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Sexologies

Volume 16, Issue 3, July–September 2007, Pages 238-258
Sexologies

Article original / Original article
70 ans sexologie française70 years of French sexology70 años de sexologia francesa

https://doi.org/10.1016/j.sexol.2007.04.003Get rights and content

Résumé

L'avènement en France d'un courant de pensée favorable à une approche laïque et dépénalisée des conduites sexuelles est d'apparition tardive, et longtemps limité à des initiatives dispersées et confidentielles. À l'inverse, les pays de culture germanique sont dès la fin du xixe siècle les authentiques fondateurs d'une scientia sexualis, qui sera « décapitée » de façon dramatique en 1933. La France l'ignore à l'époque, n'acquiert aucun enseignement et s'enlise depuis 1920 dans des joutes intellectuelles opposant les néomalthusiens aux ligues familiales. Ce n'est qu'à partir des années 1930 que débutent des actions concertées en faveur d'une vision rénovatrice et éducative de la sexualité, mais leurs promoteurs sont encore murés dans un carcan législatif répressif et un intérêt mitigé de l'opinion publique. Dans l'immédiat après-guerre et jusqu'en 1968, quelques auteurs adossent encore leur vocation de pédagogue à d'éphémères corporations, mais c'est en 1974 qu'éclot un réel mouvement associatif, nourri des apports indispensables nord-américains et favorisé par les succès législatifs en matière de libre accès à la contraception et au droit à l'avortement. Une vingtaine d'années est nécessaire pour qu'une vision consensuelle des pratiques, des enseignements et de la recherche, aboutisse à sensibiliser les institutions de tutelle. C'est à partir de 1995 que l'implication de l'université par les instances ordinales françaises (Ordre national des médecins) ouvre un deuxième chapitre de l'histoire de la sexologie française, celui de l'unité d'action certes, mais celui surtout de l'homologation professionnelle. C'est face à ce défi institutionnel et confronté à la mondialisation de nouveaux concepts de santé publique que la sexologie française prépare l'avenir de sa cinquième génération de praticiens. Deux associations ont joué un rôle majeur dans l'histoire contemporaine de la sexologie française : la SFSC (Société française de sexologie clinique) et l'AIHUS (Association interhospitalo-universitaire de sexologie).

Abstract

A school of thought promoting positive attitudes towards a secular and decriminalising approach to sexual behaviour was slow to emerge in France, and was for a long time limited to scattered and restricted initiatives. In contrast, German-speaking countries saw the advent of a scientia sexualis from the end of the 19th century, dramatically decapitated by the Nazis in 1933. At the time, France knew nothing of this, acquired no learning and, since 1920, the intellectual sphere seemed to be occupied in jousts between the Neo-Malthusians and family groups. Concerted action to achieve a renewed and educational view of sexuality was only achieved in the 1930s, and promoters of these ideas were still constrained by a repressive legislative framework and lukewarm public opinion. In the period immediately after the war, and until 1968, some authors still linked an educational activity to short-lived associations, but it was not until 1974 that a true associative movement began, fostered by indispensable North American support and promoted by legislative measures allowing access to contraception and legalising abortion. Around twenty more years were needed before a consensus appeared as to practices, teaching and research, thus succeeding in raising awareness among regulatory authorities. From 1995, on involvement of the academic world, through the French authorities (Ordre national des médecins – National Medical Association), opened a second stage in the history of French sexology, where there was some unity in terms of the actions undertaken, but even more importantly, a period of professional certification and recognition. It is in the face of this institutional challenge, and the globalisation of new concepts of public health, that the fifth generation of French sexologists is preparing for the future. Two associations in particular have played a major role in the contemporary history of French sexology: the SFSC (French Society of Clinical Sexology) and the AIHUS (University Hospitals Sexology Association).

