Maladie de Gaucher : diagnostic, suivi et traitementGaucher disease: Diagnosis, monitoring and treatment

https://doi.org/10.1016/j.monrhu.2011.07.004Get rights and content

Résumé

La maladie de Gaucher de type 1 (MG1) est une maladie rare multisystémique due à un déficit génétique en bêta-glucocérébrosidase lysosomale. Les glucocérébrosides s’accumulent dans les cellules du système réticulo-endothélial provoquant une activation macrophagique, des dépôts médullaires, une organomégalie (foie et rate) et des cytopénies. Les manifestations ostéoarticulaires sont habituellement les complications les plus douloureuses et handicapantes de la MG1 ; des anomalies cliniques et radiographiques sont présentes chez 70 à 100 % des patients. L’ostéonécrose aseptique de la tête fémorale est la complication articulaire la plus invalidante, tant à la phase initiale avec des douleurs intenses, qu’à la phase d’état de la maladie du fait des conséquences articulaires précoces chez des sujets jeunes et actifs. La fragilisation osseuse localisée ou systémique explique la fréquence de l’ostéopénie et/ou de l’ostéoporose densitométrique et fracturaire (en particulier les fractures rachidiennes, source de morbidité chronique). Malgré l’absence d’étude randomisée double insu évaluant les effets osseux du traitement enzymatique substitutif, celui-ci a démontré son efficacité pour réduire les douleurs osseuses d’environ 50 % dans un délai de un à deux ans, avec une amélioration de la densité minérale osseuse après trois ans de traitement. Le traitement par réduction de substrat (miglustat) a montré en ouvert une amélioration des douleurs osseuses et une diminution de l’infiltration médullaire. Une prise en charge spécifique de la fragilité osseuse, en particulier par bisphosphonates, mérite d’être discutée après évaluation rigoureuse et analyse des autres facteurs de risque.

Abstract

Gaucher disease type 1 (GD1) is a rare, multisystem disease caused by a genetic deficiency of lysosomal glucocerebrosidase. Glucocerebroside accumulates in cells of the reticuloendothelial system leading to chronic macrophage activation, bone marrow infiltration, organ enlargement (liver and spleen) and cytopenia. Skeletal manifestations are often the most striking and disabling long-term consequence of GD1; clinical or radiographic evidence of bone disease has been reported in 70–100% of diagnosed patients. Avascular osteonecrosis of the hip is the most disabling complication with early bone pain and often-joint collapse and secondary osteoarthritis needing orthopaedic interventions in young adults. Localized or systemic bone fragility explains osteopenia, osteoporosis and fractures. Although no double-blind randomized studies have been performed to evaluate bone effect of the treatments, enzyme replacement therapy has demonstrated its efficacy in naïve patients reducing bone pain in about 50% of patients within 1 to 2 years and improving bone mineral density after at least 3 years of treatment. Substrate reduction therapy (miglustat) improved in open-label bone pain and bone marrow infiltration. Specific treatment of bone fragility, for example with bisphosphonates, needs a rigorous evaluation with assessment for other risk factors.

Section snippets

Physiopathologie des lésions ostéoarticulaires

Le déficit génétique en bêta-glucocérébrosidase entraîne une accumulation de glycosphingolipides dans les lysosomes des cellules du système réticulo-endothélial en particulier des macrophages [1], [12]. C’est l’abondance de macrophages dans la moelle osseuse qui explique la fréquence des atteintes osseuses de la MG. Ces dépôts macrophagiques intramédullaires vont avoir deux conséquences principales, une expansion volumique médullaire et une synthèse anormale de cytokines pro-inflammatoires par

Manifestations cliniques ostéoarticulaires

Il existe une atteinte osseuse dans 70 à 100 % des cas selon les séries, dans les types 1 et 3 de la maladie [16]. C’est la principale cause de diminution de la qualité de vie ; cette atteinte est également source d’invalidité [11]. Si l’explication la plus évidente est l’infiltration médullaire par les cellules de Gaucher, il est maintenant évident que d’autres mécanismes sont impliqués dans l’atteinte osseuse comme cela a été rappelé ci-avant.

Myélogramme ou biopsie ostéomédullaire

Ils permettent de mettre en évidence des cellules de Gaucher, qui sont de grosses cellules macrophagiques dont le cytoplasme est plissé et qui contiennent des inclusions lysosomales constituées de glucosylcéramide. Il existe de la bêta-glucocérébrosidase dans ces inclusions, mais elle n’est pas fonctionnelle. Les cellules de Gaucher ne sont pas spécifiques de la maladie. En effet, on peut retrouver des cellules avec les mêmes caractéristiques cytologiques (« pseudo-Gaucher ») dans la leucémie

Prise en charge thérapeutique et suivi

La MG est prise en charge comme affection de longue durée (100 %) avec ou sans traitement. La prise en charge est multidisciplinaire, coordonnée par un médecin hospitalier en lien avec un centre de référence. Les médicaments disponibles sont à prescription restreinte de la catégorie « médicament à prescription hospitalière » pouvant être prescrits par tout médecin hospitalier. Leur coût annuel varie en fonction du poids et de la dose d’environ 140 000 à 640 000 € pour l’enzymothérapie

Quand y penser ?

Pour les maladies de Gaucher de type 1, auxquelles le rhumatologue sera principalement confronté, quelques signes d’orientation sont à retenir. Deux tableaux vont être évocateurs :

  • quel que soit l’âge, y compris chez le sujet âgé, l’association d’une splénomégalie avec une thrombopénie et des signes osseux, peut faire penser à ce diagnostic. Certains de ces symptômes peuvent être retrouvés dans d’autres pathologies, bien plus fréquentes, comme :

    • la leucémie aiguë, mais il y aura d’autres

Comment confirmer le diagnostic ?

Certains examens, particulièrement faciles à réaliser, pourront être évocateurs comme :

  • une hyperferritinémie stable en l’absence d’autres signes biochimiques de surcharge en fer ;

  • des marqueurs de l’inflammation augmentés ;

  • la présence aux radiographies de la partie distale du fémur d’un élargissement en « flacon d’Erlenmeyer » [57].

La chitotriosidase est un marqueur biologique très utile actuellement de fait de sa sensibilité et de sa spécificité pour suivre l’évolution de la MG.

L’étude de la

Déclaration d’intérêts

Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

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