Travail original
Prévenir l’incontinence urinaire postnatale par la rééducation périnéale prénatale ? Rationnel et protocole de l’étude randomisée multicentrique prévention périnéale prénatale (3PN)Prevent postnatal urinary incontinence by prenatal pelvic floor exercise? Rationale and protocol of the multicenter randomized study PreNatal Pelvic floor Prevention (3PN)

https://doi.org/10.1016/j.jgyn.2008.04.004Get rights and content

Résumé

Introduction

L’incontinence urinaire (IU) féminine est fréquente, handicapante et coûteuse. La relation entre la grossesse et IU est connue, l’IU apparue pendant la grossesse est un facteur risque pour l’IU permanente. La rééducation périnéale postnatale améliore l’IU postnatale. Mais il n’est pas certain que le bénéfice de la rééducation persiste après quelques mois. La publication de notre argumentaire pour la rééducation périnéale prénatale est l’occasion de présenter nos hypothèses a priori et de sensibiliser les professionnels de santé.

Objectif

L’objectif de l’étude prévention périnéale prénatale (3PN) est de comparer l’effet sur l’IU à un an du postpartum de la rééducation prénatale par rapport à la délivrance d’informations écrites seules.

Méthode et population

C’est une étude randomisée multicentrique en simple insu. Les principaux critères d’inclusion sont première grossesse, simple, non compliquée, après 18 ans. Il est prévu pour le groupe rééducation huit séances de rééducation périnéale entre le sixième et le huitième mois de grossesse. Le critère de jugement principal est le score d’IU (International Consultation on Incontinence Questionnaire Short Form [ICIQ-SF]) à un an du postpartum. Il est prévu d’inclure 280 femmes dans cinq centres pendant un an pour pouvoir montrer une différence d’un point sur le score d’IU.

Éthique et financement

Cette étude a reçu un avis favorable du Comité de protection des personnes Sud-Ouest et Outre-Mer. Elle est enregistrée à l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) et sur ClinicalTrials.gov. Elle est financée par le ministère de la Santé grâce au Programme hospitalier de recherche clinique (PHRC) 2007.

Perspectives

Nous avons prévu de préciser si la rééducation périnéale prénatale est susceptible de réduire le nombre de consultations médicales et de séances de rééducation postnatales.

Summary

Introduction

Female urinary incontinence (UI) is a frequent affection that generates handicap and expenses. There is a link between UI and pregnancy; onset of UI during pregnancy is a risk factor for permanent UI. Postnatal pelvic floor exercise has shown efficacy to improve postnatal UI. However, it remains uncertain if benefits last more than few months. Publication of our rationale for prenatal pelvic floor exercise is an opportunity to expose our pre-specified hypotheses and help health professionals’ awareness.

Objectives

The purpose of PreNatal Pelvic floor Prevention (3PN) is to compare the effects of prenatal pelvic floor exercise versus sole written instructions on UI one year after delivery.

Methods and population

It is a multicenter, randomized, single blind study. Main inclusion criteria are first, single and non-complicated pregnancy over 18 years. Women randomized in pelvic floor exercise group will undergo eight sessions with a physiotherapist between six and eight months of pregnancy. Our principal criterion is UI score (International Consultation on Incontinence Questionnaire Short Form [ICIQ-SF]) one year after delivery. We plan to include 280 pregnant women in five centers over a 12-month screening period to show a one-point difference on UI score.

Ethic and financing

The study was approved by the IRB Comité de protection des personnes Sud-Ouest et Outre-Mer. It was registered by French Health Products Safety Agency (AFSSAPS) and ClinicalTrials.gov. It is supported by the French Ministry of Health through the 2007 Hospital Plan for Clinical Research (PHRC).

Perspectives

We plan to assess if prenatal pelvic floor exercise reduces postnatal medical consultations or physiotherapy sessions.

Introduction

L’incontinence urinaire (IU) est une pathologie fonctionnelle fréquente, handicapante et coûteuse. Elle touche en Europe 65 millions de personnes environ. En France, 30 à 50 % des femmes en âge de procréer rapportent des fuites involontaires d’urine au cours des 30 derniers jours [1]. Elle est susceptible d’altérer la qualité de vie et d’entraîner un handicap [2]. Après 65 ans, l’impact de l’incontinence urinaire sur la qualité de vie dépasse celui d’autres pathologies chroniques, comme l’hypertension artérielle, l’angine de poitrine ou le diabète [3]. Le coût de la prise en charge d’une incontinence apparue en cours de grossesse ou dans l’année suivante est estimé entre 1438 et 5606 € en Australie [4]. En France, le coût global de l’incontinence urinaire est estimé à 4,6 milliards d’euros [5]. Aux États-Unis le coût annuel direct de l’incontinence urinaire féminine est estimé à 12,4 milliards de dollars, ce qui est supérieur à celui du cancer du sein [6].

L’incontinence urinaire est habituellement classée, selon les circonstances de fuite (à l’effort, par urgenturie, autres circonstances), en sachant que plusieurs circonstances peuvent coexister (l’incontinence mixte associe l’incontinence à l’effort et l’incontinence par impériosité). L’existence d’une relation entre la grossesse et l’incontinence urinaire d’effort est clairement établie tant sur le court terme que sur le moyen ou le long terme [7], [8], [9]. En revanche, la part de ce qui revient à l’accouchement proprement dit et de ce qui revient à la grossesse reste discutée [10]. L’incontinence urinaire est fréquente au cours de la première grossesse et sa prévalence est maximale en fin de grossesse où 30 à 50 % des femmes enceintes sont alors touchées [11], [12]. Il existe une rémission après l’accouchement, avec une prévalence entre 7 et 30 % trois mois après, suivie d’une ré-ascension progressive les années suivantes [12], [13], [14]. L’incontinence urinaire apparue en cours de grossesse ou juste après est un des principaux facteurs de risque conduisant à une incontinence urinaire permanente [8], [11], [15], [16]. Cependant, il n’est pas clair si l’incontinence urinaire transitoire de la grossesse et l’incontinence urinaire permanente de la maturité reposent sur les mêmes mécanismes physiopathologiques. Il se pourrait qu’une partie de l’incontinence prénatale ne soit finalement qu’une incontinence physiologique et transitoire liée aux modifications réversible de la grossesse. D’un autre côté, il se peut que la grossesse, le travail ou l’accouchement puissent entraîner des lésions irréversibles qui se manifesteront plus tard.

