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Reconstruction et réconciliation au Liban

 | 
Eric Huybrechts
, 
Chawqi Douayhi

Deuxième partie. Négociations

Les associations : défense de l’environnement et recompositions d’un nouvel espace public

Karam Karam

Texte intégral

  • 1 Voir, Raymond L., Bailey B. et S., Third World Political Ecology, Routledge, London and New York, (...)

1C’est au milieu des années 60 que la question de l’environnement et de l’écologie a commencé à être perçue comme un grave problème dans les pays industrialisés. Mais c’est à la fin des années 60 que l’aggravation du problème a attiré l’attention des responsables politiques et des acteurs associatifs. L’essor du phénomène écologique dans le mouvement associatif s’est prolongé dans les années 70 en même temps que les bases de l’écologie politique ont été tracées. Comme moyen de mobilisation et d’action dans le milieu associatif dans les pays du Sud, le thème de l’environnement s’est développé à la fin des années 70, en étroite relation avec le développement des questions de justice sociale et de droits de l’homme1.

  • 2 On peut signaler la création de l’association « Les amis de la nature » le 6 décembre 1972 (enregi (...)
  • 3 « En 1970, une commission pour l’étude de l’environnement et un groupe de travail furent constitué (...)
  • 4 Cf. Fisher W. F., « Doing Good ? The Politics and Antipolitics of NGO Practices », Annual Review o (...)

2Au Liban, on ne peut pas faire remonter l’origine du mouvement écologique (je ne distingue pas entre écologie et environnement), en tant que phénomène associatif important, avant la décennie 902. Son véritable essor commence (sous l’influence de différents facteurs internes et externes) avec la tenue de la Conférence Internationale pour le Développement et l’Environnement à Rio de Janeiro en juin 1992, et particulièrement en 1993, date de la création du ministère de l’Environnement au Liban (loi 216 du 2 avril 1993), malgré les multiples tentatives des autorités publiques depuis les années 703. Le retard dans le développement du mouvement écologique au Liban par rapport aux autres pays est dû à plusieurs raisons parmi lesquelles le fait que le phénomène écologique, avant qu’il ne soit une affaire universelle liée à la mondialisation4, s’est développé dans les pays industriels dans les années 60 et 70, mais n’était pas encore une préoccupation majeure au Liban à l’époque ; l’éclatement de la guerre en 75, sa durée et sa dimension de prédation économique ont orienté les préoccupations et les activités vers d’autres questions et secteurs.

3Plusieurs facteurs ont contribué à l’essor de la question de l’environnement dans le débat public au Liban : la fin de la guerre, la réaffirmation et le redressement des institutions publiques, le début de la reconstruction et la détérioration progressive de l’environnement. De plus, la globalisation de la prise en compte des problèmes environnementaux (eau, mer, couche d’ozone, déchets toxiques, etc.) et la mobilisation de plusieurs pays, firmes, ONG internationales, finançant des projets ont contribué au développement des mouvements associatifs.

  • 5 Je fais la distinction, suivant Dominique Wolton, entre trois espaces : l’espace commun, l’espace (...)
  • 6 Je remercie Habib Ma‘louf pour ses réflexions à propos du mouvement écologique au Liban et pour le (...)

4Aujourd’hui, le mouvement associatif écologiste au Liban joue, a priori, un rôle à deux volets dans la reconstruction : d’une part, un rôle purement matériel du fait que les objectifs du mouvement s’inscrivent dans la problématique de la reconstruction (une reconstruction écologique qui respecte les espaces verts, le patrimoine, le littoral, la nature, etc.) ; d’autre part, un rôle lié à la reconstruction des liens sociaux, des espaces communs5 (plages, jardins publics, etc.) et de la mobilisation « citoyenne » dans un cadre régional et/ ou national. C’est dans ce contexte que je procède à l’étude du mouvement écologique en m’attardant sur les priorités et les enjeux économiques et écologiques en conflit véhiculés par différents acteurs qui agissent sur la scène publique en influant sur la politique et les processus de la reconstruction. Je m’appuie sur l’étude de deux exemples : le développement des carrières et l’aménagement du littoral6 – dans lesquels les acteurs écologistes ont tenté de donner la priorité à l’argumentation écologique face à l’argumentation économique –, en recherchant comment se fait la régulation de ces intérêts en conflit. Celle-ci met en jeu des processus de négociation et de mobilisation qui participent à la recomposition d’un nouvel espace public. En liaison avec cette question, j’observerai comment cet espace public est caractérisé par une participation citoyenne, c’est-à-dire une participation à la définition de l’intérêt public et des biens communs. Je m’interrogerai ensuite sur l’effet de ces dynamiques sur les liens sociaux dans un espace donné.

Les carrières du Metn7

  • 7 La reconstruction du centre-ville de Beyrouth et les différents chantiers, les projets de remblais (...)

5Pendant la guerre, des entrepreneurs, en rapport d’intérêt direct avec les forces miliciennes, ont développé et créé des carrières dans différentes régions du Liban, dont le Metn. Dès le début des années 80, les habitants du Metn se sont mobilisés en vue d’arrêter les travaux dans les carrières de leur région, ont signé des pétitions et rencontré des personnalités publiques (mohafez, ministres...). Dans la même période, en 1983, l’État a essayé d’élaborer un plan directeur concernant les carrières au Liban. Le Conseil du Développement et de la Reconstruction (CDR) a parachevé l’étude du plan directeur et un décret-loi (n° 69/83) a été promulgué, classant les carrières dans des régions déterminées. Mais le rapport de force déséquilibré et les soutiens qu’ont reçus les entrepreneurs des carrières de la part des milices et des chefs politiques à l’époque ont empêché l’application du plan directeur en rendant la mobilisation populaire inefficace.

  • 8 La région du Metn compte plusieurs villages touchés par les creusements des carrières : Zabougha, (...)
  • 9 Pour l’exploitation des carrières autorisées, cette loi a envisagé des mesures pour diminuer leurs (...)
  • 10 Par exemple les arrêtés n° 45 du 7-2-1996 et n° 4 du 8-5-97, voir le bulletin écologique Minbar al (...)

6Dans la période de l’après-guerre et de la reconstruction, en particulier depuis 1993, les acteurs écologistes originaires du Metn8, regroupés dans une association écologiste qui œuvre au niveau national, mènent une action concertée avec les habitants contre les carrières en utilisant différents moyens et méthodes de protestation. Leur objectif est la fermeture des carrières dans leur région. Pour cette cause et à l’initiative d’acteurs associatifs écologistes, une série de rencontres et d’informations est entamée avec la population locale d’une part et avec les institutions, les responsables et les décideurs politiques d’autre part. Entre 1995 et 1997, ces acteurs associatifs ont concentré leur action sur l’adoption d’une loi moderne qui réglemente le travail des carrières dans des régions précisées et mette fin à leurs actions dans les régions non classées9. Simultanément, le Conseil des ministres a publié plusieurs arrêtés qui imposent la fermeture des carrières du Mont-Liban10 ; il travaille à un nouveau plan directeur. La quasi totalité des carrières du Metn a été fermée en 1998.

