas participer aux débats autrement que par leur présence physique. Canuleius, qui présente son projet de loi sur le mariage aux consuls, jouit donc de ce privilège rare qui consiste à être associé par la peinture à des femmes omniprésentes sur la place publique19. La représentation de Caton va encore plus loin, puisqu’à la différence de Canuleius, ce dernier semble systématiquement poursuivi par des groupes féminins qui illustrent une forme de désaprobation genrée de ses activités. Dans la lecture qu’en font les artistes, les lois somptuaires selon Caton visaient uniquement les femmes et leurs atours, et l’orateur de s’opposer à la licence qui en découle. Toutefois les femmes persistent et exercent une forme de pression silencieuse sur le légiste : alors qu’il est représenté dans les alentours de l’espace clos des magistratures, des groupes féminins font irruption et envahissent ce pavement urbain qu’elles délaissent habituellement (Figure 6). Dans une version des Décades, Caton est placé à l’intersection de l’espace clos de la délibération politique et du pavement urbain : une main dans la magistrature, une autre sur la place publique qui désigne un groupe féminin20. Dans d’autres représentations plus tardives, les compositions séparent deux registres très nets : l’un est la magistrature close, l’autre l’espace ouvert du débat public où des hommes discutent, mais sous le regard silencieux de plusieurs femmes21. Elles ne sont donc pas véritablement le sujet du peintre mais plutôt l’objet de l’orateur masculin qui est représenté, allant jusqu’à permettre de l’identifier puisqu’ils ne sont que deux à s’ébattre dans l’espace public des miniaturistes avec de telles escortes féminines.

Figure 7. Viol et suicide de Lucrèce.

Paris, BnF, Français 289, fol. 285. Valère Maxime, Facta et dicta memorabilia, trad. Simon de Hesdin et Nicolas de Gonesse. Fin du XVe siècle.
http://visualiseur.bnf.fr/​CadresFenetre?O=COMP-2&I=14&M=imageseule

  • 22 Voir ici la composition adoptée dans : Paris, BnF, Français 282, fol. 242. Valère Maxime, Facta et (...)
  • 23 Paris, BnF, Français 289, fol. 285. Valère Maxime, Facta et dicta memorabilia, trad. Simon de Hesdi (...)
  • 24 L’association de Lucrèce et Virginia était suggérée par les auteurs anciens. Voir ici Valère Maxime (...)
  • 25 Voir ici une représentation exemplaire dans : Paris, BnF, Français 273, fol. 111v. Tite-Live, Ab ur (...)

10Le sacrifice féminin. La mort de Lucrèce retentit exceptionnellement dans les manuscrits français. Aux limites du bien et du mal, le destin de cette femme vertueuse termine dans un désespoir répréhensible, mais compréhensible, dans la lecture qu’en fait la fin du Moyen Âge français. L’imagerie qui investit le thème produit une registration nette : les images, coupées en deux registres verticaux, distinguent une scène de viol d’une autre de suicide22. Dans les registres sis à gauche, un agresseur au poignard levé a posé sa main sur l’épaule de Lucrèce : ce geste signale immédiatement la contrainte illicite et, partant, figure avec clarté le viol. A droite, Lucrèce se frappe d’un autre poignard devant des témoins mâles. Le propos miniaturé associe donc les deux scènes, tout en distinguant un espace privé où eut lieu le crime, d’un espace public dans lequel des hommes assistent au suicide. Lucrèce voulut s’extraire de l’infamie par une issue extraordinaire en public. Dans une version de la fin du XVe siècle, le peintre se fait encore plus explicite23. A gauche est représenté un univers féminin : une maisonnée, soulignée par la domesticité, le petit chien et le carroyage d’une grande salle s’ouvrant sur un jardin privatif (Figure 7). A droite est figuré l’univers masculin : les portes de la maison et leur porche ouvrant sur la place publique, son pavement et les maisons voisines. Le crime circule dans la composition : inséré dans une vignette écarlate, il a pour suite le suicide dans l’espace domestique, portes ouvertes, observé par une opinion publique matérialisée par des observateurs effarés assistants impuissants à la scène depuis la rue. On ne saurait mieux associer domesticité et féminité en vis-à-vis de la masculinité et de son espace public. Ajoutons ici que Lucrèce semble choir sur la lame, une façon que le peintre eut d’exprimer son empathie envers la condition féminine qu’il ne voulait pas doter d’une arme levée, tout en écartant une partie de sa responsabilité dans le suicide. Cette précaution est levée dès lors qu’il s’agit de représenter une autre femme sacrifiée avec laquelle les auteurs établissent un parallèle24. Virginius frappe mortellement sa propre fille au prétoire, Virginia, pour empêcher un consul corrompu de l’asservir ou, dans une lecture médiévale, avoir sa connaissance charnelle. Ce geste du pater familias est un sacrifice honorable de sa propre maisonnée accompli en public dans le but de dénoncer l’offense commise par le magistrat Appius Claudius. Dans la miniature française, Virginia s’effondre en silence, suivie par une suite féminine qui assiste impuissante au drame25. L’imagerie de la mort de Virginia adopte donc une composition identique à celle utilisée pour figurer la mort de Lucrèce : un registre féminin signalant l’émotion domestique, un registre masculin validant l’espace public, le geste de Virginius étant placé à l’articulation des deux.

