Le sens de la maladie dans l'antiquité hébraïque

Le peuple d'Israël errait depuis trois jours, gémissant et altéré, dans le désert de Shur. Quand la voix du Seigneur lui eut révélé comment étancher sa soif aux sources de Mara, elle s'empressa au surplus de rappeler à ceux qui d'elle avaient douté : « C'est moi, Iahvé, moi seul qui guéris » (Ex., 15, 22-26). Plus tard encore, dans le cantique qu'au seuil de la mort éleva Moïse, le même témoignage se laisse entendre : « C'est moi qui fais périr et qui fais vivre. Quand j'ai frappé, c'est moi qui rends la santé et personne ne délivre de ma main » (Deut,, 32, 39). Ainsi, devant la nation élue, dès les débuts de son histoire, l'Éternel s'est affirmé comme l'unique auteur des biens et des maux.

Le dieu tribal et ambulant qu'emportaient dans leurs migrations, sous la tente patriarcale, Abraham, Isaac et Jacob, ne se manifesta dans son absolue transcendance que sur l'Horeb, lorsque, à travers le buisson de feu, il se fut nommé à Moïse « Celui qui Suis ». En vertu de l'alliance qu'il avait contractée avec Israël, il ne toléra plus dès lors de partage et les Prophètes dénonçaient dans chaque événement, propice ou néfaste, l'intervention directe de sa toute-puissance. Nul mal ne se déclarait qui ne fut représaille exercée par lui pour punir les impies d'avoir enfreint ses commandements et, surtout, d'avoir cédé aux séductions du polythéisme ambiant. « II a déchiré, il nous guérira, il a frappé, il bandera nos plaies. » Ainsi parle Osée (6, 1-2).

Après le retour de Babylone, le peuple hébreu, loin de reconstituer l'état davidien, s'érigea en communauté théocra- tique et s'enferma dans un ritualisme intransigeant. Persécuté par ses maîtres successifs, il se complut tant au sentiment masochiste d'une réprobation providentielle qu'à l'attente d'un revirement messianique. Ainsi le vit-on, à l'instar de Job, élaborer une théodicée de la souffrance. De même que l'innocent pouvait pâtir pour les fautes d' autrui, la postérité d'Abraham se jugeait investie de la mission de racheter, jusque dans ses revers et ses détresses, l'ensemble des nations1.

Quelles que fussent les fluctuations de son histoire, la jalouse sollicitude de son Dieu, seul dispensateur des maux, seul