Le littoral de Enfeh

7C’est plutôt dans le processus de développement de la région que dans le processus de la reconstruction d’après-guerre, que s’inscrit la question du littoral historique de Enfeh. Cette ville côtière du nord du Liban est connue pour ses salines, ses éoliennes, son littoral archéologique et une tradition de pêche. Son petit port de pêche se situe au nord de la ville et peut abriter au maximum 60 barques de pêche. Trois cents à quatre cents personnes vivent de cette activité de façon permanente à Enfeh et le nombre des pêcheurs est en augmentation. Pendant la guerre, le port des pêcheurs a été endommagé de part et d’autre par la construction de deux complexes touristiques (Las Salinas en 1984 et Marina Del Sol en 1986) qui ont bloqué son entrée et couvert par un remblais une partie de son bassin. À l’époque, la protestation des pêcheurs était sans efficacité devant la force des entrepreneurs des deux complexes soutenus par leur avocat ‘Omar Misqawi.

  • 11 Cf. infra note n° 37.

8Dans le contexte de l’après-guerre, la question du port a rebondi, en particulier pendant les élections législatives de 1992 et suite à des promesses électorales faites par les élus de la région (Farid Moukari député et ministre de l’Information et ‘Omar Misqawi député et ministre des Transports), de construction d’un nouveau port de pêche. Au début de l’année 1996, le ministère des Transports a commencé les travaux de construction d’un nouveau port sur le cap archéologique de la ville pour différentes raisons : l’attrait économique, puisque le lieu a été jugé moins coûteux pour la réalisation du projet ; les intérêts des entrepreneurs des deux complexes qui désirent disposer d’une marina dans le nouveau port, tout en éloignant le mouvement des barques des pêcheurs du périmètre des complexes. Cette initiative a mobilisé un petit groupe local d’écologistes (soutenu par des associations écologistes nationales) qui a pu arrêter les travaux en proposant un projet alternatif qui respecte l’environnement et préserve le patrimoine archéologique11.

9À partir de ces deux terrains d’étude, le développement des carrières et l’aménagement du port de Enfeh, j’étudie, dans un premier temps, comment les processus de reconstruction ont contribué à l’émergence des différents acteurs ayant des intérêts en conflit, à leur mobilisation et aux processus de négociation tentant de les régler. Dans un deuxième temps, j’analyserai les effets de ces dynamiques sur les liens sociaux et sur la recomposition d’un nouvel espace public.

DIFFÉRENTS ACTEURS ET INTÉRÊTS DIVERGENTS

  • 12 Al-Minbar al-Akhdar est née en 1995 suite à une fusion entre deux associations écologistes (Al-Hai (...)

10Une revue générale des acteurs permet de rendre compte du statut de l’intérêt privé et de l’intérêt public dans la problématique de la reconstruction et de la protection de l’environnement. Mon objet d’étude principal est l’association écologique, et j’évoque le rôle et la position des autres acteurs à partir de leur interaction avec l’acteur associatif écologique, c’est en particulier l’association Al-Minbar al-Akhdar qui a travaillé sur les deux questions12. Les autres acteurs sont aussi pris en compte.

L’acteur écologiste

Du militant écologiste individuel œuvrant pour un intérêt particulier et local...

11Ce n’est pas d’un coup qu’on devient militant écologiste. L’attention portée par les écologistes à l’environnement s’inscrit dans un long processus de sensibilisation. Ce processus se développe par accumulation au niveau local dans la plupart des cas. C’est souvent à titre individuel que l’expérience s’enracine avant de passer à l’action collective. Les deux cas étudiés ont été soulevés, au début, par des acteurs individuels qui ne possédaient aucune compétence acquise au sein d’une association ou d’un organisme. De même, ils n’avaient pas de position institutionnelle confortant leur action. Ils se sont plutôt mobilisés à partir de positions et d’appartenances collectives. L’appartenance à une même filière professionnelle ou générationnelle a permis, en lien avec des réseaux socio-politiques, la diffusion des informations, les rencontres et la mobilisation.

  • 13 Deux d’entre eux avaient été à l’origine du décret présidentiel, promulgué en 1972, qui a classé l (...)

12Le problème des carrières du Metn a commencé à frayer son chemin à partir de 1985, en devenant une affaire publique, dans le milieu des professeurs du lycée public de Baskinta, parmi certains groupes de jeunes durant les soirées, devant les églises après la messe du dimanche ou durant les réunions publiques dans les villages. Les discussions ont été animées par des acteurs touchés directement par les effets des carrières, et c’est à travers l’ensemble des intérêts particuliers (privés) que l’affaire a fait boule de neige parmi les habitants de la région, en donnant corps à des acteurs collectifs. À Enfeh, un groupe d’intellectuel (7 à 8 personnes) a commencé, après 1990, à partir du problème des ordures dans la ville, à s’intéresser avec un autre groupe au redéveloppement des activités des salines, puis à l’environnement en général dans la région du Koura. Ce même groupe d’acteurs13 a protesté contre la construction d’un nouveau port de pêche sur le site archéologique de la ville quand le ministère des Transports a ordonné la mise en œuvre du projet.

  • 14 Ces informations ont été recueillies à partir d’une enquête menée auprès des membres de l’associat (...)

13Les itinéraires individuels de ceux qui se sont impliqués dans la protection de l’environnement, dans les deux cas, sont variés. Ces acteurs ont en commun leur appartenance aux couches supérieures locales de la classe moyenne. Âgés de 35 à 55 ans, ils pratiquent en majorité une profession intellectuelle ou libérale14 (professeurs de l’enseignement secondaire et universitaire, ingénieurs, médecins, avocats, journalistes, etc.). L’adoption d’un comportement militant a permis aux écologistes individuels, dans un premier temps, de s’insérer dans les structures sociales et politiques de leur région, d’une part, par la négociation et par l’action contestataire (en ce qui concerne l’environnement), et d’autre part, par la participation aux affaires publiques (un certain nombre d’entre eux a participé aux élections de 1992 en nouant des relations avec certains députés de la région). Dans un deuxième temps, cette action engagée a contribué au développement d’une conscience identitaire, marquée par un militantisme écologiste plus large qui a amené ces individus à se regrouper dans un cadre associatif.

...au militantisme écologiste associatif œuvrant pour l’intérêt public dans un cadre national

  • 15 Cf. supra note n° 8.

14Dans le Metn, le mouvement engagé par les habitants contre le développement des carrières depuis la moitié des années 80, a sensibilisé un petit groupe sur les questions de l’environnement en général. Avec la fin de la guerre, une dizaine de personnes de cette région se sont retrouvées pour créer une association destinée à traiter des problèmes écologiques à l’échelle locale et nationale. Cette association, Al-Minbar al-Akhdar, a fait de la question des carrières, à partir de 1993, une de ses préoccupations principales15.

  • 16 Cf. infra note n° 38.

15À Enfeh, après certaines activités en rapport avec l’environnement de la ville, le groupe d’acteurs, animateur de ces actions, a décidé de créer son association écologiste avant de rejoindre un autre groupe qui travaille sur la région du Koura. Ils ont formé ensemble une association écologiste dont le but est la protection de l’environnement et du patrimoine dans leur région (Hay’at Himayat al-Bi’a wal-Touras fi al-Koura). Avec l ‘affaire de la reconstruction du port de pêche à Enfeh, ils ont reçu le renfort de plusieurs associations qui ont participé à la défense du site archéologique en créant le Comité de Enfeh, au sein duquel Al-Minbar al-Akhdar et S.O.S. environnement ont joué un rôle déterminant. Ce rassemblement est intervenu au moment où les militants regroupés au sein de l’association régionale du Koura se sont divisés entre eux, pour et contre le projet16.