11Nos motifs autorisant la représentation féminine dans la peinture de la Rome antique sont parfaitement dénombrables. Rares, ils s’agitent autour de contextes extraordinaires. Notons qu’ils semblent en augmentation constante au XVe siècle, mais demeurent isolés. Ils ont pour caractéristique commune d’écarter les femmes de l’espace public. Peu à peu, l’usage de la perspective dans la peinture laisse filer une incarcération des femmes dans des espaces domestiques qui n’étaient jusque là que stylisés par les représentations. Toutefois, aucune de ces figurations féminines, même fermées par la domesticité, ne fait l’économie de la présence d’un espace public masculin. Les femmes peintes des histoires romaines ont une action décisive sur les grands conflits qui jalonnent la chronologie de la Rome antique. Leur participation à l’ordre public s’éclaire lorsque l’on rencontre une logique capable d’embrocher tous les motifs évoqués.

La mise en lumière du mariage

Figure 8. Caton demandant au Sénat le maintien de la lex Oppia.

Paris, Bibliothèque Sainte-Geneviève, Ms. 777, fol. 339v°. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre Bersuire. Premier maître de la Bible de Jean de Sy, vers 1370.
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  • 26 Paris, BnF, Français 33, fol. 240 v. Cf. Tite-Live, Ab Urbe Condita, XXXIV, 1-7.
  • 27 Paris, Bibliothèque Sainte-Geneviève, Ms. 777, fol. 339v°. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre (...)
  • 28 Un dispositif identique est utilisé pour la représentation des débats afférents à la proposition de (...)
  • 29 Nous renvoyons ici aux analyses de Robert JACOB, « Peindre le droit ou l’imaginaire du juriste », i (...)

12Malgré la diversité des cas exposés, tout est mariage dans les imageries féminines de la Rome antique commanditées par la cour des Valois. Prenons ici quelques exemples édifiants de l’analogie qui prospère systématiquement parmi les choix opérés par les miniaturistes. La représentation de Caton et des lois somptuaires visant les femmes se révèle particulièrement exemplaire. Le propos était bien dans le texte le texte de Pierre Bersuire qui indiquait : « Comment Marcus Porcius Catho parle de la loy Oppienne que elle ne soit révoquée, laquele fu faite contre les femes et contre leurs meurs naturels et femenins26 ». Caton lutte donc contre les parures licencieuses dans une première lecture attendue. Mais l’image en rajoute qui fait glisser la thématique vers la question du mariage. Dans un médaillon de la fin du XIVe siècle, l’artiste est parfaitement explicite27. Un magistrat sur sa cathèdre préside un débat séparant deux groupes discutant de la lex Oppia (Figure 8). Sur la droite un groupe féminin et silencieux surgit qui surveille le débat. Cette présence ne surprendra pas : là où est Caton, les femmes le suivent avec insistance puisque le texte de Tite-Live nous rappelle qu’elles avaient envahi le forum pour contester que l’on légifère sur leurs tenues et parures. Ici le peintre a ajouté un détail décisif et absent du texte : l’un des orateurs tient un gant dans sa main28. Or, cet artefact symbolise sans détours l’union matrimoniale29. Les Romains délibèrent certes sous la présidence d’un magistrat et l’observation d’un groupe féminin, mais le véritable sujet est clairement identifié par cet attribut : l’ordonnance du mariage.

