Elsevier

Médecine & Droit

Volume 2015, Issue 135, November–December 2015, Pages 155-160
Médecine & Droit

Protection de la personne
Assistance au suicide : expérience et débats en SuisseAssisted suicide: Experience and debates in Switzerland

https://doi.org/10.1016/j.meddro.2015.07.001Get rights and content

Résumé

La législation suisse en matière d’assistance au suicide étant relativement permissive, cette pratique est essentiellement régie, lorsqu’elle implique un médecin, par des directives médico-éthiques. L’assistance au suicide (acte pratiqué par le patient) doit être différenciée de l’euthanasie active directe (acte pratiqué par le médecin), qui elle est pénalement réprimée en Suisse. Trois associations principales pratiquent des assistances au suicide, avec la particularité, pour Dignitas uniquement, d’entrer en matière même si le patient n’est pas domicilié sur territoire helvétique. Il a été discuté au niveau politique de limiter, voire interdire la pratique de l’assistance au suicide par des organisations. En 2011, le Conseil fédéral a renoncé à une telle limitation ; le risque aurait été une pratique « sauvage » d’assistances au suicide par des médecins indépendants, sans supervision et risquant d’échapper à tout contrôle. Tout décès par assistance au suicide fait l’objet d’une enquête par la justice, avec examen médico-légal du corps et vérification des indications médicales justifiant une entrée en matière du médecin ayant prescrit le pentobarbital. Le nombre d’assistances au suicide pratiquées en Suisse a constamment augmenté au cours de la dernière décennie, ne comptant toutefois toujours que pour une minime proportion des décès (0,48 %). En Suisse romande, une progression est constatée quant à la proportion de patients ayant recours à une assistance au suicide dans le contexte de souffrances physiques et/ou psychiques en lien avec des polypathologies invalidantes liées à l’âge, vraisemblablement en relation avec l’augmentation de l’espérance de vie et l’amélioration des traitements curatifs. Dans ce contexte, l’association Exit Suisse romande a, depuis 2014, spécifiquement mentionné ce critère dans les exigences pour une entrée en matière.

Abstract

Swiss law concerning assisted suicide being quite permissive, this practice is essentially regulated, when performed by a doctor, by medico-ethical directives. Assisted suicide (act performed by the patient himself) must not be confused with direct active euthanasia (act performed by the doctor), the second being criminally repressed. Three main associations perform assisted suicides in Switzerland, Dignitas is particular by accepting assisted suicide for patients living outside of the country. It has been politically discussed to limit or even forbid assisted suicide being practiced by organizations. In 2011, the federal council gave up this proposal; the risk of such a decision would have been to favor “wild” assisted suicide practice, without supervision and control. Any death consecutive to assisted suicide implies justice investigation, with medico-legal examination of the corpse and check of medical indication justifying medical pentobarbital prescription for assisted suicide. The number of assisted suicides being practiced in Switzerland has constantly increased during the ten last years, but is still corresponding to only a minimal proportion of deaths (0.48%). In the French part of Switzerland, we notice an increase of the proportion of patients asking for assisted suicide for physical and/or psychological suffering resulting of aged-related invalidating polypathologies; this is probably in relation with increase of life expectancy and improvement of curative treatments. In this context, Exit association specifically mentions, since 2014, this criterion in the requirements to accept providing assisted suicide.

Section snippets

Dans le monde

Dans la plupart des pays, l’assistance au suicide est assimilée à une forme d’euthanasie, et par conséquent réprimée par la loi.

Tel est le cas en France. Le Comité consultatif national d’éthique [1] considère depuis longtemps, comme pour l’euthanasie, que le suicide, par définition un acte individuel, mobilise en ce cas l’intervention d’autrui. Toutefois l’assistance au suicide présente une première particularité faisant peser sur la personne qui la demande la responsabilité de l’acte final,

Aspects éthiques

Du point de vue éthique, l’assistance au suicide pose un dilemme au médecin qui est confronté à une telle demande de la part d’un patient.

En effet, deux fondements de l’éthique médicale s’opposent dans ce contexte : d’une part le principe de bienfaisance, le médecin se devant de soigner et soutenir son patient et, d’autre part, le respect de l’autodétermination, principe auquel les professionnels de la santé attachent de plus en plus d’importance.

Il faut préciser qu’il n’existe pas un droit du

Suicide et assistance au suicide

Le médecin légiste est confronté, de par sa fonction, à tous types de décès dans des circonstances violentes, notamment des décès dans le contexte de suicides. Les moyens de suicide les plus fréquemment rencontrés à Genève sont les pendaisons et les tirs d’arme à feu. Chez les personnes âgées, le moyen de prédilection est la défenestration, qui présente un caractère très démonstratif et particulièrement violent pour les proches.

Une comparaison entre assistance au suicide et suicide de manière

Conclusion

La législation suisse en matière d’assistance au suicide est relativement permissive et cela amène à des questions non seulement en Suisse, mais également dans les pays avoisinants, en particulier quant à un risque éventuel de banalisation, voire de dérapage.

Bien que ce sujet soit largement discuté et que le nombre de décès de ce type soit en constante augmentation depuis une quinzaine d’années (50 cas en 1998, près de 300 cas en 2009) [7], il est important de souligner que l’assistance au

Références (14)

  • Avis n̊ 63 du 27 janvier 2000 « fin de vie, arrêt de vie,...
  • U. Cassani

    Faculté de droit Université de Genève. Assistance au suicide : quelles leçons faut-il tirer de l’arrêt Gross c. Suisse de la Cour européenne des droits de l’Homme. Colloque du 17 février 2014

    (2014)
  • Arrêt Haas, ATF 133 I...
  • C. Rouiller

    Le droit à la vie et le droit de mourir dignement. Esquisse d’une problématique relative aux actes médicaux pratiqués sur les patients en fin de vie

    Revue de la Société des juristes bernois

    (2006)
There are more references available in the full text version of this article.

Cited by (1)

  • Why adults with psychiatric conditions request euthanasia: A qualitative interview study of life experiences, motives and preventive factors

    2021, Journal of Psychiatric Research
    Citation Excerpt :

    Almost all of the patients were well aware of the existence of international (non-medical) Aid in Dying organisations. Some had even been in contact with these organisations but were put off by the many legal and practical barriers of their proposed means of non-medically assisted suicide (Burkhardt et al., 2015; van den Hondel et al., 2020; Durão et al., 2020). As euthanasia often entails a time-consuming decision-making process, it provides their loved ones with time to adjust to the idea of a hastened death and the opportunity to say goodbyes.

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