  • 17 Ces associations sont : Al-Minbar al-Akhdar, Hai’at al-Hfaz ‘alal-Bi’a à Béchareh, Bi’a Bila Houdo (...)
  • 18 Cette position revient souvent dans les discours et dans les projets de ces associations.
  • 19 Les associations écologistes profitent d’une large couverture médiatique, surtout dans la presse é (...)

16Dès leur création, ces associations ont fixé plusieurs objectifs en rapport avec l’environnement. Elles sont du type « revendicatif », et traitent les problèmes écologiques au cas par cas et sur dossier. Leurs positions vis-à-vis des détenteurs du pouvoir politique et administratif varient d’un cas à l’autre. Pour atteindre leurs objectifs, dans le cas du littoral, les dix associations regroupées dans Al-Moultaqa al-Akhdar17 ont joué le rôle de contre-pouvoir en s’opposant au projet du ministère des Transports ; dans le cas des carrières, elles ont investi les lieux du pouvoir en aidant l’administration publique, en particulier le ministère de l’Environnement, à repérer les infractions et à établir le plan directeur. Dans les deux cas, les associations écologistes ont mis en cause l’intérêt privé dans la logique de la reconstruction. Elles se sont constituées en force « alternative porteuse d’une revendication démocratique »18 pour dénoncer la politique publique de la reconstruction. D’un autre côté, on constate que ces associations veillent au respect des lois et des réglementations en matière de protection de l’environnement et à leur application au niveau local en repérant les infractions (écologie gestionnaire)19.

L’acteur public

  • 20 On remarque que l’application des lois et des réglementations en matière d’environnement n’est pas (...)

17La position de l’administration, qui représente l’acteur public dans ces affaires écologiques, est éclatée en raison de l’enchevêtrement des compétences mobilisées. De plus, elle est tiraillée par les différentes logiques (néolibéralisme, néocapitalisme) adoptées dans la politique de la reconstruction, qui brouillent les frontières entre le privé et le public et entre les différents types d’acteurs. L’administration – représentée par le Conseil des ministres, les ministères de l’Intérieur et de l’Environnement et le mohafez – a essayé de réglementer le travail des carrières (position réglementaire) en prenant plusieurs mesures20 : l’adoption du plan directeur concernant le classement des carrières dans des régions précises du Liban ; la fermeture des carrières qui n’ont pas d’autorisation de travail ; la réglementation de l’exploitation des carrières encore autorisées par des mesures qui diminuent leurs effets nuisibles. Dans l’exemple du port à Enfeh, la position de l’administration – représentée par le ministère des Transports chargé de réaliser ce projet – était fondée sur une position technique, camouflant des intérêts privés qui trouvent dans le cap archéologique de la ville un quai naturel sur lequel il est plus facile et moins coûteux d’agrandir le port. Le ministère de la Culture a pris une décision fondée sur ses compétences ministérielles, annulant celle du ministère des Transports, puisque l’affaire touche au patrimoine national, en demandant l’arrêt immédiat des travaux sur le cap archéologique.

  • 21 Le ministre de l’Environnement Akram Shhaïb a souligné cet enchevêtrement et les rapports entre le (...)

18Cet enchevêtrement et cette confusion ont constitué un élément à double tranchant pour les acteurs écologistes. Dans certains cas, ils se sont appuyés sur une décision édictée par un ministère annulant celle d’un autre ministère qui travaille sur le même site : c’est le scénario du littoral. Dans le cas des carrières, en revanche, ces dernières ont pu continuer leurs activités à cause des délais administratifs21.

  • 22 C’est le cas de Habib Hakim, député allié de Michel el-Murr (ministre de l’Intérieur) et propriéta (...)
  • 23 Il faut noter que certains présidents de municipalités (maires) et moukhtar originaires du Metn on (...)

19Le rôle des municipalités dans les deux questions était mineur pour plusieurs raisons. D’une part, la majorité des municipalités de ces régions étaient dissoutes : elles étaient sous la tutelle des mohafez ou des caïmacam qui sont à leur tour soumis à la décision des autorités politiques. D’autre part, les élus municipaux peuvent être impliqués dans les affaires des carrières en tant qu’entrepreneurs22, ce qui bloque la voie de protestation par l’intermédiaire de la municipalité. Finalement, même dans les cas où les municipalités exerçaient toujours leurs fonctions, il faut prendre en considération leur rapport aux institutions étatiques et leur inefficacité, surtout au niveau de la gestion et de la planification territoriale, puisqu’il n’y avait pas eu d’élections municipales depuis 196323.

L’acteur politique

L’élu local et les personnalités publiques de la région

  • 24 Certaines carrières appartiennent à des députés et des ministres-députés comme Habib Hakim, député (...)
  • 25 Par exemple, la réticence de l’Eglise orthodoxe à appuyer le mouvement revendicatif contre les car (...)

20Le rôle des élus locaux et des personnalités publiques change selon leur positionnement vis-à-vis du pouvoir et des décideurs politiques et en fonction de leur relation avec les entrepreneurs économiques. Comme toutes les questions qui touchent aux intérêts collectifs, la question de l’environnement met l’accent sur l’implication des personnalités publiques dans les affaires locales de leur région et sur la complexité des rapports noués entre les différents acteurs qui agissent sur la scène publique d’un espace donné. Dans certains cas, les personnalités publiques sont elles-mêmes les entrepreneurs économiques, des « élus-entrepreneurs »24, et leur soutien ou non à des causes écologiques se détermine à partir de leurs intérêts privés25. Dans la région du Metn par exemple, l’insertion des acteurs écologistes dans les structures sociales et politiques s’est effectuée dans les rouages de l’opposition politique parlementaire qui s’est organisée après les élections de 1992 autour de certains députés et personnalités politiques (Lahoud, Moukhaïber, Samaha, etc.) qui ont adopté une position ferme sur la question des carrières et de leur relation avec les entrepreneurs économiques.

L’acteur économique

  • 26 Par exemple, Joseph ‘Abdou Khoury, le principal actionnaire du chantier Linord sur le littoral du (...)
  • 27 Quand les acteurs écologistes ont été voir ‘Omar Misqawi, alors ministre des Transports, en lui pr (...)
  • 28 Cf. As-Safir, samedi 29 août 1998, n° 8084, p. 9.

21Les entrepreneurs des carrières et des complexes touristiques sont souvent liés aux acteurs politiques soit par des liens de parenté soit par des liens d’intérêts privés (économique ou politique)26. Ces acteurs économiques n’ont jamais occupé le devant de la scène dans les deux questions et souvent l’administration publique négociait à leur place. Ils ne sont pas entrés dans un face-à-face avec les acteurs écologistes puisqu’ils étaient, d’un côté, protégés et soutenus par la loi et par des règlements administratifs et, d’un autre côté, défendus par les autorités publiques27 grâce à leurs réseaux de pouvoir. Les entrepreneurs des carrières, par l’intermédiaire de leur syndicat, participent au débat et à l’élaboration du plan directeur, en critiquant certains points dans le plan. Ils réclament la réglementation du secteur des carrières actuellement géré par une loi de 1931 qui ne tient compte ni des besoins de la reconstruction et de l’urbanisation, ni de la protection de l’environnement28.

  • 29 Une société suisse a investi dans des carrières du Metn avec un capital de deux millions de dollar (...)