Resúmen

La llegada a Francia de una corriente de pensamiento favorable a un enfoque laico y despenalizado de las conductas sexuales es de aparición tardía y mucho tiempo limitada a iniciativas dispersas y confidenciales. Al contrario, los países de cultura germánica son desde finales del siglo XIX los auténticos fundadores de una scientia sexualis, que será ''decapitada'' de manera dramática en 1933. Francia lo ignora en esa época, no acquiere ninguna enseñanza y se enfrasca desde 1920 en disquisiciones intelectuales que enfrentan las corrientes neomaltusianas a las ligas familiares. Es a partir de los años treinta que comienzan las acciones concertadas en favor de una visión renovadora y educadora de la sexualidad, pero sus promotores siguen aún rodeados de cortapisas legislativas represivas y de un interés mitigado de la opinión pública. En la inmediated de la postguerra y hasta 1968, algunos autores adosan todavía su vocación de pedagogos a efímeras corporaciones, pero es 1974 cuando brota un movimiento asociativo real, alimentado por las aportaciones indispensables norteamericanas y favorecido por los éxitos legislativos en materia de libre acceso a la anticoncepción y al derecho al aborto. Serán necesarios una veintena de años para que una visión consensuada de las prácticas, de las enseñanzas y de la investigación, acabe por sensibilizar a las instituciones y organismos competentes oficiales. Es a partir de 1995 que la implicación de la Universidad por las instancias ''Ordinales'' francesas (Consejo Superior de Colegios Oficiales de Médicos), abre un segundo capítulo de la historia de la sexología francesa, el de la unidad de acción, pero sobre todo, el resultado ha sido el de la homologación profesional. Es frente a éste desafío institucional y confrontada a la mundialización de nuevos conceptos de salud pública, que la sexología francesa prepara el futuro de su quinta generación de profesionales. Dos asociaciones han jugado un papel de primer orden en la historia contemporánea de la sexología francesa: la SFSC (Sociedad Francesa de Sexología Clínica) y el AIHUS (Asociación Inter Hospitalo Universitaria de Sexología).

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Abridged version

The history of French sexology in the twentieth century is inextricably linked with an unjustly underestimated and insurmountable difficulty: the Great War of 1914–1918 and its demographic consequences. After the war, 10% of the male population of child-rearing age was missing at a time when France desperately needed to restore its marriage rate. The epidemics of typhoid fever in 1915 and Spanish influenza in 1918 caused infant mortality to soar, and the birth rate collapsed. Depopulation also

Le credo des pourfendeurs de la loi de 1920

L'histoire de la sexologie française du xxe siècle s'adosse à une butée infranchissable injustement sous-estimée : la Grande guerre de 1914–1918 et ses conséquences démographiques. Catastrophe humanitaire, le conflit est aussi un séisme effroyable du point de vue des libertés individuelles et de la plus vénérable d'entre elles, celle du choix de vie privée. Au lendemain de la guerre, 10 % de la population masculine en âge de procréer fait défaut à la reconstruction d'une nuptialité sinistrée,

Remerciements

À Arnaud Sevène, Pierre Benghozi, Robert Porto, Nicole Arnaud Beauchamp, Charles Gellman, Robert Gellman et Claire Gellman-Barroux, André Durandeau, Joëlle Mignot, Philippe Brenot, Patrice Lopes, Marie Chevret-Méasson, Marie-Hélène Colson, Danièle Lalonde et l'équipe d'enseignement du DIU de Toulouse, Frédérique Hedon, Nadine Grafeille, Marc Ganem, Ludwig Fineltain, Francis Collier, André Corman, Jean Tignol, Willy Pasini pour avoir contribué à l'élaboration de cette histoire de la sexologie

Références (11)

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Cited by (0)

1

Psychiatre sexologue, praticien hospitalier, directeur de l'enseignement du Diplôme interuniversitaire (DIU) de sexologie des facultés de médecine de Marseille et Montpellier, rédacteur en chef et fondateur de Sexologies–Revue européenne de santé sexuelle.

2

Sexothérapeute, écrivain, praticien attaché à l'hôpital Saint-Louis à Paris, dirige l'enseignement de sexologie à l'université Paris-VII, président de l'institut de sexologie.

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