L’impact de ce handicap sur la santé des femmes explique que « Réduire la fréquence et les conséquences de l’incontinence urinaire » chez la femme fait partie des 100 objectifs de santé publique définis en 2004 par le parlement [17]. La réalisation d’un tel objectif nécessite, en particulier d’identifier les facteurs modifiables accessibles à une prévention. Parmi ces facteurs, la rééducation périnéale est proposée depuis plusieurs années pour la prévention des troubles urinaires de la grossesse et du postpartum [18].

Section snippets

Rationnel et hypothèses

Il est habituel de conseiller verbalement aux femmes enceintes de faire des « exercices de contraction du périnée », au cours de leur grossesse pour éviter l’incontinence [19]. Ces instructions peuvent être considérées comme le standard actuel. Toutefois, elles sont mal évaluées, ne sont pas systématiquement données (en particulier sous forme écrite) et ne sont pas toujours appliquées par les femmes. Une étude comparative rapporte que la tonicité périnéale semble meilleure après instructions

Objectifs de l’étude

Comparer la rééducation périnéale prénatale à la délivrance d’instructions écrites seules, sur la gravité de l’incontinence urinaire à 12 mois du postpartum, dans une population de femmes nullipares menant une grossesse unique non compliquée.

Nos autres objectifs sont les suivants :

  • de déterminer si la rééducation prénatale préventive permet de réduire les dépenses de rééducation postnatale ;

  • d’estimer l’effet préventif de la rééducation prénatale sur l’incontinence urinaire de fin de grossesse ;

Description du protocole

Il s’agit d’une étude multicentrique randomisée et contrôlée en simple insu selon deux groupes parallèles : rééducation périnéale prénatale versus information écrite seule. La délivrance d’une information écrite sur le périnée (en Annexe A) nous a semblé indispensable, afin que l’information du groupe témoin soit la plus homogène possible à une époque où les traités de vulgarisation et les forums féminins sur Internet évoquent systématiquement les exercices périnéaux de la grossesse. Même si la

Outils d’évaluation

L’évaluation initiale comporte un pad-test réalisé sur 24 heures, un examen clinique avec cotation du prolapsus génital, un test périnéal et un test à la toux. Deux centres mesureront la mobilité échographique du col vésical [44]. Les questionnaires sont l’International Consultation on Incontinence Questionnaire Short Form (ICIQ-SF), score international d’incontinence urinaire validé en français, il constitue le critère de jugement principal [45]. Il est complété par un autre score de symptômes

Rééducation prénatale et information écrite

La rééducation prénatale sera réalisée par une sage-femme ou un kinésithérapeute. Elle comportera huit séances entre le sixième et le huitième mois de grossesse à raison d’une à deux par semaine. Le travail à domicile sera encouragé. Il est prévu de délivrer une information écrite sur le périnée aussi bien dans le groupe témoin que dans le groupe rééducation prénatale. Toute rééducation périnéale réalisée hors protocole par une sage-femme ou kinésithérapeute est interdite entre l’inclusion et

Conclusion

L’étude permettra de préciser si une rééducation périnéale prénatale permet de diminuer le score d’incontinence urinaire un an après l’accouchement et le nombre de séances de rééducation postnatales.

Éthique et financement

Le protocole de l’étude a reçu un avis favorable du Comité de protection des personnes Sud-Ouest et Outre-Mer en septembre 2007. L’étude est enregistrée à l’Afssaps sous le numéro 2007-A00641-52 et sur ClinicalTrials.gov sous le numéro NCT00551551. Les premières inclusions ont débutés en novembre 2007. Ce projet est financé par le ministère de la Santé grâce au Programme hospitalier de recherche clinique (PHRC) 2007.

Remerciements

À Karine Achaintre qui a conçu le dépliant d’information sur le périnée ; à Cécile Dalban et Adrian Fianu qui ont écrit le plan d’analyse ; à Xavier Deffieux et Claude Richet qui ont participés à l’élaboration du protocole ; et à tous les investigateurs non encore cités, Pierre Mares, Joël Agenor, Georges Bader, Fabrice Cuiller, Anne-Claire Donnadieu, Sonia Estrade, Brigitte Fatton, Ahmet Gueye, Magali Hilmi-Leroux, Marie-Lise Mathé, Grégory Triopon, Denis Savary.

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      These studies reported a reduced gain of maternal weight in the intervention groups (exercise).47-51 There are also a number of researchers who emphasize the importance of an appropriate weight control during pregnancy to avoid relevant complications (such as, gestational diabetes mellitus, hypertension, and fetal macrosomia).13,40,50 Nowadays, although an increased number of recommendations for the “practice of moderate physical activity” exists, maternal weight is controlled during pregnancy preferably through diet43,51-53 and not by means of programs of physical exercise that are controlled and supervised by obstetricians and sports qualified specialists.

    • For or against postnatal pelvic floor muscle exercises?

      2008, Gynecologie Obstetrique et Fertilite
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