22À côté de ces acteurs, d’autres avaient aussi un rôle déterminant dans les deux questions. L’acteur international peut être une organisation internationale, un expert, un scientifique, comme il peut être aussi un entrepreneur29. Les simples citoyens avaient eux aussi leur rôle à jouer en soutenant, ou non, les écologistes et en participant aux mobilisations et à la signature des pétitions. Enfin, les médias ont joué un rôle essentiel à travers les couvertures médiatiques qu’ils ont assurées aux deux questions.

Négociation et mobilisation

  • 30 Sur la négociation et la justification écologique dans l’aménagement de la nature voir Lafaye C. e (...)

23L’attention portée d’une part aux acteurs et d’autre part à leurs intérêts divergents permet de prendre en considération les contraintes qui pèsent sur la négociation ainsi que sur les modalités et les formes des actions. Dans cette perspective, l’analyse doit alors s’étendre à l’étude des possibilités qui sont les leurs et aux processus de négociation à travers lesquels ils parviennent à faire valoir une cause30. Les résultats obtenus par les acteurs écologistes dans les deux cas en question sont le fruit d’un long processus extrêmement ouvert quant au jeu des acteurs et à l’état de leur rapport de force. Je tenterai ici d’évaluer les tendances des groupes à user de tel ou tel mode d’action en fonction de leurs ressources et des opportunités qui s’offrent à eux. Dans ces dynamiques, la question de l’écologie prend tout son sens et sa dimension.

Le passage du privé au public dans la défense de l’environnement

  • 31 Les associations écologistes s’inscrivent dans une perspective du développement durable, qu’elles (...)

24Les acteurs écologistes recherchent une légitimité par le recours à l’opinion publique et au soutien de la population qui servira de support à l’argumentation écologique fondée sur les droits et le bien public dans une perspective du développement durable31, contre une logique économique et commerciale fondée sur la prospérité. Est-ce qu’il suffirait simplement de défendre l’environnement et le bien public pour avoir une légitimité qui rende les acteurs écologistes crédibles dans l’opinion publique, locale ou nationale ?

25L’exemple de la mobilisation contre les carrières du Metn nous montre comment la mobilisation a été opérée, quels sont ses éléments, ses étapes, les moyens utilisés, etc. Les acteurs écologistes engagés contre les carrières dans la région du Metn ont acquis leur légitimité après un long processus de sensibilisation et de mobilisation. De la défense du bien et de l’intérêt privé à la protection du bien commun et de l’intérêt public en passant par l’intérêt d’un groupe restreint, les acteurs écologistes ont pu faire valoir leur cause grâce à la combinaison de plusieurs facteurs qui leur étaient favorables.

  • 32 J’ai pu repérer, entre 1993 et 1998, à l’aide d’un dossier de presse, une longue liste de réunions (...)
  • 33 Voir, à titre d’exemple, le communiqué publié dans les journaux du 29-3-1995, dans lequel les asso (...)

26Les premières personnes à protester contre les travaux des carrières étaient les habitants touchés directement dans leur qualité de vie (santé, bruit, poussière, pollution, etc.). Avec le développement des carrières dans le Metn, le nombre de personnes touchées a augmenté et une opinion collective s’est formée parmi les habitants sur le danger immédiat des carrières et leurs effets nuisibles à long terme. Dans ce contexte, où la majorité était touchée et menacée dans ses biens, l’action de l’acteur écologiste était légitime du point de vue de la collectivité locale si bien qu’il avait un mandat de facto pour parler au nom de l’intérêt commun32. Le temps pris pour l’aboutissement d’une décision sur la question des carrières du Metn, plus de dix ans, a été un élément essentiel dans l’affirmation et la persistance des acteurs écologistes dans leur position. Cette persistance, le temps long et les échéances traversées dans la mobilisation et la négociation furent en mesure de dévoiler tous les intérêts dissimulés derrière les positions des acteurs. L’acteur écologiste (l’association) a ajouté, par son intervention, une dimension nationale à la mobilisation quand il a exigé la réglementation des activités des carrières à partir d’un plan directeur pour tout le pays33.

  • 34 Mis à part l’Église orthodoxe qui a vendu des terrains et les courtiers locaux. Personne parmi les (...)
  • 35 Les acteurs écologistes ont reçu l’appui de Michel Samaha, ministre de l’Information et député du (...)
  • 36 Le rôle des médias n’est pas toujours explicite, il faut le voir sous plusieurs angles : oppositio (...)

27Davantage, trois éléments ont joué un rôle essentiel en faveur des acteurs écologistes dans le processus de négociation et de mobilisation. Premièrement, la majorité de la population locale n’avait aucun intérêt dans le développement des carrières dans leur région34. De même, les entrepreneurs exploitant les carrières ne sont pas originaires des villages touchés directement par les travaux. Deuxièmement, il existait, dès 1992, une opposition politique et parlementaire, formée de personnalités originaires du Metn, avec laquelle les acteurs écologistes ont coordonné leurs actions. Ces personnalités ont participé directement (signature des pétitions, participation aux manifestations, etc.) et indirectement, en usant de leur pouvoir en faveur des écologistes, ou mouvement contre les carrières35. Troisièmement, les questions écologiques en général et la question des carrières en particulier bénéficient d’une large couverture médiatique qui a offert, à plusieurs reprises, l’occasion aux écologistes de présenter et de défendre leur cause. Dans cette affaire, les médias n’ont pas reproduit simplement les faits et les discours des acteurs mobilisés. Ils étaient partie prenante aux interactions – une partie favorable au mouvement écologique. Ils visaient à produire une image valorisante des acteurs écologistes et de leurs revendications ; dans certains cas « journalistes et professionnels des médias peuvent devenir acteurs à part entière des mouvements sociaux »36.

  • 37 Comprise ici dans le sens d’une force politique qui peut constituer une sorte de contre-pouvoir su (...)
  • 38 La majorité des acteurs engagés au début dans la mobilisation ont abandonné l’action dès lors qu’i (...)
  • 39 Les acteurs écologistes ont assuré la médiatisation de l’affaire du port à Enfeh par une série de (...)
  • 40 L’émission télévisée « Al-Chater Yahki » sur la chaîne LBC dans laquelle est passé un acteur écolo (...)

28Le mouvement pour l’aménagement du littoral de Enfeh et la protection de son cap archéologique présente un parcours différent de celui des carrières, au niveau de sa construction de la mobilisation. Une partie de la population locale, les pêcheurs et leurs familles, voyait son intérêt dans la construction d’un nouveau port. D’un côté, les habitants de Enfeh n’étaient menacés ni dans leur santé ni dans leurs biens privés par la construction du nouveau port, ce qui allait à rencontre, aux débuts du mouvement, de l’action des acteurs écologistes en affaiblissant leur argumentation écologique fondée sur le bien commun (naturel et archéologique). D’un autre côté, l’absence d’une opposition politique37, parlementaire ou autre, dans la région du Koura, ainsi que les services rendus à la population par le ministre-député Farid Moukari n’ont pas facilité la mobilisation des habitants en faveur de la protection de l’environnement. Dans ce contexte, il était difficile aux acteurs écologistes38 de mobiliser la population et d’acquérir son soutien ou même celui de leur propre famille. Il fallait contourner la société locale en mobilisant une opinion plus large et publique dépassant le cadre local. Pour cette mobilisation, les médias ont joué un rôle essentiel en portant l’affaire au niveau national : ils ont donné l’occasion aux acteurs écologistes de présenter leur cause39. Après sa médiatisation, l’affaire a fait boule de neige dans le milieu écologique libanais qui a formé, de suite, un comité pour Enfeh regroupant une dizaine d’associations écologistes avec le soutien de l’UNESCO et du PNUD. Il faut préciser que l’accès aux médias ne se fait pas à chaque fois qu’il y a une affaire écologique à soulever. Cet accès obéit aux interactions entre les acteurs, à leur rapport de force et à leur degré d’insertion dans des réseaux et des lobbies influents40.

