Elsevier

La Presse Médicale

Volume 44, Issue 5, May 2015, Pages 515-525
La Presse Médicale

Mise au point
Nouvelles limites de la thrombolyse intraveineuse dans le traitement des infarctus cérébrauxAn update on limitations of intravenous thrombolysis to treat acute ischemic stroke

https://doi.org/10.1016/j.lpm.2014.07.027Get rights and content

Points essentiels

La thrombolyse intraveineuse (IV) par recombinant tissulaire du plasminogène (rt-pa) a démontré son efficacité dans l’infarctus cérébral dans les 4h30 suivant l’installation des symptômes.

Le nombre de patients avec infarctus cérébral traités par rt-pa IV reste faible, inférieur à 5 %.

De nombreuses contre-indications existent dans l’autorisation de mise sur le marché du rt-pa dans l’infarctus cérébral, en raison de la crainte des complications hémorragiques. Ces contre-indications dérivent des premiers essais thérapeutiques datant de plus de 15 ans, mais elles ne reposent pas toutes sur des preuves scientifiques.

Les nombreuses études de phase IV post-commercialisation issues de larges registres et les essais thérapeutiques récents ont montré un rapport bénéfice/risque favorable dans de nombreuses situations considérées comme des contre-indications.

La population cible traitable par rt-pa pourrait atteindre 20 % des infarctus cérébraux en reconsidérant certaines contre-indications.

Key points

The benefit of intravenous thrombolysis with rt-pa has been demonstrated in acute ischemic stroke up to 4h30 after the first symptoms.

The number of patients with stroke treated by rt-pa remains low at less than 5%.

In the license of rt-pa in acute ischemic stroke, there are numerous contra-indications explained by the fear of cerebral hemorrhagic complications. These contra-indications are based on the first therapeutic trials published more than 15 years ago, but are not all evidence-based.

Large post-marketing registers and new randomized trials have shown a favorable ratio benefit/risk of rt-pa in acute ischemic strokes in some classical contra-indications.

Reconsidering some of the official contra-indications would increase the target population with treatable acute ischemic stroke using rt-pa to 20%.

Section snippets

Rationnel

Les accidents ischémiques cérébraux sont causés dans presque tous les cas par une occlusion artérielle qui entraîne une hypoperfusion cérébrale dans le territoire d’aval. Au sein de la zone hypoperfusée, apparaissent très rapidement des lésions de nécrose (zone infarcie : « core »). La nécrose du parenchyme cérébral est le processus irréversible à l’origine des séquelles cliniques. Elle est responsable en elle-même d’un risque hémorragique du fait de la destruction du tissu cérébral et des

Patients de plus de 80 ans

Les patients âgés sont les plus exposés au risque d’IC. De plus, ils ont souvent, par rapport aux patients plus jeunes, un score NIHSS plus élevé, un pronostic vital et fonctionnel plus péjoratif, et un risque hémorragique plus important en raison, notamment, des lésions microvasculaires fréquentes sur ce terrain [14], [15]. Les patients de plus de 80 ans ont été exclus des essais randomisés princeps sur la thrombolyse IV.

Plusieurs études de cohorte ont montré que la thrombolyse, chez les

Thrombolyse et limites liées à une incertitude diagnostique

Le traitement par rt-pa est destiné aux patients avec IC en cours de constitution. Hors, un certain nombre de situations cliniques peuvent causer un déficit neurologique d’installation brutale d’origine non vasculaire (pseudo-AVC), ceci s’observe pour 10 à 20 % des patients adressés pour une alerte thrombolyse [37], [38]. Si l’outil diagnostique utilisé est un scanner cérébral sans injection, il est alors souvent impossible de distinguer un IC des diagnostics différentiels. Plusieurs études ont

Infarctus mineur ou déficit en cours d’amélioration

Ces patients, considérés comme too good to treat, constituent un sous-groupe exclu du traitement par rt-pa selon l’AMM. En effet, l’objectif du traitement est la guérison sans séquelle et, en théorie, les IC associés à ce type de déficit devraient ne pas avoir de conséquences handicapantes. De plus, l’évolution spontanément favorable d’un déficit neurologique pourrait témoigner d’une recanalisation spontanée, rendant la thrombolyse inutile.

Plusieurs études ont montré qu’un tiers des patients

Infarctus semi-récent

Un antécédent d’AVC de moins de 3 mois constitue une contre-indication au rt-pa, par crainte d’hémorragie au sein du tissu cérébral déjà nécrosé. Dans une étude portant sur 115 patients candidats à la thrombolyse [46], un IC silencieux semi-récent, visible en diffusion et FLAIR, était détecté à l’IRM chez 18 % des patients, en général de petit volume (6,5 mL en moyenne). Dans cette étude, il n’y avait pas d’augmentation du risque d’hémorragie parenchymateuse. En pratique, il est raisonnable de

Conclusions

« Primum non nocere » est un principe louable dans notre pratique médicale. Le rt-pa IV est le seul traitement médicamenteux efficace à la phase hyperaiguë pour les IC, affection aux conséquences souvent lourdement handicapantes. Près de 20 ans après le premier essai ayant montré l’efficacité du rt-pa IV dans l’IC et, au vu des données de la littérature, il est temps de s’émanciper de certaines de ses conditions trop restrictives d’administration. Beaucoup de contre-indications ont évolué, pas

Déclaration d’intérêts

Sonia Alamowitch : comité de rédaction de La Revue Neurologique, intervention orale pour Bohringer Ingelheim et Bayer ; Marion Masingue déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

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