Figures 9, 10 et 11. Enlèvement des Sabines, mort de Tarpeia et Sabines s'interposant entre les Romains et les Sabins.

Paris, Bibliothèque Sainte-Geneviève, Ms. 777, fol. 7. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre Bersuire. Premier maître de la Bible de Jean de Sy, vers 1370.
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  • 30 Paris, Bibliothèque Sainte-Geneviève, Ms. 777, fol. 7. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre Ber (...)

13Dans l’exemplaire remarquable exécuté par le Maître de la Bible du sacre dans la seconde moitié du XIVe siècle30, l’affaire de l’enlèvement des Sabines connaît aussi une inflexion sémantique portée par la seule peinture. La logique d’une série de médaillons quadrilobés se révèle très claire si l’on prend la peine de les considérer en série. Dans une première scène, les Sabines sont enlevées par les Romains dans la cité des Sabins, avant d’être emmenées dans celle des Romains (Figure 9). C’est bien le mariage qui est encore évoqué, ainsi que le dévoilent les deux figurations qui suivent. En effet, le médaillon suivant représente Tarpeia précipitée contre la roche (Figure 10), tandis qu’un troisième et dernier dépeint des Sabines s’interposant entre Sabins et Romains qui veulent en découdre (Figure 11). A suivre ce discours pictural en trois temps, la violence initiale des Romains a donc conduit à deux situations : dans l’une une femme perd la vie, dans l’autre des femmes sauvent des vies. Tarpeia avait excité les conflits et tenté de monter les hommes les uns contre les autres : elle trouve ici sa juste fin. D’autres Sabines en revanche avait joué un rôle d’apaisement au nom des parentèles constituées à la suite du rapt : ce sont des femmes de vertu. Ce contrepoint moral distingue donc les femmes entre elles : l’excitation furieuse menant au désordre, dressée contre les devoirs des épouses qui conduisent à l’ordre. Ce ne sont donc pas des femmes ici, mais des épouses vicieuses ou vertueuses. Les devoirs féminins afférents à l’union matrimoniale l’emportent donc sur la violence initiale des hommes et, en conséquence, le mariage apaise les conflits, régule la violence et efface les vindictes.

Figure 12 et 13. Scipion, les prostituées et la fiancée.

Paris, BnF, Français 288, fol. 115 et fol. 212 v°. Valère Maxime, Facta et dicta memorabilia, trad. Simon de Hesdin et Nicolas de Gonesse. 2nde moitié du XVe siècle.
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  • 31 Paris, BnF, Français 288, fol. 115 et fol. 212 v°. Valère Maxime, Facta et dicta memorabilia, trad. (...)

14Cette juxtaposition de la vertu et du vice conduit le propos des peintres à plusieurs reprises. Une fois appuyée sur la mise en lumière du Facta et dicta memorabilia de Valère Maxime, le contrepoint se fait encore plus saillant. Observons ici deux miniatures consacrées à Scipion l’Africain, un champion de vertu pour la fin du Moyen Âge français. Dans un exemplaire luxueux de la seconde moitié du XVe siècle, « discipline de chevalerie » et « continence », selon les translateurs, sont illustrées par une représentation du célèbre général comprenant des figurations féminines31. Dans l’une, au folio 115, un Scipion interposé entre un groupe de soldats désorganisés et des femmes aux atours exagérés chasse ces dernières, à la pointe de son épée, de son camp militaire (Figure 12). Dans une autre, au verso du folio 212, Scipion l’Africain est représenté dans une identique composition sauf que le groupe de soldats est cette fois en bon ordre tandis que le général fait face à un couple (Figure 13). Scipion, bâton de commandement dressé, mène une femme par la main vers un homme agenouillé. La première scène désigne la prostitution expulsée du camp manu militari, mais la seconde célèbre un mariage juste. Cette mise en scène rappelle que la vigueur, la vertu et la victoire qui s’associent dans le destin de Scipion ont été obtenues par des attitudes morales fermes. Le texte translaté décrit comment le général romain rendit à un fiancé ibérique la vierge promise qu’une soldatesque lui avait ravie. Restauration d’un ordre matrimonial donc, particulièrement sensible dans les paysages accompagnant les deux scènes : camp provisoire de tentes dans la première, champ de ruines et reconstruction en pierre visible au coin inférieur gauche dans le cas de la seconde. Le contrepoint effectué entre la prostitution et le juste mariage signale la véritable force des Romains acquise par la promotion de l’union juste, et non la seule victoire sur le champ de bataille.