29Bien que ces deux mouvements écologiques aient plusieurs points communs dans leur mobilisation et qu’on y trouve les mêmes acteurs écologistes engagés (les membres de l’association Al-Minbar al-Akhdar), on peut distinguer certains modes d’action propres aux caractéristiques de chaque terrain. Alors que les pétitions, les réunions publiques dans les villages et les manifestations (sit-in) ont constitué un moyen essentiel dans la sensibilisation et la mobilisation de la population contre les carrières du Metn, elles n’ont pas été adoptées par les mêmes acteurs écologistes dans la défense du cap archéologique à Enfeh. Ces modes d’action exigent pour leur réussite des éléments endogènes (soutien de la population et des personnalités publiques, consensus local, etc.) que l’acteur écologiste n’a pas trouvé à Enfeh. Alors, par une réaction réfléchie, il a concentré ses efforts sur des moyens exogènes pour renforcer son action (conférences et dossiers de presse, rapports scientifiques, soutien d’associations écologistes nationales et d’organisations internationales, campagne médiatique).

Exploiter les ressources de la scène publique

  • 41 La seule fois où les entrepreneurs des carrières sont entrés en négociation directe avec l’associa (...)

30Toutes ces actions ont été accompagnées d’une façon concomitante par des négociations qui se sont déroulées principalement entre les acteurs écologistes et l’administration publique. Dans aucun des deux cas, l’acteur écologiste n’est entré en négociation directe avec les entrepreneurs économiques : ses interlocuteurs était l’administration publique et des personnalités politiques41. Dans les deux questions, l’acteur écologiste était admis par l’administration comme un interlocuteur officiel qui a pu s’imposer soit au nom de l’intérêt commun d’une population déterminée, soit au nom de l’intérêt public et national. Dans la négociation, comme dans la mobilisation, l’acteur écologiste a eu recours à plusieurs ressources et arguments pour défendre sa cause.

  • 42 Dans les deux exemples en questions, les associations ont eu recours aux services d’experts et d’o (...)
  • 43 Le projet alternatif pour l’aménagement et le développement durable du littoral et de la ville de (...)

31Il faut noter que le fait même d’avoir créé une association est en soi une ressource (organiser le mouvement, préparer les dossiers et les études, assurer la continuité et trouver des volontaires, etc.), qui peut être complétée par un réseau associatif organisé et destiné à renforcer la position des acteurs écologistes dans la négociation et modifier les rapports de force avec les autres acteurs. Certaines associations adoptent, grâce à des capacités acquises dans différents domaines écologiques, une position d’expert en produisant des informations et en proposant des projets alternatifs42. Souvent, c’est la même association qui change et adopte une variété d’orientations diversifiées dans son action, soit d’une façon concomitante, soit d’une façon successive. Les associations écologistes dans leurs projets alternatifs présentés en particulier dans l’aménagement du littoral à Enfeh, ont essayé d’ajouter une valeur marchande aux biens écologiques en mobilisant des ressources financières pour compenser d’éventuelles pertes économiques liées à la protection de l’environnement43. Si la crédibilité est un élément essentiel pour la négociation et la mobilisation, la validité l’est aussi pour la mobilisation des ressources : des ressources qui peuvent être utilisées, pour rendre crédibles des menaces et des promesses tenues par les parties en présence, qui cherchent à parvenir à une réglementation ou à un accord.

32Les associations écologistes n’ont pas remporté une grande victoire dans la défense de l’écologie mais ces avancées et reculs dans l’application et l’adoption des lois et des décisions en matière d’environnement ont fait bouger l’administration en engageant un débat public. Elles ont montré qu’en écologie, l’espace public est ouvert aux interactions de plusieurs acteurs (écologistes, publics, économiques, politiques, etc.) qui influencent et participent, en fonction du rapport de force, à la prise de décision.

33Ces processus et ces dynamiques nous amènent à examiner leurs conséquences sur les liens sociaux dans un espace donné. Comment la participation à l’élaboration d’une politique commune de la reconstruction et à la définition de l’intérêt public, permet-elle à ces acteurs écologistes de contribuer à la recomposition d’un nouvel espace public ?

Revivification des liens sociaux et recomposition d’un nouvel espace public

34Les effets des processus étudiés (négociation, mobilisation, participation) sur les liens sociaux peuvent être appréhendés selon plusieurs perspectives en rapport avec l’espace et le temps. L’espace est observé sur deux échelles, locale et nationale. Le temps est analysé en deux moments, le présent et le futur.

  • 44 Durant cinq ans de mobilisation et surtout quand l’association écologiste (Al-Minbar al-Akhdar) es (...)

35À l’échelle locale, ces processus ont contribué à l’intégration de l’acteur écologiste dans son cadre local en repensant autrement le rapport à l’environnement et au milieu naturel. Ensuite, l’acteur écologiste s’est inséré, par l’action engagée, dans les structures sociales et politiques en tissant des liens avec les réseaux locaux politiques, et pas seulement avec le milieu géographique. Mais cette insertion et cette implication dans le milieu et les affaires locales ne sont pas sans effets négatifs sur les associations écologistes, en particulier sur les acteurs engagés dans l’action contestataire. Dans le Metn comme à Enfeh, une fois que l’opposition écologiste a franchi une certaine limite en menaçant directement les intérêts des entrepreneurs, plusieurs acteurs écologistes ont été forcés, sous pression directe et indirecte, de déserter la mobilisation44. Mais cet affrontement a consolidé la résolution des autres acteurs écologistes à persister dans leurs positions malgré la tension et la pression.

  • 45 Voir Lafaye C. et Thevenot L., « Une justification écologique ? Conflits dans l’aménagement de la (...)

36Le renforcement de la prise en compte de l’argumentation écologique dans le processus de la reconstruction contribue également à relier l’action la plus immédiate au devenir à plus long terme45. Les associations écologistes établissent des connections et des médiations entre l’action ponctuelle et localisée et son impact global, et entre le geste immédiat et ses effets à long terme. Autrement dit, les réglementations et les lois en matière d’environnement (carrières et littoral) obtenues en raison de la mobilisation écologiste ne résoudront pas seulement un problème présent, mais elles engageront toute activité dans le futur puisque celle-ci sera réglée et gérée par la loi.

  • 46 Voir les remarques de Battegay A. et Boubeker A., « Les voies associatives. Dynamique de liens ass (...)

