RÉGIONS

Les marchés locaux du travail en Alsace

par Bernard Aubry*

Longtemps épargnée par le chômage, l'Alsace au cours des dernières années, a été touchée par une forte dégradation de l'emploi. Elle reste cependant, avec l'Ile-de-France, la région la moins atteinte par le chômage. C'est dans les bassins les plus urbanisés, Strasbourg, Mulhouse, Colmar, que les taux sont les plus élevés, et la fréquence des entrées au chômage la plus forte. L'industrie, de tradition ancienne, s'est renouvelée en partie jusque dans les années quatre-vingts, en bénéficiant de la construction européenne

qui a profité aussi au secteur tertiaire. Cependant les créations d'emploi n'ont pas suffi à absorber une population active croissant rapidement. Strasbourg à dominante tertiaire, et Mulhouse à vocation industrielle, sont les deux grands pôles de l'emploi. Mais de nombreuses zones comptent sur les marchés du travail extérieurs pour faciliter les sorties de chômage : le bassin de Wissembourg par exemple vit dans l'orbite de Karlsruhe où travaillent 5 000 frontaliers.

Parmi les vingt-deux régions françaises, l'Alsace, encadrée par les Vosges et le Rhin, est l'une des plus homogènes. Les deux départements rhénans qui la composent affichent des similitudes remarquables. Cependant, l'unité est beaucoup plus démographique et culturelle qu'économique, comme en témoigne la relative faiblesse des échanges entre les deux départements.

Au nord, le Bas-Rhin est en majeure partie orienté vers le pôle que forme Strasbourg, onzième agglomération française. Seule la partie nord-est du département échappe à son attraction, en raison de la présence de Karlsruhe, agglomération de 280 000 habitants située à une quinzaine de kilomètres de la frontière. Au sud, le Haut-Rhin est beaucoup moins polarisé. Ses deux grandes unités urbaines, Mulhouse et Colmar, doivent compter avec Baie, agglomération de plus de 400 000 habitants, reliée à Mulhouse par une autoroute, et dont l'attraction déborde la frontière. Au sud-ouest, le Haut-Rhin s'ouvre également vers la zone de Belfort- Montbéliard et au-delà, vers Lyon.

L'Alsace ne bénéficie sans doute pas autant qu'elle le devrait de sa position centrale en Europe. Si la région

ticipe aux grands courants internationaux par les voies ferrées, fluviales et aériennes (aéroports Bâle-Mulhouse et Strasbourg), elle demeure quelque peu à l'écart de l'axe principal qui, par chemin de fer et autoroutes, relie le nord au sud de l'Europe.

D'une histoire tourmentée, l'Alsace a gardé nombre de caractères particuliers qui imprègnent peu ou prou les données statistiques : droit local hérité en partie du Code civil allemand, dialecte encore répandu dans la population, présence d'une communauté protestante nombreuse (20 % de la population au recensement de 1962), et aussi d'une minorité israélite relativement importante. Autant d'éléments utiles à rappeler si l'on veut comprendre un peu de la réalité alsacienne, plus qu'ailleurs sans doute réfractaire à toute réduction.

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