Figure 14. Le mariage.

Paris, BnF, Français 282, fol. 173. Valère Maxime, Facta et dicta memorabilia, trad. Simon de Hesdin et Nicolas de Gonesse. Début du XVe s.
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Figure 15. Faustulus et les jumeaux.

Paris, BnF, Français 20071, fol. 6v°. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre Bersuire. Atelier de Jean Fouquet, vers 1470.
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  • 32 C’est d’ailleurs la seule du programme iconographique conservé : Paris, BnF, Français 282, fol. 173 (...)
  • 33 Paris, BnF, Français 20071, fol. 6v. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre Bersuire. Atelier de (...)

15Les écrits de Valère Maxime permettaient aux peintres de développer laregement ces considérations morales. Quelques exemplaires contiennent une version particulièrement épurée de ce discours sur le mariage. En lieu et place d’une scène de l’Antiquité, quelques vignettes s’affranchissent du texte et démontrent l’existence d’une appropriation morale contemporaine des commanditaires des images. A la charnière des livres relatifs à la constance et à la modération, une vignette du début de XVe siècle s’affranchit complètement des exemples historiques mobilisés par Valère Maxime32. L’image distingue deux registres séparés par un découpage horizontal (Figure 14). Deux images se suivent ici apparemment sans liens : dans la première un couple se tient par la main, mais dans la seconde un homme fait la charité aux nécessiteux. Comment réassocier ces deux images à portée générale que le peintre avait superposées ? C’est le même homme et la même main qui tiennent l’épouse ou le coin figurant le don monétaire. Mariage et charité s’enchâssent : en conséquence, le juste mariage répartit les biens en ce monde. Il est vrai que les écrits de morale de Valère Maxime permettent ce genre de disgression picturale mais l’écho peut en être trouvé dans les translations des Décades. C’est ainsi que le Tite-Live dit de « Rochechouart » exécuté par l’atelier de Jean Fouquet choisit une figuration des jumeaux fondateurs de Rome qui rompt avec les habitudes picturales33. Plutôt que la louve, l’artiste représente Faustulus et son épouse (Figure 15). Cette irruption d’une figure féminine tranche avec les codes habituels. En effet, l’animal sauvage, la forêt et l’abandon des enfants sont remplacés par leur exact inverse : la domesticité emblématisée par le bœuf, le cadre paysan régulé et l’adoption des enfants. La figuration est donc humanisée, domestiquée et féminisée mais le propos pictural insère avant tout le motif dans le cadre du mariage et ses notions afférentes : propérité, domesticité et amour parental ou marital. L’image marque ici une nette évolution artistique qui témoigne d’une réappropriation novatrice d’un motif pourtant classique.

La défense du mariage comme théorie politique 

Figure 16. Mort de Virginia et d’Appius Claudius.

Paris, BnF, Français 235, fol. 110v°. Boccace, De casibus…, trad. Laurent de Premierfait. 1ère moitié du XVe siècle.
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Figure 17. Suicide de Lucrèce et de son agresseur.

Paris, BnF, Français 43, fol. 26. Valère Maxime, Facta et dicta memorabilia, trad. Simon de Hesdin et Nicolas de Gonesse. Milieu du XVe siècle.
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  • 34 Paris, BnF, Français 235, fol. 110v. Boccace, De casibus…, trad. Laurent de Premierfait. 1e moitié (...)
  • 35 Paris, BnF, Français 43, fol. 26. Valère Maxime, Facta et dicta memorabilia, trad. Simon de Hesdin (...)