37Le passage de l’échelle locale à l’échelle nationale s’est effectué en deux temps. D’une part, il s’est effectué par le passage de l’action individuelle à l’action associative plus large où les associations écologistes en coordination ou en comité de liaison favorisent le développement d’une argumentation plus générale et permettent d’engager des acteurs et des entités qui dépassent les limites du cadre local et du voisinage. D’autre part, ces associations ont pu transformer dans la longue durée le territoire local, compris comme agencement de lieux et de liens dans un cadre géographique, en un territoire d’expériences associatives qui ne serait pas de l’ordre de l’enclave et de l’îlot46. C’est désormais un espace de circulation de significations et de réseaux, admettant une pluralité de scènes, de publics et de langages.

  • 47 Memmi D., « L’engagement politique », in Madeleine Grawitz, Jean Leca (éd.), Traité de Science Pol (...)
  • 48 Durant les élections municipales du printemps 1998, on a pu remarquer plusieurs phénomènes en rapp (...)

38L’engagement associatif écologiste, ainsi compris, peut être appréhendé comme une forme d’intervention dans l’espace public (espace de négociation, de médiation et de participation citoyenne) qui a encouragé la participation politique. Cette participation peut être définie comme « toute action volontaire visant à influencer le choix des politiques, l’administration des affaires publiques ou le choix des leaders politiques à tout niveau du gouvernement, local ou national »47. Les modalités de la participation ainsi comprise incluent l’adhésion à toute organisation s’attachant à obtenir des décisions en faveur de la collectivité ou d’un groupe, à gérer une partie de la vie collective ou simplement à la penser. Une participation qui s’institutionnalise de plus en plus, d’un côté, par la création croissante d’associations écologistes et, d’un autre côté, par la consolidation de la place de ces dernières dans l’espace politique à travers le pouvoir électoral (les élections municipales et législatives) grâce aux candidatures des acteurs écologistes48. Cependant, dans son programme électoral pour les élections municipales de 1998 auxquelles il n’a pas été élu, l’acteur écologiste principal de la mobilisation de Enfeh n’a pas du tout évoqué la question de l’aménagement du littoral dans sa ville dont il était le premier défenseur. Il explique ceci par le fait que sa candidature pouvait être considérée comme un défi aux personnalités politiques de la ville, et c’est pourquoi il a préféré parler de l’environnement en général sans évoquer des questions critiques et conflictuelles. Ce faisant, il a élargi son champ d’action de la scène locale à la scène politique.

  • 49 Catusse M., « Quelques réflexions sur la problématique des nouveaux acteurs. L’entrée en politique (...)

39Considérer les écologistes comme de potentiels « nouveaux acteurs politiques » implique nécessairement de distinguer les formes d’action publique dont ils sont les promoteurs en établissant des corrélations entre leurs réalisations effectives dans le domaine de l’environnement, et la recomposition d’un espace public dont les frontières et les normes sont sans cesse rediscutées49. Finalement, il faut examiner comment les préoccupations en matière d’environnement constituent une ressource efficace pour questionner et mettre en cause la légitimité des autres modes de justification à dire le bien commun.

40La spécificité de ces deux exemples et les questions soulevées, nous permettent d’appréhender la réconciliation comme une tension entre deux perspectives : la recherche, d’un côté, de l’avantage direct et individuel dans les processus de reconstruction et, d’un autre côté, la quête d’un sens global et solidaire. Leur articulation s’opère à travers la participation à la définition de l’intérêt public et du bien commun, et l’élaboration d’une politique commune de la reconstruction. Elle est le résultat d’une négociation et d’un consentement collectif à des finalités acceptées, contribuant ainsi à la cohésion d’ensemble.

Notes

1 Voir, Raymond L., Bailey B. et S., Third World Political Ecology, Routledge, London and New York, 1997, 237 p.

2 On peut signaler la création de l’association « Les amis de la nature » le 6 décembre 1972 (enregistrée officiellement en 1984), ayant pour but le développement social et écologique. Elle réunissait 3 180 adhérents en 1994, dont dix membres forment son conseil supérieur selon : Chamieh N. et ‘Issa J., « Vers une politique écologique au Liban » (en arabe), Beyrouth, LCPS, 1997, p. 44. On peut signaler aussi la création de la Fédération libanaise pour la protection de l’environnement en 1979 (depuis 1992 elle est connue sous le nom du Cercle libanais pour la protection de l’environnement). Elle a participé à l’élaboration du projet de loi du ministère de l’Environnement en 1990, au projet de la Charte libanaise pour l’environnement en juin 1991 et au projet du Rassemblement des associations écologistes au Liban.

3 « En 1970, une commission pour l’étude de l’environnement et un groupe de travail furent constitués par le ministère du Plan ; le plan sexennal de développement 1972-1977 établi par le ministère du Plan et ratifié le 19 janvier 1972 par le gouvernement devait s’inspirer de ce rapport préliminaire sur l’environnement ; un projet de loi adressé au Parlement en avril 1982 pour la création d’un ministère spécialement chargé de l’Environnement, l’expérience s’est arrêtée à cette date et n’a été reprise qu’en décembre 1990 avec un ministère d’État à l’Environnement ». Voir Mallat H., Droit de l’urbanisme, de la construction, de l’environnement et de l’eau au Liban, Bruylant, Beyrouth, DELTA, 1997, 335 p.

4 Cf. Fisher W. F., « Doing Good ? The Politics and Antipolitics of NGO Practices », Annual Review of Anthropology n°26, 1997, p. 439-464.

5 Je fais la distinction, suivant Dominique Wolton, entre trois espaces : l’espace commun, l’espace public et l’espace politique. « L’espace commun est lié à l’idée de communal et de communauté. Il est à la fois physique, défini par un territoire, et symbolique, défini par des réseaux de solidarité. Par espace public – qui était au départ un espace physique, celui de la rue, de la place, du commerce et des échanges -, on reconnaissait intuitivement l’importance de la discussion contradictoire, de l’argumentation, de la liberté d’expression, donc de la dimension ouverte de la politique. Dans l’espace politique, il ne s’agit ni de discuter, ni de délibérer, mais de décider et d’agir. Il ne faut pas nier le phénomène essentiel du temps, dans le passage d’un espace à l’autre », Wolton D., « Espace public. Un concept à retravailler », Études n° 2, février 1996, p. 187-198.

6 Je remercie Habib Ma‘louf pour ses réflexions à propos du mouvement écologique au Liban et pour les informations qu’il m’a fournies. Les données concernant les deux terrains d’étude (le développement des carrières au Metn et l’aménagement du littoral à Enfeh) ont été rassemblées suite à des entretiens avec les membres de l’association écologique Al-Minbar al-Akhdar, en particulier avec Habib Ma‘louf, Hani Abou Fadel et Hafez Georeïj, et à l’aide de dossiers de presse.

7 La reconstruction du centre-ville de Beyrouth et les différents chantiers, les projets de remblais et de routes engendrent une demande croissante en matériaux de construction tels que blocs de pierres, graviers et sables.

8 La région du Metn compte plusieurs villages touchés par les creusements des carrières : Zabougha, Kafar’aqab, Wadi al-Karm, Deir Chamra, Chrine, ‘In al-Toufaha, Al-Khinchara, Baskinta et Bteghrine.

9 Pour l’exploitation des carrières autorisées, cette loi a envisagé des mesures pour diminuer leurs effets nuisants : interdiction des explosifs, exploitation en palier pour la protection des paysages, etc. Voir la décision du ministère de l’Environnement (1/182 du 7-11-1997) qui précise les conditions de l’exploitation des carrières : Minbar al-Bi‘a, n° 6, février-mars 1998, p. 10-16, dossier sur les carrières au Liban.

