Revue archéologique de Picardie n° 1/2 - 1998

ESSAI D'APPROCHE DEMOGRAPHIQUE DU SITE DE LA TÈNE FINALE D'ACY-ROMANCE (ARDENNES)

Bernard LAMBOT

Aborder le problème de la démographie à l'époque gauloise peut apparaître comme une gageure, pour bon nombre de raisons. Le critère essentiel est d'avoir à disposition des données précises sur le nombre de foyers de l'habitat (les «feux» de l'époque médiévale) et le nombre de sépultures contemporaines, à une période définie. Cette conjonction est rarement, si ce n'est jamais, à disposition des archéologues. Il s'agit, la plupart du temps, de données partielles. Avec le site d'Acy- Romance, nous avons la possibilité d'aborder ces problèmes, même si un certain flou subsiste sur l'habitat qui n'est pas encore fouillé dans son intégralité.

Il est évident que nous ne pourrons donner de chiffres précis mais, plus simplement, tenter d'évaluer l'importance de la population et surtout d'esquisser sa composition sociale.

Les données disponibles dans l'habitat et les cimetières

Le village de La Tène finale d'Acy-Romance occupe une superficie de vingt hectares environ. Il s'étend sur les flancs nord, est, et sud-est d'un plateau calcaire dominant d'une quarantaine de mètres la vallée de l'Aisne. Une grande place palis- sadée, bordée sur son côté ouest par une rangée de bâtiments cultuels, barre le plateau sur sa largeur à son point culminant.

Plus d'une centaine de structures, pour l'essentiel des silos, peuvent être datées par le mobilier archéologique résiduel qu'elles contiennent. Installé vers 200-180 avant J.-C, cet habitat connaîtra son apogée un siècle plus tard avant de péricliter rapidement, pour ne plus compter que quelques maisons à l'aube de notre ère.

Les neufs cimetières contemporains de l'habitat ont été fouillés à quelques centaines de mètres à l'est et au nord-ouest. Ils sont tous limités par un fossé bordé extérieurement par un talus formé par les matériaux d'extraction. Un petit groupe est installé à l'extérieur d'un de ces cimetières. Nous trouvons : - à l'est, La Croizette : 1 enceinte ; La Noue de

Barue : 2 enceintes ; - au nord-ouest, La Noue Mauroy 89 : 1 enceinte ; La Noue Mauroy : 4 enceintes et un groupe externe ; La Prêle : 1 enceinte (fig. 1), soit 130 sépultures environ. Ce dernier site, tardif, ne sera pas retenu dans cette étude tout comme l'une des enceintes de La Noue de Barue qui ne compte qu'une sépulture gallo-romaine dans le remplissage supérieur du fossé.

L'habitat a livré des os humains dispersés, quatre incinérations en silos et vingt sacrifiés. C'est l'ensemble de ces données qui servent de base à notre réflexion.

Les horizons chronologiques

L'occupation des cimetières a été découpée en neuf phases chronologiques de vingt ans (Lambot et Friboulet 1996, Friboulet 1997), finesse que nous ne sommes pas encore en mesure d'obtenir sur l'habitat pour toutes les structures (fig. 2).

La représentation de la population n'est pas égale pour chaque horizon de l'habitat, mais aussi pour chaque phase dans les cimetières.

Pour la compréhension de cet exposé, nous avons regroupé les phases en trois grands horizons chronologiques (fig. 3).

Le nombre de tombes par horizon est variable suivant les cimetières, certains étant abandonnés précocement, d'autres étant installés tardivement. En l'état actuel des recherches sur l'habitat, il est indiscutable que ces installations différées reflètent l'évolution de la population du village.

Pour l'horizon I, le nombre de sépultures est faible par rapport au nombre de structures connues sur l'habitat. Cet écart s'explique par l'installation d'une population jeune, -on conçoit mal que la création d'un nouveau village important se fasse

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