16Le mariage, mis en avant grâce aux figurations féminines déployées dans les manuscrits peints de la cour, était manifestement perçu comme un fondement domestique débouchant sur une pensée politique large. Ce que les auteurs anciens suggéraient par l’éloge de la vertu des personnalités éminentes de l’histoire romaine, le Moyen Âge français le déclare par l’image sans détours ni artifices. Ce que le texte translaté inspire, l’imagerie entreprend donc de le proclamer. Elle procède en creux, c'est-à-dire que la peinture investit avant tout des transgressions faites au mariage par le viol, la séduction, ou le rapt. Ces transgressions déclenchent alors des cycles qui ouvrent une voie mentale permettant le dépassement de la singularité de l’histoire racontée. Le procédé apparaît clairement lorsque les miniaturistes condensent l’histoire des deux motifs de victimes féminines les plus récurrents des histoires romaines : le sacrifice de Virginia au prétoire et le suicide de Lucrèce. Dans deux vignettes de la première moitié du XVe siècle, les représentations insistent sur la simultanéité du sang versé. Dans l’une, Virginia est tuée par son père dans le registre droit tandis que le gauche contient le juge néfaste emprisonné qui avait tenté de l’asservir et qui se donne la mort à son tour (Figure 16). Simultanéité des coups de poignards, sang pour sang : le peintre ne retient que ces deux issues qu’il associe et qui viennent résumer le sens de l’histoire illustrée pour une perception médiévale du récit quelque peu malmené34. Dans une autre image, le cycle du sang se fait encore plus évident. Là encore deux registres se font face, l’un n’accueillant que des femmes et l’autre que des hommes (Figure 17). Lucrèce se suicide, suivie par un groupe de femmes emblématisant la domesticité, face à son agresseur se donnant la mort à son tour suivi par des témoins masculins habituellement saisis par la peinture dans l’espace public35. L’idée de cycle l’a ici emporté sur le récit lui-même car le coup de dague mortel que s’inflige l’homme est une spéculation pure de l’artiste. Le sang de Lucrèce appelait si fort celui de son agresseur, que le miniaturiste s’affranchit complètement de la rédaction. Cette composition demeure très isolée car elle ouvre une simultanéité du suicide totalement singulière dans notre corpus. Elle nous semble toutefois incliner à y voir les procédés cycliques que la peinture courtisane élaborait pour engager la réflexion des possesseurs-lecteurs sur une pensée politique du mariage.

Figure 18. Suicide de Lucrèce et fondation de la République.

Paris, BnF, Français 41, fol 198. Valère Maxime, Facta et dicta memorabilia, trad. Simon de Hesdin et Nicolas de Gonesse. 3e quart du XVe siècle.
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  • 36 Paris, BnF, Français 41, fol. 198. Valère Maxime, Facta et dicta memorabilia, trad. Simon de Hesdin (...)

17Dans le propos des peintres, le cycle déclenché par l’honneur matrimonial blessé se révèle fondateur, ou plutôt refondateur, du gouvernement juste des hommes. Ce projet se dévoile entièrement à l’occasion de compositions complexes relatant une autre histoire que celle qu’elles étaient censées orner dans le manuscrit. Retenons ici le cas Lucrèce dans un manuscrit qui ouvre quantités de relectures de l’histoire romaine par associations d’images36. Dans cette copie de la translation de Valère Maxime de la fin du XVe siècle, flanquée des armes de Bourbon, les miniaturistes disposent plusieurs scénettes montées en frontispice qui condensent leur interprétation de l’affaire (Figure 18). Les premières décrivent la nature du conflit ayant précipité le désordre public. Les scènes centrales explicitent la violence politique qui en découle. Enfin, les ultimes images en représentent l’issue. Pour évoquer Lucrèce, la composition adopte un montage complexe. La première image illustre le viol placé en face du suicide sur la place publique : ce dispositif est donc conforme à celui évoqué supra puisqu’il distingue les espaces placés en vis-à-vis avant de faire circuler la publicité du crime. Vient ensuite une scène de désordre public, plus surprenante, liée à l’expulsion de Tarquin le Superbe. Enfin, les ultimes images représentent le serment des premiers consuls de Rome, le déploiement des faisceaux et la destruction de la maison de Publicola. Cette association étrange suit en partie le texte : l’appel à la vindicte réclamé par le suicide de Lucrèce a déstabilisé le pouvoir tyrannique des derniers rois de Rome. La République est ensuite édifiée sur ce désordre puisque les consuls prêtent serment, les faisceaux proclament le nouveau régime et Publicola détruit le dernier palais qui aurait pu évoquer la tyrannie, à savoir sa luxueuse villa. L’ordre du texte n’est ici pas parfaitement respecté car le peintre a fait des choix permettant de mieux emboîter ces histoires dans le sens qu’il voulait leur donner. Toutefois, il a perçu tous les aspects discursifs de la narration qu’il remanie. La fondation de la République s’achève ainsi sur la destruction du palais supposé de Publicola et cette destruction, dans l’image, ouvre l’espace pour mieux découvrir une place publique telle qu’elle pouvait être imaginée par la fin du Moyen Âge français. Retenons donc ici les propos suivants : initié par le viol de Lucrèce, le programme aboutit à la refondation politique de Rome ; entamé par une transgression gravissime survenue dans l’espace domestique, le propos s’achève logiquement sur la destruction d’une maison tyrannique et le dévoilement d’une place publique. Le viol de Lucrèce apparait alors comme un sacrifice extraordinaire ayant permis une refondation politique. L’injustice faite à la domus stimule in fine la reconstruction d’un nouvel ordre public, celui de la Res Publica. Dès lors, la destinée de toutes nos femmes peintes des manuscrits des histoires romaines mérite d’être relue par cette interprétation inspirée par la lecture que firent les lettrés des écrits de Valère Maxime et de Tite-Live. Ces femmes exceptionnelles, sacrifiées par le comportement des hommes, portent en elles tout le destin de la communauté politique. Leur sang versé appelle la mobilisation humaine et sa validation par la nouvelle loi reconstructrice de l’espace public offensé par des crimes domestiques.