10 Par exemple les arrêtés n° 45 du 7-2-1996 et n° 4 du 8-5-97, voir le bulletin écologique Minbar al-Bi’a, n° 6, février-mars 1998.

11 Cf. infra note n° 37.

12 Al-Minbar al-Akhdar est née en 1995 suite à une fusion entre deux associations écologistes (Al-Hai’a al-Loubnaniyya lil-Bi’a wal-’Inma’ créée en 1992 à l’initiative des acteurs originaires de la région du Metn. et Al-Lajna al-Wataniyya li-Anchita al-Bi’a créée à la même date à l’initiative de certains professeurs et étudiants de la Lebanese American University). Elle siège à Beyrouth (à Hamra) et réunit en son sein des membres originaires de différentes régions (autour de 150 membres adhérents, il faut compter un noyau actif de 30 personnes, avec un bureau exécutif de 12 personnes élu pour deux ans). Elle travaille avec des organisations internationales, avec le PNUD et l’organisation allemande Friedrich-Ebert qui finance certains projets (publications et séminaires), sur certains dossiers en rapport avec l’écologie comme les projets « Life », « ‘Aïdoun » et « SDNP ». De même, elle coordonne son action avec certains ministères par exemple le ministère de l’Éducation, pour le projet d’initiation à l’hygiène et à l’écologie mené avec les instituteurs de l’école publique et avec le ministère de l’Environnement dans les questions des carrières et des ordures ménagères. Cette association est aussi membre d’un rassemblement écologique Al-Moultaqa al-Akhdar qui réunit 10 autres associations (couvrant tout le territoire libanais) qui travaillent ensemble sur plusieurs questions comme par exemple, les carrières, le littoral, le triage et le recyclage des ordures ménagères, le reboisement, les réserves naturelles, etc. Cf. infra note 17. Ce rassemblement publie un bulletin écologique, Minbar al-Bi’a, tiré à 2000 exemplaires tous les deux mois, distribué par l’intermédiaire des associations écologistes et par abonnement.

13 Deux d’entre eux avaient été à l’origine du décret présidentiel, promulgué en 1972, qui a classé le site archéologique de Enfeh à l’Inventaire du patrimoine national et depuis, ces deux acteurs, un professeur et un ingénieur, essayent de protéger le site contre toute construction nuisible.

14 Ces informations ont été recueillies à partir d’une enquête menée auprès des membres de l’association écologique Al-Minbar al-Akhdar.

15 Cf. supra note n° 8.

16 Cf. infra note n° 38.

17 Ces associations sont : Al-Minbar al-Akhdar, Hai’at al-Hfaz ‘alal-Bi’a à Béchareh, Bi’a Bila Houdoud à Maghdoucheh, Tajam’ Nissa’ ‘Arabsalim, Green Line, Majles al-Bi’a wel-Touras à Al-Qobaiyyat, S.O.S. Environnement, Hai’t Himaiat al-Bi’a wel-Mouhafaza ‘alal-Touras à Nabatieh, Jamiyyat al-Tanmiya al-Rifiyya à ‘Irssal, et T.E.R.R.E. Il faut préciser que ces associations ne s’impliquent pas de la même façon dans les différentes questions écologiques mais elles se soutiennent dans leurs causes.

18 Cette position revient souvent dans les discours et dans les projets de ces associations.

19 Les associations écologistes profitent d’une large couverture médiatique, surtout dans la presse écrite (à un moindre niveau dans leurs propres bulletins d’information) pour assurer « la gestion écologique ».

20 On remarque que l’application des lois et des réglementations en matière d’environnement n’est pas fixe : les lois sont souvent bafouées, ce qui exige à chaque fois de nouvelles décisions pour imposer une législation pourtant en vigueur. Par exemple, les lois n° 45 du 7-2-96, n° 40 du 12-3-97 et n° 4 du 8-5-97 relatives aux carrières.

21 Le ministre de l’Environnement Akram Shhaïb a souligné cet enchevêtrement et les rapports entre les différents ministères et institutions publiques en indiquant qu’il y a 44 responsables politiques qui ont un lien étroit avec les carrières. Voir, As-Safir, 29 août 1998, n° 8084, p. 9.

22 C’est le cas de Habib Hakim, député allié de Michel el-Murr (ministre de l’Intérieur) et propriétaire des carrières à Monteverde dans la région du Metn, qui était en même temps président de la Confédération des municipalités du Metn et président de la municipalité de Sin el-Fil.

23 Il faut noter que certains présidents de municipalités (maires) et moukhtar originaires du Metn ont participé au mouvement contre les carrières dans leur région.

24 Certaines carrières appartiennent à des députés et des ministres-députés comme Habib Hakim, député du Metn, Rocheid al-Khazen, député du Kesrouan, Nicolas Ftouch, député de Zahlé et ministre du Tourisme, Michel el-Murr, député du Metn et ministre de l’Intérieur, etc. ; de même, ils peuvent être actionnaires dans des projets privés, F. Moukari serait ainsi actionnaire dans le complexe de Las Salinas à Enfeh.

25 Par exemple, la réticence de l’Eglise orthodoxe à appuyer le mouvement revendicatif contre les carrières du Metn, serait liée au fait qu’elle a vendu des terrains aux entrepreneurs des carrières (entretient avec les acteurs écologistes du Metn).

26 Par exemple, Joseph ‘Abdou Khoury, le principal actionnaire du chantier Linord sur le littoral du Metn, est en même temps le président du syndicat des Propriétaires des carrières et propriétaire de plusieurs carrières qui alimentent son projet en matériaux de construction de remblais.

27 Quand les acteurs écologistes ont été voir ‘Omar Misqawi, alors ministre des Transports, en lui proposant leur projet pour l’aménagement du littoral et du nouveau port à Enfeh, le ministre a demandé un délai pour présenter le projet aux propriétaires des complexes touristiques et voir s’il correspondait à leurs intérêts.

28 Cf. As-Safir, samedi 29 août 1998, n° 8084, p. 9.

29 Une société suisse a investi dans des carrières du Metn avec un capital de deux millions de dollars, de même qu’une société française. Les acteurs écologistes et l’administration publique, dans la question du littoral et de la protection des sites archéologiques, ont eu recours à des experts internationaux (un comité d’experts italiens) pour soutenir et renforcer leurs propos respectifs sur l’aménagement du littoral. Les associations écologiques ont fait intervenir l’UNESCO dans l’aménagement du littoral à Enfeh.

30 Sur la négociation et la justification écologique dans l’aménagement de la nature voir Lafaye C. et Thevenot L., « Une justification écologique ? Conflits dans l’aménagement de la nature », Revue française de sociologie, XXXIV, 1993, p. 495-524.

31 Les associations écologistes s’inscrivent dans une perspective du développement durable, qu’elles partagent avec les organisations internationales et le ministère de l’Environnement. Cf. An-Nahan 10 octobre 1998, p. 9.

32 J’ai pu repérer, entre 1993 et 1998, à l’aide d’un dossier de presse, une longue liste de réunions, rencontres, conférences de presse, émissions télévisées, publications de rapports et études, manifestations, création de comités (par exemple, celui des deux Metn, nord et sud, auquel ont participé les représentants des villages touchés par les travaux des carrières, des présidents de municipalités et des moukhtar de la région), etc., à l’instigation des associations écologistes qui ont travaillé sur le dossier des carrières. De même pour l’aménagement du littoral à Enfeh. Ces dossiers de presse se trouvent dans les archives de l’association écologiste Al-Minbar al-Akhdar à Hamra (Beyrouth).

33 Voir, à titre d’exemple, le communiqué publié dans les journaux du 29-3-1995, dans lequel les associations écologistes demandent la démission du ministre de l’Environnement Samir Moukarbel, et présentent aux parlementaires libanais leurs remarques sur le plan directeur réglementant les carrières dans tout le pays.

34 Mis à part l’Église orthodoxe qui a vendu des terrains et les courtiers locaux. Personne parmi les habitants ne travaille dans les carrières (90 % des employés sont étrangers) et les chauffeurs des camions venant d’autres régions.

35 Les acteurs écologistes ont reçu l’appui de Michel Samaha, ministre de l’Information et député du Metn (à l’époque où il était encore ministre et dans l’opposition contre la coalition du ministre Michel el-Murr), pour tenir, avec sa participation, une conférence de presse au ministère à propos des carrières le 9-4-1993. Une autre conférence a été tenue avec la participation du ministre de l’Intérieur de l’époque Bechara Merhej (aussi dans les rangs de l’opposition), le 21 -12-1993. Plusieurs personnalités publiques – dont les députés Nassib Lahoud, Samir Aoun, Ghassan al-Achkar, Riad Abou Fadel, à côté des artistes comme Elias al-Rahbaneh, etc. – ont participé au sit-in devant les carrières de la région de Abou Mizen du Metn le 9 octobre 1996 (voir les journaux de 10-10-1996).

36 Le rôle des médias n’est pas toujours explicite, il faut le voir sous plusieurs angles : opposition politique au régime, gain d’audience à travers le soutien de certaines causes qui font écho dans la société, défense des intérêts publics, spécialisation dans certains domaines dont l’environnement, etc. De même, il faut prendre en considération le rôle des journalistes militants écologiques (deux personnes parmi les acteurs écologistes engagés sont journalistes). Sur le rôle des médias dans les mouvements sociaux voir Neveu E., Sociologie des mouvements sociaux, La Découverte (coll. Repères), Paris, 1996, p. 91-97.

37 Comprise ici dans le sens d’une force politique qui peut constituer une sorte de contre-pouvoir susceptible de questionner les autorités publiques et politiques sur leurs projets.

38 La majorité des acteurs engagés au début dans la mobilisation ont abandonné l’action dès lors qu’ils sont entrés en confrontation avec les députés-ministres F. Moukari et ‘O. Misqawi et les pêcheurs. Deux acteurs seulement ont continué la campagne contre le projet avant d’être rejoints par des acteurs venant d’autres régions.

39 Les acteurs écologistes ont assuré la médiatisation de l’affaire du port à Enfeh par une série de conférences, de rencontres et d’articles dans la presse écrite mettant l’ accent sur l’importance archéologique et historique de la région comme partie du patrimoine national et international.

40 L’émission télévisée « Al-Chater Yahki » sur la chaîne LBC dans laquelle est passé un acteur écologiste de Enfeh (partisan de la famille Douraïq, rivale politique de la famille Moukari dans la ville de Enfeh) dénonçant la construction du port et dévoilant les intérêts dissimulés derrière le projet, a été diffusée malgré la pression de Farid Moukari, encore ministre de l’Information, pour la censurer. Dans cette affaire, les associations écologiques ont pu profiter d’un moment de tension entre Farid Moukari et Soleiman Frangié, député-ministre du Nord et actionnaire dans cette chaîne de télévision, pour demander à ce dernier l’accès à la télévision et la diffusion de l’émission. Les acteurs écologistes locaux expliquent le soutien qu’ils ont reçu de S. Frangié par le fait que ce dernier a appris à nager au large du cap d’Enfeh.

41 La seule fois où les entrepreneurs des carrières sont entrés en négociation directe avec l’association écologique, Al-Minbar al-Akhdar, fut après le sit-in organisé à l’initiative de cette dernière. L’interlocuteur était une société suisse qui a promis à l’association de respecter les normes écologiques dans l’exploitation des carrières. L’association a répondu qu’elle n’avait pas confiance dans les autorités qui devaient surveiller l’application des réglementations et des normes. L’association écologique a négocié aussi avec les chauffeurs des camions – menacés de perte de leur travail après la décision ministérielle imposant la fermeture des carrières – en soutenant leur mobilisation et en demandant qu’ils soient transférés dans les nouveaux lieux d’implantations des carrières. Les associations écologiques, une fois élaboré un projet alternatif pour l’aménagement du littoral à Enfeh, ont négocié le projet avec les pêcheurs : la majorité l’a accepté.

42 Dans les deux exemples en questions, les associations ont eu recours aux services d’experts et d’organisations spécialisées internationales pour la production de rapports scientifiques et d’études en matière d’environnement.

43 Le projet alternatif pour l’aménagement et le développement durable du littoral et de la ville de Enfeh, présenté par les associations écologiques (le Comité de Enfeh) avec l’aide de l’UNESCO, a été négocié et approuvé par la majorité des pêcheurs. En 1998, les acteurs écologistes attendent qu’il soit adopté par le ministère des Transports pour le mettre en œuvre. Il comprend trois étapes de réalisation avec un budget de 600 000 dollars qui pourra être renouvelé (agrandissement du port de pêche, renouvellement des activités des salines, réalisation des nouvelles fouilles archéologiques sur le cap avec la construction d’un musée artisanal).

44 Durant cinq ans de mobilisation et surtout quand l’association écologiste (Al-Minbar al-Akhdar) est entrée en opposition directe avec les autres acteurs (publics, politiques et économiques) au sujet des carrières, six de ses membres, originaires du Metn, ont été forcés d’abandonner la mobilisation par peur de perdre leur travail. À Enfeh, dès que le député-ministre Farid Moukari a déclaré qu’il était pour la construction d’un nouveau port sur le cap archéologique de la ville, presque tous les membres, à l’exception des deux personnes, engagés dans Hay’at Himayat al-Bi’a wal-Touras au Koura pour la défense du site, ont renoncé, à la demande directe de F. Moukari.

45 Voir Lafaye C. et Thevenot L., « Une justification écologique ? Conflits dans l’aménagement de la nature », op. cit.. p. 504.

46 Voir les remarques de Battegay A. et Boubeker A., « Les voies associatives. Dynamique de liens associatifs et construction de territoire », in Les aléas du lien social, Constructions identitaires et culturelles dans la ville, coordonné par Jean Métrai, ministère de la Culture et de la Communication, 1997, p. 123-145.

47 Memmi D., « L’engagement politique », in Madeleine Grawitz, Jean Leca (éd.), Traité de Science Politique, volume 3 « L’action politique », PUF, Paris, 1985, p. 313.

48 Durant les élections municipales du printemps 1998, on a pu remarquer plusieurs phénomènes en rapport avec l’écologie : des associations écologistes ont présenté un programme en demandant à tous les candidats de le respecter ; ces associations avaient leur propres candidats dans différentes régions du Liban, l’écologie et l’environnement étaient les mots d’ordre dans presque tous les programmes électoraux présentés.

49 Catusse M., « Quelques réflexions sur la problématique des nouveaux acteurs. L’entrée en politique des entrepreneurs privés marocains : vecteurs de recomposition de l’espace public national », texte non publié.

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