Figure 19. Le jugement de Horatius.

Paris, BnF, Français 287, fol. 158 v°. Valère Maxime, Facta et dicta memorabilia, trad. Simon de Hesdin et Nicolas de Gonesse. 3e quart du XVe s.
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  • 37 Paris, BnF, Français 287, fol. 158 v°. Valère Maxime, Facta et dicta memorabilia, trad. Simon de He (...)

18Suivies de leur suite féminine en constante augmentation dans la miniature française du XVe siècle, nos femmes sacrifiées font ainsi irruption sur la sphère publique, dans le silence de la notoriété de leur affliction. A bien considérer Horatia représentée aux pieds du magistrat qui juge Horatius, si une médiation apaisante doit leur être attribuée, c’est celle du cadavre ensanglanté (Figure 19). Le pouvoir de la parole, lui, demeure fondamentalement masculin37. Dans notre iconographie, ces femmes peintes ne s’associent donc pas à la paix publique aussi aisément qu’on aurait pu le penser initialement. Excessivement rares dans des programmes iconographiques marqués par l’omniprésence de la représentation masculine, elles n’en sont pas moins placées aux articulations les plus remarquables et les plus édifiantes du récit de la fondation de la cité des Anciens idéalisée par les artistes pour leurs commanditaires royaux. Le discours des miniaturistes se fait ici aussi dense que les textes des miroirs au prince qui engagent la spéculation intellectuelle et réflexive. Constatons que nos miniatures invitent ici à l’appréhension, par l’imagerie, de la science du gouvernement du royaume. A en relire le discours, les peintures font un cycle politique du sang versé par les femmes dans l’espace domestique. Il déclenche alors l’effusion sanguine généralisée dans l’espace public. Toute la subtilité discursive repose alors sur la circulation de l’honneur entre les deux sphères. Or, les images qui initient ce cycle fondateur, l’érigent également en véritable mythe politique de la fin du Moyen Âge français, puisqu’une femme y est sacrifiée sur l’autel de la restauration du bon gouvernement des hommes. Le genre féminin ainsi délimité suscite alors cet abîme de réflexions morales et politiques centré par les peintres sur la figure féminine offensée. Le procédé exploite discursivement une théorie du mariage revisitée pour devenir un outil de l’ordre public. Dans cette construction politisée du genre, elles emblématisent avant tout la domesticité heurtée et, partant, toutes les vertus du bon mariage établies en creux de la transgression. Ces motifs subliment les devoirs des épouses et étayent un disciplinement des hommes qui n’est pas déclenché par la parole féminine face aux hommes, mais par l’association silencieuse des deux genres par juste mariage. Cette interprétation n’est pas sans recomposer les idéaux politiques eux-mêmes et la res publica invoquée par la fin du Moyen Âge français. Les images, parce qu’elles imbriquent le public et le domestique, le gouvernement de la maison et celui du royaume, redéfinissent la Cité à travers la représentation du sacrifice sanglant des femmes. L’ordre public qui en résultait était nécessairement lié à l’espace domestique, ou plutôt à la circulation de l’honneur à travers la porte des maisons, lorsque celles-ci se brisaient sous les coups de la notoriété d’un crime inacceptable. Le bon gouvernement, ainsi que le mauvais, filent avant tout par la domesticité et les analogies politiques qu’elle suscite. Parce qu’elles étaient réalisées pour des commanditaires proches de la cour des Valois, nous conclurons donc que ces images saisissaient une pensée politique, certes féminisée, mais au prix d’une inflexion de la construction du genre clairement focalisée sur la maisonnée. La science du gouvernement de la res publica, ainsi stimulée visuellement, invitait à faire circuler de concert l’honneur domestique et l’honneur royal, tous deux relus par l’appropriation de l’histoire urbaine des Anciens, entre espace domestique et espace public, avec une reconstruction du genre féminin placé à son articulation.

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Notes

1 Nous restreignons ici notre enquête aux manuscrits enluminés conservés par la Bibliothèque Sainte-Geneviève et la Bibliothèque nationale de France (BnF).

2 Marie-Hélène TESNIERE, « Les Décades de Tite-Live traduites par Pierre Bersuire et la politique éditoriale de Charles V », in : Mara HOFMANN et Caroline ZÖHL (dir.), Quand la peinture était dans les livres, mélanges en l’honneur de François Avril, Turnhout : Brepols (coll. Ars nova XV), 2007, p. 345-351.

3 On consultera ici une vignette dans : Paris, BnF, Français 33, fol. 15v. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre Bersuire. Milieu du XVe siècle.

4 Sur les bâtons levés par les sergents dans l’iconographie : Christine BELLANGER, « La figure du sergent dans l’enluminure à la fin du Moyen Âge : entre justice et maintien de l’ordre », in : François FORONDA, Christine BARRALIS, Bénédicte SERE, Violences souveraines au Moyen Âge, travaux d’une école historique, Paris: PUF, coll. « Le nœud gordien », 2010, p. 79-89.

5 Le motif le plus récurent autorisant des représentations de la banlieue est celui des Romains colonisant le Latium. Voir ici Paris, BnF, Français 33, fol. 94v. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre Bersuire. Milieu du XVe siècle. Des groupes masculins circulent dans la campagne environnante tandis qu’une travailleuse seule, sise sur le pavement urbain, symbolise la communauté urbaine.

6 Paris, BnF, Français 260, fol. 166. Tite-Live, Ab urbe condita

7 Il peut être considéré comme un hapax féminin dans ce manuscrit singulièrement vide de femmes.

8 Paris, BnF, Français 260, fol. 73 v. Tite-Live, Ab urbe condita

9 Rappelons ici que l’équité d’une possible redistribution des terres entre les citoyens était le sujet de la discorde.

10 Paris, Bibliothèque Sainte-Geneviève, Ms. 777, fol. 042v. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre Bersuire. Premier maître de la Bible de Jean de Sy, vers 1370.

11 Voir également : Paris, BnF, Français 289, fol. 253. Valère Maxime, Facta et dicta memorabilia, trad. Simon de Hesdin et Nicolas de Gonesse, 2e moitié du XVe siècle.

12 Paris, BnF, Français 263, fol. 455v°. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre Bersuire. Début du XVe siècle.

13 Hispala avait été attirée dans la maison de Sulpicia afin d’y être interrogée ; elle découvre les licteurs dans le vestibule. Voir Tite-Live, Ab urbe condita, Livre XXXIX, 12.

14 Figuration identique dans : Paris, BnF, Français 268, fol. 551. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre Bersuire. Fin du XIVe siècle.

15 Exemple classique de cette iconographie dans Paris, BnF, Français 172, fol. 27. Augustin, De civitate Dei, trad. Raoul de Presles. Début du XVe siècle.

16 Voir Paris, BnF, Français 273, fol. 11v. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre Bersuire. Maître du Boccace de Munich, vers 1475.

17 Paris, BnF, Français 285, fol. 74. Valère Maxime, Facta et dicta memorabilia, trad. Simon de Hesdin et Nicolas de Gonesse. Maître de l’échevinage, vers 1470.

18 Notons ici que la peinture s’écarte très fortement du texte qui évoque, non la maisonnée et sa domesticité, mais les rues publiques de Rome. L’explication de cette substitution de contextes trouvera sa résolution infra : le peintre accentue le point de départ domestique, quitte à forcer le récit.

19 Voir Paris, BnF, Français 33, fol. 41. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre Bersuire. Milieu du XVe siècle.

20 Paris, BnF, Français 262, fol. 36v°. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre Bersuire. 1er quart du XVe siècle.

21 Voir ici un exemple significatif dans Paris, BnF, Français 33, fol. 240v. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre Bersuire. Milieu du XVe siècle.

22 Voir ici la composition adoptée dans : Paris, BnF, Français 282, fol. 242. Valère Maxime, Facta et dicta memorabilia, trad. Simon de Hesdin et Nicolas de Gonesse. Début du XVe siècle.

23 Paris, BnF, Français 289, fol. 285. Valère Maxime, Facta et dicta memorabilia, trad. Simon de Hesdin et Nicolas de Gonesse. Fin du XVe siècle.

24 L’association de Lucrèce et Virginia était suggérée par les auteurs anciens. Voir ici Valère Maxime, Facta et dicta memorabilia, Livre VI, chap. 1, 2.

25 Voir ici une représentation exemplaire dans : Paris, BnF, Français 273, fol. 111v. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre Bersuire. Jean Bourdichon, vers 1475. On consultera également une copie de Boccace : Paris, BNF, Français 230, fol. 79v°. Boccace, De casibus…, trad. Laurent de Premierfait. 3e quart du XVe siècle.

26 Paris, BnF, Français 33, fol. 240 v. Cf. Tite-Live, Ab Urbe Condita, XXXIV, 1-7.

27 Paris, Bibliothèque Sainte-Geneviève, Ms. 777, fol. 339v°. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre Bersuire. Premier maître de la Bible de Jean de Sy, vers 1370.

28 Un dispositif identique est utilisé pour la représentation des débats afférents à la proposition de loi de Canuleius dans : Paris, Bibliothèque Sainte-Geneviève, Ms. 777, fol.70. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre Bersuire. Premier maître de la Bible de Jean de Sy, vers 1370.

29 Nous renvoyons ici aux analyses de Robert JACOB, « Peindre le droit ou l’imaginaire du juriste », in : Jacques DALARUN (dir.), Le Moyen Âge en lumière, Paris: Fayard, 2002, p. 207-234.

30 Paris, Bibliothèque Sainte-Geneviève, Ms. 777, fol. 7. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre Bersuire. Premier maître de la Bible de Jean de Sy, vers 1370.

31 Paris, BnF, Français 288, fol. 115 et fol. 212 v°. Valère Maxime, Facta et dicta memorabilia, trad. Simon de Hesdin et Nicolas de Gonesse. 2e moitié du XVe siècle.

32 C’est d’ailleurs la seule du programme iconographique conservé : Paris, BnF, Français 282, fol. 173. Valère Maxime, Facta et dicta memorabilia, trad. Simon de Hesdin et Nicolas de Gonesse. Début du XVe siècle.

33 Paris, BnF, Français 20071, fol. 6v. Tite-Live, Ab urbe condita, trad. Pierre Bersuire. Atelier de Jean Fouquet, vers 1470.

34 Paris, BnF, Français 235, fol. 110v. Boccace, De casibus…, trad. Laurent de Premierfait. 1e moitié du XVe siècle.

35 Paris, BnF, Français 43, fol. 26. Valère Maxime, Facta et dicta memorabilia, trad. Simon de Hesdin et Nicolas de Gonesse. Milieu du XVe siècle.

36 Paris, BnF, Français 41, fol. 198. Valère Maxime, Facta et dicta memorabilia, trad. Simon de Hesdin et Nicolas de Gonesse. 3e quart du XVe siècle.

37 Paris, BnF, Français 287, fol. 158 v°. Valère Maxime, Facta et dicta memorabilia, trad. Simon de Hesdin et Nicolas de Gonesse. 3e quart du XVe siècle.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Pierre Pretou, « Femmes et conflits dans l’imaginaire historié de la Rome des Valois »e-Spania [En ligne], 33 | juin 2019, mis en ligne le 18 juin 2019, consulté le 19 mars 2024. URL : http://journals.openedition.org/e-spania/31067 ; DOI : https://doi.org/10.4000/e-spania.31067

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Auteur

Pierre Pretou

Université de La Rochelle, LIENSs, UMR 7266

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